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mardi, 18 avril 2017

A propos d'une première monographie sur Jean Thiriart

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A propos d'une première monographie sur Jean Thiriart

par Eric Vuylsteke

YS-thiriart-pardes.jpgChef d’entreprise avisé, matérialiste athée, communiste réformateur, sportif, narcissique revendiqué, quelque peu mégalomane, redoutable organisateur et homme d’ordre, tiers-mondiste de droite, précurseur du nationalisme européen et de la grande Europe, jacobin, révolutionnaire inclassable, mal compris et souvent utilisé, tel est le Jean Thiriart (1922-1992) que nous dépeint Yannick Sauveur au terme de 127 pages fort bien documentées.

Celui qu’Alain de Benoist considérait comme une des rares têtes  pensantes de l’ultra-droite d’après la guerre voulut,  dès les années 1960, créer un parti historique capable de faire émerger les conditions d’une révolution nationale européenne qui verrait naître une Europe unitaire et centralisée de Brest à Bucarest d’abord, de Brest à Vladivostok ensuite.

Niant (ou ne prenant pas en compte) les faits ethniques et culturels, Thiriart voyait la grande Europe comme une communauté de destin sans tenir compte de l’enracinement et de l’histoire de ses composants: ce qui aboutit à vouloir créer une nation ou plutôt un empire sur du sable. Bref l’on est loin de l’Europe aux cents drapeaux que nous défendons.

Si l’on peut être favorable à la disparition des états nations, comme le voulait Thiriart, en faveur d’une grande Europe Impériale, encore faut-il accepter la longue mémoire des divers peuples composant l’Europe: fait qui ne peut être nié au profit de l’idée exacte mais réductrice d’une communauté de destin comme définition de la nation. Jean Thiriart se considérait (surtout à partir de 1980) comme un communiste non marxiste promouvant un «communisme intelligent» qu’il appelait communautarisme (mais ce terme était utilisé dès les années 1962/1963, le contenu ayant sans doute évolué) mais, à vrai dire et au-delà des apparences, le communautarisme de Thiriart est assez éloigné de l’idée de communauté du peuple car le fait ethnique et spirituel était absent de cette notion de communautarisme.

Il y eut certainement une évolution dans la pensée de Thiriart mais cette évolution est due en grande partie à l’évolution géopolitique depuis 1961, date de la constitution du mouvement "Jeune Europe" par Thiriart et plusieurs autres personnalités de la droite radicale belge.

Yannick Sauveur a connu le Thiriart des années post activisme soit aux alentours des années 1972 à 1992. «Jeune Europe» (principale organisation de l’ultra-droite de l’après-guerre en Belgique) fut active de fin 1961 à 1965 (même si théoriquement l’aventure pris fin en 1969) et se voulut une organisation révolutionnaire transnationale européenne mais la majorité de ses militants se trouvait en Belgique et en Italie.

Jeune Europe et son principal doctrinaire étaient profondément hostiles à l’impérialisme américain (mais bizarrement pas à l’impérialisme culturel américain) et à l’impérialisme soviétique communiste de l’époque  ("Ni Moscou Ni Washington" était le mot d’ordre).

Thiriart s’était rapidement imposé comme chef du mouvement Jeune Europe qu’il organisa de manière structurée et disciplinée avec ses membres, ses militants en chemises bleues qui, debout de part et d’autre de la salle, encadraient les meetings rassemblant plusieurs centaines de personnes.

Les orateurs portaient souvent le même uniforme (la chemise bleue, interdite par Thiriart après 1965, qui voulait ainsi éviter tout anachronisme et tout amalgame facile).

Les meetings se terminaient par le chant des troupes d’assaut  (Nous sommes les hommes des troupes d’assaut, les soldats de la révolution…..). A cela s’ajoutait les bagarres de salle et de rue, subies ou provoquées par Jeune Europe), bagarres où Thiriart était toujours en tête de ses hommes, la grosse laisse en métal de son chien à la main.

Cette période 1961 à 1965 (que j’ai connue partiellement dans mon extrême adolescence, comme militant) révélait une Jeune Europe de combat ou la croix celtique était à l’honneur et dont tant la pratique  que les discours s’inscrivaient dans un romantisme fascisant assumé.

Éric Vuylsteke.

Yannick Sauveur, "Qui suis-je ?" Thiriart, Editions Pardès, 2016.

sarl.pardes@orange.fr