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samedi, 13 septembre 2025

Contre la russophobie, le livre inédit et posthume de Guillaume Faye

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Contre la russophobie, le livre inédit et posthume de Guillaume Faye

Par Andrea Falco Profili

Source: https://www.grece-it.com/2025/09/09/contro-la-russofobia-...

Nous présentons ici une traduction de l'excellent article sur le dernier livre posthume de Guillaume Faye. Il est dû à la plume d'Andrea Falco Profili, animateur du GRECE-Italie.

Il se déroule actuellement une opération aussi insidieuse qu’obstinée visant à neutraliser la pensée de Guillaume Faye en la réduisant à une caricature, celle d’un simple agitateur « de droite » au sens le plus inoffensif du terme, voire, par un funambulisme interprétatif grotesque, à celle d’un « occidentaliste » et d’un russophobe. Quiconque a même effleuré l’œuvre du penseur français sait à quel point cette narration est mensongère. Pour la réfuter définitivement et rétablir le véritable Faye, celui de la grande géopolitique, de la vision impériale et de la critique radicale de la civilisation occidentale, paraît aujourd’hui le recueil Contre la russophobie, dirigé par Stefano Vaj et préfacé par Robert Steuckers.

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L’opération éditoriale menée par Vaj pour Moira Edizioni dénonce dès l’introduction du directeur et dans la préface de Steuckers la tentative de travestissement dont Faye a été la victime durant les dernières années de sa vie et surtout après sa disparition. Comme le souligne Steuckers, il existe une véritable « légende noire » qui présente l’auteur français comme un « occidentaliste » pro-atlantiste, alors que sa position était diamétralement opposée. Cette distorsion, alimentée à la fois par ses ennemis historiques de la soi-disant Nouvelle Droite et par certains de ses suiveurs superficiels des dernières années, a abouti au paradoxe de voir Faye décrit comme un soutien de Zelensky, une caricature que ce recueil démonte définitivement.

Le tropisme russe de Faye puise ses racines dans sa formation de jeunesse et dans son engagement au GRECE, où, dès les années 1970, il développait une vision critique de l’américanisme culturel. Comme le rappelle Steuckers, le mouvement de la Nouvelle Droite avait développé un anti-américanisme « différent de l’hostilité envers les États-Unis cultivée par les milieux de gauche », non pas un anti-américanisme de façade ou hérité des gauches pro-nord-vietnamiennes, mais issu d’une critique gaulliste et nietzschéenne de l’hégémonie culturelle, économique et stratégique de Washington, plus sophistiquée et orientée géopolitiquement. Dans ce contexte, l’URSS de Brejnev apparaissait « plus rationnelle et réaliste que le pandémonium déclenché par les services secrets occidentaux dans la sphère américaine ».

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L’évolution de la pensée de Faye sur la Russie traverse différentes phases. D’abord fasciné par le « socialisme réel », non pour ses aspects économiques, mais pour ses retombées en termes « d’anti-individualisme, de futurisme, de stakhanovisme, d’esprit spartiate, hiérarchique, méritocratique et communautaire ». Une fascination qui révèle l’originalité de sa pensée, capable de saisir des éléments de mobilisation totale et de discipline collective même dans des systèmes formellement opposés à l’identitarisme européen. L’effondrement de l’URSS marque un tournant. Comme l’explique Vaj dans l’introduction, le « Sauron inventé par la propagande occidentale » se révèle moins consistant qu’attendu, poussant Faye à regarder au-delà du communisme, vers une Russie post-soviétique qui se libère progressivement de l’idéologie marxiste comme du chaos oligarchique des années 1990. L’ascension de Poutine représente pour l’auteur français non seulement le retour de la Russie en tant qu’acteur géopolitique, mais surtout l’émergence d’un modèle alternatif au nihilisme occidental.

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Les textes rassemblés dans ce volume couvrent la période cruciale de 2007 à 2016, témoignant de l’évolution de la crise ukrainienne et du durcissement des relations euro-russes. Faye manifeste son positionnement en analysant les dynamiques en cours: dès 2007, dans son « Discours à la conférence de Moscou », il esquisse le projet d’une « confédération impériale euro-russe » fondée sur le fédéralisme impérial et l’autosuffisance économique. L’opinion de Faye émerge avec une force particulière dans l’analyse de la crise ukrainienne, qu’il interprète comme une provocation orchestrée par Washington pour empêcher l’intégration euro-russe.

Dans les essais consacrés à la question ukrainienne, l’auteur attaque systématiquement la narration occidentale: l’annexion de la Crimée est présentée, selon Faye, pour ce qu’elle est réellement – le retour d’un territoire historiquement russe à la mère patrie via un référendum – tandis que les sanctions contre Moscou sont dénoncées comme un « boomerang » qui nuit davantage à l’Europe qu’à la Russie elle-même.

L’analyse des motivations profondes de la russophobie occidentale est particulièrement pénétrante. Faye identifie deux causes principales: la première est géopolitique (empêcher le retour de la Russie comme grande puissance), la seconde idéologique (contrer l’exemple russe de « révolution conservatrice »). C’est ce dernier aspect qui rend le Poutine post-communiste plus redoutable pour les oligarchies occidentales que Staline lui-même: alors que l’URSS restait prisonnière d’une vision universaliste, la Russie poutinienne réaffirme des valeurs identitaires, patriotiques et traditionnelles qui constituent une menace existentielle pour le système libéral-libertaire.

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L’approche de Faye à la question russe se distingue à la fois de la russophobie et du multipolarisme acritique et messianique. Il ne tombe pas dans l’erreur d’idéaliser Poutine ou le système russe, dont il reconnaît les limites et les contradictions, mais voit dans la Russie post-soviétique le principal allié naturel de l’Europe dans un monde de plus en plus polarisé. Sa position est celle d’un « bon Européen » au sens nietzschéen: il comprend que la division de l’Europe sur l’axe est-ouest ne sert que les intérêts anglo-américains. Son regard sur la Russie combine l’admiration pour la « barbarie » antibourgeoise théorisée par Drieu La Rochelle et l’appréciation de l’efficacité géopolitique et du pragmatisme stratégique. Une synthèse qui l’amène à voir dans la politique étrangère russe « la seule intelligente » dans un panorama international dominé par l’improvisation occidentale.

La vision paneuropéenne de Faye, inclusive de la Russie mais non subordonnée à celle-ci, représente aujourd’hui une troisième voie entre le suicide atlantiste et l’isolationnisme souverainiste. Particulièrement significative est la proposition de dépasser le concept géographique d’« Eurosibérie » au profit de celui, ethno-politique, d’« Eurorussie », suivant les observations de Pavel Tulaev. Ce changement terminologique reflète une maturation théorique qui s’oppose à ceux qui voudraient aujourd’hui dépeindre les Russes comme des Turcomans armés d’arcs et siégeant à la cour de Kazan, des partisans de la Horde d’or ou des parents perdus de Gengis Khan.

Pour Faye, la notion est claire : la Russie est une civilisation européenne qui a étendu son expansion vers l’Asie, ce qui ne la rend ni foncièrement asiatique ni hybride. L’enseignement de l’auteur est d’une actualité saisissante: seule une Europe réconciliée avec la Russie pourra espérer échapper au déclin. La russophobie n’est pas seulement une erreur géopolitique, mais une forme d’automutilation qui condamne l’Europe à l’insignifiance historique. En temps de polarisation croissante, l’alternative est entre un avenir européen et le crépuscule occidental. Il s’agit, en d’autres termes, de construire l’Europe avec, et non contre la Russie, en reconnaissant dans la russophobie l’instrument destiné à empêcher le cauchemar américain: la naissance d’un bloc euro-russe souverain.

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La position de Faye est séduisante en ce qu’elle échappe à une certaine passion aveugle menant à un multipolarisme messianique de façade. Le chapitre « Une perspective française sur la Russie » est un chef-d’œuvre d’analyse critique, implacable et en même temps empathique. Faye reconnaît le « génie russe », une capacité intuitive exceptionnelle qui va de la musique à la physique, mais n’en cache pas les faiblesses. Il parle de la « double âme russe », d’une schizophrénie oscillant entre complexe de supériorité et d’infériorité, entre volonté de puissance impériale et sentiment d’être une nation reléguée aux marges. Avec une lucidité impitoyable, il énumère les plaies qui affligent la Russie: une démographie suicidaire, une économie déséquilibrée et trop dépendante des hydrocarbures, une corruption endémique et, surtout, la pénétration des virus culturels occidentaux. C’est précisément cette capacité d’analyse qui le rend si actuel et l’éloigne des supporters qui se contentent d’un soutien maladroit et grossier. Faye n’idolâtre pas, il soutient la Russie non de manière inconditionnelle, mais dans la mesure où elle sert un projet plus vaste: la renaissance de l’Europe tout entière.

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Parler de « textes inconnus » signifie généralement évoquer la rhétorique de la redécouverte: des textes oubliés qui reviennent à la lumière, souvent à l’ombre d’une opération idéologique. Ce n’est pas le cas ici. Les matériaux rassemblés par Moira Edizioni et placés sous le nom de Faye appartiennent à la périphérie éditoriale, il s’agit de blogs échappant même à l’œil maniaque des exégètes. Des textes mineurs, certes, mais nullement suspects pour autant. L’objectif n’est pas de construire un Faye ésotérique ou clandestin. Ses positions sont celles, connues et cristallisées depuis des années. Mais c’est justement cette prévisibilité qui est en jeu: il ne s’agit pas de révéler un « autre » Faye, mais de mettre à nu la manipulation en cours. Cette redécouverte agit ainsi comme une douche froide contre les lectures sélectives et les appropriations opportunistes. Une salutaire réfutation qui ramène le débat au niveau de la réalité.

mercredi, 10 septembre 2025

Directive de Douguine: "L’ère des États-civilisations – La Russie, la Chine et l’Inde s’élèvent comme les trois pôles d’un monde multipolaire"

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Directive de Douguine:

"L’ère des États-civilisations – La Russie, la Chine et l’Inde s’élèvent comme les trois pôles d’un monde multipolaire"

Alexandre Douguine

Nos États ne sont pas équivalents: certains ont des avantages démographiques, d’autres en possèdent dans la croissance économique, d’autres encore en géopolitique, en ressources naturelles, en armement ou en technologies. Mais aucun d’eux ne dépend de l’autre. Ce sont trois pôles indépendants, voilà ce qu’est la multipolarité. Chacun d’eux a en son cœur sa propre religion, sa propre identité, sa culture et une histoire très ancienne. Cela revêt une signification colossale.

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La Russie a définitivement pris conscience de ne pas être une partie de l’Occident, mais le centre d’un monde russe autonome. Il en va de même pour l’Inde et la Chine. Au centre de l’identité chinoise se trouve l’idée confucéenne de l’Empire chinois. Le maoïsme et le libéralisme de Deng Xiaoping sont des moyens de moderniser la société dans le but de la défendre contre l’Occident. Le noyau reste immuable – la Chine défend ses principes et sa métaphysique.

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Il en va de même pour l’Inde qui, avec l’arrivée au pouvoir des conservateurs de Narendra Modi et du « Bharatiya Janata Party », prend de plus en plus conscience de son opposition à l’Occident en tant que civilisation védique. Modi a opté pour une décolonisation de la conscience indienne et poursuit résolument cette voie, comprenant que le système occidental ne convient pas à la société indienne, fondée sur d’autres principes.

La civilisation russe plonge ses racines dans l’antique société indo-européenne des temps sarmates et scythes, époque où s’est formé le peuple slave. Mais nous sommes devenus une véritable civilisation en embrassant le christianisme et le byzantinisme, avec son héritage gréco-romain. Nous sommes aussi, toutefois, les héritiers de la culture du code indo-européen.

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Après le Grand Schisme des Églises au 11ème siècle, nos chemins ont divergé de ceux de l’Occident. Nous avons continué à porter ce code, tandis que l’Occident s’en est éloigné. À l’époque moderne, il a bâti une civilisation sur des principes antichrétiens et anti-romains, en rompant avec lui-même. Nous, malgré les reculs des 18ème et 20ème siècles, sommes restés porteurs de la foi orthodoxe dans laquelle le Saint Prince Vladimir nous a baptisés.

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Après la chute de Constantinople, nous sommes devenus les seuls héritiers de ce code. Il nous incombait d’être le bastion de l’orthodoxie. Ce n’est pas un hasard si nous sommes appelés la "Troisième Rome". Nous sommes héritiers non seulement du millénaire, mais d’une histoire bien plus profonde, incluant la Perse et Babylone, comme l’écrit Constantin Malofeev dans son livre « Empire ». Depuis 500 ans, nous, les Russes, portons la Couronne de l’Empire en préservant une civilisation que l’Occident a abandonnée.

Ce n’est pas nous qui sommes une partie de l’Occident, mais l’Occident qui est une version dégénérée de nous-mêmes. Ils se sont séparés de la civilisation, tandis que nous lui sommes restés fidèles. Ils sont les fils prodigues qui se sont éloignés en enfer. Nous, nous portons une culture ancienne, les Chinois la leur, les Indiens la leur.

Après des époques pas toujours favorables, nous, les trois États-civilisations renaissants, nous nous rencontrons à nouveau, conscients de notre profondeur. Face à nous, un ennemi commun: l’Occident. Trump aurait pu devenir un autre pôle souverain s’il avait surmonté l’hégémonie des mondialistes, comme il le prévoyait. Mais il n’y est pas parvenu.

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Les trois pôles du monde multipolaire existent déjà. Mais le club du monde multipolaire est ouvert. Dans les BRICS, format plus large que celui de l’OCS, il y a aussi une place pour les mondes islamique, africain et latino-américain. Plus l’Occident nous attaque, plus nous nous rapprochons. Même Trump y contribue, rendant ce processus irréversible – sous sa pression, l’Inde nous a rejoints.

Il y a là quelque chose d’eschatologique. Nous ressentons de façon aiguë notre identité et notre destin, comme jamais au cours des 300 dernières années. Il en va de même pour les Chinois et les Indiens. L’Inde, ancienne colonie, se réveille enfin pour de bon, tout comme la Chine revient à son noyau confucéen. Ce qui était au commencement se révèle à la fin.

Nous entrons dans l’ère des États-civilisations, tandis que l’Occident, en tentant de conserver sa domination, sombre. Il est désormais évident pour tous que son hégémonie est terminée. C’est l’agonie.

mardi, 09 septembre 2025

Diplomatie des gazoducs aux dépens de l’Europe

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Diplomatie des gazoducs aux dépens de l’Europe

Gregor Jankovič

Source: https://geoestrategia.eu/noticia/45127/geoestrategia/que-... (Extrait)

En adoptant une idéologie et des slogans creux, l’UE a livré sa bouée de sauvetage énergétique à la Chine, non par nécessité, mais par sa propre erreur stratégique et par une subordination totale aux intérêts des États-Unis.

Lors du récent sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) à Pékin, la Russie, la Chine et la Mongolie ont signé un mémorandum juridiquement contraignant pour le gazoduc « Power of Siberia 2 ». S’étendant sur 2600 km et coûtant 13,6 milliards de dollars, ce gazoduc livrera 50 milliards de mètres cubes de gaz russe par an depuis l’Arctique directement vers le nord de la Chine via la Mongolie, en évitant complètement l’Europe.

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Les implications économiques sont saisissantes. En Europe, 50 milliards de mètres cubes de gaz naturel valent aujourd’hui 16,5 milliards de dollars. Le GNL américain pour le même volume coûterait environ 25 milliards de dollars (Financial Times), tandis qu’un achat direct à la Russie, selon les récents accords de Gazprom avec la Chine, reviendrait à environ 6 à 6,5 milliards de dollars. Le gazoduc russe bon marché, qui a constitué la colonne vertébrale de l’industrie allemande et de l’Europe occidentale, écoulera désormais son flux vers l’est, assurant à la Chine un approvisionnement énergétique stable et abordable.

Les élites dirigeantes anglo-américaines, qui poussent l’Europe à rompre ses liens énergétiques avec la Russie, ont, sans le vouloir (en tout cas apparemment – peuvent-ils être si naïfs – ou bien?), transféré l’influence stratégique à la Chine. L’Europe paie le GNL américain trop cher, perd sa compétitivité industrielle et glisse vers la récession, un scénario idéal pour alimenter les tensions intra-européennes sur fond de difficultés économiques et de ventes d'armes américaines surévaluées.

Le président Xi Jinping a présenté le gazoduc PoS2 comme une pierre angulaire du partenariat stratégique « sans limites » avec la Russie, garantissant à la Chine un corridor énergétique terrestre fiable. Il ne s’agit pas seulement d’un accord énergétique: c’est un réalignement stratégique. La Russie s’assure un acheteur garanti, la Chine sécurise des approvisionnements à long terme, et l’Europe fait face à l’érosion de sa position industrielle et géopolitique.

La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, illustre parfaitement, dans sa réflexion sur l’histoire, la véritable valeur et la mentalité de la classe dirigeante actuelle de l’UE, fruit d’un projet impérial américain de plusieurs décennies:

« … La Russie s’adressait à la Chine : ‘Russie et Chine, nous avons combattu pendant la Seconde Guerre mondiale, nous avons gagné la Seconde Guerre mondiale, nous avons vaincu les nazis…’ et j’ai pensé : ‘D’accord, c’est nouveau.’ Quand on connaît l’histoire, cela suscite beaucoup de questions. Je peux vous dire qu’aujourd’hui les gens ne lisent ni ne se souviennent beaucoup de l’histoire. On voit qu’ils adoptent ces récits sans réfléchir… »

En se séparant non seulement du bon sens et de la décence, mais aussi du gaz russe abordable sous la pression anglo-américaine, l’Europe a éliminé toute possibilité réaliste de reprise industrielle et d’avenir économique viable. La carte énergétique mondiale est en train d’être réécrite: le déclin de l’Europe s’accélère, les crises internes occidentales s’approfondissent et les élites anglo-américaines risquent de perdre leur influence tandis que les anciennes puissances périphériques et colonies, en particulier la Chine et l’Inde, montent en puissance sur le plan stratégique et économique.

L’Europe est confrontée à l’effondrement final de sa pertinence industrielle et géopolitique, tandis que les élites anglo-américaines perdent leur seul projet historique réellement réussi : le soi-disant « ordre international fondé sur des règles », « indispensable », « inévitable » et « le plus puissant ».

lundi, 08 septembre 2025

Le méga-contrat russo-chinois pour le pétrole et le gaz. Et l’UE reste spectatrice

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Le méga-contrat russo-chinois pour le pétrole et le gaz. Et l’UE reste spectatrice

par Clemente Ultimo

Source: https://www.destra.it/home/geoeconomia-il-mega-contratto-...

En marge du 25ème sommet de l’Organisation de coopération de Shanghai, la Russie et la Chine ont encore renforcé leur partenariat énergétique. Moscou a trouvé dans le marché chinois une alternative au marché européen – fermé suite aux sanctions imposées par l’UE après le déclenchement de la guerre en Ukraine – tandis que Pékin bénéficie du pétrole et du gaz russes comme source d’énergie moins chère pour alimenter son secteur industriel.

Quatre accords ont été signés entre l'entreprise russe Gazprom et la China National Petroleum Corporation, le principal de ces accords concernant la construction du Power of Siberia 2, le gazoduc destiné à approvisionner Pékin en méthane provenant des gisements arctiques russes. La ligne traversera la Mongolie, qui pourra ainsi profiter des droits de transit. L’objectif est de transporter des milliards de mètres cubes de gaz par an, sur la base d’un accord d’une durée de trente ans.

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Gazprom a également donné son feu vert à la demande chinoise d’augmenter les livraisons arrivant en Chine via le Power of Siberia, passant des 38 milliards de mètres cubes actuels à 44 milliards. En tenant compte des autres canaux d’approvisionnement, les livraisons totales de gaz russe devraient passer, dès cette année, de 48 à 56 milliards de mètres cubes.

Les prévisions indiquent qu’avec la mise en service du Power of Siberia 2, les livraisons russes de gaz à la Chine atteindront 106 milliards de mètres cubes. Le seul marché chinois absorbera ainsi presque entièrement les flux de gaz qui, avant le conflit en Ukraine, approvisionnaient les pays de l’Union européenne, soit environ 150 milliards de mètres cubes. À ce propos, il convient de rappeler que la Hongrie et la Slovaquie continuent d’acheter du gaz à la Russie, comme en témoignent les tensions croissantes avec Kiev, qui a frappé à plusieurs reprises, ces dernières semaines, le gazoduc alimentant ces deux nations d’Europe centrale, interrompant ainsi le flux.

À côté des achats chinois, il ne faut pas oublier non plus ceux de l’Inde qui se fournit en pétrole et en gaz russes. Des achats qui se poursuivent malgré les pressions politico-diplomatiques et les droits de douane imposés par les États-Unis. L’Inde a jusqu’à présent rejeté les demandes d’interrompre les importations énergétiques russes, réaffirmant son droit de défendre ses intérêts nationaux en achetant du gaz et du pétrole dans les meilleures conditions du marché.

Enfin, il y a le chapitre des achats effectués par les Européens eux-mêmes, en particulier de pétrole : des achats résultant de triangulations qui permettent de « diluer » l’origine russe des hydrocarbures concernés. Mais cela concerne davantage le registre de l’hypocrisie « made in UE » que le plan économique.

Guillaume Faye et la Russie

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Guillaume Faye et la Russie

Par Robert Steuckers

Préface à l'anthologie de textes de Guillaume Faye consacrés à la Russie et traduits en italien. Intitulée Contro la russofobia: Russia post-sovietica, federalismo eurosiberiano e crisi ucraina, cet ouvrage vise, pour l'essentiel, à réfuter les ragots colportés sur la personne de Faye, le décrivant comme "atlantiste" et partisan de l'Occident. Ces textes datent tous de la dernière décennie de Faye et constituent, en quelque sorte, un testament politique. Pour commander: https://www.amazon.it/dp/B0FP8VC5RC?ref=cm_sw_r_ffobk_cp_...

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Guillaume Faye a tenu longtemps un blog qui, hélas, n’a pas été assez connu voire a été délibérément ignoré par ses ennemis de tous horizons. Dans ce blog, Guillaume Faye traitait, avec le brio qu’on lui connait, les grands thèmes de notre époque. La Russie y tenait toutefois une place privilégiée. Tous comptes faits et six ans après sa disparition, la teneur de ses textes sur la Russie actuelle et sur les initiatives de son président est tout à la fois dense et agile : elle permet à l’honnête homme et au diplomate européen potentiel, soit le diplomate d’une autre Europe qu’il faut malgré tout espérer voir advenir, d’acquérir les bases essentielles et nécessaires pour pouvoir juger correctement la Russie, son histoire, son système politique, son essence, et pour traiter avec elle, au-delà de toutes les mièvreries et les hystéries idéologiques qui ont mené l’Europe à sa déchéance actuelle. Faye fut certes le théoricien d’une certaine identité européenne qui, pour renaître, devrait se dé-coloniser et organiser la remigration, mais il ne fut pas que cela : il fut un esprit capable d’arraisonner le réel au départ de nombreuses de ses facettes, selon un perspectivisme bien compris, suite à une bonne lecture de Nietzsche.

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Le tropisme russe, chez Faye, est toutefois ancien, bien que Français de l’Ouest, il ne se soit jamais frotté dès l’enfance ou l’adolescence à des faits russes, exprimés par des personnalités issues directement de l’espace russe ou de l’émigration blanche. A la fin des années 1970, la mouvance dite de « nouvelle droite », en laquelle il oeuvrait, avait commencé à adopter des positions très critiques à l’égard de la civilisation américaine, à l’importation en Europe de la sous-culture américaine et aux pratiques de la politique étrangère américaine, sur des tons différents de l’hostilité aux Etats-Unis que cultivaient les milieux de gauche suite, par exemple, à la guerre du Vietnam ou aux appuis apportés aux bourgeoisies compradores d’Amérique ibérique. Plus tard, les passerelles entre les deux modes d’anti-américanisme critique se feront de plus en plus nombreuses.

guillaume-faye-jeune-3445975739.jpgStefano Vaj et moi-même, nous nous sommes connus en juin 1979 lors d’une réunion organisée par Faye à Paris dans le cadre de sa mission de directeur du « Département Etudes et Recherches » du GRECE. Il convient de rappeler qu’il s’est acquis de cette mission avec un extraordinaire brio, jusqu’à son départ du GRECE, fin 1986. Les textes, souvent inédits, qu’il a produits dans le cadre de cette mission, prouvent l’extrême pertinence de sa pensée en bon nombre de domaines. Dans ces textes, épars, dispersés, rejetés par sa « hiérarchie » à qui il faisait de l’ombre à son corps défendant, l’affirmation européenne, contre l’hégémonisme américain, tient une place prépondérante.

9782911202278.jpgEn tant que Français, Faye reposait une bonne part de ses arguments sur les principes du non-alignement gaullien, théorisés notamment par Maurice Couve de Murville (qui fut nommé ministre des affaires étrangères en 1958) et Michel Jobert (ministre des affaires étrangères en 1973-74, opposé aux immixtions de Kissinger dans les affaires européennes). Jobert préfacera d’ailleurs l’ouvrage capital de Faye, Nouveau Discours à la Nation européenne (Albatros, janvier 1985), livre qui sera considérablement amplifié en 1999, dans une seconde édition parue chez L’Aencre. Je vais y revenir.

Le contexte des années 1970 est donc celui qui a éveillé un anti-américanisme militant dans la mouvance dite de « nouvelle droite ». Pourquoi ce rejet, précisément à ce moment-là de l’histoire européenne et mondiale ? Les Etats-Unis sous la présidence de Jimmy Carter connaissaient un ressac, du moins en apparence : la débâcle au Vietnam en 1975 (mais la présence américaine n’y était plus vraiment nécessaire vu l’alliance implicite avec la Chine de Mao suite aux tractations très habiles de Kissinger en 1972), l’endettement considérable que ce conflit indochinois avait provoqué dans les finances de l’Etat américain, le phénomène de la stagflation qui s’installait dû au manque de volonté d’investissement des milieux économiques américains donnaient l’impression que l’on avait affaire à une grande puissance sur le déclin, dont il fallait se débarrasser de la tutelle. Un tel rejet semblait alors possible. Carter avait tourné le dos au « réalisme politique » du tandem Kissinger-Nixon et opté pour un « soutien aux droits de l‘homme » partout dans le monde même chez des alliés des Etats-Unis (Somoza au Nicaragua, par exemple), soit pour un « idéalisme libéral », le terme « libéral » étant, dans le langage politique américain, le synonyme de ce qu’est pour nous le « gauchisme ».

71d44iz4dKL._SL1496_-3603283719.jpgIl resterait beaucoup à écrire pour expliquer à nos contemporains, et surtout aux « millenials » ce que furent ces années 1975-1980, où les grands problèmes irrésolus de notre troisième décennie du 21ème siècle ont émergé sur la scène internationale. Rappelons que les thèses pessimistes et alarmistes du Club de Rome commencent à circuler à partir de 1975, que le phénomène des « boat people » annonce, dès la chute de Saïgon, les problèmes de migrations massives vers l’Europe et l’Amérique du Nord, que le facteur religieux et l’opposition chiites/sunnites redeviennent cruciaux avec l’avènement de Khomeiny en Iran, que le « gauchisme » de Carter fera place dès 1979 à une autre déviance idéologique, le néolibéralisme de Thatcher et de Reagan (entraînant le monde dans une spirale socialement descendante, surtout depuis la crise de 2008), que des vagues successives et persistantes d’écologisme politisé et déréalisant ont envahi depuis 1979 les parlements de toutes les nations de l’américanosphère (terme inventé par Faye) pour culminer dans les errements dramatiques de l’avant-dernier gouvernement allemand dit « feu tricolore » (Ampel).

Annalena-Baerbock-2-cropped-scaled-1828108195.jpgCe gouvernement, présidé par le socialiste Olaf Scholz, comptait dans ses rangs une ministre, Annalena Baerbock, qui a réussi à porter au pinacle le cartérisme antiréaliste des années 1970, avec les résultats désastreux que l’on aperçoit aujourd’hui. Tel était donc le contexte dans lequel nous travaillions, Vaj et moi-même, avec Faye, à la fin de cette décennie dont les événements et les trouvailles idéologiques malsaines nous taraudent encore aujourd’hui et nous obligent à faire face à une dépolitisation totale, dont nous n’imaginions pas la survenance dans une telle ampleur. Ou si, oui, nous l’imaginions dans nos scénarios les plus outrés, nous aurions été enclins à penser qu’elle n’aurait qu’un règne très fugace, renversée aussitôt par des « restaurateurs du politique » comme l’entendait Julien Freund, le mentor de Faye.

30864351479-2333025117.jpgA ce propos, il y avait ce curieux roman « national-bolchevique » de Jean Dutourd, Mascareigne, où un militant communiste notoire devient président de la France pour se muer en un nouveau dictateur bonapartiste…

Le pandémonium qui se mettait en place entre 1975 et 1980 ne rencontrait que peu d’opposition. Le soft power qui l’orchestrait en coulisses brouillait pistes et repères, édulcorant les corpus doctrinaux en place, ceux de droite comme ceux de gauche, ceux de tradition maurassienne en France comme ceux de tradition marxiste à Paris ou ailleurs ou comme ceux du vieux libéralisme chanté par un Raymond Aron. Les uns comme les autres tentaient de se mettre au diapason des nouveaux engouements idéologiques : on a vu apparaître ainsi du marxisme écologisé ou du conservatisme vert ou un libéralisme, propre aux droites conventionnelles, aveugle aux problèmes des migrations croissantes, etc.

La confusion idéologique était généralisée : nous avions Reagan, adulé par les droites oublieuses de l’antilibéralisme de tous les anciens conservatismes, qui craignait en paroles l’Armageddon et l’Axe du Mal mais dont les services reprenaient certaines pratiques libérales-gauchistes préconisées par son prédécesseur Carter en soutenant, avec le Vatican, le mouvement Solidarnosc en Pologne, ce qui amena Faye à parler de « reagano-papisme », un mélange de protestantisme quaker américain, de libéralisme anglo-saxon outrancier et de vaticanisme moderniste. Bref une soupe abracadabrante…

12809065643-2531577606.jpgFace à cette confusion « impolitique », l’URSS de Brejnev apparaissait comme un pôle certes archaïque, désuet en bien de ses aspects, mais un pôle plus rationnel, plus réaliste que le pandémonium déclenché par les services dans l’américanosphère. En dépit de l’anticommunisme professé par la mouvance néo-droitiste ou par les autres formes de conservatismes (édulcoré ou non), la « soviétosphère » apparaissait plus traditionnelle, en dépit du vernis communiste. La figure emblématique de l’anticommunisme en Occident, à l’époque, était Alexandre Soljénitsyne. Or, dès 1978, à l’occasion d’un discours à Harvard, ce dernier se met à fustiger l’Occident et ses travers, redevenant un slavophile inutilisable pour les services occidentaux, au contraire des « occidentalistes » de la dissidence libérale russe.

ob_aecb3a_le-declin-du-courage01-985266360.jpgLes ouvrages ultérieurs de Soljénitsyne accentueront encore cette slavophilie qui accompagnera toutes les « droites » (ou mouvances considérées comme telles) hostiles à l’hégémonisme américain. Ce qui amena Faye à prononcer en privé l’un de ses célèbres bons mots : « La France doit adhérer au Pacte de Varsovie!». Il pensait même en faire le titre d’une bonne brochure militante, arguant que la position, encore quelque peu « tierce » de la France dans les années 1980, lui permettrait de sortir de l’impasse que devenait ce qu’il appelait le « Gros-Occident ». Boutade, mi polissonne mi sérieuse, énoncée au même moment où, en Allemagne, un formidable aréopage, venu des gauches comme des droites, envisageait la neutralisation des deux états allemands, de la Pologne, de la Hongrie, de la Tchécoslovaquie et des trois états du Benelux. Juste avant et juste après la perestroïka de Gorbatchev, cela bouillonnait ferme dans les espaces non-conformistes d’Europe, plus nombreux et mieux formés que ceux qui subsistent vaille que vaille aujourd’hui.

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En 1984, avec l’avènement de Gorbatchev et son projet de « Maison commune » désoviétisée, les apriori antisoviétiques habituels commencent à s’estomper ou à disparaître. A la même époque, Jean Thiriart, à Bruxelles, revient à la politique, conteste la perestroïka car elle fracasse l’ensemble soviétique qui, selon lui, était sainement cohérent, mais appelle à la constitution d’un espace « euro-soviétique » des Açores à Vladivostok. Faye, lui, parlera plutôt d’une « Euro-Sibérie ».

41hOhVQW1qL-2003627696.jpgCe concept avancé par Faye vient d’un dialogue que j’avais eu avec lui après lui avoir présenté un ouvrage fondamental, celui d’un Russe blanc, établi pendant l’entre-deux-guerres à Berlin puis à Stockholm, Youri Semionov, auteur d’un livre copieux sur les richesses de la Sibérie qu’un consortium euro-russe pourrait exploiter en commun. Plus tard, dans la première décennie du 21ème siècle, Pavel Toulaev, identitaire russe, lui expliquera que la Sibérie n’a jamais été un sujet de l’histoire, que seule la Russie l’a été en ce vaste espace, et qu’il conviendrait dès lors de parler d’  « Euro-Russie ». Faye a admis l’argument. Raison pour laquelle il parle dans les articles du présent volume de Russie et pratiquement jamais d’ « Euro-Sibérie ».

Après les premiers balbutiements de la perestroïka de Gorbatchev et avant la chute du Mur de Berlin en novembre 1989, Faye avait quitté la mouvance dite « néo-droitiste », en butte qu’il était aux jalousies et aux intrigues propres à la clique parisienne qui s’agitait sous cette étiquette.

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Faye, pendant ses années passées dans les antres du showbiz (1987-1998) ne s’est donc pas exprimé (ou très peu par la suite) sur la période de déchéance de la Russie sous le piètre règne de Boris Eltsine. Toutefois, dans les addenda de 1999, ajoutés à la seconde édition du Nouveau Discours à la Nation européenne, Faye évoque clairement (mais trop brièvement) l’effondrement du potentiel militaire de la Russie, sa crise financière et son délitement politique et s’alarme surtout de son effondrement démographique. Il était donc bien conscient du problème de la « catastroïka » eltsinienne. En 1999, le problème premier qui mobilise les opinions en Europe est celui de la guerre que livre l’OTAN à la pauvre Serbie, sur laquelle ces addenda sont assez prolixes. La conclusion de Faye sur le bref paragraphe consacré à la période Eltsine est clair : « L’Europe devrait se consacrer à aider la Russie à se relever » (p. 174).

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Iévguény Primakov et Vladimir Poutine, au début de sa carrière publique en 2000.

Dès la fin de l’année 1999, toutefois, tout se met à changer à Moscou dans le sens souhaité par Faye, en fait sous l’impulsion discrète de Primakov. En 2000, commence l’ère Poutine qui mettra fin au binôme calamiteux de l’ère Eltsine où le pouvoir était détenu par la présidence (faible) et le comité des Sept Oligarques (qui vendait le pays à l’encan). Poutine mettra ces derniers au pas, comme on le sait, restaurant par la même occasion la primauté du politique, ce qui ne pouvait qu’enthousiasmer le disciple de Julien Freund qu’était Guillaume Faye.

Le regard de Faye sur le redressement de la Russie et sur les réalisations de Poutine est le sujet du présent recueil. Le lecteur pourra donc juger sur pièces.

Cependant, depuis les événements d’Ukraine en 2004 déjà et surtout, bien sûr, depuis les bouleversements de 2014 à Kiev, une confusion totale règne dans la mouvance identitaire (et non plus uniquement dans celle, réduite, de la dite « nouvelle droite »). Cette confusion est le résultat d’une inculture généralisée due à l’effondrement des systèmes d’enseignement dans toute l’Europe et, par suite, de l’incapacité des générations nées dans les années 1990 et 2000 à assimiler, par lecture et par raisonnement logique, des faits de monde sans être influencées par toutes sortes de filtres incapacitants. Le temps que l’on peut consacrer à la lecture est réduit à peu de minutes par semaine vu la surabondance des sollicitations audio-visuelles incapables d’imprimer durablement du savoir dans les cerveaux. Il y a certes de notables exceptions mais elles se font de plus en plus rares, rendant toute conversation inter-générationnelle avec nos cadets extrêmement pénible.

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A cet effondrement cognitif s’ajoute, chez ceux qui se piquent de faire de la « métapolitique » comme Monsieur Jourdain faisait de la prose, une dispersion tous azimuts des centres d’intérêt, un émiettement dramatique du savoir dont Faye était déjà bien conscient et qu’atteste, à chaque numéro, la table des matières d’une revue dont il fut, un moment, l’animateur principal.

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On peut effectivement parler de la diffusion d’un savoir inutile, constitué de brics et de brocs qui virevoltent à la façon d’un mouvement brownien ; dans un tel contexte, les grands thèmes du savoir politique ne trouvent hélas pas leur place, comme si on cherchait délibérément à les occulter (pour le compte de qui ?). Il y a ensuite le mouvement dit « identitaire », qui connait des fleurons admirables, comme le travail d’un Sellner en Autriche et dans l’espace linguistique allemand, ou comme le mouvement « Terre & Peuple » en France, mais à côté desquels, hélas, on trouve aussi de petits cénacles réduits et repliés sur une poignée d’isolés qui ont peur de leur ombre, des bandes de copains ou de copines sympathiques mais inefficaces, sauf à organiser des barbecues quand le soleil atteint son zénith ou risque de disparaître à l’horizon au cercle polaire arctique, des clubs de collectionneurs nostalgiques animateurs d’oripeaux militaires ou autres portés au cours de certaines décennies du 20ème siècle, de petites escouades d’anachroniques en tous genres, des coteries de grognons qui vitupèrent contre les immigrations sans jamais analyser le problème et sans jamais proposer de mesures concrètes, etc.

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Le problème que soulève le terme « identitaire » aujourd’hui, n’existait pas quand le vocable a été utilisé pour la première fois, dès le tout début des années 1990, par les courageux pionniers de cette mouvance qui se voulait enracinée dans l’histoire européenne. Aujourd’hui le terme est utilisé dans des acceptions bien plus diverses, surtout celles qui ont émergé aux Etats-Unis, avec le mot « identity ». On parle désormais d’identité de genre, d’identité de race (dans le sens de « non-blanc »), d’identité sexuelle, LGBT+. L’identité n’est plus une référence à un collectif historique, à un peuple, à une communauté populaire, à un « nous ». Mais le terme « identité » sert à désigner ce que je veux ou prétend être en dépit des faits anthropologiques, biologiques, sexuels, raciaux, etc. Tel quidam peut se dire femelle, alakalouf, chienne de race Yorkshire, et définir ainsi son « identité » (choisie et, à ses yeux, incontestable) tout en étant objectivement mâle, bavarois et homo sapiens. Tel autre se déclarera transsexuel, numismate et handicapé tout en étant objectivement femme, douanière et championne de saut en hauteur. Si l’identitaire enraciné, par la revendication de cet enracinement, ne pouvait être qu’Angevin, Français, Européen ou Bavarois, Allemand, Grand-Germanique et Européen, l’identitaire perturbé ou le millenial fragilisé pourra dire qu’il est « identitaire » et « occidentalisé », s’assimilant donc à une culture de l’américanosphère qui a généré le wokisme et la « cancel culture », tout en étant contre l’immigration, seul critère factuel dont il sera tenu compte, alors que la généralisation des phénomènes migratoires depuis les boat people a été propagée par les Etats-Unis, qui, pour eux, sont l’hegemon protecteur contre les méchants Africains, Russes, Chinois et autres Bordures ou Poltomaltèques. Toutes les autres questions politiques dont la géopolitique (affaire de « boomers » parait-il…), l’économie politique, le droit ne sont plus jamais abordés et quiconque les aborde est un déviant ou, une fois de plus, un « boomer » (notion désormais élargie à tous ceux qui sont nés avant 1995). Rappelons-le une bonne fois pour toutes : l’Occident est ce qui nie en permanence les héritages solides partout dans le monde mais surtout en Europe. On ne peut donc se déclarer « occidentaliste » et évoquer le salut ou l'identité de l’Europe. Les deux postures sont incompatibles.

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Cliché pris par un de nos amis dans le Paris ratisé d'Anne Hidalgo: un métapolitologue browno-mobile a pris rendez-vous sur un site de speed-dating avec une millenial occidentalo-identitaire au QI à deux chiffres. 

Ce glissement vers le ridicule, cette lamentable déchéance de la pensée militante, s’est repérée dans un circuit qui fut pourtant très proche de Faye au cours des derniers mois de sa vie.  Ce mouvement était animé par un certain Daniel Conversano. Certes, il faut chaleureusement remercier ce Monsieur Conversano et une équipe de ses amis d’avoir généreusement aidé Faye dans les cruelles semaines de misère et de souffrance qui ont précédé son décès et d’avoir édité les derniers ouvrages de Faye, Guerre civile raciale et Nederland. Cependant, la contradiction entre les positions de nos deux hommes, l'admirateur naïf et le vieux métapolitologue disciple de JUlien Freund, a éclaté au grand jour dans un entretien filmé, sur Youtube,  entre notre cher Guillaume Faye et ce Daniel Conversano: ce dernier prononce le mot « Occident » avec trémolo dans la voix, Faye marque un très bref instant de silence et dit : « Moi, mais j’ai écrit un livre contre l’Occident ». Et l’autre, un peu perplexe malgré ses airs d’éternel rigolard fait: « Ah, bon ? ». Le malheur, c’est que Conversano et les millenials boutonneux qui le suivent comme s’il était un gourou hindou, n’ont jamais eu une vision complète de Faye, qui a été l’incarnation d’un militantisme ininterrompu de cinquante années : de ses dix-neuf ans, quand il arrive à Paris pour y étudier, à ses soixante-neuf ans, âge de son passage en l’autre monde et ce, malgré la parenthèse du showbiz où, en dépit du burlesque outrancier, le message qu'il cherchait à lancer demeurait parapolitique voire carrément politique. Sans procéder à une rétrospective bien étayé de l'itinéraire de Faye, sans une rétrospective chronologiquement fondée, on tombe alors dans les simplismes, que profèrent ceux que l’Education nationale française a abandonnés depuis près de quatre décennies. Ils ne peuvent hélas plus proférer autre chose que des simplismes.

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Le livre que vous avez ici entre les mains vise justement à réfuter l’image d’un Faye, réduit à une hostilité aux migrations non-européennes en Europe (hostilité qui était certes bien présente chez lui), à un adepte d’un occidentalisme qu’il a pourtant toujours âprement combattu et, partant, puisqu’il serait « occidentaliste », on fait parfois aussi de lui un fervent supporter de Zelensky (après les prestations de ce dernier dans le showbiz ukrainien…). Ce livre vise donc aussi à réfuter les légendes tenaces (et partiellement répandues par ses ennemis rabiques au sein du cœur de la mouvance dite de « nouvelle droite ») qui font de lui un « agent de la CIA » et un « sioniste » (jamais il n’a eu l’idée d’aller s’établir en « Terre Sainte » pour y attendre le retour du Christ ou du Messie). Ce livre a donc pour objectif de rétablir, dans l’esprit de ses futurs lecteurs, l’image du vrai Faye, celui qui anima le « Département Etudes & Recherches » du GRECE. Celui qui fut mon chef et que je n’abandonnerai jamais. Celui qui est présent, en pensées, à côté de moi quand je traduis sans relâche les articles de mes camarades du monde entier. Et que je les diffuse sur la « grande toile ».

Robert Steuckers, Forest-Flotzenberg, août 2025.

 

13:05 Publié dans Livre, Livre, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : nouvelle droite, guillaume faye, russie, livre | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 07 septembre 2025

Directive de Douguine: "Trump contribue à la formation d’un monde multipolaire, même contre sa volonté"

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Directive de Douguine: "Trump contribue à la formation d’un monde multipolaire, même contre sa volonté"

Alexandre Douguine

Après son accession au pouvoir, Trump aurait pu accepter la nouvelle réalité du monde et tenter de reconquérir une bonne position dominante pour les États-Unis dans un système devenu multipolaire. Au lieu de cela, Trump a choisi la voie de l’agression, et ce sont précisément ses actions — attaques contre la Chine, introduction de droits de douane élevés contre l’Inde, pression sur le Brésil et menaces contre les pays du BRICS, ainsi que la poursuite de l’agression américaine contre la Russie en Ukraine — qui accélèrent la création d’un monde multipolaire, a souligné le directeur de l’Institut Tsargrad, le philosophe Alexandre Douguine :

"Trump ne fait pas cela volontairement, mais sous la contrainte. En tentant de faire échouer la multipolarité et de préserver l’hégémonie américaine, il accélère en réalité sa consolidation".

L’importance du processus en cours ne réside pas seulement dans la rencontre entre Vladimir Poutine et Xi Jinping, rencontre qui symbolise à elle seule l’unité de deux grandes civilisations et puissances, mais aussi dans la présence lors du sommet de l’OCS du Premier ministre indien Narendra Modi, que Trump a profondément heurté par son comportement. À Pékin, lors du sommet de l’OCS, convergent en fait les trois pôles principaux du monde multipolaire: la Chine, la Russie et l’Inde.

Le destin de l’humanité dépendra de la capacité de ces trois pôles à parvenir à une compréhension mutuelle dans ces nouvelles conditions historiques, et non de ce que dit ou fait Trump. Sa mission est déjà accomplie dorénavant : il a poussé la Russie dans les bras de la Chine, et il y a aussi jeté son récent partenaire — l’Inde.

Ces trois grandes civilisations-États s’unissent maintenant. Leur potentiel combiné — économique, démographique, politique, géopolitique, en ressources et en capacités nucléaires — dépasse celui du monde occidental. Voilà la vraie multipolarité, elle était inattendue, mais elle est désormais la réalité.

L’Occident, qui voulait initialement bétonner un monde unipolaire avec l’OTAN pour pièce centrale, la calamiteuse Union européenne et son Israël idiot qui tente de faire valoir sa grandeur sur un petit coin du Moyen-Orient, se trouve face à un contrepoids eurasiatique de grande ampleur. Et personne n’y résistera. À cette nouvelle organisation multipolaire, incarnée par la Russie, la Chine et l’Inde, se joindra aussi le monde islamique — en premier lieu, les chiites d’Iran. Ceux qui hésitent perdront peu à peu toute pertinence, même au niveau régional. Trump voulait s’y opposer, mais il y a finalement contribué lui-même.

La prochaine visite de Vladimir Poutine en Chine, pour le sommet de l’OCS, n’est pas seulement une nouvelle rencontre avec Xi Jinping et Narendra Modi. La situation a changé. L’Occident n’a pas voulu accepter la multipolarité, ce qui signifie que cette multipolarité, désormais, « houspille » l’Occident dans les marges du monde et de l'histoire et le forcera à prendre sa place dans cette hiérarchie, qui ne sera plus en première ligne.

Trump a commencé avec le slogan « Rendons l’Amérique grande à nouveau », en promettant aussi la grandeur pour d’autres pays: faire en sorte qu'eux aussi puissent « redevenir grands ». Mais il n’a pas tenu cette mission, et il a basculé, et c'est navrant, dans une politique néoconservatrice, de mauvais aloi et de bas étage. En tentant de préserver l’hégémonie, il l’a en fait achevée et a transmis l’initiative aux trois pôles d'Eurasie.

Lors du sommet, se réunissent de véritables grandes puissances — la Russie, la Chine et l'Inde. Et c’est eux qui décideront du destin de l’humanité. Que cela plaise ou non, l’avenir appartient à Xi Jinping, à Modi et à Poutine. Ensemble, ils définiront la prochaine ère de l’humanité. Nous inscrivons dans cette nouvelle ère multipolaire nos propres visions. C’est là toute la signification de cette rencontre au sommet de l’OCS.

mardi, 02 septembre 2025

Les droits de douane de Trump - L'UE aurait dû prendre exemple sur l'Inde

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Les droits de douane de Trump

L'UE aurait dû prendre exemple sur l'Inde

Thomas Röper

Source: https://anti-spiegel.ru/2025/die-eu-haette-sich-ein-beisp...

Dans le conflit sur les droits de douane, l'UE a cédé devant Trump et a accepté un accord ruineux, que les médias et les politiciens célèbrent même, car cet accord aurait évité le pire. L'Inde voit les choses différemment et s'oppose aux exigences de Trump.

Fin juillet, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a capitulé sans raison devant le président américain et a accepté un accord ruineux pour l'UE, selon lequel les entreprises américaines peuvent vendre leurs marchandises en franchise de droits dans l'UE, tandis que la plupart des exportations de marchandises de l'UE vers les États-Unis seront désormais soumises à un droit de douane de 15%. Ursula von der Leyen a également promis à Trump d'acheter aux États-Unis pour 750 milliards de dollars de gaz liquéfié, de pétrole et de combustibles nucléaires d'ici la fin de son mandat. En outre, l'UE investira 600 milliards de dollars supplémentaires aux États-Unis dans les années à venir.

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La capitulation de l'UE devant Trump

Il s'agit là d'une capitulation totale de l'UE devant Trump, qui sera ruineuse pour l'économie européenne, déjà mise à mal par l'explosion des prix de l'énergie suite au refus du pétrole et du gaz russes. L'Allemagne est en récession depuis des années et les autres pays de l'UE ne se portent guère mieux. Les droits de douane et l'obligation d'acheter à l'avenir du pétrole et du gaz de fracturation hydraulique coûteux porteront un nouveau coup à l'économie.

Malgré cela, les médias allemands, prétendument si critiques, s'efforcent de minimiser la catastrophe. Le magazine Der Spiegel, par exemple, s'est une fois de plus complu dans son rôle de porte-parole de la Commission européenne et a publié le 24 août un article intitulé « Accord douanier entre l'UE et les États-Unis – Ursula von der Leyen se défend et parle d'un « accord solide, même s'il n'est pas parfait » avec Trump », dans lequel Der Spiegel reprenait sans aucune critique les propos d'Uschi von der Leyen. Cet article n'avait rien à voir avec du journalisme, il s'agissait plutôt de la publication d'un communiqué de presse de la Commission européenne.

Le 26 août, Der Spiegel a publié une chronique intitulée « Déclaration commune sur l'accord douanier – Un adieu à l'Occident », qui semblait certes un peu plus critique, mais qui, dans le fond, suivait également l'argumentation de la Commission européenne, car toutes les critiques exprimées dans la chronique à l'égard de l'accord ont été balayées dès le début de l'article par ces phrases:

« Certes, von der Leyen a raison de dire que les États membres de l'UE n'avaient guère d'autre choix que de céder à Trump en raison de leur faiblesse militaire et économique. Et il est également vrai que la confédération d'États a obtenu de meilleures conditions que des pays plus petits comme la Suisse ou la Malaisie. »

Il semble logique qu'une guerre commerciale avec les États-Unis aurait été pire pour l'UE que cet accord. Mais, dans le fond, c'est absurde, même si cela semble logique, or ça ne l'est pas. La raison en est que la guerre commerciale aurait touché les États-Unis aussi durement, voire plus durement, que l'UE.

Il ne faut pas oublier que l'UE, en tant qu'économie nationale mesurée en termes de PIB selon la parité de pouvoir d'achat (PPA), qui doit être utilisée pour comparer les économies nationales, est aussi grande que les États-Unis, car les deux ont un PIB légèrement supérieur à 29.000 milliards de dollars. L'UE aurait donc pu se montrer plus confiante, mais elle est un vassal des États-Unis qui doit dire « oui » à tout.

L'Inde montre comment faire

Selon la PPA, l'Inde a un PIB de 14.600 milliards de dollars, soit à peine la moitié de celui des États-Unis. Néanmoins, l'Inde ne s'est pas laissée intimider par Trump lorsqu'il a menacé fin juillet de déclencher une guerre commerciale avec des droits de douane punitifs de 25%, ce qui signifie un droit de douane total de 50 % sur les marchandises indiennes. Trump a lancé un ultimatum à l'Inde: soit elle cesse d'acheter du pétrole russe, soit elle sera sanctionnée par des droits de douane.

J'ai immédiatement supposé que l'Inde ne se laisserait pas intimider par Trump, car premièrement, le gouvernement indien est trop sûr de lui, deuxièmement, renoncer au pétrole russe nuirait davantage au pays que les droits de douane de Trump, troisièmement, parce qu'il mène délibérément une politique neutre et ne veut se laisser instrumentaliser par aucune grande puissance, et quatrièmement, parce qu'il aurait de gros problèmes avec les agriculteurs indiens s'il ouvrait le marché indien aux denrées alimentaires américaines, comme l'exige Trump.

Les droits de douane sont entrés en vigueur mercredi, l'Inde ne s'est pas laissée intimider par Trump. L'UE aurait pu s'en inspirer, car elle est économiquement beaucoup plus forte que l'Inde.

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Les déclarations faites ces derniers jours par l'Inde sont intéressantes. Samedi, le ministre indien des Affaires étrangères a déclaré que New Delhi avait fixé des limites claires dans les négociations commerciales en cours avec les États-Unis, malgré la menace de droits de douane punitifs pouvant atteindre 50 %. Il a insisté sur la protection des agriculteurs et des petits producteurs du pays. Il a également déclaré que l'incertitude croissante à l'échelle mondiale ramenait l'attention sur les « partenaires fiables et stables ». Nul besoin d'être devin pour comprendre qu'il faisait principalement référence à la Russie, avec laquelle les échanges commerciaux de l'Inde ne cessent d'augmenter à des conditions avantageuses pour les deux parties.

Fin juillet, Trump s'était exprimé de manière très désobligeante à l'égard de l'Inde et de son économie, qu'il avait qualifiée de « morte ». Comme Trump cherche également à se rapprocher du Pakistan, ennemi juré de l'Inde, le Premier ministre indien est manifestement en colère contre lui. Selon les médias, Trump aurait tenté à quatre reprises d'appeler le Premier ministre indien dans les derniers jours avant l'entrée en vigueur des droits de douane contre l'Inde, mais celui-ci n'aurait pas répondu à ses appels.

Cela montre également qu'il est tout à fait possible de montrer de la confiance en soi face à Trump et de ne pas tout accepter de lui, comme le font l'UE et ses États membres.

De plus, le ministre indien de la Défense a annulé un voyage aux États-Unis. Cela met en péril les commandes indiennes auprès des entreprises d'armement américaines, pour lesquelles les États-Unis se sont longtemps battus, car la Russie est traditionnellement le principal partenaire de l'Inde dans le domaine de l'armement.

On voit donc que tous les discours des politiciens européens et des médias allemands selon lesquels l'accord avec Trump n'est certes pas formidable, mais préférable à une guerre commerciale, sont absurdes. L'UE aurait pu tenter le coup, mais comme elle est – je me répète – un vassal des États-Unis, elle se laisse actuellement ruiner par Trump et le remercie même pour cela.

Pas étonnant que plus personne dans le monde ne prenne l'UE au sérieux...

Qui est Thomas Röper?

Thomas Röper, né en 1971, est un expert de l'Europe de l'Est qui a occupé des postes de direction et de conseil d'administration dans des sociétés de services financiers en Europe de l'Est et en Russie. Il vit aujourd'hui à Saint-Pétersbourg, sa ville d'adoption. Il réside en Russie depuis plus de 15 ans et parle couramment le russe. Son travail critique des médias se concentre sur l'image (médiatique) de la Russie en Allemagne, la critique de la couverture médiatique occidentale en général et les thèmes de la politique (géopolitique) et de l'économie.

vendredi, 29 août 2025

Les véritables enjeux du sommet en Alaska

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Les véritables enjeux du sommet en Alaska

par Clara Statello

Source: https://www.sinistrainrete.info/articoli-brevi/31073-clara-statello-la-vera-posta-in-gioco-del-vertice-in-alaska.html

Le sommet crucial en Alaska : un duel entre la Russie et les États-Unis. L'Ukraine et l'UE restent en retrait

Les négociations de paix pour l'Ukraine s'avèrent être un duel entre les États-Unis et la Fédération de Russie, qui ont décidé vendredi 15 août en Alaska du sort des territoires sous contrôle russe, ainsi que des questions de coopération stratégique et de division des zones d'influence. L'Union européenne et l'Ukraine sont restées en retrait.

Alors que l'Europe s'inquiète de plus en plus que la Maison Blanche et le Kremlin puissent s'entendre pour mettre fin à la guerre prolongée, en contournant Kiev, Zelensky rejette le plan de Trump visant à reconnaître le Donbass russe.

Il accepte un cessez-le-feu avec le gel de la ligne de front actuelle, dans le cadre du plan européen, qui prévoit un cessez-le-feu avant toute autre initiative, le retrait des troupes selon le principe « territoire pour territoire » et des garanties de sécurité, y compris l'adhésion à l'OTAN.

Kiev dit donc "non" à une reconnaissance de jure, mais s'ouvre à une reconnaissance de facto.

Il s'agit tout de même d'un progrès dans les négociations, d'un « assouplissement de la position » ukrainienne, écrit le Telegraph. Zelensky bénéficie du soutien de ses partenaires européens et de l'OTAN, grâce auxquels l'Ukraine acquerra un pouvoir de négociation.

Entre-temps, dans la presse occidentale, l'idée commence à s'imposer que la position de Kiev de refuser toute concession territoriale est irréaliste. Selon le commentateur du Financial Times, Gideon Rachman, la reconnaissance de facto des territoires sous contrôle russe pourrait être nécessaire si elle garantit que « l'Ukraine parviendra à maintenir son indépendance et sa démocratie ».

« ... certaines concessions territoriales de facto peuvent être douloureuses, mais acceptables ».

Pourquoi Zelensky a-t-il changé d'avis ?

Deux facteurs ont contribué à adoucir la position de Kiev :

La crainte qu'un refus de Zelensky à Trump n'entraîne l'arrêt de l'aide militaire et du renseignement, comme cela s'est déjà produit en février, après « l'incident » dans le bureau ovale.

Le consensus croissant de l'opinion publique en faveur d'une fin négociée et immédiate de la guerre.

Selon un sondage Gallupp réalisé début juillet et publié la semaine dernière, 69 % des Ukrainiens se sont déclarés favorables à une fin négociée de la guerre dès que possible, contre 24 % qui souhaitent continuer à se battre jusqu'à la victoire.

En outre, en se montrant ouverts au plan de Trump, les pays européens et l'Ukraine espèrent être impliqués dans les négociations afin d'accroître le poids de l'Occident dans les négociations.

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L'UE cherche sa place à la table des négociations

Selon un adage diplomatique bien connu, si vous n'êtes pas assis à la table, vous êtes au menu. De plus en plus écartée du jeu, l'Union européenne tente de se faire une place à la table des négociations. Elle a donc publié une déclaration dans laquelle elle exhorte Trump à prendre en compte les intérêts de l'Europe et de l'Ukraine dans les négociations avec Poutine.

Elle souligne le droit du peuple ukrainien à déterminer son avenir de manière autonome, ainsi que la nécessité d'une solution diplomatique à la guerre qui protège les intérêts ukrainiens et européens.

« Des négociations constructives ne peuvent avoir lieu que dans le contexte d'un cessez-le-feu ou d'une réduction des activités militaires », peut-on lire dans la déclaration. La Hongrie n'a pas soutenu cette déclaration.

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Le bras de fer entre Kallas et Dmitriev

Kaya Kallas, dans un post sur X, a réaffirmé l'unité transatlantique, le soutien à l'Ukraine et la pression sur la Russie comme moyen de mettre fin à cette guerre et d'en prévenir une autre.

La réponse du représentant spécial de Poutine, Kirill Dmitriev, qui dirige les aspects économiques et de coopération des négociations entre la Russie et les États-Unis, ne s'est pas fait attendre. Il a rappelé que le conflit se résout par le dialogue et que la sécurité se renforce par la résolution des problèmes grâce à la coopération, tandis que ceux qui continuent à suivre les discours de Biden échoueront.

Le haut représentant pour la politique étrangère européenne a ajouté que l'UE se préparait à exercer une pression accrue sur la Russie avec davantage de sanctions et d'armes, annonçant la préparation d'un 19ème paquet de sanctions contre la Russie.

Le plan de Trump

L'Union européenne n'a pas l'intention de discuter de concessions territoriales tant que la Russie n'aura pas accepté un cessez-le-feu complet et inconditionnel. Le président Trump, en revanche, entend trouver un accord pour mettre fin aux combats, qui inclurait un échange de territoires entre Moscou et Kiev.

Les États-Unis tenteront de fixer les frontières des Républiques populaires du Donbass sur la ligne de front actuelle, qui servira également de ligne de démarcation pour geler la guerre sur les territoires qui ne feront pas l'objet d'un échange et qui bénéficieront d'une reconnaissance de facto.

Toutefois, Trump reste prudent et prévient que cette rencontre avec Poutine ne sera que préliminaire, afin de demander la fin de la guerre et d'établir un dialogue constructif.

Le chef du Pentagone, Pete Hegseth, a confirmé que l'échange de territoires sera une question clé du sommet en Alaska.

« Au cours des négociations, il pourrait y avoir des échanges territoriaux, il y aura des concessions. Personne ne sera satisfait », a-t-il déclaré à Fox, assurant que Trump n'offrira pas une victoire totale à Poutine.

Le réarmement « historique » de l'UE

Alors que les États-Unis entendent mettre un terme au scénario ukrainien, ou du moins se retirer, l'UE se prépare à la guerre avec la Russie.

C'est ce qui ressort d'une enquête du Financial Times, qui montre que l'Europe est en train de vivre un réarmement sans précédent : les usines d'armement se développent à un rythme trois fois supérieur à celui de l'époque de paix, avec 7 millions de mètres carrés de nouveaux développements industriels.

L'étude est basée sur une analyse des données satellitaires relatives à 150 installations et 37 entreprises produisant des missiles et des munitions, « deux goulets d'étranglement dans le soutien occidental à l'Ukraine ».

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Parmi les installations qui connaissent la plus forte expansion figure un projet conjoint du géant allemand Rheinmetall et de la société d'État hongroise de défense N7 holding, visant à construire une grande usine de production de munitions et d'explosifs à Varpalota, dans l'ouest de la Hongrie.

«L'ampleur et l'étendue des travaux constatés suggèrent un changement générationnel dans le réarmement, qui a conduit l'Europe de la production "juste à temps" en temps de paix à la construction d'une base industrielle pour une situation de guerre plus durable », écrit le FT.

L'UE n'a donc pas l'intention de lâcher prise, mais entend plutôt poursuivre sa guerre contre la Fédération de Russie jusqu'à la dernière goutte de sang du dernier Ukrainien. Dans cette perspective, on peut craindre que le sommet du vendredi 15 août entre Poutine et Trump n'a servi qu'à établir un retrait des États-Unis de la guerre afin d'entamer de nouvelles relations avec la Fédération de Russie, un partenaire indispensable pour dialoguer avec Pékin, Téhéran et d'autres challengers de Washington.

Mais la machine à broyer ukrainienne continuera à faire des ravages avec cette guerre soutenue par les États européens et l'OTAN.

jeudi, 28 août 2025

La chute de l'Arménie et le «corridor Trump»

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La chute de l'Arménie et le «corridor Trump»

Leonid Savin

La signature de l'accord de paix entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, qui a eu lieu à Washington le 8 août 2025 en présence du président américain Donald Trump, marque la victoire des forces mondialistes en Eurasie. Malgré le ton modérément positif des déclarations des dirigeants russes sur l'importance de cet accord, attendu depuis de nombreuses années, il convient de noter que Moscou avait auparavant imaginé un scénario complètement différent.

Tout d'abord, il y avait le Groupe de Minsk de l'OSCE, qui était médiateur et observateur du règlement des litiges entre les républiques caucasiennes. Ensuite, il y avait le plan Lavrov, qui prévoyait la restitution d'un certain nombre de localités à l'Azerbaïdjan, après quoi un traité de paix devait être signé et les frontières délimitées. Bakou était prêt à accepter cette option, mais Nikola Pashinyan, l'homme de main de Soros, a saboté ce processus.

En conséquence, Ilham Aliyev, tenant compte de l'opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine, ainsi que de l'implication militaire de la Russie en Syrie, a décidé de mener une campagne militaire contre le Haut-Karabakh et l'Arménie, qui s'est avérée fructueuse. Les forces de maintien de la paix russes ont été retirées de la région (après avoir subi des pertes à la suite des tirs de l'armée azerbaïdjanaise).

Troisièmement, la signature de l'accord à Washington a eu lieu dans un contexte de détérioration des relations entre la Russie, d'une part, et l'Azerbaïdjan et l'Arménie, d'autre part. Le premier soutient activement l'Ukraine, développe sa coopération avec l'OTAN et mène des campagnes de répression contre les russophiles à l'intérieur du pays. Quant aux autorités du second, elles menacent ouvertement de se retirer de l'OTSC (Organisation du traité de sécurité collective) et de l'UEE (Union économique eurasienne), laissant entendre un possible renforcement de la coopération avec les États membres de l'UE et les États-Unis (ce qui, en fait, est en train de se produire).

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Il convient de noter que la rencontre des chefs des trois États aux États-Unis s'est déroulée dans une atmosphère pompeuse. Aliyev et Pashinyan ont tous deux fait l'éloge de Donald Trump, soulignant la nécessité de sa nomination au prix Nobel de la paix. Dans le même temps, Trump lui-même a indiqué qu'il souhaitait organiser la signature d'un accord similaire entre la Russie et l'Ukraine, insistant ainsi sur son importance exceptionnelle.

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Au-delà de cela, Pashinyan a offert à Trump un manuscrit arménien ancien et unique, représentant l'une des plus anciennes copies du livre de prières mondialement connu de Grigor Narekatsi, « Le Livre des Lamentations » (Xème-XIème siècles après J.-C.). On ne sait pas pourquoi Trump, qui est évangélique de confession religieuse, a besoin de ce trésor culturel de l'Église apostolique arménienne. Mais cette décision de Pashinyan a déjà suscité l'indignation des Arméniens. Sur le plan symbolique, voire métaphysique, un tel geste de la part du Premier ministre arménien signifie une renonciation volontaire à la souveraineté, qui se manifeste non seulement dans les décisions politiques, mais aussi dans les codes métaculturels.

L'un des points clés de l'accord entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan est le corridor de Zangezur, une section terrestre d'environ 50 km de long reliant l'enclave azerbaïdjanaise de la République autonome du Nakhitchevan et l'Azerbaïdjan continental, qui traverse le territoire de la région de Syunik en Arménie. L'exploitation et la gestion du corridor ont été transférées aux États-Unis, officiellement dans le cadre d'un bail de 99 ans. Des sociétés militaires privées américaines devront assurer la sécurité dans ce corridor. Cette section a déjà été baptisée « corridor Trump » (son nom officiel est toutefois « Trump Route For International Peace and Prosperity » (TRIPP)).

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Compte tenu de l'étroite coopération entre la Turquie et l'Azerbaïdjan, on peut tout aussi bien parler de la création d'un corridor turc. Ankara, via l'Arménie et l'Azerbaïdjan, accède ainsi aux pays d'Asie centrale, qui font partie du système de l'Organisation des États turcs (OTS), un projet pan-turc aux objectifs flous et aux formulations vagues. Il ne fait aucun doute que la Turquie d'Erdogan se précipitera pour profiter de cette nouvelle opportunité et poursuivra son expansion culturelle, économique et politique dans le Caucase et à travers lui.

Il va sans dire que l'émergence d'un tel format de corridor de transport, légalement lié aux États-Unis, porte atteinte aux intérêts de la Russie et des autres acteurs du Caucase, en particulier l'Iran. Auparavant, les autorités de ce pays avaient réagi de manière critique à la participation éventuelle d'une tierce partie à l'exploitation du corridor de Zangezur, qu'il s'agisse de la Turquie ou de tout autre pays. Mais avec l'arrivée des États-Unis, Téhéran considère cela non seulement comme un signal d'alarme, mais aussi comme une menace claire.

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Le brigadier général Yadollah Javani (photo), commandant adjoint chargé des affaires politiques du Corps des gardiens de la révolution islamique, a déclaré, à propos de la signature de l'accord entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, qu'ils avaient commis une « erreur bien plus grave » que Zelensky. Il ne s'agit pas d'un traité de paix en soi, mais du transfert du corridor de Zangezur aux États-Unis pour une durée de 99 ans. Il est évident que cette zone terrestre adjacente à la frontière iranienne sera utilisée non seulement pour la circulation des civils et des marchandises, mais aussi à des fins militaires et de renseignement. Tout d'abord, contre l'Iran.

L'Azerbaïdjan coopère depuis longtemps avec Israël sur cette question (lors du dernier conflit militaire entre Israël et l'Iran, l'ajustement des tirs a également été effectué depuis le territoire de l'Azerbaïdjan). Javani a promis d'empêcher la mise en œuvre de ce projet par la force des armes. Cependant, les affrontements précédents avec les États-Unis et Israël ont montré que l'Iran dispose en réalité de capacités limitées, même s'il fait des déclarations assez sérieuses et bruyantes au niveau officiel. Compte tenu du retrait de l'Iran de Syrie, ainsi que des difficultés au Liban et en Palestine, Téhéran disposera désormais d'encore moins d'outils pour mener sa propre politique dans la région.

Quant à la Russie, l'hostilité croissante de l'Azerbaïdjan est également source de préoccupation. La République d'Azerbaïdjan a une frontière directe avec la Fédération de Russie. En outre, l'Azerbaïdjan a participé au corridor de transport nord-sud et il était prévu qu'une ligne secondaire terrestre le traverse. Si les relations entre l'Azerbaïdjan, la Russie et l'Iran se compliquent, Bakou bloquera tout simplement cette ligne. Il ne restera alors que l'option d'une voie navigable à travers la mer Caspienne. Cependant, en raison de la capacité limitée des infrastructures portuaires sur les côtes iraniennes et russes, cette direction ne permettra pas d'assurer le transit de volumes importants de marchandises.

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En outre, la sécurité globale dans le Caucase sera soumise à une érosion plus sévère. Les agents des services de renseignement turcs et britanniques sont déjà très actifs dans cette région. Au-delà de cela, des émissaires religieux des pays du golfe Persique y travaillent depuis longtemps, engagés dans la diffusion de valeurs étrangères aux peuples du Caucase, bien que sous le couvert d'une culture musulmane commune. Cela augmentera le risque de conflits intra-religieux et inter-religieux.

Les dirigeants actuels de l'Arménie et de l'Azerbaïdjan, quant à eux, présenteront chacun l'accord signé comme le meilleur scénario possible, avec des plans ambitieux de développement économique: création de nouveaux pôles, investissements étrangers, etc. Il est logique de supposer que les pays de l'UE ne coopéreront pas avec la Russie pendant longtemps et que la zone du Caucase sera utilisée comme voie de transit entre la Chine et d'autres pays asiatiques vers l'Europe. Dans cette perspective, la Géorgie, qui tente d'équilibrer les intérêts des différents pays, mais ne se laisse pas entraîner dans des aventures politiques et développe ses propres infrastructures de transit, se rapprochera progressivement de l'Occident, voyant les avantages de sa position géostratégique et s'appropriant une partie des flux de marchandises et de ressources énergétiques.

À long terme, on peut donc noter que l'accord actuel entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan dans le contexte géopolitique mondial va à l'encontre des intérêts de la Russie.

Directive de Douguine: « Il ne fait aucun doute que la rencontre en Alaska est un immense succès pour notre diplomatie »

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Directive de Douguine: « Il ne fait aucun doute que la rencontre en Alaska est un immense succès pour notre diplomatie »

Alexandre Douguine

Même le fait que le déjeuner n'ait pas eu lieu est, selon moi, une étape prévue qui confirme le sérieux de nos exigences en matière de défense des intérêts nationaux et des intérêts relatifs à notre sécurité. C'est là, à mon avis, que réside le principal succès.

Le simple fait que la rencontre ait eu lieu est déjà une victoire. La Russie a brisé son isolement et a été reconnue comme une grande puissance par Trump. Quant aux réelles conditions de paixs qui ont été discutées, je n'en sais rien. Et c'est tant mieux, car sinon, il y aurait eu beaucoup de spéculations et d'interprétations divergentes.

Si Trump parvient à un accord avec les dirigeants mondialistes de l'UE et Zelensky, nous connaîtrons les conditions d'un accord et nous pourrons les évaluer. S'il n'y a pas d'accord, peu importe les conditions qui ont été discutées, tout continuera comme avant. La seule question est de savoir si Trump, comme Biden, participera au conflit aux côtés de l'Ukraine ou s'il s'en retirera. Nous savons que la rencontre en Alaska a été un succès diplomatique. Mais au-delà, c'est l'incertitude totale. La seule certitude, c'est que nous avons fait part à Trump de nos conditions pour mettre fin au conflit, et c'est tout. Nous avons exprimé ce que nous considérons comme nos intérêts nationaux, et maintenant Trump, qui souhaite clairement mettre fin au conflit, va comparer cela avec les positions des autres parties prenantes.

Nous verrons dans quelle mesure Trump est souverain par rapport à l'UE, dans quelle mesure il est indépendant de l'« État profond » (Deep State) et des néoconservateurs, qui proposent, eux, d'intensifier la pression militaire. Dans quelle mesure s'est-il éloigné du mouvement MAGA (Make America Great Again), qui était le pilier de son pouvoir et l'expression populaire de son idéologie, dans le cadre duquel il aurait dû depuis longtemps opter pour la désescalade et cesser de soutenir l'Ukraine, mais il ne l'a pas fait. Cela indique qu'il s'est éloigné du mouvement MAGA (comme dans sa position sur le Moyen-Orient et dans son refus de publier des éléments du dossier Epstein). Mais en général, il y a actuellement trop d'incertitudes pour faire des prévisions.

Il faut toutefois comprendre qu'il y a actuellement plus de personnes qui veulent nous combattre en Occident que de personnes qui veulent la paix. Je veux parler ici de l'UE, du régime nazi ukrainien, du Parti démocrate américain, des néo-conservateurs du Parti républicain et de tout le Deep State américain. D'un autre côté, il y a ceux qui ne veulent pas nous combattre. Il s'agit du mouvement MAGA et, apparemment, de Trump lui-même, qui souhaite jouer le rôle de pacificateur et obtenir le prix Nobel de la paix. Mais qui l'emportera ? Les ambitions personnelles de Trump et l'influence affaiblie du mouvement MAGA, ou le Parti démocrate, qui contrôle la quasi-totalité de la presse occidentale, l'État profond, qui supervise les deux partis, le noyau néoconservateur du Parti républicain, ainsi que l'UE avec Zelensky ?

Le rapport de forces est inégal. Je pense que le « parti de la guerre » en Occident l'emporte actuellement sur le « parti de la paix ». Nous devons donc être prêts à toute issue. Le plus important est de défendre nos intérêts, de ne jamais abandonner et de ne pas faire confiance à l'Occident. Même s'il existe des forces qui nous sont idéologiquement proches, comme le mouvement MAGA, nous constatons qu'elles sont elles-mêmes isolées et ne peuvent jouer un rôle déterminant.

Au cours des six derniers mois, la coalition MAGA, composée de personnalités très intéressantes (Elon Musk, Stephen Bannon, Tucker Carlson, Candace Owens, Alex Jones, Marjorie Taylor Greene, Thomas Massie), s'est séparée de Trump. C'est pourquoi nous devons nous concentrer sur nous-mêmes, ne pas nous faire d'illusions, faire confiance à notre président et nous préparer à une longue guerre. Même si nous nous arrêtons maintenant, la guerre nous rattrapera. Il semble que la guerre soit notre destin. Mais cela a toujours été le cas dans notre histoire.

mardi, 26 août 2025

L'importance de la rencontre Poutine/Trump en Alaska

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L'importance de la rencontre Poutine/Trump en Alaska

Alex Krainer

Le vendredi 15 août, Donald Trump et Vladimir Poutine se sont rencontré en Alaska. Le choix de ce lieu a envoyé un message très encourageant au monde entier.

Source: https://alexkrainer.substack.com/p/the-significance-of-alaska

Mise à jour [12 août 2025] : J'ai établi la chronologie du projet visant à relier les États-Unis et la Russie à travers le détroit de Béring à partir du Substack de Matthew Ehret (lien ci-dessous), mais j'ai omis de mentionner l'économiste visionnaire et candidat à la présidence Lyndon LaRouche, qui a conceptualisé le projet dès les années 1980 et « fait du programme du détroit de Béring le centre de sa stratégie internationale » dès 1993. Pour en savoir plus, cliquez sur ce lien: https://x.com/CHahnT/status/1955161957297733710.

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La semaine dernière, j'ai eu le privilège de m'entretenir avec un auteur et géostratège chevronné, l'amiral Davor Domazet, que j'ai mentionné ici le mois dernier dans « La défaite de la stratégie du chaos de l'Occident » (https://trendcompass.substack.com/p/defeat-of-the-wests-strategy-of-chaos). Alors que nous discutions des événements géopolitiques en cours, le sommet entre le président américain Trump et son homologue russe venait d'être annoncé.

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L'amiral Domazet (photo) a déclaré que le choix du lieu du sommet serait extrêmement important et qu'il constituerait en soi un message adressé au monde entier. Il n'était sûr que d'une chose : ce ne serait pas en Europe occidentale.

Nous n'avions pas deviné que ce serait l'Alaska, mais une fois ce choix annoncé, cela nous a paru tout à fait logique. Cela envoie un message très important : la Russie et les États-Unis se rapprochent dans la paix, achevant ainsi un cycle historique important mais interrompu. J'y ai fait allusion dans un article que j'ai rédigé en février de cette année : https://alexkrainer.substack.com/p/is-a-grand-bargain-between-us-and

L'histoire inachevée

L'Alaska est l'endroit où les États-Unis sont limitrophes de la Russie et où les deux puissances peuvent et doivent se rapprocher. Comme Matthew Ehret l'a superbement résumé dans son récent article Substack (https://matthewehret.substack.com/p/will-upcoming-putin-trump-summit ), l'idée de relier physiquement les États-Unis et la Russie à travers le détroit de Béring est une idée ancienne, car elle est assez évidente. Elle a été avancée pour la première fois sous la présidence d'Abraham Lincoln en 1864, mais elle est malheureusement morte avec lui. Elle a été relancée en 1890 par William Gilpin, ancien gouverneur du Colorado, sous la forme de son projet « Cosmopolitan Rail », qui prévoyait la construction d'un tunnel sous le détroit de Béring.

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L'importance de ce projet n'a pas échappé au gouvernement russe sous le tsar Nicolas II et à son ministre des Finances, Sergei Witte, qui ont engagé en 1905 plusieurs ingénieurs ferroviaires américains et français pour réaliser des études de faisabilité. Malheureusement, le tsar a rapidement été contraint d'abdiquer, son Premier ministre a été assassiné et le projet n'a jamais vu le jour.

La paix future

Il fut relancé sous l'administration de Franklin Delano Roosevelt et discuté en 1942 par son vice-président Henry Wallace et le ministre des Affaires étrangères de Staline, Molotov. Wallace a exprimé ainsi l'importance de relier physiquement les États-Unis à la Russie :

« Il serait très important pour la paix future qu'il existe un lien tangible de ce type entre l'esprit pionnier de notre propre Ouest et l'esprit frontalier de l'Est russe. »

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Cependant, Wallace (photo) fut rapidement écarté et remplacé par Harry Truman, l'instrument aveugle de l'oligarchie britannique. Une fois FDR mort, le projet fut à nouveau relégué aux oubliettes : relier les deux superpuissances, que ce soit physiquement, politiquement, socialement, culturellement ou commercialement, tomba en disgrâce.

Dans son discours sur le « rideau de fer » en 1946, Winston Churchill déclara l'Union soviétique ennemie de l'Occident. Il prononça ce discours devant Harry Truman et, au lieu de cultiver une coopération productive entre les États-Unis et la Russie, l'Occident opta pour la guerre froide.

Le soleil brille déjà différemment

L'idée de rapprocher les deux puissances et les deux continents n'est cependant jamais morte, et les dirigeants actuels de la Russie et des États-Unis sont clairement désireux de la faire revivre. En 2008, le Premier ministre de l'époque, Vladimir Poutine, a approuvé le projet de construction d'une ligne ferroviaire vers le détroit de Béring dans le cadre du plan de développement des infrastructures de la Russie à l'horizon 2030. Ce projet prévoyait la construction d'un tunnel de 60 miles (près de 100 km) entre Tchoukotka, dans l'Extrême-Orient russe, et l'Alaska, pour lequel la Russie proposait de financer les deux tiers du coût total.

La Russie a proposé ce projet à ses « partenaires occidentaux » en 2011 et en mai 2014, mais à l'époque, l'Occident dans son ensemble avait des projets tout à fait différents concernant la Russie. Aujourd'hui, ces projets ont tous échoué et le peuple américain a voté pour un changement radical de cap en élisant Donald Trump à la Maison Blanche.

Reste à voir si l'administration Trump réussira à mener à bien ce changement de cap, mais la volonté du peuple américain, exprimée lors de trois élections présidentielles consécutives, donne un nouvel espoir au monde. Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, a exprimé cet espoir après la deuxième investiture de Trump en janvier, en déclarant que « le soleil brille déjà différemment ».

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Pour sa part, le président Trump nous a donné quelques indications de son intérêt pour le raccordement ferroviaire de l'Alaska au continent lorsqu'il a annoncé, en septembre 2020, son approbation du projet de liaison ferroviaire de 2579 kilomètres entre l'Alaska et l'Alberta (A2A).

Le projet A2A était une initiative privée qui a finalement échoué, apparemment en raison d'une mauvaise gestion, mais en soulignant son approbation du projet, Trump nous a donné une indication de ses intentions, qui ont peut-être influencé l'accord entre la Russie et les États-Unis pour tenir le sommet imminent entre les deux pays en Alaska. Le message derrière ce choix est indéniablement celui de la paix, de la construction de ponts de confiance, de respect mutuel et de coopération constructive.

Il est important de noter qu'en accueillant Vladimir Poutine sur le territoire américain, l'administration Trump signale qu'elle ne reconnaît pas la condamnation de Poutine comme criminel de guerre par le tribunal de La Haye. Ce faisant, elle légitime l'opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine.

* * *

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La question du Canada

Incidemment, la connexion entre la Russie et l'Alaska et entre l'Alaska et le continent américain pourrait également être liée à l'intention déclarée de Trump d'absorber certaines parties du Canada dans les États-Unis. Si l'Alberta, la Colombie-Britannique et le Yukon devenaient partie intégrante des États-Unis, leur territoire serait relié à l'Alaska, créant ainsi un pont terrestre contigu vers la Russie.

Si les États-Unis annexaient également les territoires nordiques du Canada et le Nunavut, ils pourraient se relier territorialement au Groenland et partager la zone arctique avec la Russie afin de rejoindre le projet de la Route de la soie arctique. En février, j'écrivais ce qui suit :

Ces développements pourraient-ils faire l'objet d'un futur accord majeur entre Vladimir Poutine et Donald Trump ? Je pense que c'est possible. Du point de vue actuel, tout cela peut sembler être un changement radical et dangereux par rapport au statu quo d'après-guerre, mais ce statu quo n'était peut-être qu'une pause dans les processus géopolitiques qui ont commencé à se dessiner dès le 19ème siècle.

Nous le saurons peut-être dans quelques jours. Il est certain que si les deux dirigeants ont déjà convenu de se rencontrer, une sorte de grand accord a déjà été conclu entre leurs représentants respectifs. Nous en saurons bientôt plus, notamment grâce à la manière dont les dirigeants canadiens, britanniques et européens qualifieront les résultats du sommet très attendu de cette semaine en Alaska.

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La signification du 15 août

La date du sommet, le 15 août 2025, est également significative à plusieurs égards. Le 15 août 1971, Richard Nixon a temporairement (bien sûr) suspendu la convertibilité du dollar américain en or. Le 15 août 1945 a été une date charnière dans l'histoire de la Chine : elle a marqué la capitulation du Japon devant les Alliés, mettant fin à la guerre de résistance contre le Japon.

Le 15 août revêt une profonde signification religieuse pour les chrétiens catholiques et orthodoxes, car c'est le jour de la fête de l'Assomption (ou Dormition dans la tradition orthodoxe), qui commémore la croyance selon laquelle la Vierge Marie, mère de Jésus, a été élevée corps et âme au ciel à la fin de sa vie terrestre.

samedi, 23 août 2025

Le sacrifice de Darya Douguina: le chaînon doré qui unit notre « ordre de chevalerie »

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Le sacrifice de Darya Douguina: le chaînon doré qui unit notre «ordre de chevalerie»

Raphael Machado

Il y a trois ans, Darya Douguina était assassinée, sa vie emportée par les flammes lors d'un attentat terroriste organisé par l'Ukraine en collaboration avec les agences de renseignement occidentales.

À l'époque, elle jouait un rôle important dans le journalisme d'investigation russe, se penchant sur des sujets dangereux impliquant les liens entre les élites occidentales et certains intérêts obscurs. Mais au-delà de cela, elle était une philosophe néoplatonicienne et une militante pour l'eurasisme, le traditionalisme et le patriotisme russe.

Elle n'était pas exactement une « bourgeoise ». Et il serait honteux de la traiter comme si elle n'avait « rien à voir avec cela ». Au contraire, elle était une combattante spirituelle et intellectuelle dans la guerre que les peuples du monde mènent contre les élites mondialistes occidentales et leurs armées de zombies.

Elle était donc une camarade.

Certains détracteurs nous demandent « pourquoi » nous nous souvenons toujours et exaltons la mémoire de Darya Douguina. Pour eux, il semble « ridicule » que des « Brésiliens » se souviennent d'une « Russe » qui est morte « à l'autre bout du monde ». Ce sont des zombies et des golems cyniques, ce sont des hommes-bêtes, et Yukio Mishima a déjà dit ce qu'il fallait dire à propos de ces gens: « Le cynisme qui considère le culte des héros comme ridicule s'accompagne toujours d'un sentiment d'infériorité physique ». Ceux qui sont dans la boue, dans le marigot, essaieront toujours de tout ramener à leur propre niveau.

La « camaraderie » n'est pas une « amitié », car ce n'est pas un sentiment. Ce n'est pas non plus une simple « concordance politique », car elle n'est pas rationnelle. La camaraderie est un lien de synchronie spirituelle qui unit, par un chaînon doré, tous ceux qui luttent dans la même guerre éternelle et planétaire des forces de la Tradition contre les forces parasitaires de la Modernité.

En ce sens, elle est le fondement d'une « Patrie spirituelle » dont les « ressortissants » sont comme un « ordre de chevalerie » invisible, menant une guerre désespérée contre l'avancée des forces souterraines.

L'éthique de cette « Patrie » et de cet « ordre » est folie et délire pour les hommes-bêtes. C'est une éthique de sacrifice, de dévouement et de fanatisme, où les menaces de mort, le chantage économique, les promesses de récompense, la répression juridique et policière n'ont absolument aucune signification. Où chaque coup subi est un honneur, car il indique que nous sommes sur la bonne voie ; où chaque désagrément causé par l'ennemi renforce le fanatisme ; où la mort dans l'accomplissement du devoir révolutionnaire est toujours glorieuse et sert à couronner d'une auréole dorée et auguste le camarade devenu héros.

C'est en ce sens que nous ne nous souvenons pas de Darya avec un « regret pour une victime de la violence », mais au contraire, nous célébrons sa mémoire et voyons sa mort comme l'apothéose d'une camarade. Nous appartenons à un « monde » différent du monde bourgeois, où le « Valhalla » est espoir et désir, et non peur, et où nous nous souvenons de chaque camarade monté vers l'empyrée en lui portant un toast.

Bien sûr, elle n'est pas la première camarade à mourir. Tant au Brésil que dans d'autres endroits où nous sommes présents, nous avons nos « mémoriaux » de camarades tombés au combat. Mais la mort de Darya Douguina est néanmoins significative et marque un tournant.

Elle est particulièrement significative car elle s'inscrit dans le cadre d'une guerre ouverte où la dualité Tradition/Modernité s'est finalement réincarnée de manière absolue dans la géopolitique, avec l'affrontement entre l'Axe contre-hégémonique, dirigé par la Russie, et l'OTAN, dirigée par les États-Unis. Ce n'est pas une guerre comme les autres, ce n'est pas une guerre pour des intérêts économiques, des actions en bourse ou toute autre futilité du genre, c'est la guerre fondamentale, celle qui va inaugurer une nouvelle période ou, tout simplement, nous plonger dans l'esclavage.

Elle est également significative par le symbolisme profond de la mort : une jeune fille guerrière et philosophe, tout à la fois, et dotée d'une profonde conscience spirituelle et animée d'un patriotisme inébranlable, engloutie par les flammes (et pourtant, son corps est resté presque intact, comme nous l'avons vu lors du rituel funéraire !). Elle fait immédiatement penser à Jeanne d'Arc, par exemple.

Dans le type de lutte que nous menons, les martyres féminines sont beaucoup plus rares que les martyrs masculins. Et, pour cette raison même, infiniment plus précieuses. Elles sont si rares qu'elles nous font presque croire qu'il s'agissait davantage d'un ange ou d'une émissaire des dieux que d'une personne ordinaire. Rappelons ici le rôle de la projection extérieure de la « demoiselle intérieure » dans les mythes et les rites de la chevalerie médiévale, ou les Valkyries scandinaves et les fravashis perses, toutes des « esprits féminins » liés aux « ordres » des héros guerriers.

Il y a donc dans le sacrifice de Darya Douguina un mystère qui se rattache à ces symboles anciens et qui consacre, par son sang, cette lutte menée à l'échelle internationale contre les ennemis des peuples.

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Naturellement, pour le professeur Aleksandr Douguine, tout cela est encore plus profond et viscéral. Car elle était aussi sa chair et son sang. Son sang, qui a été versé, était aussi le sien et c'est aussi une partie de lui qui est morte avec Darya Douguina.

Et pourtant, ce que nous voyons chez Douguine depuis deux ans, c'est un dévouement encore plus grand et plus fanatique à la cause pour laquelle il se bat et se sacrifie depuis des décennies. En ce sens, c'est un honneur de partager les mêmes tranchées qu'un homme aussi noble.

Non seulement en Russie, mais aussi du Brésil au Japon, de l'Italie au Pérou, de l'Argentine à la Turquie, de la France à l'Iran, du Venezuela à la Chine, nous nous souvenons aujourd'hui de Darya Douguina et nous gardons son souvenir vivant, afin qu'elle continue à nous inspirer et à nous donner du courage dans notre lutte conservatrice-révolutionnaire mondiale.

Darya Douguina,

PRÉSENT !

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jeudi, 21 août 2025

Deux mondes s'affrontent: les États-Unis assouplissent leurs sanctions, l'UE les renforce

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Deux mondes s'affrontent: les États-Unis assouplissent leurs sanctions, l'UE les renforce

Source: https://unzensuriert.de/306897-zwei-welten-treffen-aufein...

Alors que les préparatifs du sommet entre le président américain Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine sur la guerre en Ukraine battent leur plein en Alaska, le fossé entre les États-Unis et l'Union européenne ne pourrait être plus profond.

Signaux d'ouverture au dialogue

Washington a suspendu de manière ciblée certaines sanctions afin de permettre aux participants russes de se rendre aux pourparlers. Cette suspension n'est valable que jusqu'au 20 août et concerne exclusivement les activités liées à la rencontre. Les biens bloqués ne seront pas débloqués, mais le signal est clair: les États-Unis misent sur la volonté de dialogue et la flexibilité diplomatique. Trump salue publiquement les efforts de son gouvernement pour mettre fin à la guerre en Ukraine et laisse entrevoir des garanties de sécurité pour Kiev.

L'UE sur la voie de la confrontation

L'UE, en revanche, reste sur la voie de la confrontation. À Bruxelles, on travaille actuellement sur le 19ème paquet de sanctions contre Moscou, qui devrait être adopté en septembre. La ministre des Affaires étrangères, Kaja Kallas, a clairement indiqué qu'aucune concession ne serait faite à la Russie sans un « cessez-le-feu complet et inconditionnel ». La pression sur Moscou doit continuer à s'intensifier, malgré les conséquences économiques parfois lourdes pour les États membres.

Un coup dans le pied

Ces répercussions sont désormais clairement mesurables. En raison de l'autolimitation des importations de gaz bon marché en provenance de Russie, les prix de l'énergie en Europe sont si élevés que l'industrie n'est plus compétitive. Les contre-sanctions russes touchent durement l'Europe, notamment l'agriculture: les producteurs de fruits et légumes, les éleveurs et l'industrie alimentaire souffrent parce qu'ils perdent des opportunités de vente. Rien qu'en Haute-Autriche, les maraîchers ont dû détruire des centaines de tonnes de choux.

Un moyen de pression inutile

Les économistes avertissent que les sanctions européennes n'affaibliront pas de manière décisive la Russie. Au contraire, la Chine profiterait de prix plus bas pour les matières premières, tandis que les produits transformés reviendraient en Europe par des voies détournées et à des prix beaucoup plus élevés. Une politique symbolique au détriment des intérêts stratégiques de l'Europe.

Le sommet de l'Alaska pourrait donc être non seulement un test pour les chances d'un cessez-le-feu, mais aussi le reflet de la capacité à résoudre les conflits: étroitesse d'esprit et obstination d'un côté, diplomatie et flexibilité de l'autre côté de l'Atlantique.

Alexandre Douguine: La transformation de Trump en néoconservateur

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La transformation de Trump en néoconservateur

Alexandre Douguine

Tatiana Ladiaeva : Nous allons continuer à suivre les événements autour des sous-marins nucléaires qui se trouveraient près de la Russie sur ordre du président américain Donald Trump. C'est en tout cas ce qu'il a déclaré lors d'une récente rencontre avec la presse. La zone précise n'est toutefois pas précisée. Je rappelle que cette déclaration a été précédée d'une dispute publique avec le vice-président du Conseil de sécurité russe, Dmitri Medvedev. Selon Trump, Moscou menace désormais ouvertement Washington. Est-ce le cas ? Analysons la situation en détail.

Alexandre Douguine : Oui, malheureusement, l'escalade s'intensifie. Au cours des deux dernières semaines, voire de cette dernière semaine, des changements importants se sont produits.

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Trump a en fait complètement renoncé à la ligne qu'il avait annoncée pendant sa campagne électorale et immédiatement après son arrivée au pouvoir. Nous avons analysé méthodiquement son comportement dans l'émission « Escalade ». J'ai surestimé sa cohérence et sa dépendance à l'égard de sa base électorale, pensant qu'il maintiendrait sa position réaliste en matière de relations internationales, ce pour quoi il avait été élu. Mais il s'en est éloigné, non pas par de simples ajustements ou hésitations, mais en changeant complètement de cap. Alex Jones (photo), l'un des plus fidèles partisans de Trump, l'a dit de manière convaincante. Aujourd'hui, ses partisans en parlent : Tucker Carlson, Candace Owens, Jeffrey Sachs, John Mearsheimer — ils avaient placé leurs espoirs dans ses actions, car ses adversaires, les mondialistes et les libéraux, sont le mal que l'Amérique réelle rejette. Mais Trump déçoit non seulement ses adversaires, mais aussi ses partisans. Ses actions deviennent de moins en moins prévisibles pour eux — précisément pour eux, et non pour tous les autres.

Notre analyse doit donc être révisée. Trump agit de manière extrêmement agressive, mettant en œuvre la politique des néoconservateurs, alors qu'il s'y opposait initialement. Les néoconservateurs sont les mêmes mondialistes que les autres mondialistes, mais ils sont plus cyniques, plus francs et plus intransigeants. Si les libéraux de gauche parlent de démocratie mondiale et de coopération multilatérale, les néoconservateurs déclarent : « Quelle coopération ? Nous sommes la principale puissance hégémonique, soumettez-vous ou nous vous détruirons ». C'est le même programme mondialiste, mais sans masque, agressif et cynique. Trump s'est opposé aux néoconservateurs et aux mondialistes de gauche, mais il mène désormais leur politique. C'est ce qui explique l'escalade des tensions avec la Russie. Lorsqu'il est arrivé au pouvoir, il a déclaré : « Ce n'est pas ma guerre, c'est celle des mondialistes – de gauche, de droite, Biden et Crow. C'est la guerre de Biden, je la terminerai. Je sais comment : je vais téléphoner aux Russes, arrêter les livraisons d'armes à l'Ukraine, et nous trouverons une solution avec l'éminent leader souverain de la Russie, Vladimir Poutine ». Il l'avait promis, il comptait dessus, mais les choses se sont passées autrement.

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Trump a renoncé à sa stratégie MAGA. Je ne sais pas si certains éléments ont été conservés, mais il semble que non. Il a adopté la position classique des néoconservateurs, revenant à l'approche de Biden : soutien inconditionnel à la junte nazie, volonté d'infliger une défaite stratégique à la Russie, pression par tous les moyens, y compris la menace d'un conflit nucléaire direct avec Moscou. C'était l'argument clé de Trump lors de son arrivée au pouvoir : « Biden a conduit deux grandes puissances au bord de la guerre nucléaire. Nous allons rectifier cela, il y aura la paix, aucune menace nucléaire ». Les Américains ont répondu : « Très bien, nous votons pour vous, nous avons besoin de ce programme ». Trump a tenu bon pendant un certain temps, mais ce que nous voyons en août 2025, c'est la politique de Biden, sur un ton plus franc et cynique.

Tatyana Ladaeva : Se rend-il compte qu'il répète certaines erreurs et certaines mesures de Biden ? Il a toujours souligné à quel point lui et Biden étaient différents et à quel point leurs politiques étaient différentes. Mais regardez-le, ce qu'il dit et ce qu'il fait. « Avec moi, tout sera différent ». Et sur quoi va-t-il mettre l'accent maintenant ?

Alexandre Douguine : Sur Internet, de nombreux messages de partisans et d'opposants de Trump affirment que quelque chose ne va pas dans son état mental. Ils analysent les veines de ses mains, l'expression de ses yeux, la couleur de sa peau. Il n'est pas exclu qu'il ait subi un accident vasculaire cérébral. Il est âgé, en pleine campagne électorale, victime d'attentats — on ne peut exclure certains processus.

Il y a un commandement important dans l'Évangile: ne traite pas quelqu'un d'imbécile. Nos analystes utilisent souvent les mots « imbécile », « débile », « idiot », « sénile », « fou ». Mais l'Évangile l'interdit: en insultant, en humiliant, tu risques de t'attirer cela sur toi-même. Le comportement grossier de Trump envers ses adversaires — peut-être le méritent-ils, peut-être Biden a-t-il vraiment des déficiences liées à l'âge — mais trop insister là-dessus, se frapper la poitrine et déclarer : « Je bois du light et je vivrai éternellement », c'est faire preuve d'une arrogance excessive. Cela pourrait se retourner contre lui.

Quand tout le monde autour de vous est stupide et que vous êtes le seul à être intelligent, vous devenez vous-même victime de cette stratégie. C'est un orgueil démesuré. Trump récolte ce qu'il a semé : il figure sur les listes d'Epstein, mène une politique agressive. Ses propres critiques se retournent contre lui. On ne peut exclure que ce soient des manifestations de démence.

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Comme dans « Faust », les rôles s'inversent et on ne sait plus qui est le diable et qui est la victime. Il se passe quelque chose avec Trump. Il s'accroche à son égocentrisme, à son narcissisme, mais cela prend une tournure inquiétante. Ses actions en matière de droits de douane, avec le monde – il distribue des coups, peut donner un coup de pied au visage d'un allié comme l'Inde, en qualifiant son économie de rétrograde.

Nous nous opposons aux Américains en Ukraine, mais l'Inde est un allié clé des États-Unis en Asie du Sud-Est, beaucoup dépend d'elle. Qualifier son économie de nulle alors qu'elle est en pleine croissance est contre-productif. Ses relations avec Lula au Brésil et avec les BRICS sont les mêmes. Il distribue des coups à tout le monde.

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L'envoi de sous-marins nucléaires vers nos côtes rappelle un cow-boy dans un saloon qui enfonce la porte, tire sur les siens et les étrangers, brise des bouteilles de whisky. Dans un western, cela peut passer, mais dans la politique mondiale, dans les relations avec une puissance nucléaire, c'est dangereux. Au départ, il avait une idéologie, une stratégie cohérente, mais Trump l'a chiffonnée et jetée à la poubelle avec ses partisans. Il peut repousser tous ceux qui se sont battus pour lui. C'est ce qu'il fait avec l'Europe, la Chine, la Russie. Il a conclu un accord avec la Chine sur des tarifs douaniers insensés, et maintenant il menace à nouveau d'imposer des droits de douane de 100% si la Chine continue d'acheter des ressources russes. C'est peut-être un signe de démence, mais c'est objectif, et c'est plus dangereux que la somnolence de Biden.

Certains analystes américains notent un phénomène de confabulation, un diagnostic dans lequel des troubles mentaux conduisent à remplacer des lacunes dans la conscience par des situations fictives. Une personne peut décrire en détail une conversation téléphonique qui n'a jamais eu lieu. Trump publie des messages et fait des déclarations qui ne correspondent ni aux renseignements ni aux propos de ses conseillers. Il s'agit de confabulation, un mécanisme de défense qui comble les lacunes de la conscience. Ce phénomène est fréquent chez les personnes âgées. Trump comble peut-être ses lacunes mentales avec de tels placebos.

Il s'est offusqué des messages virulents de Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité. Trump considère probablement la Russie comme un pays pauvre et arriéré, mais il perçoit Vladimir Poutine comme une menace sérieuse, un joueur coriace avec lequel il faut négocier. Cependant, lorsque Medvedev s'exprime, Trump est perplexe : « Poutine est poli avec moi, et là, quelle brusquerie ! ». Il lui semble que Poutine est devenu grossier. Il oublie ses « 50 jours », l'ultimatum qu'il nous a lancé, comme à des subordonnés, sans objectif clair. Il a envoyé des sous-marins nucléaires vers nos côtes. Un tel traitement de la Russie et des autres puissances mondiales est le signe d'un désordre. On pourrait mettre cela sur le compte d'une déviation ou d'une démence, mais cet homme a entre les mains le potentiel nucléaire des États-Unis. L'Amérique est une puissance, et le fait qu'elle soit dirigée par un leader partiellement dément est inquiétant. Ses partisans commencent à douter de lui, et cela donne à réfléchir. Son attitude de cow-boy lui a peut-être été utile dans le passé, mais il semble désormais se prendre pour Dieu : il est le seul sujet, tous les autres sont des objets. Lorsqu'ils manifestent leur propre volonté, il se met en colère. C'est une situation dangereuse.

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Le mois d'août est un mois sinistre dans l'histoire. On ne peut pas affirmer que tout est perdu et qu'une guerre nucléaire est inévitable, mais sa probabilité augmente. Il faut être prêt à tout. On peut s'attendre à tout de la part de Trump. Si sa rationalité refait surface, c'est une chose ; si elle s'éteint, remplacée par un patch-work de confabulations où il se prend pour Dieu, la situation pourrait devenir catastrophique. Nous devons être extrêmement vigilants. Ce n'est pas une raison pour plaisanter, on ne peut pas balayer cela d'un revers de main en pensant que tout ira bien. Peut-être que tout ira bien, mais peut-être pas. Il faut prendre cela au sérieux.

Tatyana Ladaeva : Permettez-moi de poursuivre un peu sur le thème des relations entre Moscou et Washington, compte tenu de la situation actuelle. Il y a quelques minutes à peine, le Kremlin a publié des commentaires, notamment ceux du porte-parole du président russe, Dmitri Peskov. Il a souligné que Moscou était extrêmement prudente dans ses déclarations sur la question nucléaire et estimait que tout le monde devait aborder ce sujet avec le même sens des responsabilités. Quant aux déclarations de Trump, le Kremlin n'y voit pas d'escalade: il s'agit de sujets sensibles, que beaucoup perçoivent de manière émotionnelle. Cela dit, le Kremlin n'exclut pas la possibilité d'une rencontre entre Poutine et Witkoff cette semaine. La Russie reste attachée à l'idée d'un règlement politique et diplomatique en Ukraine comme voie préférable. Dès le début, je me suis posé deux questions classiques qui se posent dans tout débat : qui est responsable et que faire ? Nous avons déjà répondu à la question « que faire » dans la partie précédente de l'émission. Mais si l'on examine la situation sous l'angle de la responsabilité, en sachant qu'il y a toujours au moins deux parties dans un conflit, pouvons-nous apporter une réponse ?

Alexandre Douguine : Lorsque nous considérions Trump comme un homme politique cohérent et rationnel, désireux de s'éloigner du mondialisme et du pouvoir de l'État profond pour se diriger vers un projet d'Amérique indépendante, souveraine et puissante, nous voyions des perspectives de rapprochement avec nous, des positions communes sur les valeurs traditionnelles entre les États-Unis de Trump et la Russie. Nous voyions des modèles qui auraient pu conduire à une désescalade, si Trump avait été cohérent.

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Mais même dans le scénario le plus favorable pour les relations entre l'Amérique de Trump et la Russie de Poutine, il y avait une exception : le conflit ukrainien, la guerre en Ukraine. Du point de vue de la psychologie de Trump, qui a toujours été particulière, cela est devenu une pierre d'achoppement. Dans des conditions acceptables pour Trump, nous ne pouvions en aucun cas mettre fin à ce conflit, quelle que soit la pression exercée. Ce n'est pas négociable. Pour la Russie souveraine, il existe des positions qui ne sont pas négociables, qui ne font pas l'objet d'un compromis. Il s'agit de l'absence d'une Ukraine souveraine, anti-russe et armée en tant qu'entité pro-occidentale et russophobe. Cela était inacceptable pour nous, c'est pourquoi nous avons lancé une opération militaire spéciale. Et c'est la condition pour la cessation des hostilités : l'Ukraine renonce à son adhésion à l'OTAN, à son idéologie hostile à la Russie et réduit son armée à un niveau qui ne représente plus une menace pour nous, sans appartenir à aucun bloc. Nous sommes d'accord avec cela. À partir de là, nous discutons de la manière, du moment et de l'ordre dans lesquels nous passerons à la désescalade. Les frontières ne sont pas si importantes: tout ce qui restera derrière nous restera derrière nous, y compris ce que nous libérerons ou acquerrons. Mais il faut d'abord s'entendre sur le principe.

Pour les États-Unis, ce n'est pas si important, et Trump aurait pu accepter, mais cela aurait suscité une forte pression de la part de l'Union européenne, des mondialistes, des néoconservateurs, bref, de tous ceux qui ne sont pas ses partisans. Ses partisans le voulaient, Trump disait : « Je vais y réfléchir », mais il hésitait entre ses opposants et ses partisans, compte tenu de la position pacifiste de l'électorat MAGA, qui souhaitait mettre fin au soutien à l'Ukraine. Il avait commencé, mais il était déjà clair que cela serait extrêmement difficile. Accepter nos conditions minimales et non négociables était problématique, même pour un Trump sensé, tel qu'il semblait être quelques mois après son arrivée au pouvoir. Maintenant qu'il a abandonné sa stratégie, la situation est devenue beaucoup plus volatile, imprévisible et chaotique.

Qui est responsable ? Auparavant, Trump comprenait que la responsabilité incombait à Biden et aux mondialistes qui avaient déclenché une guerre contre la Russie, laquelle n'augurait rien de bon. Il disait : « Je vais y mettre fin ». De bonnes intentions : la guerre a été déclenchée par des forces maléfiques, il n'y a aucune perspective, ce n'est pas une guerre américaine, je veux y mettre fin. C'est sur cela que reposait la bonne volonté du président américain, soutenue par Moscou, Poutine, les négociations avec Trump, les échanges avec Witkoff, qui était venu, la préparation de la rencontre en Arabie saoudite. Tout allait bien, mais soudain, Trump a brusquement changé de cap, perdant rapidement le contact avec ce qu'il avait proclamé. Maintenant, qui est responsable, ce n'est pas clair.

Notre position reste la même, dans le même esprit. Les paroles pacifiques de Peskov sont sincères, il n'embellit pas la situation, mais la décrit telle qu'elle est. La Russie est attachée à son plan de victoire et à l'accomplissement des missions de ses forces armées. Sur cette base, nous sommes prêts à prendre des mesures pour nous rapprocher des États-Unis. De plus, il existe de nombreux sujets que nous pourrions discuter avec les États-Unis en dehors du cadre ukrainien avec beaucoup de succès et des résultats constructifs. Trump sacrifie sa stratégie, sa base électorale, ses promesses, ses intérêts. C'est pourquoi je pense que l'escalade actuelle est à blâmer. Nous ne la voulons pas, mais si quelqu'un nous déclare la guerre, nous ne pouvons pas répéter que nous ne voulons pas la guerre. Nous voulons la victoire. Dire « nous ne voulons pas la guerre » alors qu'elle est en cours revient à reconnaître notre défaite, et nous ne l'acceptons pas. Nous en sommes loin, et cela n'arrivera jamais. C'est un moment grave.

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Nous sommes peut-être à l'aube d'une troisième guerre mondiale, peut-être nucléaire. Tout le monde veut l'éviter. Quand la propension à maintenir la paix s'épuise, il faut agir avec détermination. L'escalade est une chose dangereuse, car les doctrines nucléaires de la Russie et des États-Unis prévoient la notion de frappe préventive. Si une partie estime que l'autre va certainement lancer une frappe nucléaire, il faut appuyer sur le bouton en premier. Mais que signifie « sait qu'elle va certainement lancer » ? Imaginez : la personne qui doit prendre la décision reçoit des informations sur une frappe imminente, et à ce moment-là, elle commence à perdre la raison, à confondre la réalité et la fiction, à perdre ses repères mentaux.

Une image tirée d'un film d'action, d'un western ou d'un film Marvel apparaît, où il « reçoit » cette information. Le décalage entre la réalité et les pensées de Trump devient inquiétant. Il peut ne pas recevoir le briefing des services de renseignement, mais « s'en souvenir » dans sa tête. Nous sommes dans une situation où il est question d'une frappe préventive.

Nos dirigeants sont tout à fait sensés et responsables, ce qui a été prouvé à maintes reprises. Nous soutenons Poutine parce que nous sommes convaincus de sa rationalité, de sa logique claire, de la déclaration de ses intentions, de ses méthodes et de son évaluation précise du coût des actions. Mais à l'autre bout, la situation est différente. Nous pouvons agir de manière rationnelle et pacifique, mais là-bas, c'est irrationnel, émotionnel, agressif, spontané. Les signes inquiétants se multiplient de ce côté-là.

Avec Biden, dont l'hostilité était prévisible, la situation était plus ou moins claire. Mais que fera Trump ? Ni ses partisans, ni ses adversaires, ni nous-mêmes ne le savons. C'est un signal inquiétant. Ce n'est pas que Trump soit un méchant, mais la perte de ses capacités cognitives dans une escalade aussi tendue est extrêmement dangereuse. Comment y faire face ? Nous avons des moyens, mais ils sont limités. Nous ne dirigeons pas les États-Unis, ils sont un sujet souverain. Comment faire passer notre message ? On peut reprocher à Medvedev ses messages virulents, mais le faire pourrait donner à Trump l'impression que nous sommes ses subordonnés, qu'il peut simplement prendre par les oreilles.

Tatyana Ladaeva : Revenons aux commentaires très pertinents, mesurés et calmes de Vladimir Poutine. Vendredi dernier, il a rencontré le président biélorusse Alexandre Loukachenko à Valaam. Il a notamment déclaré : « La déception vient des attentes excessives ». Il me semble que c'était une allusion à Trump, à ses déceptions constantes envers la Russie et Vladimir Poutine personnellement. Pourquoi avoir choisi cet endroit, cette île ? Y a-t-il selon vous une symbolique ?

Alexandre Douguine : Tout d'abord, c'est là que se trouve l'ancien monastère russe de Valaam, que l'on appelle le Mont Athos du Nord. C'est le cœur du monachisme orthodoxe. Le Mont Athos du Nord est la plus haute destination spirituelle. C'est notre grand monastère (photo), où se concentrent les traditions spirituelles de notre peuple. C'est très important.

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Poutine montre qu'il parle au nom de toute l'humanité orthodoxe, de la civilisation orthodoxe. Les valeurs sacrées sont importantes pour lui. Regardez comment, imprégné de l'esprit de ce lieu ancien et pieux, il s'est entretenu avec humilité et bienveillance avec Loukachenko, comment il semblait, comment le vent agitait les branches derrière le banc où les deux grands leaders slaves orientaux étaient assis en chemise après la messe, parlant de la grandeur de notre armée, du héros russe.

Dans le sanctuaire de Valaam, à Smolensk, où Loukachenko et Poutine se sont tenus debout et ont prié, se trouve notre principal temple des forces armées, un petit temple où les moines honorent la mémoire des soldats tombés au combat. Ce n'est pas un lieu fastueux, bruyant ou riche, mais un lieu riche en esprit, en pureté, en silence, en concentration monastique et en contact direct avec les armées des martyrs russes, des héros russes.

Je me suis moi-même rendu au sanctuaire de Smolensk, c'est un lieu sacré. Nos deux dirigeants l'ont choisi pour un entretien afin de parler des questions fondamentales de la politique mondiale. Ce n'est pas un hasard, car tout ce que font Poutine et Loukachenko, ils le mettent en relation avec la logique de l'histoire russe, avec l'esprit, avec Dieu. Ils essaient de comprendre ce que Dieu attend de nous, du peuple russe, comment nous en sommes arrivés là, ce que nous devons faire.

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C'est une ouverture, contrairement à l'orgueil satanique de Trump, et cela crée une atmosphère complètement différente. Les grands dirigeants écoutent ce que Dieu veut, et non ce qu'ils veulent, et parlent au monde, à l'humanité, à partir de ce discours subtil, à peine audible, qu'ils essaient de saisir au sanctuaire de Smolensk, à Valaam. La vie des moines, la vie du monastère, c'est le silence, l'élément, le silence qui permet à l'humanité de se taire et à Dieu de parler à travers nos cœurs, nos âmes. L'état d'esprit de Poutine et de Loukachenko, les formules dans lesquelles ils ont habillé leurs opinions, témoignent de cette attitude de prière de nos dirigeants. De nombreux grands princes, vainqueurs de guerres difficiles, ont pris les traits monastiques avant leur mort : ils sont forts et fiers devant les hommes, mais humbles et obéissants devant Dieu.

Poutine nous a transmis ce message, à nous et au monde entier. Il dresse le tableau de ce moment sinistre et inquiétant de notre histoire, où il y a des gens qui écoutent la volonté de Dieu, qui sont humbles, qui accomplissent leur devoir, qui s'appuient sur la tradition, la responsabilité, le souci des autres, et où il y a ceux qui sont leur contraire, même sur le plan esthétique.

J'ai beaucoup aimé cette image : Poutine, un homme mûr et sage, au visage simple et bon, assis et réfléchissant très sérieusement au sort du monde, pesant chaque mot, à côté de lui son plus proche allié, Alexandre Grigorievitch Loukachenko. C'est un pôle d'esprit, de lumière dans la situation actuelle. Nous nous reconnaissons dans ces dirigeants qui ne sont ni menaçants, ni agressifs, ni narcissiques. Nous voyons en eux la volonté concentrée qui anime notre histoire.

Tatyana Ladaeva : Nous continuons de recevoir de nombreuses questions et messages, tous concernant Trump. Beaucoup de gens ne comprennent pas et cherchent des réponses. Voici, par exemple, ce qu'écrit un certain Alexandre, de Belgorod : « Peut-être que les choses iront vraiment mal aux États-Unis dans un avenir proche et que Trump essaie simplement de semer la confusion avec sa rhétorique ? » Ce message a été posté sous notre vidéo sur YouTube. Il me semble que Trump n'avait pas dès le départ de plan précis pour mettre fin à la guerre. Il voulait en finir d'une manière ou d'une autre, mais il n'y arrive pas, alors il est en colère. Compte tenu de l'instabilité de son discours, il est très difficile de faire des prévisions. Avons-nous quelque chose à ajouter ?

Alexandre Douguine : Nos auditeurs évaluent très justement la situation, et pas seulement parce que nous en parlons. Ils sont capables d'analyser eux-mêmes la situation mondiale, en saisissant globalement l'essentiel.

À présent, l'essentiel est de comprendre que, comme le disent les personnes spirituelles, de nombreuses guerres ont lieu pour nous rappeler l'existence de Dieu. Les tragédies et les catastrophes surviennent pour nous montrer qu'il existe quelque chose de plus grand que les êtres humains et leurs besoins quotidiens : les valeurs, l'esprit, Dieu, l'immortalité, la résurrection, l'Église, la foi, les rites. Quand tout va bien, nous l'oublions. Mais lorsque deux sous-marins nucléaires, envoyés par un homme politique imprévisible à la psyché instable, approchent de nos côtes, il est temps de se demander : qu'est-ce que notre vie, notre pays, notre histoire ?

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Il y a une chanson de Roman Neumoyev, interprétée par Egor Letov dans l'album « Instructions pour survivre », qui s'intitule « Et le monde a une heure avant minuit ». Il faut vivre comme s'il ne restait qu'une heure avant minuit, en étant conscient que nous sommes face à l'éternité et que nous devons répondre de tout. Nous ne sommes pas maîtres des événements mondiaux, mais nous pouvons influencer notre vie, notre repentir, nos relations avec nos proches, nos décisions morales. Si le sentiment que « l'heure de minuit approche » s'éveille en nous en raison de la situation géopolitique et stratégique difficile, c'est peut-être là que réside le dessein. Si nous reprenons nos esprits, si nous nous réveillons, si nous prenons conscience, peut-être que le Seigneur aura pitié de nous et nous épargnera cette épreuve. Ou peut-être pas. Qui sait ? Tout est entre les mains de Dieu. Il faut comprendre qu'il existe des forces bien plus élevées et plus fondamentales que nous, les êtres humains.

mercredi, 20 août 2025

La géographie, clé de l'histoire

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La géographie, clé de l'histoire

Source: https://pangea.blog.hu/2014/06/29/a_foldrajz_a_tortenelem...

"La géographie, c'est la clé de l'histoire". C'est ce qu'affirmait au début du siècle dernier un professeur écossais déjà dans la fleur de l'âge. En 1904, ce professeur écossais publia son ouvrage influent intitulé « La géographie est la clé de l'histoire », dans lequel il posait les bases de la géopolitique classique et gravait son nom à jamais dans l'histoire. Son livre fut véritablement révolutionnaire et créa une nouvelle ère. Il a créé une époque, car son livre et ses thèses géopolitiques publiées par la suite sont devenus la doctrine politico-militaire la plus importante du début du 20ème siècle et, avec une légère exagération, on peut affirmer qu'ils ont déterminé les principaux événements géopolitiques du 20ème siècle. L'influence de ses thèses est perceptible dans les traités de paix qui ont mis fin à la Première Guerre mondiale, dans les événements militaires de la Seconde Guerre mondiale et dans la guerre froide. Mon article est centré sur Sir Halford John Mackinder, dont le nom est sans doute familier aux experts en politique de sécurité, aux historiens et aux géographes.

Mackinder a mené une vie extrêmement mouvementée, ses contemporains lui reprochaient souvent que « sa carrière aurait suffi à occuper cinq personnes », car Mackinder n'était pas seulement géographe, mais aussi homme politique actif et représentant élu, explorateur, professeur de lycée et d'université et diplomate. Sa vie active a porté ses fruits. Grâce à ses connaissances en de nombreux domaines et à sa perspicacité, il comprit que l'année 1900 marquait un tournant dans la vie de la Grande-Bretagne victorienne.

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Le « cycle de vie » de l'Empire britannique, son apogée et son déclin 

L'Empire britannique victorien comptait un quart de la population mondiale (400 millions d'habitants) et s'étendait sur près de 32 millions de kilomètres carrés. Mais l'empire commençait à perdre sa position dominante dans la politique et l'économie mondiales. Mackinder savait que le départ de près de 10 millions de personnes de Grande-Bretagne entre 1871 et 1911 pouvait entraîner un rééquilibrage des pouvoirs. Il croyait voir d'autres signes de faiblesse dans les guerres contre les Boers en Afrique du Sud. Au début, les habitants du Transvaal et de l'Etat d'Orange ont réussi à se défendre contre les Britanniques. Les progrès technologiques de la deuxième révolution industrielle ont également transformé les transports. Le transport ferroviaire a pris le pas sur le transport maritime. C'est un coup dur pour un pays qui était avant tout une puissance maritime et qui imposait sa volonté grâce à sa supériorité navale. L'ouverture de la ligne ferroviaire transsibérienne en 1905 a mis un point final à cette situation. Mackinder a compris que l'ère des puissances maritimes était révolue.

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Le chemin de fer mondialement connu qui a vaincu le transport maritime 

Mackinder a consacré sa vie à l'Empire britannique. En tant que patriote, il s'est efforcé d'attirer l'attention de l'opinion publique et des décideurs sur tous les remaniements du pouvoir qui touchaient l'Empire. Quatre ans après le tournant du siècle, il donna une conférence intitulée « La géographie est la clé de l'histoire », puis, quelques mois plus tard, il publia un livre dans lequel il exposait sa "théorie du pivot", qui reste encore aujourd'hui très influente.

Sa théorie du pivot repose sur une approche géographique du pouvoir. La situation géographique des continents et des pays qui les composent détermine fondamentalement, ou du moins influence, quels pays peuvent devenir des puissances mondiales. Les fondements de sa théorie sont donc ancrés dans le déterminisme environnemental, mais son point de vue diffère néanmoins de celui de ses contemporains. Le Suédois Rudolf Kjellén (également géopolitologue) se vantait par exemple de pouvoir déterminer le niveau de civilisation d'un pays donné à partir de sa latitude et de sa longitude. Mackinder abordait le problème de manière plus subtile et, bien sûr, du point de vue de l'Empire britannique.

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La division du monde selon Mackinder, avec le Pivot au centre

Mackinder a désigné une zone centrale, comprenant le nord de l'Eurasie et l'Asie centrale. Il a appelé cette zone le Pivot, autour duquel s'organise le reste du monde. Cette zone centrale est en grande partie détenue par la Russie, qui a pris le relais de l'ancien Empire mongol. Il estime que son isolement géographique rend le Pivot difficile, voire impossible, à occuper. Même si cela était possible, il serait impossible de le conserver longtemps en raison de la rudesse du climat.

Le Pivot est entouré d'un demi-cercle, la Ceinture intérieure ou Marginal Perimeter, qui comprend l'Europe continentale, l'ancienne Turquie (y compris l'Afrique du Nord), l'Iran, l'Inde et la Chine. Mackinder soulignait que l'État qui détient le pivot ne peut à lui seul devenir une puissance mondiale, mais seulement s'il s'allie à un État de la ceinture intérieure plus puissant que l'Angleterre et qu'ils puissent la vaincre ensemble. Il fallait donc empêcher l'Allemagne, qui se renforçait et se développait rapidement en Europe continentale, de conclure une alliance avec la Russie.

La troisième et dernière zone à statut particulier était celle des îles du monde, qui comprenait le continent américain, l'Afrique subsaharienne, l'Australie, le Japon et, bien sûr, l'Angleterre. Il est intéressant de noter que les États-Unis, qui n'étaient encore qu'une puissance marginale dans les jeux géopolitiques du début du 20ème siècle, n'étaient pas considérés comme une menace.

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Visualisation de la théorie de Hearland, qui souligne l'importance de l'Europe centrale

La Première Guerre mondiale affaiblit encore davantage l'Empire britannique, et il publie une version modifiée de sa théorie en 1919, à la veille des traités de paix qui mettent fin à la Première Guerre mondiale. Il l'appelle théorie du Heartland (le Heartland correspond à son ancienne zone pivot). Il y soulignait l'importance géopolitique de l'Europe centrale et rêvait d'une Europe centrale composée de nombreux petits États situés entre l'Allemagne et la Russie, dont la plupart seraient alliés à la Grande-Bretagne ou à l'Entente, et dont la tâche principale serait d'empêcher l'alliance germano-russe. Ils ne parvinrent pas à empêcher la conclusion de l'alliance, et le pacte Molotov-Ribbentrop fut signé en 1939.

À cette époque, il ne publiait plus ses doctrines en tant que simple professeur d'université, mais en tant que haut représentant britannique en Russie méridionale, et entretenait de bonnes relations avec Lord Curzon, qui proposait de redessiner les frontières orientales de la Pologne. À partir de 1920, il fut président de la Commission impériale britannique de la marine marchande, le premier responsable de cette commission qui gérait les affaires maritimes de tout l'Empire britannique, sur lesquelles reposait la position de puissance mondiale qu'était cet empire. Considéré comme l'un des hommes les plus influents de l'Angleterre de l'époque, sa théorie a atteint les plus hauts niveaux, et ses thèses ont donc pu jouer un rôle décisif dans le tracé des frontières en Europe centrale, par exemple dans la définition des détails du traité de Trianon.

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La thèse principale de Mackinder 

Sa théorie du Heartland peut être résumée en quelques phrases, qui sont d'ailleurs devenues des expressions courantes. La première thèse est la suivante : « Celui qui domine l'Europe centrale et orientale commande le Heartland ». La deuxième : « Celui qui domine le Heartland commande les îles du monde », et la troisième : « Celui qui commande les îles du monde domine le monde ». Ergo, si l'Empire britannique contrôle la majeure partie de l'Europe centrale, ni la Russie ni l'Allemagne ne constituent une menace pour lui, et sa position de puissance mondiale est assurée.

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Le Lenaland. La vision d'un espace de pouvoir dans l'Atlantique Nord

Sa dernière théorie géopolitique, intitulée Lenaland, a été publiée en 1943, quelques années avant sa mort. Il a été fortement influencé par la période de l'entre-deux-guerres, où il voyait déjà l'émergence d'une nouvelle puissance, à savoir les États-Unis. Dans cette théorie, il envisageait la création d'un espace de pouvoir nord-atlantique, c'est-à-dire la naissance de la coopération militaire et politique de l'OTAN. La thèse du Lenaland s'appuyait sur ses théories antérieures, auxquelles il ajoutait que les États-Unis étaient devenus un acteur géopolitique déterminant. En outre, il séparait la région de la Léna (c'est-à-dire la plaine de Sibérie orientale) du cœur de la Russie et du Pivot.

La question se pose de savoir comment Mackinder a influencé la guerre froide, étant donné que ses théories portaient sur la Grande-Bretagne, l'Allemagne et la Russie, et ne mentionnait pas l'opposition américano-russe/soviétique dans ses thèses. La réponse est qu'après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Américains ont repris le rôle de puissance mondiale dominante et ont également repris les idées de Mackinder, qu'ils ont adaptées à leur propre situation. Cependant, la question clé n'était plus la situation de l'Europe centrale, puisque l'Union soviétique l'avait déjà annexée, mais celle de la ceinture intérieure et des îles mondiales. Les États-Unis se sont donné pour mission première d'empêcher l'Union soviétique de poursuivre son expansion dans la ceinture intérieure ou sur les îles mondiales. C'est ici que reviennent les conflits bien connus de la guerre froide, en Corée, à Suez, en Grèce, au Guatemala, au Vietnam et en Afghanistan.

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Caricature de propagande durant la guerre froide qui montre clairement les principaux axes le long desquels les Soviétiques cherchaient à s'étendre afin de sortir de leur isolement et de placer la Ceinture intérieure sous leur influence.

Mackinder était un personnage peu connu de l'histoire, qui a œuvré dans l'ombre et accompli de grandes choses, mais dont le nom n'apparaît que rarement dans les ouvrages des historiens. Sa grandeur est éclipsée par les noms des hommes d'État de son époque, alors qu'il était l'un des rares à avoir véritablement compris les orientations de la politique mondiale. Il a reconnu, mais n'a pas pu empêcher la chute de l'Empire britannique, qui a culminé avec une série de déclarations d'indépendance de ses anciennes colonies.

 

Commentaire de la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Maria Zakharova à l'occasion du troisième anniversaire de l'assassinat de Daria Douguina

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Commentaire de la porte-parole du ministère des Affaires étrangères Maria Zakharova à l'occasion du troisième anniversaire de l'assassinat de Daria Douguina

Source: https://mid.ru/en/foreign_policy/news/2041995/

20-08-2025

Il y a trois ans, un acte terroriste orchestré par les services secrets ukrainiens a coûté la vie à la journaliste, commentatrice politique et personnalité publique russe Daria Douguina (Platonova).

Ni les pseudo-démocraties occidentales ni les organisations internationales qui leur sont inféodées n'ont daigné réagir à ce meurtre perfide, tout comme elles ont fermé les yeux sur d'autres crimes sanglants commis par les néonazis ukrainiens contre des journalistes et des correspondants de guerre.

Sous le patronage de ses commanditaires, le régime de Kiev continue d'éradiquer méthodiquement toute dissidence, menant une véritable chasse aux représentants des médias russes. Nous rendons hommage au sacrifice de tous les professionnels des médias qui ont péri dans l'exercice de leurs fonctions, et nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour que les responsables de ces atrocités soient traduits en justice.

Le destin tragique de Daria Douguina est devenu, pour des millions de personnes, un symbole de dévouement désintéressé à la patrie, d'engagement sans faille et de loyauté envers ses idéaux. En Russie et bien au-delà de ses frontières, la mémoire de Daria et son héritage créatif perdurent: ses livres sont publiés à grand tirage et de nombreuses initiatives et projets sont mis en œuvre, notamment le Prix international de la jeunesse « Frontière russe » et la médaille publique « Pour la fidélité au monde russe et aux valeurs traditionnelles ».

Des rues dans de nombreuses villes russes ont été baptisées du nom de Daria Douguina, et son image a été immortalisée dans des fresques murales et des plaques commémoratives. Cette année, un monument dédié à la courageuse journaliste, sculpté par Dmitri Alexandrov, a été inauguré dans le parc Zakharovo, dans le district d'Odintsovo, dans la région de Moscou.

Le crime commis contre Daria Douguina est imprescriptible. Les coupables seront retrouvés et subiront une punition inévitable.

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« La vie est guerre sur terre ! » - En mémoire du 3ème anniversaire de l'assassinat de Darya Douguina

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« La vie est guerre sur terre ! »

En mémoire du 3ème anniversaire de l'assassinat de Darya Douguina

Werner Olles

Le 20 août 2022, une voiture piégée a explosé en marge d'un festival près de Moscou, tuant la journaliste et philosophe Darya Douguina, alors âgée de 29 ans. La jeune femme est morte sous les yeux de son père horrifié, le philosophe et fondateur du mouvement eurasiste Alexandre Douguine, qui était peut-être la cible de cet attentat perfide. Commandé par le gouvernement néonazi ukrainien corrompu et terroriste de Kiev et exécuté par les sbires et les bourreaux de ses services secrets meurtriers, le SBU, qui a été et continue d'être dirigé par les deux services secrets les plus cruels et les plus impitoyables de l'Occident collectif, le MI6 britannique et la CIA américaine. Tout comme l'OTAN et l'UE, avec leurs gouvernements vassaux dirigés par des fonctionnaires corrompus et des clowns, ils répandent des océans de mensonges et de tromperies afin de maintenir leur hégémonie et leur objectif d'uniformisation total des peuples, et de justifier leur confrontation malveillante avec Moscou, qui n'a qu'un seul but: préparer une guerre contre la Fédération de Russie.

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Tout cela en fait l'archétype du mal. Darya Douguina, qui, dans ses recherches scientifiques, menées depuis le déclenchement de la guerre dans le Donbass et l'opération militaire spéciale, s'est intéressée d'une part au mouvement de l'OTAN vers l'Est et à la menace évidente d'encerclement de la Russie qui en découlent, et d'autre part à la lutte la plus efficace contre le mondialisme et le libéralisme, y compris leur défaite totale, a un jour qualifié le champ de bataille de « lieu du chaos ».

Si cela s'intensifie maintenant dans le Donbass, où l'Occident collectif, l'OTAN et les chiens enragés du régime criminel de Kiev se battent pour un monde sombre dominé par l'hégémonie mondiale du mal, et où l'autre camp se bat pour la liberté des peuples et un monde multipolaire lumineux, alors cette lutte est une lutte pour la vérité de la tradition éternelle.

Elle était une chrétienne orthodoxe fervente, engagée au premier plan lorsqu'il s'agissait de son grand pays et de son peuple russe bien-aimé, tout autant que la défense quotidienne des idées politiques de son père Alexandre Douguine, dont l'idée cardinale d'un empire sous la forme d'une confédération géopolitique de peuples et de groupes ethniques était déjà née pendant la Seconde Guerre mondiale: un monde multipolaire avec des communautés organiques partageant un destin commun, la théorie du grand espace de Carl Schmitt.

L'Occident collectif, dont l'objectif est un nouvel ordre mondial fondé sur l'idée de "One World", sur le nihilisme, l'anti-humanisme et le racisme culturel, a détruit la tradition, la famille, la religion, tout ce qui est beau et sublime et a légalisé les vices du néo-féminisme, du « wokisme », des communautés queer LGTB et homo, y compris leurs messes noires et leurs réseaux pédophiles, le totalitarisme libéral, le politiquement correct et tout ce qui reste de sain et de bon dans l'être humain.

En réalité, il s'agit là de la lutte ancienne et pourtant éternellement nouvelle entre le Katechon et l'Antéchrist, entre les démons de l'enfer, les anges déchus et les anges bons qui servent Dieu avec fidélité et courage, et qui, comme l'archange Michel, n'hésitent pas à prendre les armes pour détruire une fois pour toutes le mal qui existe réellement.

Darya se trouvait également sur ce front, dont l'optimisme eschatologique ne lui permettait jamais de douter ni de désespérer, car elle n'était pas seulement une militante métapolitique exemplaire, mais aussi une philosophe engagée au sens classique du terme, fière, gracieuse, radicale, une jeune femme simple, naturelle et authentique. Regardez les visages déformés par la haine, l'envie, la méchanceté et la stupidité de nos sorcières politiques vertes, gauchistes et libérales, qui nous sont présentées jour après jour à la télévision publique, et vous comprendrez ce que nous voulons dire lorsque nous nous extasions sur la beauté intérieure et extérieure de Darya et sur sa féminité naturelle.

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Lorsque nous pensons aujourd'hui à Dascha, comme l'appelaient ses parents bien-aimés et ses bons amis, à l'occasion du troisième anniversaire de sa mort, c'est aussi parce qu'elle nous rappelle une autre jeune femme qui a mené un combat acharné: la pucelle de Domrémy, Jeanne d'Arc. Battue et trahie, elle se tenait devant son juge qui lui demandait cyniquement si elle ne croyait pas que Dieu aimait aussi les Anglais. Elle répondit avec franchise: « Je ne sais pas si Dieu aime ou déteste les Anglais, je sais seulement qu'ils doivent être chassés de France ! ». Sa mort sur le bûcher fit de cette jeune femme Sainte Jeanne.

Nous ne doutons pas un instant que la mort de Dascha la rendra immortelle, et pas seulement pour nous, et qu'elle occupera à jamais une place dans nos cœurs et nos pensées. Nous sommes certains qu'avec l'aide de la profondeur de sa foi et du Dieu tout-puissant, elle nous donnera sa bénédiction à tous ceux qui, ici sur terre, poursuivons sans hésiter jusqu'à la victoire finale sa croisade contre la nature totalitaire de l'Occident collectif, la dégénérescence culturelle, l'abîme nihiliste, la dictature du relativisme et la normalisation de la perversion. Et elle nous rappellera en même temps sa propre motivation, la devise de sa chaîne Telegram : VITA EST MILITIA TERRAM (« La vie est guerre sur terre ! »)

Werner Olles

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samedi, 16 août 2025

L'accord de paix de Washington marque l'humiliation de la Russie dans le Caucase

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L'accord de paix de Washington marque l'humiliation de la Russie dans le Caucase

Trahison en Arménie et en Azerbaïdjan

Alexandre Douguine

Alexandre Douguine dénonce la paix négociée à Washington entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie et la considère comme une humiliation brutale pour la Russie, un effondrement total de sa politique dans le Caucase du Sud et une trahison qui exige une justice visible à l'encontre des responsables.

L'histoirique de l'accord de paix signé entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie à Washington est une honte pour nous. Il vaut mieux affronter certaines choses directement. Si quelqu'un nous a humiliés, insultés, castrés, violés, alors au lieu de dire « c'est comme ça » ou « ce n'est rien, ça guérira », il vaut mieux regarder la vérité en face.

Car c'est véritablement une humiliation brutale pour la Russie. Il n'y a pas si longtemps, nous considérions l'Azerbaïdjan, l'Arménie et le Haut-Karabakh comme faisant partie de notre territoire. Nous y administrions ces territoires. Puis nous y avons renoncé, mais nous pensions avoir conservé une influence, par exemple sur le Karabakh, grâce à une Arménie qui nous était favorable. Puis, sous Pashinyan, l'Arménie a cessé de nous écouter et a commencé à équilibrer ses relations avec l'Azerbaïdjan. Nous avons décidé de nous lier d'amitié avec l'Azerbaïdjan. Aujourd'hui, notre politique dans le Caucase du Sud s'est effondrée de manière catastrophique. Oui, il reste encore la Géorgie, qui sous Ivanishvili est devenue moins agressive par rapport à son ancienne russophobie, mais tout le reste est un échec total.

C'est exactement ainsi qu'il faut comprendre la situation. Cela signifie qu'il y a des responsables. Il y a des gens qui ont conseillé à notre président d'agir ainsi, de construire des relations de cette manière avec Bakou, Erevan et Stepanakert. Un échec est un échec. Une humiliation est une humiliation. Le fait qu'aujourd'hui Aliyev – que nous avons efficacement aidé pendant la guerre du Karabakh – et Pashinyan – qui s'est soulevé contre nous – travaillent pour notre ennemi est une gifle. Cette gifle ne vient pas des États-Unis ou de l'Occident, qui sont de toute façon nos ennemis. C'est un coup porté de l'intérieur.

Ces mêmes personnes au sein de la Russie qui ont orchestré cela, en insistant pour « s'en occuper elles-mêmes » et en rejetant toute ingérence extérieure, devraient, si Poutine avait son mot à dire, être condamnées à la peine ultime. Cependant, nous avons suspendu la peine de mort ; nous nous targuons d'être humains. Après un échec catastrophique, monstrueux et humiliant pour le pays et pour notre société, ce qui suit souvent n'est qu'une promotion. Un homme a tout volé, tout ruiné, trahi tout le monde, et il obtient un poste plus élevé.

Bien sûr, c'est une situation malsaine. Notre peuple et notre société veulent que justice soit faite. Nous ne voulons pas de sang, nous ne voulons pas de violence, mais nous voulons la justice. Quand nous voyons que les responsables de l'effondrement total de notre politique dans le Caucase du Sud restent totalement impunis, c'est humiliant. La signature de cet accord à Washington montre notre nullité, le fait que nous ne contrôlons rien, même dans l'espace post-soviétique. Qui, dans ce cas, nous prendra au sérieux à un niveau supérieur ?

Cette douleur, cette insulte, cette gifle doivent être comprises précisément comme une gifle à chacun d'entre nous, à chaque Russe. Il ne sert à rien de dire: «Comme ils sont mauvais ! Nous vous avions bien dit que Pashinyan était un toutou de Soros et qu'Aliyev était un scélérat qui travaille pour Erdogan et trahit notre amitié».

Ce ne sont pas des arguments. Quelle que soit l'opinion que l'on ait de Pashinyan et d'Aliyev, leurs actions doivent être combattues de front.

Comme le disait mon ami Yevgeny Vsevolodovich Golovin :

« Affrontez le monde extérieur comme vous affronteriez un coup : sans détourner le regard ».

Il ne faut pas dire: «Et alors, on m'a cassé une dent ? Elle me faisait mal depuis longtemps et j'avais de toute façon l'intention de la faire enlever». Il ne faut pas édulcorer la douleur. Ce qui s'est passé avec Aliyev et Pashinyan est une humiliation pour nous. C'est exactement ainsi qu'il faut le prendre. C'est plus sain et plus honnête. Nous avons perdu. Nous avons commis une erreur en confiant le travail à faire avec l'Arménie et l'Azerbaïdjan à des personnes qui n'étaient absolument pas compétentes. Il n'y a pas d'autre façon de l'expliquer. Si nous ne considérons pas cela comme un échec, si nous n'acceptons pas cette douleur, nous cesserons d'être des êtres humains et une civilisation souveraine.

Bien sûr, justice doit être faite. Ceux qui ont conduit notre pays à un tel résultat en matière de politique étrangère dans notre voisinage immédiat doivent être punis de manière claire et visible. Cela doit cesser. Il est temps de confronter tous ceux qui sont derrière ce désastre: les responsables qui ont façonné notre politique dans le Caucase du Sud, les diasporas qui l'ont influencée et les lobbyistes étrangers qui l'ont poussée vers l'échec. Soit nous sommes un empire, une civilisation souveraine, soit nous méritons tout ce que nous avons vu à Washington, lorsque nos deux « alliés » léchaient les bottes de notre ennemi.

Par conséquent, si les responsables de tout cela s'en tirent sans être punis, je n'ai pas de bonnes nouvelles. Bien sûr, nous sommes un grand peuple. Mais si nous ne considérons pas l'échec comme un échec, la trahison comme une trahison et l'humiliation comme une humiliation, alors nous ne valons rien.

vendredi, 15 août 2025

Douguine sur l'Alaska et la doctrine Monroe eurasienne

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Douguine sur l'Alaska et la doctrine Monroe eurasienne

Des erreurs du passé à une nouvelle vision de la puissance russe

Alexandre Douguine

Alexandre Douguine évoque la vente de l'Alaska et l'effondrement de l'Union soviétique comme des leçons à tirer de la perte de puissance, appelant à une doctrine Monroe eurasienne pour contrer la domination américaine.

Le célèbre philosophe Alexandre Douguine s'est exprimé sur ce qu'il considère comme la plus grande erreur de la Russie, un acte qui, selon lui, fait passer la vente de l'Alaska pour une capitulation relativement mineure des intérêts nationaux.

Les débats en ligne ont enflammé les esprits à propos de la rencontre prévue cette fin de semaine en Alaska entre le président russe Vladimir Poutine et le président américain Donald Trump.

Le choix inattendu du lieu a relancé le débat sur la pertinence de la vente de l'Alaska aux États-Unis par la Russie. Les partisans de cette décision soulignent qu'à l'époque, le budget du pays avait été gravement affecté par la guerre de Crimée et que cette vente avait permis de lever des fonds dont le pays avait un besoin urgent. Ces fonds ont été investis dans l'extension du réseau ferroviaire et le développement des régions de l'Amour et du Primorié. L'accord a également renforcé les relations de la Russie avec les États-Unis et affaibli l'influence britannique en Amérique du Nord. En outre, la Russie a acquis les plans et la technologie de production du fusil Berdan, qui a permis le réarmement de l'armée et contribué à venger sa défaite dans la guerre de Crimée pendant la guerre russo-turque.

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Les détracteurs rétorquent que l'Alaska a été vendue pour une fraction de sa valeur réelle. La richesse de ses ressources — or et pétrole — vaut plusieurs fois plus, voire plusieurs centaines de fois plus que le prix encaissé suitye à la vente. De plus, cette vente a permis d'affirmer définitivement la doctrine Monroe, une politique américaine déclarant que toute l'Amérique du Nord et du Sud ainsi que les îles des Caraïbes relevaient de la sphère d'influence américaine. Si les bases militaires russes étaient restées en Alaska, elles auraient constitué un puissant moyen de dissuasion pour les États-Unis, qui aujourd'hui attisent les conflits dans le monde entier tout en bénéficiant de la sécurité offerte par la distance géographique et l'absence de menaces directes.

Douguine reconnaît que la vente de l'Alaska était une erreur, que Moscou s'efforce aujourd'hui de compenser en élaborant sa propre doctrine Monroe, qui s'étend à toute l'Eurasie.

Il considère toutefois que les politiques de Mikhaïl Gorbatchev et de Boris Eltsine ont été des erreurs bien plus graves. Le premier a démantelé l'Union soviétique, le second a cédé la Crimée et le Donbass à l'Ukraine, tout en démantelant partiellement et en vendant aux oligarques le grand héritage de l'Union soviétique.

« Une vaste Union eurasienne, voilà notre doctrine Monroe pour l'Eurasie. Ils ont leur propre doctrine Monroe, nous avons la nôtre. Bien sûr, l'Alaska n'aurait pas dû être vendu. Mais même ainsi, ce n'était pas le même genre de folie [de comportement absurde et illogique – NDLR] qui a accompagné Gorbatchev et Eltsine. Car cela dépassait les bornes », a déclaré Douguine.

Il a ajouté qu'aujourd'hui, la Russie attire l'Inde, la Turquie et l'Iran dans son orbite tout en restaurant progressivement son influence sur les territoires de l'ancien Empire russe, rendant ainsi de plus en plus viable une version eurasienne de la doctrine Monroe.

Il a été annoncé précédemment que le président américain Donald Trump et le président russe Vladimir Poutine tiendraient une réunion bilatérale en Alaska à la fin de la semaine pour discuter de l'Ukraine. Certains experts estiment que le choix du lieu n'est pas fortuit. Premièrement, l'Alaska rappelle une époque où la Russie et les États-Unis étaient alliés contre la Grande-Bretagne. Deuxièmement, cela indique que ces négociations sont désormais une affaire exclusivement américaine et russe, l'Europe étant exclue de la table des négociations après avoir alimenté le conflit par tous les moyens pendant quatre ans.

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lundi, 11 août 2025

Trump et Poutine: pourquoi l'Alaska?

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Trump et Poutine: pourquoi l'Alaska?

Par Elena Fritz

Source:  https://www.compact-online.de/trump-und-putin-warum-gerad...

L'Alaska, justement, pourrait-on dire en référence à un titre de film célèbre. Le lieu du sommet entre Trump et Poutine n'a pas seulement été choisi pour sa valeur symbolique, il revêt également une dimension stratégique.

Dans l'édition COMPACT « Vladimir Poutine : l'histoire de la Russie », vous en apprendrez davantage sur son agenda géopolitique ancré dans l'histoire, traduit en allemand. Pour en savoir plus: https://www.compact-shop.de/shop/sonderausgaben/edition-1....

Le choix de l'Alaska comme lieu du sommet du 15 août n'est pas un hasard. C'est l'État américain le plus proche de la Russie sur le plan géographique et historique, avec un message implicite: « Loin de tout le monde, surtout de l'UE ». Politiquement ancré dans le camp républicain et loin des réseaux mondialistes, des services secrets britanniques ou des structures de lobbying ukrainiennes, l'Alaska offre une occasion rare de mener des discussions sensibles sans fuites ni provocations ciblées.

Il est également idéal en termes de sécurité : survol minimal de territoires étrangers, contrôle maximal de l'environnement.

L'Arctique, clé stratégique

L'Alaska n'est pas seulement un symbole, il représente également la dimension arctique de la politique mondiale. En mai dernier, le Conseil européen des relations étrangères avait déjà mis en garde contre le fait que Moscou pourrait utiliser l'Arctique comme terrain de négociation avec Washington.

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Un scénario spéculatif, mais digne d'intérêt: une limitation de la présence chinoise dans l'Arctique en échange d'un soutien moindre des États-Unis à Kiev. Une chose est claire: l'Arctique n'est pas seulement un gisement de matières premières et une route maritime, il fait partie de l'équilibre mondial des forces entre les États-Unis, la Russie et l'Europe.

Signaux antérieurs et ligne de conduite de Trump

Février 2025, Riyad : un diplomate russe basé au Canada était également présent à la table des négociations russo-américaines, ce qui indique clairement l'importance accordée à l'Arctique. Dans le même temps, Trump a annoncé son intention de rattacher le Groenland aux États-Unis et d'intégrer davantage le Canada.

Cela prolongerait considérablement la côte arctique américaine et intensifierait la concurrence pour le plateau continental arctique. Contre-argument de la Russie : la dorsale de Lomonossov, qui étaye ses propres revendications sur une grande partie du plateau continental arctique.

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Perspectives

La rencontre en Alaska est plus qu'une simple discussion sur l'Ukraine. Elle s'inscrit dans le cadre d'un redécoupage de l'architecture du pouvoir mondial, avec l'Arctique comme monnaie d'échange potentielle, accompagnée de questions relatives au contrôle des armements, à la stabilité stratégique et à l'énergie. À Anchorage, un dialogue pourrait s'engager qui profilera non seulement les deux présidents, mais façonnera aussi l'ordre mondial à venir.

Plus important que jamais : ne lisez pas sur Poutine, mais lisez-le lui-même ! Dans l'édition COMPACT « Vladimir Poutine : l'histoire de la Russie », vous en apprendrez davantage sur son programme géopolitique ancré dans l'histoire, traduit en allemand. Le président russe dans ses propres mots. Commandes: voir lien supra.

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dimanche, 10 août 2025

L'Inde et la Russie forgent une alliance civilisationnelle - Les flux commerciaux libérés de la domination lointaine

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L'Inde et la Russie forgent une alliance civilisationnelle

Les flux commerciaux libérés de la domination lointaine

Constantin von Hoffmeister

Source: https://www.eurosiberia.net/p/india-and-russia-forge-a-ci... 

Sous le ciel voûté des empires, les seigneurs forgerons de l'Orient concluent leur pacte, et les montagnes elles-mêmes répondent par le rugissement du fer.

Le 6 août 2025, dans les salles du Vanijya Bhawan (photo, ci-dessous), dans la capitale de la civilisation hindoue, deux grandes puissances, l'Inde et la Russie, ont scellé le « Protocole de la 11ème session » de leur groupe de travail sur la modernisation et la coopération industrielle. Cet acte dépasse le cadre des traités ordinaires et entre dans le domaine de la géopolitique en tant qu'art sacré.

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Les domaines concernés par cet accord sont les piliers de la souveraineté. Le protocole touche profondément à des domaines stratégiques. Au-delà des industries traditionnelles telles que « l'aluminium et le transport ferroviaire », il aborde les éléments vitaux de l'indépendance technologique: « la coopération dans le domaine aérospatial », « l'extraction des terres rares et des minéraux critiques », « la gazéification souterraine du charbon » et la création d'« infrastructures industrielles » avancées. Ces secteurs constituent les fondements matériels et énergétiques qui permettent à un État-civilisation de tracer sa propre voie.

Du toit du monde au bord des mers gelées, le courant de la guerre coule, liant les royaumes dans les tendons du destin.

Présidant ce congrès des puissants, le secrétaire indien du DPIIT (Département pour la promotion de l'industrie et du commerce intérieur), Amardeep Singh Bhatia, et le vice-ministre russe Alexey Gruzdev, étaient flanqués de quatre-vingts délégués: fonctionnaires, ingénieurs et stratèges. Leur rassemblement était une convergence de deux pôles civilisationnels, unis dans la conviction que le destin se manifeste à travers la volonté, la technologie et une vision commune. C'est le lien qui unit un axe traversant les continents, transportant un courant vivant de l'Himalaya à l'Arctique.

Les navires noirs transportent la sève des royaumes, et les vents salés transportent l'odeur du pouvoir à travers les horizons de la Terre.

Les chiffres économiques ne mentent pas. Depuis le début de la guerre en Ukraine, le commerce a explosé, passant d'environ 13 milliards de dollars en 2021-2022 à plus de 68,7 milliards de dollars pour l'exercice 2024-2025, alimenté par les importations massives de pétrole et d'engrais russes par l'Inde, qui ont consolidé la position de la Russie comme l'un des principaux partenaires commerciaux de l'Inde. L'Inde achète désormais environ 35 à 40% de son pétrole brut à la Russie, ce qui représente 50 milliards de dollars d'importations énergétiques pour l'exercice 2024-2025.

À l'aube métallique, les couloirs s'étendent au-delà des cartes; des veines d'acier pompent des rêves bruts dans les poumons des continents, et le vieux monde, tremblant dans un coin, sent l'ozone de sa propre éclipse.

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Les transactions s'effectuent en roupies et en roubles, un abandon délibéré de la dépendance au dollar, rendu possible par des négociations entre les banques centrales et des accords visant à contourner l'étranglement financier occidental. Environ 90% des échanges bilatéraux s'effectuent désormais en monnaie locale, créant un réseau financier hors de portée de l'influence atlantique.

L'or et les céréales voguent sur le grand fleuve des rois, sans ingérence étrangère, vers les trônes qui commandent leur propre destin.

Ce bilan n'est pas le fruit du hasard. L'Inde et la Russie sont en train de construire un circuit sanguin économique qui bat au rythme de l'autonomie. Le fleuve du commerce traverse désormais Moscou et New Delhi, et non plus les couloirs SWIFT. Les flux commerciaux sont libérés de la domination lointaine.

L'ancienne couronne tremble sur un front flétri, tandis que de nouveaux seigneurs de guerre s'élèvent sous les bannières que les anciens dieux favorisent désormais.

Du côté du monde atlantique, la résistance prend la forme de décrets et de droits de douane. Le jour même de la signature de cet accord, Trump, se posant en porte-parole d'un trône unipolaire en déclin, a publié un décret imposant des droits de douane sur les importations indiennes et menaçant de sanctions secondaires ceux qui s'engagent dans le secteur énergétique russe. Loin de démontrer une suprématie durable, ce geste révèle le réflexe d'un empire confronté à son propre éclipse stratégique.

Dans les salles des bâtisseurs et des rois, les marteaux résonnent comme des tambours de guerre, et les plans des empires sont gravés à la lueur du feu du destin.

Le langage de la politique mondiale passe désormais d'un universalisme imaginaire à un champ de projets civilisationnels distincts. L'Inde et la Russie apparaissent comme des architectes actifs, et non comme des bénéficiaires passifs. Leur coopération s'étend à la production de défense, à la recherche scientifique et aux initiatives de villes intelligentes, mêlant la vision « Make in India » de l'Inde à la maîtrise technique russe. Chaque projet devient un rituel de création, affirmant la prérogative des civilisations à façonner leur propre destin technologique.

L'ancien empire se dresse sur des pierres qui s'effritent, tandis que les nouveaux royaumes marchent vers le soleil levant, leurs bannières brillant du feu d'une gloire ascendante.

Ce protocole n'est pas une note de bas de page dans la diplomatie ; c'est la carte d'un monde à venir. Chaque soufflerie assemblée, chaque ligne ferroviaire forgée, chaque gisement de terres rares exploité dans le cadre de cette alliance ajoute une brique à l'édifice d'un ordre multipolaire. Les États-Unis, avec leurs flottes et leurs banques, se dressent désormais comme un souverain vieillissant entouré par la couronne de nouvelles puissances. Des chambres de New Delhi aux mines de Sibérie, le message est clair : l'ère d'un centre unique est révolue ; l'ère des centres multiples a commencé.

mardi, 05 août 2025

Menaces de Trump: l'Inde ne se laisse pas impressionner - Le pays asiatique veut continuer à acheter du pétrole à la Russie

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Menaces de Trump: l'Inde ne se laisse pas impressionner

Le pays asiatique veut continuer à acheter du pétrole à la Russie

Kurt Koriath

Source: https://aufgewacht-online.de/trump-drohungen-indien-laess...

Malgré les menaces du président américain Donald Trump, l'Inde prévoit de continuer à acheter du pétrole bon marché à la Russie, ont déclaré des représentants du gouvernement indien au New York Times (NYT) dans un article publié le 2 août.

Le 30 juillet, Trump a annoncé un droit de douane de 25% pour l'Inde ainsi qu'une sanction non précisée pour la poursuite des achats de produits pétroliers russes. Trump a également menacé d'imposer des droits de douane secondaires de 100% sur le pétrole russe d'ici le 8 août si Moscou ne parvenait pas à un accord pour mettre fin à la guerre en Ukraine.

Deux hauts responsables indiens ont déclaré au NYT que l'annonce de la Maison Blanche n'entraînerait aucun changement dans la politique énergétique ou commerciale de l'Inde. Le gouvernement n'a « donné aucune instruction aux compagnies pétrolières » de réduire leurs importations en provenance de Russie, a déclaré l'un d'eux.

Les relations avec la Russie restent « stables »

Randhir Jaiswal, porte-parole du ministère indien des Affaires étrangères, a déclaré lors d'une conférence de presse le 1er août que les relations entre l'Inde et la Russie restaient « stables ».

« Nos relations bilatérales avec différents pays sont fondées sur leurs propres mérites et ne doivent pas être considérées à travers le prisme d'un pays tiers », a déclaré M. Jaiswal. « L'Inde et la Russie ont un partenariat stable et éprouvé. »

L'Inde est le deuxième plus grand importateur de pétrole russe après la Chine. Longtemps dépendante du pétrole du Moyen-Orient, l'Inde a fortement augmenté ses importations en provenance de Russie depuis le début de la guerre en Ukraine, profitant ainsi de remises importantes et de la baisse de la demande en Europe.

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Les espoirs de Trump prématurés ?

Après les avertissements de Trump concernant des droits de douane élevés sur les importations secondaires, Reuters a rapporté le 30 juillet que les raffineries publiques indiennes avaient suspendu leurs achats de pétrole russe pendant au moins une semaine. Bloomberg a ensuite rapporté le 1er août que plusieurs pétroliers transportant du pétrole brut russe étaient au large de la côte ouest de l'Inde, tandis que les raffineries du pays cherchaient des alternatives.

Trump a commenté ces informations dans une déclaration aux médias le 1er août.

« J'ai entendu dire que l'Inde n'achèterait plus de pétrole à la Russie », a-t-il déclaré.

« C'est ce que j'ai entendu. Je ne sais pas si c'est vrai ou non. C'est une bonne initiative. Nous verrons ce qui se passera. »

Les déclarations des responsables indiens au NYT suggèrent que les informations faisant état d'un changement majeur de la politique commerciale étaient peut-être prématurées. Les analystes de Kpler, une société qui recueille des données sur le transport maritime, ont déclaré au NYT que la baisse des importations de pétrole brut russe en Inde en juillet coïncidait avec une période où l'Inde achète généralement moins de pétrole en raison de la mousson et des travaux de maintenance prévus dans les raffineries.

Kurt Koriath

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jeudi, 31 juillet 2025

Le prochain conflit de type "Nord Stream": le gouvernement Orbán veut son propre oléoduc pour le pétrole russe

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Le prochain conflit de type "Nord Stream": le gouvernement Orbán veut son propre oléoduc pour le pétrole russe

Budapest/Bruxelles. Les fissures au sein de l’UE deviennent toujours plus profondes. Alors que la Commission européenne à Bruxelles prévoit une interdiction totale d’importation de gaz et de pétrole russes d’ici 2027, la Hongrie entend suivre sa propre voie. Comme l’a annoncé le ministre des Affaires étrangères Péter Szijjártó sur les réseaux sociaux, la Hongrie, la Serbie et la Russie se sont entendues pour parfaire la construction d’un nouvel oléoduc destiné à poursuivre l’approvisionner de Budapest en matières premières bon marché. « En collaboration avec nos partenaires serbes et russes, nous avançons dans la construction d’un nouvel oléoduc  entre la Hongrie et la Serbie », a écrit Szijjártó. « Pendant que Bruxelles interdit l’énergie russe, rompt des connexions et bloque des routes, nous avons besoin de plus de sources, de plus de routes. La Hongrie ne sera pas victime de ces décisions catastrophiques. » 

L’annonce intervient à un moment critique. L’UE prévoit non seulement de cesser toutes les importations d’énergie russes – y compris le GNL – d’ici 2027, mais souhaite également déclarer obsolètes les contrats d’approvisionnement à long terme. De plus, le négociateur du Parlement européen pour l’interdiction de ces importations demande de raccourcir le délai et d’y intégrer davantage le pétrole via pipelines. Mais la Hongrie, qui couvre encore environ 70% de ses besoins en pétrole provenant de la Russie, dont la moitié de Lukoil, refuse de suivre ces plans. 

Déjà cet été, l’Ukraine avait stoppé le transit de pétrole russe vers la Hongrie et la Slovaquie – une étape que Budapest considérait comme une tentative de chantage politique. Depuis, le gouvernement Orbán cherche des alternatives pour se rendre indépendant des routes de transit ukrainiennes et, en dehors des directives de l’UE, pour continuer à se fournir en énergie. Selon les médias hongrois, le nouvel oléoduc pourrait être achevé dès 2027 – juste au moment où l’interdiction d’importation de l’UE devrait entrer en vigueur. 

Le conflit entre Budapest et Bruxelles va bien au-delà de la politique énergétique. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán critique vivement les plans budgétaires de l’UE, qu’il qualifie de « sauvetage pour l’Ukraine ». « Jusqu’à 25 % de l’argent va directement à Kiev, 10 % supplémentaires sont utilisés pour rembourser de vieilles dettes. Que reste-t-il ? Moins que jamais. Je ne soutiendrai jamais cela », a déclaré Orbán. 

Avec cette initiative pour l'oléoduc, la Hongrie réaffirme une fois de plus son rejet de la politique de sanctions de l’UE – et mise sur une coopération étroite avec Moscou et Belgrade. Alors que Bruxelles mise sur la sécurité énergétique par diversification, Budapest insiste sur des solutions pragmatiques pour garantir des prix énergétiques bas. « Nous construirons des oléoducs et exploiterons de nouvelles sources d’approvisionnement, afin que la population hongroise continue de payer les coûts énergétiques les plus bas en Europe, » a affirmé Szijjártó. 

La décision risque d’aggraver encore davantage les tensions entre la Hongrie et l'UE – notamment face au fait que Bruxelles a déjà bloqué des milliards d’euros d’aides pour Budapest. Avec ce projet d'oléoduc, la Hongrie montre une fois de plus qu’elle n’est pas prête à se plier au diktat bruxellois sur des questions essentielles (mü)/

Source: Zu erst, juillet 2025. 

mardi, 29 juillet 2025

L’avenir de la Russie au-delà de l’Occident - L’Europe a disparu, la Russie s’éveille

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L’avenir de la Russie au-delà de l’Occident

L’Europe a disparu, la Russie s’éveille

Alexander Douguine

Alexander Douguine déclare qu’à mesure que l’Occident dépérit, la Russie doit s'efforcer de devenir un Etat-civilisation en reprenant la voie qu’elle avait empruntée lorsqu’elle s’était séparée de l’Europe.

Aujourd’hui, beaucoup citent la remarque d’Alexey Gromyko selon laquelle « la Russie ressemble actuellement plus à l’Europe traditionnelle que les pays d’Europe eux-mêmes ». Je pense qu’il voulait exprimer quelque chose de très précis. Un jour, alors que j’étais en Argentine, j’ai crié : « Quel excellent pays européen, c’est ! » Plus tard, lorsque j’ai visité la France (avant même les sanctions), j’ai été horrifié par l'état dans lequel elle se trouvait : « Quel dépotoir, c’est ! ».

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Le fait est que beaucoup d’Européens qui viennent en Russie sont ravis. Cela leur rappelle l’Europe, mais dans une phase passée, disparue. C’est l’Occident qui n’existe plus dans l’Occident. On peut le rencontrer en Amérique latine ou ici chez nous. De plus, bientôt, certaines sociétés asiatiques pourraient être plus "occidentales" que l’Occident lui-même. La dégénérescence, l’échec total, la transgression et le déclin qui ont frappé les sociétés occidentales ne leur permettent plus d’être considérées comme des civilisations occidentales traditionnelles.

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Bien sûr, cela ne signifie pas que nous avons échangé nos places. Il faut faire très attention ici. Gromyko veut clairement dire que l’Occident s’est perdu, alors que nous ne le sommes pas encore. Mais en vérité, nous sommes à une étape de l'occidentalisation et de la modernisation qui paraît encore relativement convenable, précisément en raison de notre "retard". Si nous étions entrés davantage dans la logique de la civilisation occidentale, si nous l’avions suivie de plus près, je pense que nous vivrions à peu près la même chose: un cauchemar, une dégénérescence, un grand nombre de migrants sales et sans but qui réclament des droits, une population locale terrorisée, des pervers libéraux totalitaires qui échappent à la loi tout en commettant des crimes horribles. Tout cela nous a également menacés, jusqu’à l'effondrement final et la disparition de cette gabegie.

Le fait que nous ayons freiné à un certain moment et refusé de suivre davantage encore l’Occident est ce qui crée ce sentiment d’un Russie confortable, sympathique, en développement, ce que Gromyko a noté. Il n’y a rien de mal à cela ; c’est une observation très précise.

Comme Tucker Carlson l’a dit : si quelque chose ressemble encore à l’Occident, c’est la Russie, Moscou et Saint-Pétersbourg.

Oui, cela ressemble vraiment à cet Occident révolu. Pendant ce temps, Rome, Paris et Londres sont devenues des dépotoirs, où il est souvent difficile de trouver un Blanc ou des valeurs traditionnelles. Nous ne parlons pas des pays asiatiques ou africains. Bien que l’Afrique elle-même soit un monde magnifique avec sa propre culture. Les pays islamiques sont aussi admirables ; les musulmans traditionnels sont tout simplement merveilleux. Mais chacun devrait vivre dans son propre pays. Pourtant, ils sont délibérément amenés en Europe par les mondialistes pour effacer la population locale jusqu’à l’invisibilité, puis pour la remplacer simplement par des robots.

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En même temps, je tiens à souligner que la déclaration de Gromyko (photo) n’est pas un argument qui devrait nous guider tous. Elle ne peut pas servir de base à la mission de la Russie, à sa stratégie ou à notre souveraineté. C’est simplement une observation facile, énoncée par un membre de l’élite russe, par un héritier d’une famille soviétique bien connue, qui profite de la vie et remarque que tout fonctionne bien ici, alors que tout s’est effondré et fonctionne de mal en pis en Occident. En d’autres termes, ce n’est qu’un commentaire fugace d’un observateur extérieur.

En réalité, c’est une remarque aux assises très fragiles et instables. Car en vérité, la Russie est une civilisation distincte. Nous nous sommes séparés de la civilisation occidentale au 11ème siècle et sommes devenus une civilisation indépendante au 15ème siècle. Nous avons pris conscience de nous-mêmes aux 16ème et 17ème siècles, et puis, suite à des succès variés, nous avons tenu bon — parfois nous avons reculé, parfois nous sommes revenus à l'avant-plan. Aujourd’hui, c’est l’ère du retour à la conscience que nous sommes un État-civilisation. Notre président en parle, et de nombreux hauts responsables aussi.

En résumé, je trouve la remarque de Gromyko quelque peu déplacée. Il ne s’agit pas de se réjouir d’être en retard par rapport à l’Occident, et que tout ici soit propre et en ordre, que tout fonctionne, et que les gens normaux demeurent en place — alors que tout cela a disparu en Occident. Après tout, c’est aussi ce que beaucoup de nos invités d’Amérique et d’Europe disent — ceux qui soutiennent un monde multipolaire et rejettent la dictature libérale qui règne en Occident.

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Les choses peuvent être « merveilleuses » pour nous, d’une certaine façon, mais ce n’est pas encore une merveille à la russe. Nous avons suivi l’Europe, mais nous avons pris du retard. Et il s’est avéré que prendre du retard était mieux que de suivre sans délais. Regardez simplement où tout cela a conduit l’Ukraine et beaucoup d’autres pays.

Ce dont nous avons besoin, c’est de notre propre civilisation. Nous devons nous reconnaître comme un État-civilisation. Nous devons construire une Grande Russie. Une Russie qui, même esthétiquement, sera différente — technologiquement aussi, en apparence extérieure à l'Occident et surtout psychologiquement différente. Elle ne peut pas être une autre Europe hédoniste qui serait à la traîne et à la périphérie, elle doit essayer de se couper des formes les plus toxiques que l’Occident adopte désormais. Cette approche ne durera pas longtemps.

Avancer vers l’Europe maintenant, c’est s’engager vers l’abîme, vers la décharge — vers le LGBT, vers d’autres formes de transgression, vers le féminisme, vers la chirurgie transgenre, vers le remplacement des humains par des biorobots, et vers le transfert du pouvoir à l’intelligence artificielle. Toutes ces formes de déchéance totale que nous voyons aujourd’hui en Occident devraient être in fine adoptées si nous avancions dans la direction de l’Europe. Et s’arrêter simplement à ce point médian ne fonctionnera pas longtemps.

Rester comme l’Europe d’autrefois n’est pas un projet. Ce n’est pas une vision d’avenir. L’avenir de la Russie est quelque chose de tout à fait différent.

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La Russie doit devenir elle-même. Et répondre à la question « Qu’est-ce que c’est, exactement, la Russie ? »: ce n’est pas simple. Mais une chose est claire: ce n’est pas l’Occident. Même nos Occidentalistes et libéraux ont commencé à comprendre que notre Russie, ce n’est pas l’Occident moderne. Pourtant, ils pensent encore: « Restons comme ça, figeons ce moment — il est si beau. »

Mais cela ne fonctionnera pas. Nous avons besoin de ressources pour l’avenir, nous avons besoin d’énergie, nous devons faire renaître des forces, nous avons besoin de visions — des visions d’un avenir spécifiquement russe. Sans cela, notre moment présent ne sera qu’une pause avant de tomber plus profondément dans l’abîme. Une chute vers laquelle nous nous précipitons déjà depuis 100 ans — surtout dans les années 1990.

Aujourd’hui, nous avons besoin d’un changement stratégique profond qui devrait nous mener vers un État-civilisation. Heureusement, notre président parle dans ces mêmes termes. Mais cela doit être élaboré en détail, décrit, et mis en œuvre. C’est le chemin que nous devons suivre.

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samedi, 26 juillet 2025

Le nouveau “Général Armageddon” de la Russie et la peur de la guerre totale en Occident

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Le nouveau “Général Armageddon” de la Russie et la peur de la guerre totale en Occident

Les négociations s’évanouissent ; le conflit reprend

Alexander Douguine

Alexander Douguine présente les pourparlers d’Istanbul comme un théâtre sans avenir et déclare que l’ère de la guerre totale a commencé.

Examinons comment le troisième tour de négociations à Istanbul a été couvert cette fois-ci par les médias. Tout à fait différemment des premier et deuxième tours.

Cette fois, l’information était chiche et laconique, comme si elle concernait une routine qui mènerait clairement nulle part. Les deux premiers tours étaient essentiellement les mêmes sur le plan du contenu, mais ils ont provoqué un frisson nerveux au sein de la société russe: les patriotes craignaient la trahison comme si c’était une sentence de mort, tandis que les libéraux silencieux et les occidentalisés de l’élite aspiraient à cette trahison avec un plaisir pervers. Cette tremblote ne pouvait être dissimulée. Maintenant, tout le monde comprend que la trahison n’arrivera pas, et pour le reste — personne ne s’y intéresse particulièrement.

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Dans les premiers tours, tout le monde, directement ou indirectement, était à l’écoute de la réaction de Trump. À tout moment, il pouvait venir lui-même, s'emporter furieusement contre Zelensky, exploser de rage face à la détermination de Poutine, et ainsi de suite. Il n’est allé nulle part, s’est énervé contre tout le monde, a vitupéré contre tout le monde, insulté tout le monde, puis est retourné à ses affaires — en l'occurrence dissimuler la liste d’Epstein et tenter de faire arrêter Obama.

Malgré l’excentricité de Trump, le comportement des États-Unis s’est avéré, curieusement, plutôt prévisible et peu différent de celui de Biden et des néocons — et nous avons appris à vivre et à fonctionner dans de telles circonstances. Ce n’est pas que Trump se soit complètement retiré, mais il ne semble pas prêt à faire quelque chose d’extrêmement mauvais (ni même quelque chose de bon) en ce moment. Cela signifie que la situation perdurera sur le long terme. Les 50 jours que Trump a déjà abandonnés ne signifient rien du tout. D’où l’attitude générale envers le troisième tour: le facteur Trump s’est estompé, et donc les négociations n’ont plus beaucoup de poids. Il n’y aura pas de miracle. Les nazis ukrainiens ne sont toujours pas prêts à se rendre, donc il n’y a rien à discuter.

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Il vaut la peine de s’arrêter sur le facteur Vladimir Medinsky (photo). Beaucoup croyaient à tort, faute de détails, qu’il était responsable de l’échec des premières négociations d’Istanbul en 2022, qui ont été suivies de réelles difficultés sur le champ de bataille pour la Russie. Il n’était pas en tort et, alors, comme maintenant, poursuivait une ligne fortement patriotique. C’est un homme intelligent qui ne vendra pas sa patrie. Le premier tour des nouvelles négociations a clairement montré cela. Ainsi, dans l’œil de ses alliés comme de ses ennemis, il est perçu comme un nouveau “Général Armageddon” ou quelque chose comme ça. Le fait qu’il soit historien ne fait qu’ajouter à la gravité: nous forgeons maintenant l’histoire de la Russie, et pour cela — pour obtenir la victoire — cette histoire doit être connue et comprise. C’est ainsi qu'apparaît le bon type d’historien.

En même temps, il ne faut pas surévaluer les protestations qui se déroulent actuellement à Kiev, afin d’éviter de retomber dans la panique. Tout d’abord, le nombre de personnes impliquées dans ces manifestations reste relativement faible, et ce n’est guère une tendance généralisée. Beaucoup restent fidèles au régime. C’est regrettable, mais c’est la réalité. Deuxièmement, le NABU (Bureau anti-corruption national de l’Ukraine) et le SAP (Procureur anti-corruption spécialisé) ne sont jamais que des structures soutenues par Soros. Elles ne feront jamais rien d’utile ou de bénéfique pour nous. C’est une évidence. Par conséquent, il est prématuré de considérer la position de Zelensky comme catastrophique ou même fragile. Ce qui signifie que Kiev n’est pas encore prête pour un dialogue substantiel avec nous.

Pendant ce temps, l’Europe se prépare à faire la guerre contre nous [la Russie] de manière directe et plus dure. Cela aussi ne doit pas être ignoré.

En un mot, il faut maintenant comprendre que la grande guerre est chose sérieuse, car elle se prolongera et sera totale. Il est temps de transformer la Russie en un pays sur pied de guerre. Combien de temps continuerons-nous à crier “Nous sommes pour la paix” ? Même si nous désirons effectivement la paix (mais certes pas à n’importe quel prix !), ils veulent surtout la guerre, eux, et ne cherchent pas à le cacher. L’Occident a pris sa décision: si l’Ukraine ne peut pas vaincre la Russie, alors l’Union européenne essaiera, et ce qui se passera ensuite, ils le découvriront plus tard. Une apocalypse nucléaire est tout à fait possible. L’état des sociétés occidentales s’est tellement dégradé que l’autodestruction atomique ne paraît plus une idée si terrible à leurs esprits tordus. Télécharger la conscience sur des serveurs dans le cloud puis s'autodétruire. Cela semble fou, mais ce n’est plus aussi invraisemblable qu’il y a quelques décennies.

Dans une telle situation, les négociations avec Kiev sont tout simplement dépourvues de sens — pour l’instant, du moins. Qu'elles se poursuivent ou soient mises en pause, cela ne change rien. Des assistants de Medinsky ou du personnel purement technique peuvent être envoyés au prochain tour. La nouvelle version de “Général Armageddon” a accompli sa mission. Brillamment. La prochaine étape est la signature d’un acte de reddition inconditionnelle. Cela peut très bien être fait par le président lui-même lors d’une rencontre avec Zelensky, qui a déjà commencé à rechercher une telle rencontre.

Mais pour que tout cela devienne réalité, nous devons commencer à convertir le pays de manière plus intensive à une économie de guerre. On disait autrefois que personne n’est prêt pour la guerre jusqu’à ce qu’elle commence. Cela dure déjà quatre ans et durera encore beaucoup plus longtemps, durement, terriblement. Il est temps de l’ouvrir dans nos cœurs et nos âmes.

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