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samedi, 03 décembre 2022

Les chemises noires du sionisme

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Les chemises noires du sionisme

par Georges FELTIN-TRACOL

Le 1er novembre dernier, pour la cinquième fois en trois ans, les Israéliens ont désigné un nouveau parlement. En raison de l’étroite superficie d’Israël, le mode de scrutin pratiqué est la proportionnelle de liste nationale avec un seuil d’attribution de sièges à 3,25 %. Ces nouvelles législatives confirment l’éclatement du paysage politique.

Les travaillistes fondateurs de l’État hébreu n’obtiennent que 3,69 %, soit quatre sièges sur cent vingt. La gauche laïque, les formations israéliennes d’origine arabe et les nationalistes du Foyer juif réalisent des contre-performances. Le parti centriste, Yesh Atid, de l’actuel chef du gouvernement, l’ancien journaliste Yaïr Lapid, arrive en deuxième position (13,97 % et 17 sièges). La mouvance « nationale-centriste » déçoit. La coalition de l'unité nationale de Benny Gantz récolte quatorze sièges. Israël notre Maison du nationaliste laïque russophone Avigdor Liberman ne conserve que six élus. Ces trois formations formaient une alliance gouvernementale anti-Likoud avec des partis de gauche et même le mouvement islamiste israélien. La défection de deux députés de cette majorité précaire qui ne tenait qu’à une seule voix a provoqué ces élections anticipées.

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Premier ministre de 1996 à 1999 et de 2009 à 2021, Benyamin « Bibi » Netanyahou gagne son pari et peut prétendre diriger Israël malgré le procès en cours contre lui pour corruption. Le « bloc des droites » autour du Likoud rassemble 64 élus parmi lesquels les partis clientélistes du Shas (religieux séfarades du Moyen-Orient) et du Judaïsme unifié de la Torah (religieux ashkénazes d’Europe centrale et orientale), dix-huit sièges au total. Il faut surtout prendre en compte les quatorze élus de l’entente ultra-nationaliste animée par Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir.

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Âgé de 42 ans, Bezalel Smotrich (photo) dont la famille est originaire d’Ukraine préside le Parti sioniste religieux. Favorable au « Grand Israël (Eretz Israël) » et à la primauté des règles judaïques dans la vie publique, Smotrich ne cesse pas de dénoncer le wokisme occidental et l’idéologie gendériste. Son comparse est encore plus radical puisque le système médiatique d’occupation mentale le qualifie de « suprémaciste juif » !

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Né en 1976, d’un père irakien et d’une mère kurde (il a existé une infime minorité kurde de confession juive), Itamar Ben Gvir (photo) dirige Force (ou Pouvoir ou Puissance) juive. Ses détracteurs le présentent en héritier spirituel du rabbin d’extrême droite Meir Kahane, fondateur et guide du mouvement Kach d’où procédera la sulfureuse Ligue de défense juive (LDJ). En 1984, le Kach entre au Parlement grâce à un positionnement anti-arabe assumé. Il préconise l’expulsion massive des Arabes d’Israël et des Palestiniens.

31qpLa5-eoL._SX195_.jpgEn 1990, l’historien Simon Epstein, futur auteur du Paradoxe français en 2005 qui bouleversa le récit historique officiel hexagonal sur la Collaboration et la Résistance, publiait Les chemises jaunes. Chronique d'une extrême droite raciste en Israël, une enquête plongeant dans les méandres de cette idéologie. Meir Kahane meurt assassiné à New York cette année-là. La Knesset interdit son mouvement et le range parmi les organisations terroristes.

Les propos haineux de Meir Kahane ont continué à se propager chez les colons et auprès des nouveaux arrivants. Par exemple, de nombreux Français naturalisés citoyens israéliens votent massivement pour Ben Gvir et Smotrich alors qu’ils s’indignaient récemment encore des progrès électoraux du FN – RN dans l’Hexagone. Incroyable schizophrénie politique...

Ben Gvir milite très tôt chez les ultra-nationalistes. Il salue l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin en 1995 et le massacre à Hébron perpétré par le colon extrémiste Baruch Goldstein en 1994. Sa radicalité contraint Tsahal à l’exempter de tout service militaire, un fait exceptionnel pour cette nation armée ! Avocat, il défend les colons avec qui il vit dans les enclaves avec ses six enfants. Ce redoutable tribun au style vestimentaire savamment débraillé et qui manie avec aisance la provocation rêve d’établir une théocratie juive en Israël.

Dès sa fondation en 1948, l’État hébreu est en effet confronté à une ambiguïté existentielle liée à sa définition d’« État juif et démocratique ». Faut-il comprendre que c’est une démocratie juive, un ensemble institutionnel juif qui accepte d’autres minorités ou bien que le judaïsme éclipse son caractère démocratique ? Le débat est loin d’être clos d’autant qu’émerge avec Ben Gvir et Smotrich une absence flagrante de filiation avec le sionisme révisionniste.

langfr-300px-Logo_of_the_Lehi_movement.svg.pngPromu par Vladimir Zeev Jabotinsky (1880 - 1940), le « Mussolini juif » selon David Ben Gourion, le sionisme révisionniste est un nationalisme juif radical qui inspire des organisations terroristes telles l’Irgoun de Menahem Begin, Premier ministre de 1977 à 1983, ou les très corporatistes völkischen Lehi (Combattants pour la liberté d’Israël - symbole, ci-contre), aussi connus sous le nom de « Groupe Stern » avec Yitzhak Shamir, Premier ministre de 1983 à 1984 et de 1986 à 1992, ainsi que, plus indirectement, le Likoud. Le propre père de « Bibi » fut le secrétaire personnel de Jabotinsky. La Palestine sous mandat britannique a connu des expériences fasciste avec Brit Ha'birionim (ou « Alliance des  sicaires ») et païenne canaanéenne. Rappelons par ailleurs que l’historien non-conformiste Jean-Claude Valla évoqua dans le n° 4 de ses Cahiers libres d’histoire le « pacte germano-sioniste » du 7 août 1933. Le sionisme révisionniste contribua à la naissance du nationalisme sioniste laïque. Israël notre Maison d’Avigdor Liberman s’inscrit en partie dans cette continuité. Ce n’est pas le cas pour le tandem Ben Gvir – Smotrich qui conçoit un « national-judaïsme » expansionniste. Pour eux, l’État d’Israël ne peut être que la patrie des seuls Juifs obéissant aux commandements bibliques et talmudiques.

Le succès électoral du Parti sioniste religieux indispose « Bibi » qui se méfie de ces « enragés » désormais incontournables dans sa majorité parlementaire. Ben Gvir et Smotrich réclament des ministères stratégiques. D’après de récentes rumeurs, Smotrich recevrait les Finances et Ben Gvir la Sécurité intérieure. Leur entrée au gouvernement risquerait toutefois d’irriter l’administration Biden, l’Union dite européenne ainsi que les États arabes signataires des Accords d’Abraham (Émirats arabes unis, Bahreïn, Soudan et Maroc), voire l’Arabie Saoudite. Conscient des enjeux diplomatiques actuels avec l’accès imminent par l’Iran au seuil nucléaire, le chef du Likoud préférerait négocier avec Yaïr Lapid et Benny Gantz qui lui opposent pour l’heure une fin de non-recevoir. On parle déjà de nouvelles élections législatives à brève échéance.

Observons en tout cas que le Système médiatique hexagonal a fait preuve d’une étonnante discrétion au sujet de la percée de l’ultra-droite sioniste religieuse. D’habitude prompt à hurler à l’avènement d’un micro-fascisme à Pitcairn ou dans un igloo du Groenland, son silence est éloquent. Où sont les manifestations, les tribunes libres indignées et les pétitions dénonciatrices ?  Les belles âmes seraient-elles déjà en vacances ? Leur sotte vigilance pourrait-elle enfin s’émousser pour la circonstance ?   

GF-T.

  • « Vigie d’un monde en ébullition », n° 53, mise en ligne le 29 novembre 2022 sur Radio Méridien Zéro.

dimanche, 05 septembre 2021

Les Radhanites de Kazarie et les futures diasporas

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Les Radhanites de Khazarie et les futures diasporas

par Daniele Dal Bosco 

Ex: https://www.centrostudilaruna.it/i-radaniti-di-kazaria-e-lusura.html

"Nummus nummum parere non potest"

(Aristote, Éthique à Nicomaque)

Depuis plusieurs années, on parle de l'origine kazakhe d'une certaine faction de la population juive qui, au fil des siècles, aurait acquis de plus en plus de pouvoir en prêtant de l'argent contre intérêt. On parle généralement de la conversion de l'ancien khanat de Khazarie à la religion juive, une conversion devenue nécessaire pour ne pas s'inféoder aux puissances chrétiennes et musulmanes voisines. Cette opinion est devenue populaire principalement grâce à Arthur Koestler et à son livre The Thirteenth Tribe (1976), dans lequel il affirme que les Juifs ashkénazes européens ne descendent pas des habitants de l'ancien Israël, mais plutôt des Turcs khazars qui se sont convertis au judaïsme au 8e siècle et ont ensuite migré vers l'Europe de l'Est aux 12e et 13e siècles, lorsque l'empire khazar a décliné. Cette théorie sur l'ascendance des ashkénazes, bien que populaire aujourd'hui, n'est pas partagée par tous les spécialistes.

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Une vision particulièrement critique du rôle joué par les Juifs khazars est celle de l'historien russe Lev Nikolaevič Gumilëv, qui a probablement été influencé par les vues de Mikhaïl Artamonov (Histoire des Kazars, 1962), son professeur, mais qui a lui-même influencé d'autres savants russes, comme le critique littéraire Vadim Kozhinov.

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Les Juifs sont arrivés dans la vaste région que fut la Khazarie en deux vagues différentes. Tout d'abord, aux 5e et 6e siècles, des Juifs karaïtes sont arrivés de Perse, puis, aux 8e et 9e siècles, d'autres Juifs sont arrivés de Byzance, qui connaissaient bien le Talmud. Au IXe siècle, les Juifs sont essentiellement divisés entre karaïtes et rabbinites; ce sont ces derniers, particulièrement attachés aux enseignements talmudiques, qui arrivent au Khanat en provenance de Byzance, d'où ils s'enfuient en raison des persécutions du pape Léon III (795-816) qui tente de les convertir de force au christianisme. En particulier, un groupe de Juifs spécialisés dans le commerce international le long de la route de la soie entre l'Europe et l'Asie a émigré en Khazarie: les Radhanites, dont la présence dans le commerce de l'époque, de l'Espagne à la Chine, est attestée par ibn Khordadbeh, un géographe perse du 9e siècle.

Selon certains chercheurs, les Radhanites sont responsables de la conversion des Khazars au judaïsme[1]. Selon Gumilëv, les Radhanites constituaient un groupe super-ethnique particulièrement "diabolique"; à cette époque, affirme l'historien, le commerce international ne se faisait pas au profit de la population mais surtout à son détriment, tant en Khazarie qu'ailleurs, puisque l'économie d'échange naturelle fournissait tout ce dont la population locale avait besoin. Il affirme également que les Radhanites faisaient aussi le commerce de biens volés dans les pays d'Europe du Nord, mais surtout qu'ils profitaient de la traite des esclaves, notamment des Slaves.

Gumilëv affirme que les Radhanites ont infiltré la noblesse turque khazar en épousant leurs femmes, mais que la progéniture de ces mariages mixtes a été mise à l'écart, ce qui a encouragé leur émigration vers la Crimée où le karaïsme était professé. Au contraire, les enfants de deux parents juifs gagnaient en importance sociale et étaient les seuls à avoir accès aux études talmudiques. La conversion au judaïsme, soutient l'historien russe, a été imposée à la population khazar, notamment avec l'arrivée au pouvoir d'Obadia, entre la fin du VIIIe et le début du IXe siècle, un riche juif qui a transformé le khanat et introduit le judaïsme rabbinique, réprimant violemment les chrétiens, les musulmans et les infidèles en général. Cependant, il semble que déjà auparavant, peut-être vers 730, le roi kazakh Bulan s'était converti au judaïsme de son propre chef.

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La Kazarie est alors fortement affaiblie par le prince Sviatoslav de Kiev (image ci-dessus), qui est ensuite tué par les nomades Petchenègues (972) lors du siège de Kiev, déjà commencé par les nomades en 968 avec le soutien des Khazars. Sviatoslav attaque notamment les villes khazar de Sarkel, la capitale Itil et Samandar (vers 964-966)[2]. Itil, qui, vers 980, sera plus tard occupé par les Khoresmiens et contraint de se convertir à l'Islam.

C'est à cette époque que les Juifs radhanites restants se déplacent vers l'ouest, notamment vers l'Espagne, et principalement vers l'important centre commercial de Cordoue, où ils bénéficient d'une plus grande protection. Gumilëv affirme que l'antichristianisme et l'intolérance générale de ce groupe de Juifs n'ont pas diminué lorsqu'ils se sont installés en Europe occidentale, et que cette empreinte talmudique a fortement influencé la façon de penser des Occidentaux au cours du dernier millénaire (3).

9789004138827.jpgLes Radhanites, selon l'historien israélien Moshe Gil, ont tiré leur nom de Radhan, une région de l'Irak actuel (4). Selon d'autres spécialistes, leur nom, de l'arabe ar-Rahdaniya, signifie "ceux qui connaissent la route", "les globe-trotters" ou "les Juifs errants". Pour d'autres (Lombards), le nom est lié au Rhône, où ces groupes de marchands avaient l'habitude de s'arrêter au cours de leurs voyages.

L'étymologie proposée par Gil, en particulier, expliquerait leur adhésion aux enseignements talmudiques babyloniens; d'autre part, on sait qu'il y avait une forte présence juive dans la région de Babylone depuis l'époque de l'exil au VIe siècle avant J.-C. causé par Nabuchodonosor II, le destructeur du Temple de Salomon. On sait également que les juifs babyloniens étaient encore très puissants dans la région de Babylone au début de la période du califat abbasside, dont l'existence est attestée de 750 à 1258 après JC.

En fait, déjà dans la Bagdad abbasside, certains marchands juifs sont devenus des banquiers du gouvernement, c'est-à-dire des prêteurs d'argent à l'État. On pense à la célèbre famille Neṭīra, du nom de son fondateur, qui vécut au IXe siècle, et dont les fils Sahl et Isḥāq continuèrent, sur les traces de leur père, à financer les coûteuses expéditions militaires du califat. Neṭīra, cependant, avait à son tour suivi les traces de son beau-père Joseph b. Phinehas et son associé Aaron b. Amram, banquiers de la cour du calife al-Muqtadir à Bagdad et considérés à l'époque comme les plus riches financiers de Mésopotamie et de Perse occidentale. En tant que banquiers privés des souverains locaux, ils étaient déjà en mesure d'obtenir le rôle officiel de jahbadh, c'est-à-dire de collecteurs des taxes d'État, chargés d'émettre des lettres de change au nom du gouvernement et de prêter de l'argent à long terme à l'administration du califat. En même temps, cependant, ils faisaient office de prêteurs d'argent pour les affaires plus ou moins propres des vizirs locaux [5]. Bagdad est ainsi devenue le grand centre financier de l'époque, bien placé pour le commerce le long de l'ancienne route de la soie.

Les Radhanites polyglottes, dont certains étaient d'origine persane, ont dominé le commerce eurasien, y compris l'utilisation de lettres de crédit, entre les mondes chrétien et islamique pendant au moins quatre siècles entre le VIIe et le Xe siècle, mais il semble probable qu'ils jouaient déjà un rôle dominant dans la période préislamique. Certains pensent qu'ils sont également responsables de l'introduction de l'utilisation du papier en Occident depuis la Chine [6].

Il semble que ces Radhanites aient déjà pris racine dans certaines régions de la France, de l'Allemagne et de la Pologne actuelles aux Ve et VIe siècles; il existe des preuves de leur présence même en Afrique, à Tombouctou, au Mali, dès le VIIIe siècle. Suite à l'Inquisition espagnole, d'autres sont arrivés sur le sol africain au 15ème siècle, ainsi que dans la destination néerlandaise plus célèbre, Amsterdam. C'est en effet en Hollande qu'un groupe de Juifs séfarades, des marchands marranes, tels que la célèbre famille Mendes et plus tard Yossef Nasi à Anvers, qui avaient accru leur fortune grâce au commerce avec les colonies espagnoles et portugaises, ont déplacé le centre de leurs activités financières lorsqu'ils ont été contraints de quitter la péninsule ibérique après l'édit d'expulsion de 1492 [7].

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Dès le XVIIe et le début du XVIIIe siècle, des familles de banquiers marranes prêtaient de l'argent à diverses monarchies européennes. Certains Juifs marranes se sont également installés à Londres dès le règne d'Elizabeth I (1558-1603), mais surtout à partir de 1664 et grâce au travail antérieur du rabbin Menasseh ben Israël, un Juif portugais qui s'était installé à Amsterdam, et au soutien d'Oliver Cromwell, Lord Protecteur du Commonwealth entre 1653 et 1658. Ce sont des financiers juifs séfarades, espagnols et portugais qui, après s'être installés à Amsterdam, sont venus à Londres et ont largement contribué à la fondation de la Banque d'Angleterre en 1694.

Ce n'est qu'en 1803, lorsque l'influence napoléonienne devient prépondérante en Hollande, que le centre financier est transféré d'Amsterdam à Francfort, où le contrôle financier de la ligue anti-napoléonienne tombe entre les mains de Mayer Amschel Rothschild, un juif à la cour de Guillaume Ier (1743-1821), prince-électeur de Hesse-Kassel [8].

La chute de la dynastie Tang en Chine en 908, la destruction du khanat khazar (968-969), ainsi que les invasions turques au Moyen-Orient, ont entraîné l'instabilité et la disparition presque complète de la route commerciale de la soie. Cela a conduit à l'émergence de nouveaux acteurs commerciaux sur le marché international, non plus par voie terrestre mais par voie maritime, principalement les cités-États maritimes italiennes telles que Venise, Gênes, Pise et Amalfi, aidées par les familles bancaires italiennes émergentes.

Les Radanites se sont progressivement fondus dans les peuples où ils s'étaient installés au cours des siècles, ou avec les autres Juifs présents dans les différents territoires où ils s'étaient installés, notamment, comme nous l'avons mentionné, en Espagne. À partir des 11e-12e siècles, il ne semble pas y avoir de trace d'eux en tant que guilde.

Notes:

[1] Enc. du commerce mondial, "Radhanites" 764 ; voir aussi Pritsak 265.

[2] Une version alternative de l'histoire est mentionnée par le médiéviste russe Aldo C. Marturano, selon lequel " la campagne est un mensonge historique lu dans la version du PTI (nda : Chronique des temps passés ou Chronique de Nestor, XIIe siècle) et je suis d'avis qu'il faut la minimiser. Au contraire ! Selon l'historien allemand Marquart, Svyatoslav n'est pas allé à l'encontre des Khazars, mais a mené en leur nom des campagnes punitives contre certains peuples rebelles de la Volga [...] Svyatoslav à Itil n'a pas passé l'île des marchands ni attaqué l'île du Kaghan, car l'armée khazar était toujours présente et en activité". (Aldo C. Marturano, Khazars et Russes, une aventure juive médiévale, Lulu Press, Raleigh 2016, pp.189-190).

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[3] V. J. Rossman : Russian Intellectual Antisemitism in the Post-Communist Era. Lincoln, NE : University of Nebraska Press pour le Vidal Sassoon International Center for the Study of Antisemitism (SICSA), Hebrew University of Jerusalem, 2002.

[4] Moshe Gil, "The Radhanite Merchants and the Land of Radhan", Journal of Economic and Social History of the Orient 17, no 3 (1974) : 299-328.

[5] A. Harkavy, Teshuvot ha-Ge'onim, 4 (1887), nos. 423, 548, 552 ; L. Ginzberg, Geonica, 2 (1909), 87-88 ; Fischel, Islam, 6-44.

[6] Enc. du commerce mondial, "Radanites" 764.

[D'autres Juifs ibériques émigrent, après l'édit de 1492, vers l'Italie, en particulier vers Venise, et vers l'Empire ottoman, où la présence des Juifs est plus tolérée.

[8] http://www.jewishencyclopedia.com/articles/2444-banking.

 

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dimanche, 22 août 2021

Le début et la fin de la quatrième diaspora

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Le début et la fin de la quatrième diaspora

Alexandre Douguine

Ex: https://www.geopolitica.ru/article/nachalo-i-konec-chetvertoy-diaspory

Le 10 août de l'an 70 de notre ère, un événement très important s'est produit pour deux religions mondiales - le christianisme et le judaïsme. Ce jour-là, les légions romaines de l'empereur Titus font irruption à Jérusalem, gardée par les zélotes juifs qui s'étaient révolté contre l'autorité romaine. Les Romains soumirent les habitants à une répression d'une cruauté indicible, massacrant des centaines de milliers de personnes. Le second temple, construit par Zerubbabel après le retour des Juifs de la captivité babylonienne, fut rasé. La chute de la ville fut précédée d'une terrible famine qui coûta également la vie à des centaines de milliers d'habitants et s'accompagna d'événements monstrueux, notamment des faits de cannibalisme, comme le décrit de manière imagée l'historien juif  Flavius Joseph (buste, ci-contre).

flavius-josc3a8phe.jpgPour les Juifs, cet événement est considéré comme l'une des pires catastrophes de l'histoire sainte.

C'est le début de la quatrième et dernière dispersion des Juifs, qui, dans la religion juive, n'est pas un accident historique, mais une punition pour les péchés du peuple d'Israël. Selon la religion juive, ce déracinement général, appelé le Galut, ne s'achèvera qu'au moment de la venue de Moshiach, le Sauveur, le Messie. Et alors, seuls les Juifs pourront retourner en Terre promise. Ce qui a commencé le 10 août 70 se terminera tout à la fin de l'histoire. C'est à ce moment-là, croient les Juifs, que le Messie sera couronné roi des Juifs, qu'il franchira la Porte dorée et que le troisième temple sera construit.

Mais, jusqu'à la venue du Messie, toutes les portes du monde, sauf la porte des larmes, resteront fermées. C'est pourquoi le Mur occidental, vestige du Second Temple, est aujourd'hui appelé le Mur des lamentations. La seule porte d'entrée au monde des esprits qui subsiste pour les Juifs, ce sont les pleurs et les gémissements. Pour ce qui s'est passé le 10 août 70.

Pour les chrétiens, l'événement a une signification très différente. Les destins du judaïsme et du christianisme avaient déjà irrévocablement divergé en l'an 70 de notre ère. La chute de Jérusalem n'est pas un événement central dans les sources chrétiennes. C'est pourtant l'événement décisif: déjà, de son vivant, Jésus avait prophétisé que les Juifs qui n'avaient pas accepté le vrai Messie et attendaient encore quelqu'un d'autre perdraient bientôt Jérusalem, et que le temple serait détruit. Pour les chrétiens, le Christ est déjà venu, et il faut vivre cet événement, vivre par lui et sa nouvelle alliance, et ne pas insister sur la position de l'ancienne alliance. La chute de l'ancienne Jérusalem semblait confirmer que l'ancienne alliance et ses sanctuaires avaient définitivement disparu. Les élus parmi les Juifs ont été convertis au christianisme et sont devenus le noyau d'un nouveau peuple mondial, dans lequel il n'existe plus ni juif ni grec. Ceux qui ont obstinément rejeté le Christ et provoqué la persécution de ses disciples ont eu ce qu'ils méritaient.

Plus tard, au quatrième siècle de notre ère, l'empereur romain Julien, qui s'était tourné vers le paganisme et n'aimait pas les chrétiens, a décidé de reconstruire le temple de Jérusalem afin de défaire ce que ses prédécesseurs, les empereurs romains, avaient fait, mais ce projet est tombé à l'eau. Le chantier de construction du troisième temple brûle et Julien lui-même est bientôt assassiné.

Pour les chrétiens, c'était une preuve supplémentaire de l'irréversibilité de ce qui s'est passé le 10 août 70. Il était futile, pensaient les chrétiens, d'attendre Celui qui était déjà venu. Le nouveau troisième temple sera désormais l'Église chrétienne, jusqu'à la fin des temps.

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La chute de Jérusalem aux mains de Titus Vespasien (buste-ci-dessus) est revenue sur le devant de la scène au XXe siècle, lorsque l'État d'Israël a été créé après la Seconde Guerre mondiale, à la suite de la persécution monstrueuse des Juifs par le régime nazi d'Hitler. Le sionisme, qui avait déjà émergé au XIXe siècle, insistait sur le fait que, puisque le Messie repoussait toujours sa venue, les Juifs eux-mêmes devaient prendre en main leur propre destin - retourner en Palestine, où la quatrième dispersion avait commencé en 70, sans attendre le Moshiach. Le sionisme a décidé de prendre de l'avance et, au lieu de recourir au miracle promis par la religion, il a décidé de s'appuyer sur des méthodes banales - lobbying politique, machinations économiques et propagande généralisée. Ce n'est pas un hasard si parmi les principaux partisans de l'idée sioniste figuraient les barons Rothschild, intégrés depuis longtemps dans l'économie capitaliste pragmatique et séculière.

Au XXe siècle, Israël se construisait déjà selon des règles très réalistes et utilisait des méthodes modernes - nettoyage ethnique, opérations militaires, accaparement de terres, campagnes de relations publiques à grande échelle. Ainsi, en 1950, Israël a failli faire de Jérusalem, dont la moitié était encore sous domination arabe palestinienne, sa capitale, et a établi son contrôle sur Jérusalem Ouest puis sur Jérusalem Est pendant la guerre des Six Jours. Le côté séculaire et musclé de l'occupation de la Palestine était terminé, la communauté mondiale était imprégnée de compassion pour le sort des Juifs sous Hitler, ce qui leur apportait un soutien mondial, et ce n'était qu'une question de temps avant la reconstruction du troisième temple et la rencontre du Messie. Les courants religieux extrêmes du judaïsme - comme les Fidèles du Temple - s'y préparent déjà, en creusant des structures souterraines sous le Mont du Temple, évinçant les Arabes musulmans de leur sanctuaire, la mosquée Al-Aqsa. Mais le Messie tarde toujours à venir. L'un des courants du judaïsme,le courant traditionnel Naturei Karta, estime que, cette fois, la venue du Messie est retardée par les Juifs eux-mêmes - les sionistes, qui ont décidé avec audace et ambition de faire par eux-mêmes ce que seul un être surnaturel peut faire.

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Aux yeux des chrétiens, la chute de Jérusalem était irréversible. C'est pourquoi tout ce qui est lié à l'Israël actuel et aux préparatifs de la construction du troisième temple, parallèlement à la répression continue des Arabes et non juifs de Palestine, musulmans et chrétiens, semble plutôt être des signes de la venue de l'Antéchrist.

Voilà ce que peuvent nous révéler de bonnes éphémérides du mois d'août.

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lundi, 04 janvier 2021

Le mystère de la treizième tribu

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Le mystère de la treizième tribu

Par Michele Fabbri

Ex: http://www.centrostudilaruna.it

Le mystère de la treizième tribu d'Israël est l'un des thèmes les plus fascinants de l'histoire universelle. Comme on le sait, la Bible nous parle d'un peuple juif divisé en douze tribus : mais il y a ceux qui y ont ajouté une treizième tribu, qui serait celle des Khazars, le mystérieux peuple des steppes eurasiennes, d'origine turque, qui s'est installé au nord du Caucase et à l'est de l'Ukraine à la fin du VIIe siècle, et a commencé à pratiquer la religion juive entre le VIIIe et le IXe siècles.

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A l'origine, les Khazars étaient païens et pratiquaient des cultes chamaniques en l'honneur de Tengri, dieu du ciel. Les religions monothéistes offrent aux classes dirigeantes des avantages évidents en termes de contrôle social, et les dirigeants khazars, entrant en contact avec le "peuple du Livre", auraient envisagé d’adopter ces cultes. Puisque le judaïsme est désormais connu comme une religion qui ne prévoit la conversion que dans des cas spécifiques définis par les autorités rabbiniques, on se demande comment il a été possible qu'un peuple entier se soit converti à la religion mosaïque. Il est probable que les Khazars ont commencé à pratiquer cette religion en imitant les communautés juives avec lesquelles ils entraient en contact, et comme ils pratiquaient le culte en masse, les autorités religieuses juives n'avaient aucun moyen d'exercer un contrôle sur ce phénomène. D'autant plus que les Juifs persécutés dans l'Empire byzantin ou dans les pays arabes ont trouvé un puissant allié dans le royaume khazar. De plus, l'adoption du judaïsme par les Khazars était probablement perçue comme un élément qui les distinguait de leurs voisins chrétiens et musulmans qui les menaçaient. Ce sont évidemment ces raisons qui ont convaincu les dirigeants et les aristocrates khazars de pratiquer le judaïsme.

Le christianisme, l'islam et le paganisme ancien étaient également répandus parmi les Khazars, mais le choix de la noblesse était suivi par la majorité de la population, donnant à l'Empire khazar la connotation d'un royaume juif.

Pour administrer la justice, il y avait aussi une sorte d'assemblée de magistrats qui étaient choisis pour représenter les fidèles des religions pratiquées dans l'Empire : juifs, chrétiens, musulmans, païens.

51ZGE6OZoXL.jpgL'empire khazar s'est effondré avec l'expansion de la nouvelle puissance émergente dans la région : la Russie. De plus, nous savons que lorsque le souverain de la Russie de Kiev, Vladimir le Saint, a décidé de choisir une religion monothéiste pour son peuple, il a également considéré le judaïsme en plus du christianisme et de l'islam : il semble donc que l'exemple des Khazars ait été pris en considération.

L'histoire des Khazars n'est pas inconnue, mais le premier intellectuel qui a porté le sujet à l'attention du grand public a été Arthur Koestler, avec son livre de 1976, The Thirteenth Tribe. Koestler affirme qu'avec la dissolution de l'Empire khazar, de grandes masses de familles, pratiquant le judaïsme, se sont répandues dans toute l'Europe de l'Est, et il attire l'attention sur le fait que la plupart des Juifs exterminés par les nazis étaient probablement d’ascendance khazar. Selon cette thèse, presque tous les Juifs ashkénazes étaient des descendants des Khazars. L'hypothèse de Koestler a d'abord été prise en considération, mais elle a ensuite été abandonnée par l'historiographie la plus récente, et la recherche génétique a donné des résultats fragmentaires (toutefois, en évaluant ces données, il faut garder à l'esprit que nous vivons à une époque où la politique exerce un contrôle asphyxiant sur la recherche historique).

L'hypothèse khazar a provoqué un débat sur l'identité israélienne et sur les fondements du sionisme : le protagoniste de ce débat est l'historien israélien Shlomo Sand, qui est connu pour l'honnêteté intellectuelle de ses déclarations, au point d'être considéré quasiment comme un "traître" dans l'État juif. En Israël, les Khazars ont fait l'objet d'un documentaire télévisé et d'un livre publié par une petite maison d'édition : le sujet est cependant devenu assez "gênant" et les médias israéliens et occidentaux ont tendance à ne pas en parler ...

9782081380288.jpgSand a procédé à une déconstruction radicale de l'identité israélienne, et cite des exemples de croyants au judaïsme qui n'appartiennent pas à la population qui était installée en Terre Sainte dans l'Antiquité : le cas le plus célèbre est celui des Falasha, les Juifs éthiopiens. Mais il existe d'autres manifestations significatives d'une propension missionnaire du judaïsme : le royaume himyarite au IVe siècle, le règne de la reine berbère Kahina en Afrique du Nord, les témoignages latins des anciens Romains convertis à la religion de Moïse...

De plus, la légende des tribus perdues d'Israël suggère l'idée que le judaïsme peut prendre des formes que la culture actuelle ne prend généralement pas en compte. À ces éléments, on peut ajouter l'hypothèse de Sigmund Freud sur l'origine égyptienne du judaïsme.

La question est loin d'être secondaire : la piste khazar et la possibilité de conversion au judaïsme ne concernent pas seulement l'origine ethnique de ceux qui sont aujourd'hui considérés comme juifs mais, plus important encore, soulèvent la question de savoir si le judaïsme peut être considéré comme une religion missionnaire. Les preuves historiques montrent que, du moins à certains moments, la religion de Moïse a fait du prosélytisme.

La définition de l'identité juive est un thème historiographique qui peut conduire à des conclusions absolument déstabilisantes pour les équilibres stratégiques dans le monde : il n'est pas nécessaire de souligner l'importance du mythe d'Israël pour la psychologie des masses contemporaines. La question juive, le sionisme, l'antisémitisme sont des sujets sur lesquels nos dirigeants éclairés légifèrent avec une grande légèreté, sans doute sans même savoir de quoi ils parlent. Et si le mythe de l'identité israélienne devait s'effondrer, il entraînerait dans sa chute cataclysmique toute la classe dirigeante occidentale, qui a fait de ce mythe sa raison d'être !

BIBLIOGRAPHIE ESSENTIELLE :

Arthur Koestler, La tredicesima tribù, UTET 2004, p.215

Kevin Alan Brook, The Jews of Khazaria, Rowman & Littlefield Pub Inc 2018, p.357

Shlomo Sand, L’invenzione del popolo ebraico, Rizzoli 2010, p.536

Shlomo Sand, Come ho smesso di essere ebreo, Rizzoli 2013, p.149

Sigmund Freud, L’uomo Mosè e la religione monoteistica. Tre saggi, Bollati Boringhieri 2013, p.152

http://www.khazaria.com/

vendredi, 26 juin 2020

Dégénérescence de Max Nordau

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Dégénérescence de Max Nordau

 
 
Extrait d'un exposé intitulé "Art décadentiste, art dégénéré : la polémique Nordau, Lombroso" par Olivier Bosc
 
 
 
 
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samedi, 06 juin 2020

The Ultra Orthodox vs. The IDF: Israel's Other Religious War

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The Ultra Orthodox vs. The IDF: Israel's Other Religious War

 
 
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Since Israel's inception, the Haredi — ultra-Orthodox adherents of Judaism —have been exempt from the country's military conscription laws. But their growing population, coupled with their high unemployment rate and dependence on state benefits, sparked outrage within the country's secular majority. After years of demanding that the Haredi share the responsibility of serving in the armed forces, the Israeli government passed an unprecedented law in March 2014 that requires Haredi men to serve in the military. The decision resulted in major opposition from the Ultra Orthodox community, from violent protests to religious leaders demanding that no one should comply. VICE News travels to Israel to speak with hardline members and leaders of the Ultra Orthodox community as well as soldiers in the Netzah Yehuda, the IDF's Ultra Orthodox Battalion, to get their take on the government's decision.
 
 
War Games: Israeli Urban Warfare - http://bit.ly/1oykW0C
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mardi, 17 mars 2020

Le mur des lamentations a été construit par les romains !

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Le mur des lamentations a été construit par les Romains !

Ex: https://echelledejacob.blogspot.com
 
Il va falloir revoir le chapitre «Mur des Lamentations » des guides touristiques d'Israël, car les origines de sa construction ne seraient pas celles que l'on croyait. Jusqu'à présent, il était admis que le site -le Mont du Temple pour les Juifs, l'Esplanade des mosquées pour les musulmans- avait été entièrement construit par Hérode, roi des Juifs.

Placé sur le trône par les Romains, Hérode règne sur la Judée de 37 avant Jésus-Christ jusqu'à sa mort, en 4 avant Jésus-Christ. Dans la tradition chrétienne, Hérode est avant tout connu pour avoir tenté de tuer l'enfant Jésus en ordonnant la mise à mort de tous les enfants de Bethléem âgés de moins de deux ans. Grand bâtisseur, il se lance dans de grands travaux en recourant aux techniques romaines. C'est ainsi qu'on lui attribue la construction du théâtre et de l'amphithéâtre de Jérusalem, mais surtout, l'extension du Second Temple, complexe religieux juif construit au VI ème siècle avant JC sur l'emplacement du Premier Temple, détruit par Nabuchodonosor II en 587 avant Jésus-Christ. Ce que l'on appelle communément le Mur des Lamentations, principal lieu saint du judaïsme, est considéré comme étant le mur occidental restant du Second Temple, qui sert également de soubassement à l'Esplanade des mosquées, le «Noble Sanctuaire» des musulmans.

Mais des archéologues travaillant pour l'Autorité des antiquités d'Israël ont annoncé mercredi que des fouilles sous les fondations en pierre du Mur avaient permis de mettre au jour des pièces frappées par un procurateur romain de Judée vingt ans après la mort d'Hérode. Ce qui indique qu'Hérode n'a pas construit le Mur des Lamentations.
Flavius Josèphe avait raison

Les pièces de bronze ont été frappées aux alentours de 17 après Jésus-Christ par Valerius Gratus, qui précéda Ponce Pilate en tant que représentant de Rome à Jérusalem, souligne Ronny Reich, de l'Université de Haïfa, l'un des deux archéologues en charge des fouilles. Ces pièces ont été découvertes dans un bain rituel qui était antérieur à la construction du complexe du Temple d'Hérode, et avait été comblé à l'époque pour soutenir les nouveaux murs, précise Ronny Reich. Si Hérode a bien mis en route l'extension du Second Temple, les pièces montrent que la construction du Mur des Lamentations n'avait même pas commencé avant sa mort et a été probablement achevée seulement des générations plus tard.

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La découverte vient confirmer un récit de Flavius Josèphe, historien romain du Ier siècle, qui après la destruction du Second Temple par Rome en 70 après Jésus-Christ, raconta que les travaux au Mont du Temple n'avaient été terminés que par le roi Agrippa II, arrière-petit-fils d'Hérode. Flavius Josèphe explique également que la fin du chantier avait laissé 18.000 travailleurs sans emploi, ce qui, selon certains historiens, est à mettre en relation avec l'éclatement de la Grande Révolte des Juifs de la province de Judée contre l'Empire romain en 66 après Jésus-Christ. Après quatre années d'affrontements, les légionnaires romains de Titus viennent à bout de l'insurrection en 70 et détruisent le Temple, marquant la fin de l'État hébreu à l'époque ancienne.

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Contrôlée depuis 1967 par Israël, l'enceinte abrite la mosquée Al-Aqsa et le Dôme du Rocher, sanctuaire musulman à la coupole dorée. Ce «Noble sanctuaire», un des lieux les plus saints de l'islam, cohabite dans la douleur avec, en contrebas, le Mur des Lamentations. 
 

dimanche, 02 février 2020

Yoram Hazony’s The Virtue of Nationalism

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Yoram Hazony’s The Virtue of Nationalism
 

Ex: https://www.unz.com

Yoram Hazony is an Israeli political theorist. He has a BA in East Asian studies from Princeton and a Ph.D. in political theory from Rutgers. While at Princeton, he founded a conservative publication, the Princeton Tory. An orthodox Jew and a political Zionist, he is the president of the Herzl Institute in Jerusalem. He is also the chairman of the Edmund Burke Foundation, the purpose of which seems to be to nudge conservatism in America and Europe in a more nationalist direction.

The Virtue of Nationalism is a lucidly written, trenchantly argued antidote to the anti-nationalist sentiments that dominate mainstream politics, both Left and Right. Hazony seeks to defend the nation-state as the best form of government, pretty much for everyone. Hazony defines a nation as “a number of tribes with a shared heritage, usually including a common language or religious traditions, and a past history of joining together against common enemies” (p. 100). Hazony defines a nation-state as “a nation whose disparate tribes have come together under a single standing government, independent of all other governments” (p. 100).

HazonyNationalism.jpgHazony defines the nation-state in contradistinction to two alternatives: tribal anarchy and imperialism. Tribal anarchy is basically a condition of more or less perpetual suspicion, injustice, and conflict that exists between tribes of the same nation in the absence of a common government. Imperialism is an attempt to extend common government to the different nations of the world, which exist in a state of anarchy vis-à-vis each other.

Hazony’s primary example of tribes coming together to form a state is the tribes of Israel, whose history may well be entirely fictional. There are, however, historical examples of such “tribal” unification from the 19th century, when different Italian “tribes” came together in the Kingdom of Italy, and different German “tribes” came together to form the Second Reich. However, in the 19th and 20th centuries, it was far more common for nation-states to emerge by separating themselves from empires.

Hazony’s appeals to the Bible considerably weaken his argument but reveal his primary audience: American Protestant Zionists. Thus the first part of The Virtue of Nationalism offers a historical narrative in which nationalism was created by the ancient Israelites, suppressed by various ancient empires—Assyrian, Babylonian, Persian, Hellenistic, Roman, Catholic, and Islamic—then revived after the Reformation and codified in the Peace of Westphalia.

In Chapter III, “The Protestant Construction of the West,” Hazony claims that Protestant political thought rests on two Old Testament principles. First, legitimate governments must protect the common good of the people and uphold Christianity. Second, different nations have the right to self-determination, i.e., to govern themselves without the interference of others.

In Chapter VII, “Nationalist Alternatives to Liberalism,” Hazony distinguishes between the “neo-Catholic” approach, which upholds the Biblical principle of legitimacy but rejects nationalism for empire; the “neo-nationalist” view which rejects Biblical legitimacy but embraces the nation-state; and the “conservative” or “traditionalist” viewpoint, which embraces both Biblical legitimacy and nationalism.

Hazony, of course, favors the third, as would most Protestant Zionists, but it should be noted that only the second option is consistent with the American separation of church and state. Moreover, only the second option is consistent with the many European nations that are now post-Christian.

71SNg-fRfgL.jpgHazony argues that nationalism has a number of advantages over tribal anarchy. The small states of ancient Greece, medieval Italy, and modern Germany wasted a great deal of blood and wealth in conflicts that were almost literally fratricidal, and that made these peoples vulnerable to aggression from entirely different peoples. Unifying warring “tribes” of the same peoples under a nation-state created peace and prosperity within their borders and presented a united front to potential enemies from without.

But if the nation-state has such advantages, why stop there? Why not continue the process by unifying nation-states into empires? Wouldn’t that expand the realm of peace and prosperity, in principle to the whole globe?

Hazony prefers to stand with the nation-state. Political unification can lead us that far, but no farther. Thus he spends a good deal of time criticizing imperialism in all its forms: religious, ethnic, and secular, including liberalism, federalism, and civic nationalism. It is the best part of his book.

Hazony doesn’t like the word sovereignty, claiming it smacks of absolutism and rationalism. But he paraphrases the concept when he speaks of “collective freedom,” “non-interference in the internal affairs of other national states,” and “a government monopoly of organized coercive force within the state” (p. 177).

A nation is either sovereign or it isn’t. A sovereign state does not take orders from other entities. It controls its internal affairs. It does not suffer other armed powers within its borders. It stands on terms of equality with other sovereign states, no matter how large or small. It has the right to say “no” to other states and international bodies.

Imperialists seek to obfuscate this hard either/or with euphemisms like “federalism,” “subsidiarity,” and the risible EU newspeak “pooled sovereignty.” Federalism and subsidiarity are attempts to coax states to give up their sovereignty by assuring them that they will retain autonomy in all matters that are unimportant to the center. But on important matters, they are not allowed to say no. Thus when advocates of empire assure nations that they will be allowed to control their internal affairs, they will enjoy no more sovereignty than an Indian reservation. Pooled sovereignty means that EU member states can vote on EU policies, but they have to abide by majority decisions. They have no veto power, which means that they are not sovereign when it counts, which is when one wants to say “no.”

According to Hazony, the nation-state is superior to imperialism because:

  • Nationalism “offers the greatest possibility for collective self-determination.”
  • Nationalism “inculcates an aversion to the conquest of foreign nations.”
  • Nationalism “opens the door to a tolerance of diverse ways of life.”
  • Nationalism “establishes a life of astonishingly productive competition among nations as each strives to attain the maximal development of its abilities and those of its individual members.”
  • The “powerful mutual loyalties that are at the heart of the national state give us the only known foundation for the development of free institutions and individual liberties.” (p. 10)
  • Nationalism also reduces the amount of hatred and violence in the world (Part Three: Anti-Nationalism and Hate).

Hazony makes it clear that the tribes that are candidates for political unification in a nation-state already belong to the same nation. They share a common language, religion, and culture. In short, a nation is an ethnic group.

The collective freedom maximized by nation-states is the freedom of ethnic groups to live by their own lights—and to allow different peoples to do the same, hence tolerance and an aversion to empire. Hazony puts this point very beautifully in the Conclusion of his book:

The nationalist, we may say, knows two very large things, and maintains them both in his soul at the same time: He knows that there is great truth and beauty in his own national traditions and in his own loyalty to them; and yet he also knows that they are not the sum of human knowledge, for there is also truth and beauty to be found elsewhere, which is own nation does not possess. (p. 231)

9789657052068.jpgThe “mutual loyalty” at the heart of nation-states is a product of a common ethnicity. How does ethnic unity make free institutions possible? Every society needs order. Order either comes from within the individual or is imposed from without. A society in which individuals share a strong normative culture does not need a heavy-handed state to impose social order.

The move from nation-state to empire requires that peoples lose their collective sovereignty. Beyond that, because empires by nature contain many nations, the empire cannot depend upon a common culture to produce order and civility. These must, therefore, be imposed mechanically by the state. Thus empires erode free institutions.

Hazony offers a very strong critique of civic nationalism and the idea that a state can be ethnically neutral (Chapter XVI: “The Myth of the Neutral State”). Hazony thinks it is inevitable that the boundaries of states do not precisely coincide with nations. Not all Poles live in Poland, and some non-Poles do. But if all states are multiethnic, then shouldn’t they be ethnically “neutral”? Shouldn’t they base their unity on something other than ethnicity, such as a civic creed?

Hazony rejects this as a delusion. Even supposedly universalistic civic creeds are actually the products of particular ethnic groups. Their persistence through time depends on these ethnic groups. These ethnic groups might fool themselves into thinking that they are simply “humanity” and their principles are “universal,” but the minority groups who live with them are never fooled. Hazony claims that, whether we admit it or not, the core of every nation has to be an ethnic group that imposes its basic norms and ways of life on minorities.

Hazony also deals with the common argument that nationalism produces hatred and conflict, whereas high-minded globalist/imperialist schemes will give rise to peace and love. But everybody hates somebody. Globalists, Hazony points out, are energetic haters as well. They are also willing to unleash vast and devastating wars to bring peace and love to the far corners of the map.

411TCU-+pEL._SX315_BO1,204,203,200_.jpgIn fact, Hazony argues, imperialism is far more conducive to hatred and violence than nationalism.

Nationalists are particularists, and liberal globalists are universalists. Nationalists believe that it is legitimate for multiple states with different values and ways of life to exist, whereas liberal globalists implicitly deny the legitimacy of all non-liberal states and ways of life. Thus for liberal globalists, every other state is a potential target of hatred and war. Thus every conflict is potentially global. And every enemy should in principle be destroyed, for if no other regime is really legitimate, with whom can one reach a settlement? For globalists, the globe is the only natural limit for hatred, fighting, and political expansion.

Particularists, by contrast, have only petty hatreds and petty conflicts, which are confined to small areas and can be concluded in a relatively brief time with a negotiated peace, because nationalists regard it as legitimate for other nations to exist, even when they make war against them.

Liberal globalists have an inflated sense of themselves, for they believe that they represent not just a particular regime but the interests of all humanity. This means that they regard their enemies as the enemies of all humanity. This makes their hatreds more intense and their conflicts more protracted and deadly, because how can one not be at war with the enemies of humanity? (There are, of course, material limits to war, which often force globalists to stop fighting sooner than they would like.) Nationalists find it easier to avoid war and conclude peace because they don’t have inflated senses of their own goodness and their enemies’ evil.

An important theme of The Virtue of Nationalism is the critique of liberalism. Hazony claims liberalism is false because it begins with a false image of man: a rational actor loyal only to himself, shorn of any attachments to collectives—for instance, the family, tribe, and nation into which every individual is born. On top of this false anthropology, liberalism erects a false ethics and political philosophy: the only legitimate claims that can be made on a rational individual are those he chooses for himself. The only legitimate institutions are those that a rational individual would choose for himself.

Liberal man is basically identical to economic man. The rational, self-interested behavior of liberal man finds its purest expression in the marketplace. By making the behaviors of economic man normative, liberalism dissolves non-economic social institutions like family, tribes, and nations. All individuals emerge from these collectives, which impose unchosen relationships on individuals and evoke strong feelings of attachment, which can cause individuals to risk and sacrifice their lives to preserve these collectives. Hazony calls such collective attachments “loyalties” (p. 65). The liberal individualist project seeks to dissolve all unchosen relationships and to make all loyalties contingent on loyalty to the self.

Hazony argues that liberalism is an inherently imperialistic ideology. Nations are collectives. But only individuals matter to liberals. Because all men are the same insofar as they are rational, self-interested agents, all boundaries between political entities are morally meaningless. Liberals also believe that only liberal regimes are legitimate. Thus liberals have no moral objections to overthrowing illiberal regimes, particularly if this coincides with economic interests.

Hazony emphasizes that although nationalists reject imperialistic globalist institutions, nationalism is itself a vision of the best world order. Thus in Chapter XVIII he outlines “Some Principles of the Order of Nationalist States.”

First, he claims that “the order of national states . . . grants political independence to nations that are cohesive and strong enough to secure it” (p. 176). The core of cohesiveness is ethnic, which means that a proposed state that lacks a core ethnic group is not a candidate for independence. The most cohesive state of all, of course, would be entirely ethnically homogeneous.

As for being “strong enough to secure” independence: Why this concession to Realpolitik? If a nation is strong enough to secure its independence, it doesn’t really need international recognition. It is nice, but not necessary. It is precisely the peoples that cannot secure their independence on their own that need to depend on an international order of nationalist states. Many such countries exist today. Andorra, Lichtenstein, Monaco, the Vatican, and San Marino do not have the ability to establish their independence by force of arms. But that is true of most states. There is not a single nation in Europe that is a military match for the United States or Russia. Hazony thinks that small states that cannot secure their independence are doomed to become non-sovereign protectorates of larger states. But there are alternatives: Small states can secure their independence by allying themselves with other sovereign states, and they can appeal to the moral and political principles upheld by an international order of nationalist states.

The second principle is “non-interference in the internal affairs of other national states” (p. 177). Does this apply to all sovereign states, or just the nationalist ones? Does it not apply, then, to empires? This would be problematic, because, as I will discuss at greater length later, when Hazony claims that nation-states can contain minority groups under the dominion of a core ethnic population, it is hard to distinguish them from empires. This is particularly the case when Hazony argues that even empires that claim to be based on universal principles have an ethnic character.

cf204a130708bf5ad104fecc59436619-w204@1x.jpgThe third principle is “government monopoly of organized force within the state” (p. 177), as opposed to tribal anarchy. A failed state is one in which different ethnic groups create their own militias.

The fourth principle is the “maintenance of multiple centers of power” (p. 180), which is the old doctrine of maintaining a balance of power so that one state, or group of states, never becomes powerful enough to destroy the sovereignty of the rest.

The fifth principle is “parsimony in the establishment of independent states” (p. 182). The moral principle of nationalism need not lead simply to breaking up larger national units into smaller ones. Sometimes, as in the case of the reunification of Germany, one sovereign entity can be annexed to another one.

The sixth principle, “Protection of minority nations and tribes by the national government” (p. 183) is designed to prevent tribal anarchy and a failed state. Some tribal peoples are too small to be sovereign nations. But they should be given as much autonomy as possible short of that, because it is the right thing to do and because it is the best way to avoid conflict.

As for irreconcilably disgruntled tribes and minorities, the only solution Hazony envisions is repressing them. But other solutions are possible. Some tribes might be large enough to form their own nations, and if they are not happy with their current status, the international order of nationalist states should help negotiate their path to sovereignty, to avoid conflict and maximize opportunities for divergent cultural evolution. Disaffected minority groups from neighboring nations might be encouraged to join them, by moving people, by moving borders, or a combination of the two.

The seventh and final principle is the “non-transference of the powers of government to universal institutions” (p. 184).

As I read through The Virtue of Nationalism and tried to imagine objections, the main one is: “Nationalism leads to hatred and violence. Just look at the Nazis.” Hazony’s response to this is that Hitler wasn’t a nationalist. He was an imperialist.

But it is not that simple. In truth, Hitler was both. Thus we need another distinction besides nationalism vs. imperialism. We need to distinguish between good and bad forms of nationalism. When Hitler talked about bringing scattered German tribes under a common government, he was practicing the good form of nationalism. When he talked about Lebensraum in the East at the expense of other nations, that’s the bad sort of nationalism.

The bad nationalist demands freedom for his own nation but denies it to other nations. The bad nationalist stokes the pride and patriotism of his nation, then pits it against other nations. This is how European nations built vast colonial empires. Bad nationalism passes over into empire, but it does not cease to blacken the name of nationalism. Hence it might be more persuasive to grant that there is simply a bad form of nationalism.

51JEt3BkNhL._SX331_BO1,204,203,200_.jpgThe difference between good nationalism and bad nationalism is simple: Good nationalism is universalist. A good nationalist wants to ensure the sovereignty of his own people, but does not wish to deny the sovereignty of other peoples. Instead, he envisions a global order of sovereign nations, to the extent that this is possible. Hazony, however, wishes to stop short of the idea of a universal right to self-determination, which I will deal with at greater length later.

Clearly, The Virtue of Nationalism has many virtues. Every defender of nationalism will benefit from its arguments. But this book also has several vices. Hazony is dismissive of kinship — and more broadly, race — as the biological substratum of community. He is too willing to dismiss the idea of ethnic homogeneity which makes his conception of the nation indistinguishable from an empire. Finally, he is mistaken to reject the idea of a universal principle of national self-determination. I will deal with these topics in a separate essay that compares The Virtue of Nationalism to The White Nationalist Manifesto.

(Republished from Counter-Currents Publishing by permission of author or representative)

vendredi, 09 novembre 2018

Max Nordau et l’art dégénéré du goy (1900)

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Max Nordau et l’art dégénéré du goy (1900)

par Nicolas Bonnal

Ex: http://www.dedefensa.org

Les Carnets de Nicolas Bonnal

Philosophe juif et sioniste hérétique (il acceptait l’Ouganda…), Max Nordau appartient à toute cette génération de penseurs juifs politiquement incorrects qui défièrent à Vienne le monde moderne dans le sillon de Nietzsche, et auxquels j’ai rendu hommage dans mon livre sur Kubrick. Schnitzler, le jeune Weininger, l’extraordinaire et éternellement méconnu Karl Kraus et même Freud dans son genre furent, entre beaucoup d’autres, ces êtres qui foraient, sapaient et minaient le monde moderne qui s’était construit depuis beaucoup plus longtemps que ne le pensaient les chrétiens peu éclairés et les traditionalistes de l’époque. Un rappel : Jonathan Swift se demandait déjà par quoi on remplacerait le christianisme au début du dix-huitième siècle. Eh bien on le remplaça par quelque chose qui prit son nom mais qui n’était plus du christianisme (voyez Feuerbach à ce propos). On passait du croisé, du bâtisseur de cathédrale au bourgeois victorien, au possédant trouillard, au pèlerin ferroviaire, au touriste religieux…

Nordau dénonce donc la culture moderne du dix-neuvième, culture de philistin comme dirait Nietzsche. Les symbolistes, y passent, les parnassiens, les Tolstoï, les préraphaélites. Nordau voit aussi le mauvais usage que l’on fait de Wagner… et de Nietzsche ! Pour lui la culture moderne est une pathologie. Comme nous sommes d’accord ! Et cette pathologie tourne en rond comme la modernité depuis des siècles (plus elle prétend progresser, plus elle patauge et tourne en rond mécaniquement, comme ces épisodes de la quête du Graal où l’on voit des chevaliers pris dans des rondes).

Il me parait important de le rappeler. Les nazis ont dénoncé l’art dégénéré lié aux juifs, eh bien un intellectuel juif l’a fait avant eux, tapant sur l’art dégénérant du goy, et qui avait compris la toxicité de la culture wagnérienne qui donnerait Hitler.Il faut renvoyer dos à dos ici antisémites et progressistes libérateurs. Car le problème est bien plus spirituel que politique.

Je donnerai des extraits du texte que Nordau écrit au célèbre César Lombroso :

« La notion de dégénérescence, d'abord introduite dans la science par Morel et développée avec tant de génie par vous-même, s'est déjà montrée extrêmement fertile dans les directions les plus diverses. Sur de nombreux points obscurs de la psychiatrie, du droit pénal, de la politique et de la sociologie, vous avez déversé un véritable flot de lumière, que seuls n'ont pas perçu ceux qui ferment obstinément les yeux ou qui sont trop myopes pour tirer profit de quelque illumination que ce soit. »

Et là, la cible qui fâche, l’art et la littérature dégénérée :

« Mais il existe un domaine vaste et important dans lequel ni vous ni vos disciples n’avez jusqu’à présent porté le flambeau de votre méthode : le domaine de l’art et de la littérature. »

deg.jpgEn effet, ajoute Nordau :

« Les dégénérés ne sont pas toujours des criminels, des prostituées, des anarchistes et des fous déclarés ; ce sont souvent des auteurs et des artistes. Ceux-ci, cependant, présentent les mêmes caractéristiques mentales, et pour la plupart, les mêmes caractéristiques somatiques que les membres de la famille anthropologique susmentionnée qui satisfont leurs pulsions malsaines avec le couteau de l'assassin ou la bombe du dynamiteur, et eux avec stylo et crayon. »

On parle de films-culte depuis que le cinéma est crevé comme tel. Mais le culte artistique est énorme à l’époque de Lombroso (Tolstoï attaque aussi Wagner et le symbolisme dans son livre sur l’art que j’ai recensé) :

« Certains parmi ceux-ci dégénérés en littérature, musique et peinture ont pris une importance extraordinaire ces dernières années et sont vénérés par de nombreux admirateurs en tant que créateurs d'un nouvel art et hérauts des siècles à venir. »

Conformément à son époque et à son propos, Nordau certes use et abuse du lexique médical. Il est bien sûr de son temps comme nous sommes du nôtre. Il dénonce aussi l’hypnose massifiée de ce culte artistique, et donc son danger (Tolstoï voit même la dimension hitlérienne  de l’art wagnérien) :

« Ce phénomène ne doit pas être négligé. Les livres et les œuvres d'art exercent une puissante suggestion sur les masses. C'est de ces productions qu'une époque tire ses idéaux de moralité et de beauté. S'ils sont absurdes et antisociaux, ils exercent une influence perturbante et corruptrice sur les vues de toute une génération. Par conséquent, ces derniers, en particulier les jeunes impressionnables, facilement excités par un enthousiasme pour tout ce qui est étrange et apparemment nouveau, doivent être avertis et éclairés quant à la nature réelle des créations si aveuglément admirées. »

Nota : le mot impressionnisme était en ce sens tout un programme…

Mais Nordau ajoute :

« Cet avertissement que le critique ordinaire ne donne pas. La culture exclusivement littéraire et esthétique constitue, par ailleurs, la pire préparation concevable pour une véritable connaissance du caractère pathologique des œuvres de dégénérés. Le rhétoricien verbeux expose avec plus ou moins de grâce ou d'intelligence les impressions subjectives reçues des œuvres qu'il critique, mais est incapable de juger si ces œuvres sont les productions d'un cerveau brisé, mais aussi la nature du trouble mental qui s'exprime par leurs écrits. »

Plus loin :

« Maintenant, j'ai entrepris le travail d'investigation (autant que possible d’après votre méthode) des tendances de la mode dans l'art et la littérature ; de prouver qu'ils ont leur source dans la dégénérescence de leurs auteurs et que l'enthousiasme de leurs admirateurs est pour les manifestations de folie morale, d'imbécillité et de démence plus ou moins prononcées. »

Il ajoute avec humour et humeur qu’il est déjà trop facile de taper sur l’Eglise ou les gouvernements :

« Je ne doute pas des conséquences pour moi de mon initiative. Il n’y a actuellement aucun danger à attaquer l’Église, car elle n’a plus de bûcher à sa disposition. De même, écrire contre les gouvernants et les gouvernements n'a rien d'inquiétant, car au pire, il ne pourrait s'ensuivre une incarcération assortie de la gloire compensatrice du martyre. »

Par contre Nordau rappelle avec raison qu’il est plus grave de traiter de l’art et les artistes « dégénérés », et ce bien avant donc que les nazis n’antisémitisent la critique dudit art par leur comportement de « barbares préhistoriques » (Freud) !

« Mais le destin de celui qui a l'audace de qualifier les modes esthétiques de décadence mentale est menaçant. L’auteur ou l’artiste attaqué ne pardonne jamais à un homme de reconnaître en lui un fou ou un charlatan ; les critiques subjectivement ridicules sont furieux lorsqu'il est souligné à quel point ils sont superficiels et incompétents ou à quel point ils sont lâches en nageant avec le courant ; et même le public est en colère lorsqu'il est forcé de voir qu'il a couru après des imbéciles, des dentistes et des charlatans. »

Enfin Nordau dénonçait même le rôle toxique de la presse :

« Maintenant, les graphomanes et leurs gardes du corps critiques dominent la quasi-totalité de la presse et possèdent dans celle-ci un instrument de torture par lequel, à la mode indienne, ils peuvent dégager le dérangeur gênant de la partie jusqu’à la fin de ses jours. »

Notre intellectuel juif antisystème faisait déjà partie de ces nombreux esprits juifs (voyez Cohen, Klein, Kunstler, Zemmour, Finkielkraut et autres) qui envoient promener tous les partis pris et guident la marche des antisystèmes…

Et je rajouterai comme ça en passant cette phrase de Julien Benda qui montre que bien avant Léo Strauss et les néocons les penseurs allemands avaient remis Machiavel au goût du jour… C’est dans la Trahison des clercs :

« On sait que cette apologie du machiavélisme inspire tous les historiens allemands depuis cinquante ans, qu’elle est professée chez nous par des docteurs fort écoutés, qui invitent la France à vénérer ses rois parce qu’ils auraient été des modèles d’esprit purement pratique, des espèces de paysans madrés (voir J. Bainville), exempts de tout respect d’on ne sait quelle sotte justice dans leurs rapports avec leurs voisins… »

Sources

Max Nordau – Dégénérescence (Gutenberg.org, en anglais)

Tolstoï – Qu’est-ce que l’art ? Bibliothèque russe et slave.

Julien Benda – La trahison des clercs (classiques.uqac.ca)

Bonnal – Kubrick et le génie du cinéma (Dualpha, Amazon.fr)

mercredi, 14 février 2018

Le signe secret entre Carl Schmitt et Jacob Taubes

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Le signe secret entre Carl Schmitt et Jacob Taubes

par Juan Asensio

Ex: http://www.juanasensio.com

«En effet, même si elle n’est ni nécessité, ni caprice, l’histoire, pour le réactionnaire, n’est pourtant pas une dialectique de la volonté immanente, mais une aventure temporelle entre l’homme et ce qui le transcende. Ses œuvres sont des vestiges, sur le sable labouré par la lutte, du corps de l’homme et du corps de l’ange. L’histoire selon le réactionnaire est un haillon, déchiré par la liberté de l’homme, et qui flotte au vent du destin.»

Nicolás Gómez Dávila, Le Réactionnaire authentique.


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Noté cette idée, lue dans une lettre adressée à Armin Mohler (le 14 février 1952) par le génial et déroutant Jacob Taubes : «Qu’est-ce qui aujourd’hui n’est pas théologie (en dehors du bavardage théologique) ? Ernst Jünger, est-ce moins de la «théologie» que Bultmann ou Brunner ? Kafka, en est-ce moins que Karl Barth ?» (1). J’y retrouve ainsi la notion, chère à Gershom Scholem, selon laquelle le sacré souffle où il veut et, particulièrement, sur les grandes œuvres de la littérature qui, quoi que prétendent les imbéciles de stricte obédience laïcarde, ne peuvent (et ne semblent vouloir) se passer de Dieu.

C’est d’ailleurs à propos de Carl Schmitt que Jacob Taubes, philosophe qui a «entièrement consacré la force de sa pensée à la parole vivante» selon Elettra Stimilli (p. 9) et n'a donc publié qu'un seul livre (sa thèse, soutenue à l'âge de vingt-trois ans, intitulée Eschatologie occidentale éditée en 2009 par Michel Valensi pour les Éditions de l’Éclat), qui fut l’un des plus exigeants lecteurs du juriste qui jamais n'hésita, tel un Grand Inquisiteur, à pourfendre ceux qu'il considérait comme des hérétiques (cf. p. 36), Jacob Taubes donc, tentant même de comprendre les errements du grand penseur catholique sans jamais le condamner (2), a écrit : «Carl Schmitt était juriste, et non théologien, mais un juriste qui foula le sol brûlant dont s’étaient retirés les théologiens» (p. 25).

Jacob Taubes, qui a pris le soin de lire le texte douloureux de Schmitt s'intitulant Ex captivitate salus, sans doute celui où le grand juriste a été le plus sincère et a tenté de justifier ses prises de position, poursuit, cette fois en rappelant Walter Benjamin et sa notion de théologie souterraine, voilée, grimée, de contrebande pourrais-je dire : «Si je comprends un tant soit peu ce que Walter Benjamin construit là comme vision mystique de l’histoire en regardant les thèses de Carl Schmitt, tout cela veut dire : ce qui s’accomplit extérieurement comme un processus de sécularisation, de désacralisation et de dédivinisation de la vie publique, et ce qui se comprend comme un processus de neutralisation allant par étape jusqu’à la «neutralité axiologique» de la science, index de la forme de vie technico-industrielle – comporte également un virage intérieur qui témoigne de la liberté des enfants de Dieu au sens paulinien, et donc exprime un parachèvement de la Réforme» (pp. 53-4).

CSJT-schh.jpgÉvidemment, tout, absolument tout étant lié, surtout lorsqu'il s'agit des affinités électives existant entre les grands esprits qui appréhendent le monde en établissant des arches, parfois fragiles mais stupéfiantes de hardiesse, entre des réalités qu'en apparence rien ne relie (cf. p. 38), je ne pouvais, poursuivant la lecture de cet excellent petit livre qui m'a fait découvrir le fulgurant (et, apparemment, horripilant) Jacob Taubes, que finalement tomber sur le nom qui, selon ce dernier, reliait Maritain à Schmitt, qualifié de «profond penseur catholique» : Léon Bloy, autrement dit le porteur, le garnt ou, pourquoi pas, le «signe secret» (p. 96) lui-même. Après Kafka saluant le génie de l'imprécation bloyenne, c'est au tour du surprenant Taubes, au détour de quelques mots laissés sans la moindre explication, comme l'une de ces saillies propres aux interventions orales, qui stupéfièrent ou scandalisèrent et pourquoi pas stupéfièrent et scandalisèrent) celles et ceux qui, dans le public, écoutèrent ces maîtres de la parole que furent Taubes et Kojève (cf. p. 47). Il n'aura évidemment échappé à personne que l'un et l'autre, Kafka et le grand commentateur de la Lettre aux Romains de l'apôtre Paul, sont juifs, Jacob Taubes se déclarant même «Erzjude» «archijuif», traduction préférable à celle de «juif au plus profond» (p. 67) que donne notre petit livre : «l'ombre de l'antisémitisme actif se profilait sur notre relation, fragile comme toujours» (p. 47), écrit ainsi l'auteur en évoquant la figure de Carl Schmitt qui, comme Martin Heidegger mais aussi Adolf Hitler, est un «catholique éventé» dont le «génie du ressentiment» lui a permis de lire «les sources à neuf» (p. 112).

La boucle est bouclée, mais avouons que son nœud gordien était bel et bien visible dans ce passage : «Il ne fait pas question pour moi que le peuple juif a poursuivi Carl Schmitt toute son existence, que 1936 ne fut pour lui que l'occasion d'une prise de parti «conforme au temps" face à un problème comportant pour lui de tout autres profondeurs. Il était chrétien issu de ces peuples qui regardaient avec haine et jalousie «ceux qui sont d'Israël, auquel appartiennent l'adoption et la gloire et l'alliance et la loi et le culte et les promesses; auquel sont également les pères et duquel provient le Christ selon la chair» (Paul, Épitre aux Romains, chapitre IX dans la traduction de Luther)» (p. 49).

Il n'y a pas là qu'une simple métaphore, car la théologie politique est le nœud, coulant plutôt que gordien, qui serre le cou de notre époque, et ce n'est sans doute pas un hasard si l'étrange dialogue qui s'est noué, c'est le cas de le dire, entre Taubes et Schmitt, soit entre deux apocalyptiques, «bien que l'un appartienne à la révolution et l'autre à la contre-révolution» (p. 10) (3), nous rappelle celui qui a tant fait couler d'encre, parfois fort pâle, entre Heidegger et Celan.

JTCS-abesch.jpgC'est l'importance, capitale, de cette thématique que Jacob Taubes évoque lorsqu'il affirme que les écailles lui sont tombées des yeux quand il a lu «la courbe tracée par Löwith de Hegel à Nietzsche en passant par Marx et Kierkegaard» (p. 27), auteurs (Hegel, Marx et Kierkegaard) qu'il ne manquera pas d'évoquer dans son Eschatologie occidentale (Nietzsche l'étant dans sa Théologie politique de Paul) en expliquant leur philosophie par l'apocalyptique souterraine qui n'a à vrai dire jamais cessé d'irriguer le monde (4) dans ses multiples transformations, et paraît même s'être orientée, avec le régime nazi, vers une furie de destruction du peuple juif, soit ce peuple élu jalousé par le catholiques (et même les chrétiens) conséquents. Lisons l'explication de Taubes, qui pourra paraître une réduction aux yeux de ses adversaires ou une fulgurance dans l'esprit de ses admirateurs : «Carl Schmitt était membre du Reich allemand avec ses prétentions au Salut», tandis que lui, Taubes, était «fils du peuple véritablement élu par Dieu, suscitant donc l'envie des nations apocalyptiques, une envie qui donne naissance à des fantasmagories et conteste le droit de vivre au peuple réellement élu» (pp. 48-9, le passage plus haut cité suit immédiatement ces lignes).

Nous pourrions ici, peut-être, retrouver la trace du Léon Bloy du Salut par les Juifs, ce livre si difficile, extraordinairement polémique, ordurier et, tout à la fois, prophétique, éblouissant et mystique, mais je ne sais si Taubes, qui a mentionné nous l'avons vu Léon Bloy, a lu ce texte, et je ne puis m'aventurer à établir de fallacieux rapprochements entre les visions de l'écrivain et certaines des concaténations, quasi-juridiques dans leur formalisme, des propositions schmittiennes.

Je ne sais pas plus si Léon Bloy aurait fait sienne la thèse de Jacob Taubes sur le katechon de Carl Schmitt censé retenir le déclenchement de l'apocalypse : il s'agirait en fait, par l'instauration d'un régime totalitaire que le juriste a appelé de ses vœux et légitimé intellectuellement, c'est-à-dire juridiquement, de conserver ce qui peut être menacé voire soumis à une destruction certaine, le juriste selon Jacob Taubes investissant dans, pariant alors, quitte à frayer avec le diable, sur ce monde et voyant, dans l'apocalypse, «sous quelque forme que ce soit, le principe adverse», cette évidence l'ayant conduit à faire «tout [son] possible pour le subjuguer et le réprimer, parce que venant de là peuvent se déchaîner des forces que nous ne sommes pas en situation de surmonter» (p. 111). Jacob Taubes n'hésite même pas à affirmer que, s'il avait «eu à choisir entre la démocratie et le gouvernement avec le paragraphe 48 pour faire obstacle aux nazis», il n'aurait pas hésité (p. 110).

Une telle idée, pariant sur l'existence d'une espèce secrète de force d'opposition, de retenue eschatologique, est bien évidemment le contraire même des appels innombrables qu'émit le Mendiant ingrat, désireux, surtout durant ses dernières années de vie, de voir advenir le plus rapidement et violemment possible le déchaînement de la brisure des sceaux.

Le style d'écriture de Jacob Taubes est difficile, heurté, il mime l'oralité, la parole vivante dont il fut un maître (cf. p. 9) par ses nombreuses ellipses, mais il est vrai que les textes recueillis dans ce petit volume passionnant trahissent, en effet, un auteur complexe, ambigu, qui ne semble pas avoir été, c'est le moins qu'on puisse dire, un de ces professeurs à petites lunettes rondes estimant sa réussite universitaire au seul nombre de ses textes publiés. Mais qu'attendre d'autre, après tout, d'un auteur qui se prétend révolutionnaire (et non, comme Schmitt, contre-révolutionnaire) et apocalyptique ?

JT-apo.jpgCette complexité se retrouve dans le jugement de Jacob Taubes sur Carl Schmitt qui, ce point au moins est évident, avait une réelle importance intellectuelle à ses yeux, était peut-être même l'un des seuls contemporains pour lequel il témoigna de l'estime, au-delà même du fossé qui les séparait : «On vous fait réciter un alphabet démocratique, et tout privat-docent en politologie est évidemment obligé, dans sa leçon inaugurale, de flanquer un coup de pied au cul à Carl Schmitt en disant que la catégorie ami / ennemi n'est pas la bonne. Toute une science s'est édifiée là pour étouffer le problème» (p. 115), problème qui seul compte, et qui, toujours selon Jacob Taubes, a été correctement posé par le seul Carl Schmitt, problème qui n'est autre que l'existence d'une «guerre civile en cours à l'échelle mondiale» (p. 109). Dans sa belle préface, Elettra Stimilli a du reste parfaitement raison de rapprocher, de façon intime, les pensées de Schmitt et de Taubes, écrivant : «Révolution et contre-révolution ont toujours évolué sur le plan linéaire du temps, l'une du point de vue du progrès, l'autre de celui de la tradition. Toutes deux sont liées par l'idée d'un commencement qui, depuis l'époque romaine, est essentiellement une «fondation». Si du côté de la tradition cela ne peut qu'être évident, étant donné que déjà le noyau central de la politique romaine est la foi dans la sacralité de la fondation, entendue comme ce qui maintient un lien entre toutes les générations futures et doit pour cette raison être transmise, par ailleurs, nous ne parviendrons pas à comprendre les révolutions de l'Occident moderne dans leur grandeur et leur tragédie si, comme le dit Hannah Arendt, nous ne le concevons pas comme «autant d'efforts titanesques accomplis pour reconstruire les bases, renouer le fil interrompu de la tradition et restaurer, avec la fondation de nouveaux systèmes politiques, ce qui pendant tant de siècles a conféré dignité et grandeur aux affaires humaines» (pp. 15-6).

De fait, l'explication selon laquelle des penseurs de la trempe intellectuelle de Heidegger ou de Schmitt auraient cédé aux sirènes du nazisme pour la simple raison que c'étaient, en tout premier (mais aussi en dernier) lieu, des salauds est évidemment simpliste : ainsi, dire que l'histoire allemande, «que ce soit à partir de Luther, de Bismarck, ou de Charlemagne, ou encore de Schmitt [aboutirait] à Hitler» cela écrit-il, il n'y croit pas, car ces «généalogies sont faciles et ne coûtent rien, on peut les échafauder sans mal. Si l'affaire s'était passée en France, j'aurais pu vous la présenter avec Maurras en remontant jusqu'à Gobineau» (p. 109). On n'ose penser ce que Jacob Taubes eût pu écrire de terrible et définitif sur les travaux d'un historien tel que Zeev Sternhell, habitué, lui, à ce genre de raccourci aussi séduisant que contestable, mais nous savons que, dans le jugement de Taubes sur Schmitt, c'est la prise en compte de l'homme qui a prévalu, non celle de ses idées ou de ses livres, non celle de la pure théorie du droit, cette chimère contre laquelle le juriste s'est battu toute sa vie. En fait, ce qui, in fine, intéresse Jacob Taubes, c'est le fait que Carl Schmitt a dominé, par la pensée, son époque, tout en ne refusant pas de se confronter à la réalité, c'est-à-dire, et cela signe la nature véritable d'un penseur qui est, avant tout, un homme, devoir décider (5), quoi qu'il lui en coûte, s'engager, au-delà même de la loi, par le biais de la miséricorde, de l'amour ou du pardon, trois situations exceptionnelles, absolument personnelles, convoquant plus que toute autre la force de l'individu kierkegaardien, auxquelles Jacob Taubes, dans sa «misérable vie» nous dit-il, n'aura jamais pu renoncer (cf. p. 63).

Notes

(1) En divergent accord. À propos de Carl Schmitt (traduit de l'allemand par Philippe Ivernel, Préface d'Elettra Stimilli, Rivages Poche, coll. Petite bibliothèque, 2003), pp. 61-2. Les chiffres entre parenthèses renvoient à notre édition.

(2) Sur ce refus de condamner Schmitt, à l'inverse de ce que font beaucoup de nos midinettes intellectuelles, Jacob Taubes a des mots remarquables : «Nous [les Juifs] avons bénéficié d’une grâce, en ce sens que nous ne pouvons être de la partie. Non parce que nous ne voulions pas, mais parce qu’on ne nous laissait pas en être. Vous, vous pouvez juger, parce que vous connaissez la résistance, moi je ne peux être sûr de moi-même, je ne peux être sûr de moi-même ni de quiconque, je ne peux être sûr que personne ne soit à l’abri d’une contamination par cette infection du «soulèvement national» et ne joue un jeu fou pendant une ou deux années, sans scrupule, comme le fut Schmitt» (pp. 107-8).

(3) J'ai déjà cité le propos d'Elettra Stimilli. Plus loin, Jacob Taubes écrit : «Car Schmitt pense en terme d'apocalypse, mais d'en haut, à partir des puissances; moi, je pense au contraire d'en bas. Cela étant, nous est commune à tous deux cette expérience du temps et de l'histoire comme délai, comme dernier délai» (p. 45) ou comme «délai limité» (p. 96). Il poursuivra le parallèle entre Schmitt et Benjamin en écrivant : «tous deux ont en propre une conception mystique de l'histoire, dont la pièce essentielle concerne le rapport de l'ordre du sacré à l'ordre du profane» (p. 53).

(4) Je renvoie le lecteur curieux de ces questions éminemment complexes à la préface fouillée que Raphaël Lellouche a donnée à la traduction française, déjà mentionnée, d'Eschatologie occidentale, sous le titre La guérilla herméneutique de Jacob Taubes.

(5) «Schmitt lit la montée de la pensée contre-révolutionnaire, à partir de de Maistre jusqu'à Donoso Cortès, c'est-à-dire jusqu'à la décision absolue, comme une réaction à l'encontre de la passivité traditionaliste et légitimiste», préface de Raphaël Lellouche, op. cit., p. 20. Souvenons-nous également que Schmitt a fait dans sa Théologie politique une lecture de Kierkegaard au travers du concept de la décision.

mercredi, 08 février 2017

Neturei Karta et autres juifs contre le sionisme

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Neturei Karta et autres juifs contre le sionisme

Par Daniele dal Bosco

(texte tiré de: http://www.centrostudilaruna.it )

« L’antisionisme n’est pas de l’antisémitisme : c’est tout simplement la critique des actions criminelles d’un Etat particulier » (Noam Chomsky).

Beaucoup d’entre nous ont vu à la télévision, dans les journaux ou sur la grande toile des manifestations dans les rues des grandes villes, surtout dans les pays anglo-saxons ou en Israël, organisées par des juifs à longues barbes et à papillotes (payot), brandissant, en guise de protestation, des drapeaux et des fanions palestiniens, des calicots affichant des slogans antisionistes et, au cou, l’effet vestimentaire le plus symbolique des Palestiniens, devenu célèbre dans le monde par Arafat : le keffieh.

Les médias israëliens, et la plupart des médias internationaux, surtout anglo-saxons et européens, les considèrent comme un groupe d’orthodoxes extrémistes qui nient l’évidente connexion qu’il y a entre sionisme et judaïsme. Leur groupe ne compte que quelques milliers de personnes mais, en réalité, ceux qui, tant parmi les juifs que parmi les « gentils »,  semblent s’aligner sur l’essentiel de leurs idées, à la base de leurs protestations, sont bien plus nombreux.  Cependant, la crainte de « blesser » les victimes de l’holocauste, d’être mal jugé ou, pire, d’être taxé de « raciste » est encore profondément ancrée dans le subconscient collectif de l’humanité depuis plus de 70 ans, grâce au colossal travail de la propagande médiatique.

Les membres du mouvement Neturei Karta font partie d’un groupe de juifs orthodoxes, les haredim, qui se composent de plus d’un million de personnes, divisées en plusieurs sous-groupes, plus ou moins extrémistes, lesquels sont majoritairement hostiles au sionisme, hostilité qui se manifeste, par exemple, dans le refus de faire le service militaire imposé par l’Etat israélien. Les Neturei Karta refusent, en plus, toute représentation politique et tout subside économique de la part de l’Etat d’Israël.

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Tout comme le grand intellectuel et linguiste Noam Chomsky et l’historien américain moins connu Norman G. Finkelstein, les Neturei Karta font leurs les expressions les plus fortes de la foi mosaïque et s’opposent au sionisme, idéologie qui, dès les années 40 du siècle passé, était partagée par une majorité de juifs. Un autre groupe de haredim (notamment des hassidiques) était également antisioniste, bien que cet antisionisme ait été diffus. Ce groupe est celui dit de Satmar. Il a été fondé en Roumanie en 1905 par le Rabbin Joel Teitelbaum. Ce dernier a exprimé ses idées antisionistes dans un texte intitulé Vayoel Moshe (paru en 1961). Elles sont à la base des vues du Conseils Orthodoxe de Jérusalem (Edah HaChareidis).

L’antisionisme des Neturei Karta, comme celui des autres groupes orthodoxes juifs, a toujours été pensé comme hostile à l’existence d’un Etat juif en terre palestinienne, sans pour autant nier le caractère sacré que le judaïsme confère à cette terre palestinienne (Eretz Yisrael). Ils se réfèrent aux écritures sacrées des juifs, plus spécifiquement au Talmud, selon lequel il est interdit de créer par la force un Etat juif avant la venue du Messie (Mashiach ben David). De plus, ces textes interdisent explicitement de dominer et d’humilier d’autres peuples. Le Talmud, dans le traité dit Ketubot 111a, affirme clairement que les juifs ne peuvent retourner en masse en terre sainte, ne peuvent se rebeller contre l’épreuve de la diaspora, voulue par Dieu, ni forcer la venue du Mashiach.

Dans la vision sioniste, au contraire, la terre palestinienne, celle de l’antique Israël, est étroitement liée à l’Etat d’Israël, selon la vision du Rabbin Zvi Yehuda Kook, chef de file du sionisme religieux d’après-guerre. Quant au mouvement juif postsioniste, que l’on retrouve principalement dans les milieux universitaires et intellectuels, il propose, dans sa forme la plus courante, un dépassement de l’idéologie sioniste mais sans toucher au lien entre la terre et la souveraineté territoriale de l’Etat d’Israël.

Les Neturei Karta, terme qui signifie, en araméen, les « Gardiens de la Cité », ont leur siège dans le quartier de Mea Shearim à Jérusalem. Le mouvement a été créé en 1938 par les Rabbins Amram Blau et Aharon Katzenelbogen. Ils se référaient tous deux à l’antisionisme de Jacob Israël de Haan, un journaliste juif que les sionistes ont assassiné à Jérusalem en 1924 parce qu’il s’opposait fermement à la création d’un Etat d’Israël.  Le Rabbin Meir Hirsch  -fils de Moshe Hirsch, lui-même gendre de Rabbi Katzenelbogen, chef de file des Neturei Karta et conseiller d’Arafat- soutenait la thèse suivante : « Le sionisme, pour nous, est la continuation de la Haskalah, c’est-à-dire des Lumières juives, qui veulent que le judaïsme ne soit plus observer que dans la vie privée et jamais dans la vie publique. Theodor Herzl, considéré comme le fondateur du sionisme, est un adepte de la Haskalah. Dans ses journaux intimes, il raconte que le sentiment sioniste est né en lui après une querelle avec un passant dans les rues de Paris, passant qui l’avait injurié copieusement, usant de vocalbes antisémites. Herzl a été profondément meurtri par cet incident et s’est mis à penser que l’unique solution, pour les juifs, était de créer un Etat sous le signe de la Haskalah. Le sionisme est donc une idéologie qui a amené tout un peuple à la mécréance, l’arrachant ainsi à sa véritable nature juive » (1).

Herzl, dans son célèbre livre Der Judenstaat (1896), renouait avec les visions proto-sionistes du rabbin sépharade Yehudah Alkalai (1798-1878) (2) qui, en 1838 déjà, dans un pamphlet intitulé Shema Yisrael (« Ecoute, ô Israël »), proposait de commencer à établir des colonies juives sur la terre d’Israël, afin de préparer la venue du Messie. Des idées similaires s’exprimaient également chez l’un de ses contemporains, le rabbin askénaze Tzvi Hirsch Kalischer (1795-1874). A cette époque-là, la majorité des juifs considéraient que de telles idées étaient hérétiques, dans la mesure où ils croyaient, à l’instar des Neturei Karta d’aujourd’hui, que seule l’intervention divine, par l’intermédiaire de l’avènement du Mashiach, allait permettre un retour à la Terre Sainte.  

Pour les Neturei Karta, la diaspora a été une punition divine et, dès lors, les uniques propriétaires de la Palestine sont les Palestiniens. Ils ne vont pas prier au Mur Occidental (Kotel), connu sous le nom de « Mur des Lamentations » parce qu’ils considèrent que toute la ville de Jérusalem-Est est une terre occupée (3). Ils entretiennent des rapports avec le Hamas, le Hizbollah et l’Iran. Ils contestent l’instrumentalisation par les sionistes de l’holocauste. Ils communiquent entre eux en utilisant les pashkvil, des communiqués en forme de manifeste qu’ils collent ou affichent sur les murs dans les rues, mode typique aux communautés juives orthodoxes.

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Il est curieux de noter que les deux partis, antisionistes et sionistes, font référence à la figure d’Amalek, le premier ennemis des Israélites après le passage de la Mer Rouge. Amalek était le petit-fils d’Esaü, le frère jumeau de Jacob (appelé aussi Israël) (4). Esaü avait ordonné à Amalek de poursuivre Jacob pour l’éternité, l’accusant d’ l’avoir privé de son droit d’aînesse et de lui avoir ravi l’amour de leur père, Isaac. Le personnage biblique d’Amalek est instrumentalisé de diverses manières par les sionistes et les antisionistes : certains sionistes considèrent que les Palestiniens sont les descendants d’Amalek, tandis que certains antisionistes, comme les Neturei Karta, associent les sionistes à la descendance d’Amalek. Au-delà de ces associations et références à l’antiquité juive, utilisées à des fins de propagande, on peut admettre que la vision traditionaliste des Neturei Karta est, en milieux juifs, plus proche de l’idée et de la vision traditionnelle et métaphysique. Dans leur vision, le peuple ou la nation d’Israël est une réalité métaphysique, dans la mesure où elle ne peut pas exister sans la Torah et sans la foi ; par voie de conséquence, la forcer à demeurer sur un territoire déterminé, comme on l’a vu ci-dessus, est contraire aux écrits des textes sacrés. En ce sens, ils s’opposent totalement à la vision matérialiste du sionisme, qui déracine le peuple juif, c’est-à-dire l’arrache à ses racines métaphysiques (5).

L’opposition à tout abus dans l’usage du terme « Israël » est, dans cette perspective, une confirmation supplémentaire du caractère traditionnel du mouvement Neturei Karta. Ils déclarent explicitement que « l’Etat qui vient d’être appelé ‘Israël’ devrait cesser d’exister. Si cela n’arrive pas, nous voulons qu’il ne s’appelle plus ‘Israël’ parce que sa nature toute entière est en opposition totale au vrai peuple d’Israël (…). Les chefs sionistes n’ont aucun droit de se poser comme les représentants et les porte-paroles du vrai peuple d’Israël » (6).

Notes:

(1) http://www.tpi.it

(2) Ceci pour démontrer que le sionisme n’est pas une invention purement askénaze, comme on le croit souvent erronément.  

(3) La partie orientale de Jérusalem a été annexée par Israël en 1967, après la guerre des six jours.

(4) « Je ne t’appellerai plus Jacob mais Israël parce que tu as combattu avec Dieu et contre les hommes et tu as vaincu ! » (Genèse, 32, 29).

(5) L’interprétation du peuple d’Israël comme entité métaphysique est typiquement cabbalistique et s’exprime dans la Kabbalah moderne, par exemple chez Michael Laitman, lequel est d’accord avec les Neturei Karta, pour dire que le véritable Israël, c’est-à-dire l’Israël métaphysique, ne pourra se manifester qu’avec l’avènement du Messie. Là où le Messie se manifeste, pour Laitman, est son lignage, non comme celui d’une personne spécifique, mais comme une force de la Lumière divine qui revient vers nous, comme un labeur spirituel qui l’attire vers notre réalité. Toutefois, Laitman et, avec lui, bon nombre de cabbalistes juifs, à la différence des Neturei Karta, ne s’oppose pas au sionisme et à l’Etat d’Israël, les considérant comme un passage nécessaire dans la préparation à la venue du Messie. Cette séparation nette entre métaphysique et « physique » de la réalité, cette vision dualiste, typique de la Kabbalah, est explicitée dans un langage typiquement symbolique, a-logique et interprétable, rendant la vision traditionnelle cabbaliste difficilement confrontable à celle étudiée spécifiquement par les traditionalistes, par les chrétiens, les hindouistes, les musulmans et les taoïstes voire par la Grèce et la Rome antiques. Ce qui est commun, en général, aux diverses visions traditionnelles, sauf dans une certaine vision guénonienne moderne (voir : Sull’origine della visione economica in René Guénon), c’est le manque de séparation entre les parties du réel, entre la métaphysique et la « physique ». La vision islamique, et plus encore soufie, est exemplaire à ce propos.

(6) http://www.nkusa.org

 

vendredi, 25 novembre 2016

Quel avenir pour le sionisme sous Donald Trump?

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Quel avenir pour le sionisme sous Donald Trump?

Christian Brosio interroge Youssef Hindi

Christian Brosio interroge Youssef Hindi au sujet de ses deux ouvrages sur l'histoire du sionisme et le choc des civilisations publiés chez SIGEST. La fin de l'entretien porte sur Donald Trump, et ce que l'on peut en attendre. L'histoire des Etats-Unis est hélas peu encourageante, les présidents isolationnistes ont souvent été entraînés à la guerre à la suite de coups montés...

mardi, 22 novembre 2016

Entretien de Youssef Hindi à "Algerie patriotique"

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Entretien de Youssef Hindi à "Algerie patriotique": «Les réformistes veulent apporter leur poison comme remède au wahhabisme»

Ex: http://www.algeriepatriotique.com

L’historien, écrivain et chercheur indépendant Youssef Hindi prône le retour à «une étude saine des textes de l’islam, par-delà le réformisme et le wahhabisme» et à «utiliser le corpus islamique pour comprendre le sens de l’Histoire et faire une critique de la modernité». Pour lui, il ne faut pas «soumettre l’islam au monde moderne», mais «proposer une alternative au projet globaliste, totalitaire et destructeur». Interview.

Algeriepatriotique : Dans votre livre Occident et islam : sources et genèse messianiques du sionisme ; De l'Europe médiévale au choc des civilisations, vous parlez des racines du messianisme kabbalistique et de son influence sur les trois religions monothéistes, à partir du XIIIe siècle. Quel rôle le wahhabisme et les Frères musulmans ont-ils joué dans la subversion de la religion musulmane par la tradition kabbalistique ?

Youssef Hindi : Il est impossible de comprendre le rôle historique du wahhabisme et des Frères musulmans sans retracer la genèse du réformisme islamique (dont est issu le frérisme) et son lien historique et idéologique avec un des mouvements kabbalistiques qu’est le sabbato-frankisme. Les deux piliers fondateurs de la kabbale – depuis sa formation au Ier siècle – sont, d’une part, l’étude de la fin des temps (l’apocalyptique) et, d’autre part, l’ésotérisme et le mysticisme qui englobent une réflexion sur le monde d’ici-bas et de l’au-delà, à quoi il faut ajouter la notion purement kabbalistique d’évolution vers la révélation de la connaissance cachée, induisant l’idée que la kabbale progresse et avec elle l’histoire. Un progrès historique par paliers successifs menant droit vers les temps messianiques, vers la fin des temps et l’apogée du peuple élu.

Dans le second chapitre de mon ouvrage, je retrace l'histoire du wahhabisme, du réformisme islamique et du réformisme chrétien, en mettant en évidence leurs racines communes : le messianisme antinomique sabbato-frankiste.

jacob-frank-hp.jpgIssu d'un double mouvement, né aux XVIIe et XVIIIe siècles avec les faux messies Sabbataï Tsevi et Jacob Frank (l’un faussement converti à l’islam et l’autre au catholicisme), ce messianisme apocalyptique s'opposant à Dieu et à la loi naturelle, par les conversions massives des sabbatéens à l'islam et des frankistes au catholicisme, va promouvoir l'athéisme au cœur de ces deux mondes, via notamment des loges maçonniques.

Jacob Frank

Les principes premiers d’un mouvement historique déterminant ses finalités, les fondements de la kabbale ont conditionné la forme de messianisme dont il est issu, et par la suite, donné au sabbato-frankisme le caractère qui est le sien. Le sabbato-frankisme fut l’inéluctable conséquence de l’évolution de la kabbale, le fruit de l’histoire de la mystique juive aux plans idéologique, intellectuel, politique et moral.

Sabbatai_tsevi.jpgDans la même perspective, le programme apocalyptique du choc des civilisations est partie intégrante du dessein messianique juif. Le projet de destruction du christianisme et de l’islam que l’on trouve au XIIIe siècle, dans le Zohar, a dirigé quelques siècles plus tard et à la suite de tentatives qui en posèrent les fondations, le sabbato-frankisme vers cet objectif.

Le réformisme islamique eut comme point d’ancrage les régions sabbataïstes, et son expansion s’est faite via les loges maçonniques infiltrées par les sabbataïstes. Les loges se sont propagées, à partir du XVIIIe siècle, en Turquie, en Iran, en Asie centrale, mais aussi en Egypte et en Syrie.

Sabbataï Tsevi

De son côté, le père du wahhabisme, Muhammad Ibn Abd Al-Wahhab (tout comme les réformistes allant de Afghani à Hassan Al-Banna, en passant par Abduh et Rachid Ridha) prétendait revenir à l’islam en massacrant les musulmans, avec l’aide des Saoud, pour imposer son idéologie.

Lorsque l’on fait le parallèle entre Cromwell qui, au XVIIe siècle, l’Ancien Testament à la main, massacra en masse les catholiques irlandais et écossais, en détruisant les églises, massacrant prélats, hommes, femmes et enfants, pour imposer une nouvelle religion, et Mohamed Ibn Abd Al-Wahhab un siècle plus tard, l’on y voit bien plus que quelques similitudes. C’est exactement le même schéma. Abd al-Wahhab prétendait revenir à l’islam des origines, comme les protestants qui se présentaient comme des fondamentalistes, véritables tenants du christianisme, en renouant avec l’Ancien Testament. Dans les faits, Abd Al-Wahhab et ses sectateurs d’hier et d’aujourd’hui font montre d’une haine dévastatrice de l’islam, du Prophète et de ses compagnons, dont ils se sont acharnés à détruire systématiquement les tombeaux et l’héritage tant religieux que culturel.

Le réformisme islamique forme avec le wahhabisme deux faces d’un même projet, se complétant l’un et l’autre sous une apparente opposition, soit une hérésie à deux visages suivant ce que j’appelle une dialectique infernale.

Depuis l’apparition d’Abd Al-Wahhab, Malkun Khan (le premier grand réformiste), Afghani et Abduh, ainsi que leurs disciples, cela jusqu’à nos jours, le wahhabisme et son versant libéral réformiste, dont l’ultime avatar sont les Frères musulmans, ont agi comme des agents corrosifs et des facteurs de décomposition matérielle et spirituelle de l’islam ; et nous sommes à présent témoins de la dernière étape de ce processus historique de subversion.

Les wahhabites et les Frères musulmans jouent un rôle essentiel dans ce grand échiquier géopolitique dans lequel s’applique la stratégie du choc des civilisations : les troupes wahhabites fanatisées détruisent les villes et les Etats musulmans, guidées par des prédicateurs et de pseudos savants wahhabites et Frères musulmans ; tandis que les Frères musulmans pilotés, financés par les occidentalistes tant arabes qu’européens et américains sont portés au pouvoir comme en Egypte et en Tunisie.

YH-arton41737.jpgDans vos deux livres Occident et islam et Les mythes fondateurs du choc des civilisations, vous décrivez le choc des civilisations comme étant une doctrine programmée. Qui est à l’origine de cette stratégie qui vise à faire s’affronter les civilisations ?

Mes recherches montrent que cette stratégie a été élaborée par un kabbaliste du nom de Solomon Molcho – suivant les interprétations rabbiniques et eschatologiques de la Bible – qui, au XVIe siècle, a tenté de lancer l'Eglise puis le Saint-Empire romain germanique dans une guerre contre l'Empire ottoman, afin d'expulser ce dernier de Palestine et y reconstruire le royaume d'Israël. C’est précisément ce que les Britanniques ont fait au sortir de la Première Guerre mondiale, par le démantèlement de l’Empire ottoman et la création du Foyer juif en Palestine (1919-1920) à la suite de la promesse faite par les Anglais aux sionistes dans la Déclaration Balfour (1917).

Le projet de Molcho a mis quatre siècles à s’accomplir, mais il s’est finalement réalisé ; ceci est une des preuves que j’apporte en guise de démonstration de la permanence du projet messianique et du lien intrinsèque existant entre le sionisme et la stratégie du choc des civilisations, la seconde étant la condition préalable à la réalisation du premier.

En 1957, Bernard Lewis, le maître de Samuel Huntington, «laïcisera» cette stratégie messianique en lui donnant un habillage scientifique pour l'ériger ainsi en théorie. Lewis, en digne héritier de Molcho, dans l’optique de fomenter des guerres entre le monde (post)chrétien et le monde musulman, décrète alors que ces deux grandes religions seraient ontologiquement vouées à s’affronter. C’est ce même Bernard Lewis, de confession juive et détenteur des nationalités israélienne, britannique et étasunienne, qui œuvra dans le début des années 2000 pour convaincre Dick Cheney, alors vice-président des Etats-Unis, d’envoyer l’Amérique en guerre contre l’Irak.

Ce choc des civilisations fabriqué de toutes pièces n'est au fond que le faux nez de ce que j'appelle «un choc idéologique mondial» opposant le monde vétérotestamentaire – recouvrant le bloc anglo-thalassocratique, ses vassaux anciennement catholiques du vieux Continent, les pétromonarchies wahhabites et Israël – au reste de l'humanité.

L’idéologie wahhabite, Daech et la propagande occidentale ont largement contribué à déformer la perception qu’ont les non-musulmans de l’islam. Sur quels mythes déformants repose cette fausse perception ?

Les mythes fabriqués au cours des siècles autour de l’islam sont très nombreux, mais dans mon second ouvrage Les mythes fondateurs du choc des civilisations, je déconstruis les principaux sur lesquels s’appuie la stratégie du choc des civilisations. J’ai choisi cinq mythes – qui me semblent être les plus importants – que j’ai traités dans cinq chapitres à thèmes.

Ces mythes et accusations ont notamment trait au rapport existant entre l’islam, la violence et la guerre. Mon étude part à ce propos d’une contextualisation historique de la naissance et de l’expansion de l’islam, combinée à une minutieuse étude exégétique ; s’ensuit un focus sur les rapports, souvent méconnus ou oubliés, de la chrétienté et du monde musulman, ainsi que sur la place de la femme dans la religion musulmane.

Mon ouvrage s’achève sur une réflexion fondamentale, à savoir : quelle est la place véritable de Dieu et de la religion dans les sociétés humaines, ceci en relation directe avec la notion de souveraineté. Car il nous est asséné que le problème fondamental du monde musulman et son retard seraient dû au fait qu’il n’aurait pas procédé à un aggiornamento, une séparation complète du religieux et du politique.

Vous affirmez que si l’islam est rejeté en Occident, la faute en incombe aux Occidentaux qui n’ont pas compris cette religion. Peut-on leur en vouloir du moment que le discours alternatif à l'idéologie wahhabite extrémiste et violente est totalement inaudible ?

Je n’ai pas affirmé cela. J’explique que le rejet de l’islam est en grande partie dû à sa diabolisation par les grands médias occidentaux, les idéologues et intellectuels ainsi que les politiciens. Cette diabolisation se fait par la diffusion de vieux mythes forgés dans des contextes historiques, politiques et géopolitiques à partir du Moyen-Age, combinée à la propagation de l’idéologie wahhabite dans le monde – via plusieurs canaux et financée par les pétrodollars : médias, institutions, chaires universitaires, mosquées… –, qui a débuté après la Seconde Guerre mondiale et le Pacte de Quincy (février 1945) passé entre le président des Etats-Unis, Roosevelt, et le roi d’Arabie Saoudite, Abdelaziz Ibn Saoud, avec l’aide et la bénédiction du monde occidental, les Etats-Unis en tête. Sans les pétrodollars et le soutien anglo-américain apporté à l’Arabie Saoudite, le wahhabisme (et ses avatars terroristes) ne serait pas devenu l’orthodoxie musulmane aux yeux des Occidentaux et d’un certain nombre de musulmans.

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La propagande médiatique wahhabite et occidentale rend totalement inaudible le discours des savants traditionnalistes et des intellectuels qui ont étudié l’histoire et le rôle du wahhabisme.

Des penseurs s'accordent à dire qu'il faut aller vers une refondation de la pensée théologique de l'islam afin de dégeler toutes les glaciations théologiques. Quel est votre avis sur cette question ?

Ces penseurs musulmans, dont le discours est accompagné par les idéologues qui veulent finir d’abattre l’islam, sont les héritiers des réformistes francs-maçons (Malkun Khan, Afghani, Abduh et leurs élèves) qui ont commencé ce travail de dilution de l’islam dans la modernité.

Les réformistes se bousculent aujourd’hui, dans la logique de ce mouvement dialectique entre wahhabisme et réformisme dont j’ai parlé, prenant pour prétexte les atrocités de Daech et des autres groupes terroristes, pour apporter leur poison sous forme de remède à une maladie qu’ils ne nomment jamais : le wahhabisme.

Mon avis est qu’il faut revenir à une étude saine des textes de l’islam, par-delà le réformisme et le wahhabisme, et utiliser le corpus islamique pour comprendre le sens de l’Histoire et faire une critique de la modernité ; non pas pour soumettre l’islam au monde moderne, mais pour proposer une alternative aux idéologies modernes et au projet globaliste, totalitaire et destructeur, sous couvert de progressisme, qu’elles ont générés.

Selon vous, Eric Zemmour, Bernard-Henri Levy et Alain Finkielkraut obéissent à un même mouvement qui existe dans la tradition juive, à savoir le mouvement assimilationniste ou «Haskalah». Qu’est-ce que ce mouvement ? Quels sont ses objectifs ?

moses-mendelssohn-german-philosopher-photo-researchers.jpgDans une conférence récente, j’ai expliqué qu’Eric Zemmour s’inscrit dans ce mouvement (on peut y inscrire aussi Finkielkraut dans une certaine mesure), mais pas Bernard-Henri Levy. La Haskalah est un mouvement initié en 1780 par le philosophe juif allemand Moses Mendelssohn (1729-1786). Il propose aux juifs d’Europe de s’assimiler en apparence aux cultures européennes, mais tout en préservant leur identité. La Haskalah appartient au mouvement frankiste qui prône une assimilation par la conversion au catholicisme et/ou par la dissimulation de l’appartenance au judaïsme, pour détruire le monde chrétien de l’intérieur.

Moses Mendelssohn

Dans mon premier livre, je cite l’historien Gershom Scholem, qui est le plus grand spécialiste de la kabbale et de son histoire, et qui écrit à propos de la doctrine de Jacob Frank et de ses finalités (et dont est issu le mouvement de la Haskalah) : «La conception de Jacob Frank revêtit un aspect résolument nihiliste. Sous le sceau du silence, le vrai croyant (c’est-à-dire le partisan de Frank), qui possède Dieu dans le secret de son cœur, peut traverser toutes les religions, les rites et les ordres établis sans donner son adhésion à aucun, au contraire, en les anéantissant de l’intérieur et en instaurant ainsi la véritable liberté. La religion constituée n’est qu’un manteau qui doit être endossé puis rejeté sur le chemin de la "connaissance sacrée", la gnose du point où toutes les valeurs traditionnelles sont anéanties dans le courant de "vie". Il propagea ce culte nihiliste sous l’appellation de "voie vers Esaü" ou "Edom" (le monde chrétien occidental), incitant à l’assimilation sans vraiment y croire, espérant la miraculeuse renaissance d’un judaïsme messianique et nihiliste surgissant dans les douleurs de l’enfantement d’un bouleversement universel. Ces conceptions ouvraient la voie à la fusion entre la dernière phase du messianisme et de la mystique sabbataïste, d’une part, et, de l’autre, le rationalisme contemporain et les tendances laïques et anticléricales. La franc-maçonnerie, le libéralisme, voire le jacobinisme peuvent être considérés comme d’autres façons de tendre au même but.»

La destruction du christianisme à laquelle se sont attelés les frankistes, d’une part, et celle de l’islam par les sabbataïstes, d’autre part, se sont faites en parallèle via des voies quasi-similaires : en accédant et en s’intégrant aux élites et aux classes dominantes, notamment via des loges maçonniques – le concept kabbalistique de la rédemption par le mal, celui de la Table rase en quelque sorte, détruire pour reconstruire, pénétra les mondes chrétien et musulman en passant par des loges maçonniques kabbalistiques.

C’est en comprenant l’origine de ce mouvement et ses finalités, qui se résument à la destruction totale de l’Occident (spirituellement et physiquement), que l’on peut comprendre le discours d’un Zemmour qui se présente comme un patriote assimilé, plus français que les Français, et qui attise paradoxalement depuis des années les flammes de la guerre civile en France, tout comme BHL travaille lui, comme son coreligionnaire Bernard Lewis, à la destruction du monde musulman.

Interview réalisée par Mohamed El-Ghazi

lundi, 14 novembre 2016

"Against Our Better Judgment" The Hidden History of How the U.S. Was Used to Create Israel,

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Review:
"Against Our Better Judgment"
The Hidden History of How the U.S. Was Used to Create Israel, by Alison Weir
 
Ex: http://www.unz.com
 
weir.jpgAlison Weir's relatively short book covers the history of Zionism in the United States from the last decades of the 19th century until the creation of the state of Israel in 1948. (She is working on a second volume that will carry this history to the present.) Its brevity does not mean, however, that it is in any sense superficial, as it brings out key historical information, all well-documented, that sets the stage for the troubled world in which we now live. While histories of Zionism have usually focused on Europe, Weir shows that American adherents of this ideology have been far more important than generally has been recognized

The basic theses of this book are encapsulated in the title and subtitle. The history of how American Zionists used America to create Israel was “hidden” in two respects. First, it was “hidden” in the sense that American Zionists often worked behind the scenes. More importantly, however, that history is known but has been kept hidden from the general public, who rely on the mainstream media, and exists almost exclusively in works produced by small publishers—often of a scholarly bent—read by only a few. As Weir points out, those who have tried to bring this information to the general public have suffered both venomous verbal attacks and economic threats that quickly silence the message and often destroy the messenger. This treatment obviously serves to prevent others from doing likewise—“Pour encourager les autres.”

America’s support for Israel ran “against our better judgment” in the sense that American foreign policy experts of the era covered by this work recognized that support for Zionist goals would damage American national interest and that this support only came about because of the political power of American Zionism.

While Weir is not a professional historian, she has intensively studied the literature on this subject for years, much of it rather arcane, as well as spending considerable time traveling in the region. Having a Ph.D. in history myself, I would like to point out that the writing of history does not require any specialized talents as are needed in such fields as theoretical physics or medicine, so that intelligent, hardworking laypersons can often produce works of great value. Weir does not purport to have pored over primary sources to discover new information, which is the hallmark of the professional historian’s craft, but rather synthesizes information from existing published studies that are largely unknown to the general public. Moreover, she brings to her work knowledge of the land and the peoples which she has picked up from her travels.

For those who still might find her background insufficient for her task, it should be further added that Israel apologist Alan Dershowitz, who lacks as far as I can tell any college degree in history, manages to produce works on Israel that are picked up by major publishers who would not think of publishing anything done by most academic historians. It might be added that academic historians, who specialize in monographs, would be loath to produce a comparable account of this subject from Weir’s perspective, since it would do little for their careers and might serve as their professional death knell.

While the book’s narrative is very readable and the key points can easily be digested by the average reader, it is nonetheless well-documented. To satisfy the more academic reader, the book has a section of extended endnotes longer than the narrative. I found the endnotes section valuable not only for confirming and expanding upon the content of the narrative but also in serving as a point of departure for additional research. I often switched from my Kindle book to a Web search, coming up with names of related books and articles that I would like to peruse, should I ever have the time to venture to a research library.

The work goes over a large number of little known but very important topics to demonstrate the powerful influence of Zionism over American foreign policy. Space, naturally, precludes me from discussing all the topics in detail so I have focused on those which seem to deal most directly with the major themes of the book.

The early political influence of Zionism is illustrated by the fact that in 1887 a Jewish American was made ambassador to the Ottoman Empire, which then controlled Palestine and was thus considered by Zionists as the key country with which to deal. This set the precedent of a Jewish ambassador to this country that was continued for the next 30 years, by which time the Zionist search for outside support had turned elsewhere.

The book brings up the central importance of Louis Brandeis and his disciple Felix Frankfurter in advancing the interests of Zionism. Brandeis was a noted social and economic reformer who was a Zionist and happened to be very close to President Wilson, who would put him on the Supreme Court in 1916, the first Jew to hold such a position. Even after joining the Supreme Court, Brandeis used this access to Wilson to promote Zionist interests, sometimes acting as a go-between for Wilson and British Zionists.

Brandeis would head the international Zionist Central Office during the teens but, perhaps even more significant, he would be a leading member of a secret society, the Parushim, the Hebrew word for “Pharisees” and “separate,” which covertly advanced the interests of Zionism in the United States and Europe. The Parushim was founded in 1913 by a University of Wisconsin philosophy professor, Horace M. Kallen, who ironically is considered to be the father of cultural pluralism in the United States. Obviously this idea conflicted completely with his support for the creation of a Jewish exclusivist state, but it is a contradiction that is rather commonplace among many Jews and liberal gentiles alike.

kallen.jpgKallen was regarded by some as first promoting the idea for what became the Balfour Declaration, which would set the stage for the modern state of Israel. He promoted this scheme in 1915 when the U.S. was still a neutral. He told a British friend that this would serve to bring the United States into World War I. It should be pointed out that at that time, despite serious diplomatic issues regarding German submarine warfare, the great majority of the American people wanted to avoid war and Wilson would be re-elected president in November 1916 on the slogan “He kept us out of war.” Kallen’s idea for advancing the Zionist goal, however, soon gained traction.

Frustrated in their efforts to achieve a Jewish homeland in Palestine from the Ottoman Empire, the American Zionists turned toward Britain to bring this about. In 1916 as World War I dragged on indecisively, Zionist leaders promised the British that in return for a Jewish homeland in Palestine—which the British could expect to gain from the Ottomans as one of the spoils of a victorious war—American Zionists would work to bring the United States into the war on behalf of Britain and its allies. Many British strategists at the time, such as Winston Churchill, believed that such an event would turn the tide for victory. Weir holds that it “appears” that the Zionists’ activity was one factor in bringing America into the war [1] and cites a number a number of reputable books and leading contemporary figures—such as then-British Prime Minister Lloyd George—that held that Zionists carried out their side of the bargain by pushing the United States into war.

The Balfour Declaration was a letter, dated November 2, 1917 (and coming out in the press one week later), from British Foreign Secretary Arthur Balfour to Walter Rothschild, a British Zionist leader, officially stating that Britain would use its “best endeavours to facilitate the achievement” of a Jewish Homeland in Palestine.

Now even to give attention to the Balfour Declaration in a history of World War I is somewhat outré; to claim that it caused the United States to enter war is one of those ultra-taboos. Although my Ph.D. was in American history with a focus on diplomacy (and a minor in 20th Century European history), never did I come into contact with anything about the Balfour Declaration in my college studies (which, granted, did not deal with the Middle East). I only knew about it from reading what the mainstream historical profession would regard as disreputable authors.

Reference to the Balfour Declaration and the Zionist role in it was considered one of the daring things done by the iconoclastic Israeli “New Historian” Tom Segev who discussed it in his book, One Palestine, Complete: Jews and Arabs Under the British Mandate (2000). In a lecture on his book that I heard at the University of Maryland in 2002, Segev, though acknowledging that the British goal was winning over Jews to their side [2], derided the idea of any real Jewish power, attributing that mode of thinking to “anti-Semitism.” In 2010, Segev expressed this view in a review of a new book on the Balfour Declaration: “Obviously there was no ‘Jewish power’ controlling world affairs, but Weizmann [3] successfully pretended that the Jews were in fact turning the wheels of history. For once, the anti-Semitic image of the Jews proved useful — they were believed to be so maliciously dangerous that one would do best to acquire them as allies rather than as enemies.”[4]

segev.jpgAlthough Segev is a daring historian who often rejects the Zionist myths on the creation of Israel, in this case he essentially relies on a classic Zionist-constructed strawman, which involves greatly exaggerating the view that the Zionists (and Jews in general) don’t like. It is highly doubtful that the British foreign office believed that Jews were so powerful as to be “turning the wheels of history.” (If that had been the case, one would think that the British would have offered Jews much more than Palestine from the very start of the war.) Furthermore, as noted earlier, Weir does not subscribe to anything like this Zionist strawman in regard to the Balfour Declaration, or anything else, I should add.

However, what is important is not only whether the American Zionists were able to bring the United States into a war, but that they made a solemn promise to a foreign country that they would try to do so. As a matter of fact, since Zionists such as Brandeis knew much about Wilson’s thinking and undoubtedly were kept abreast on what Germany was likely to do (it being well-known that Germany was suffering from the British “starvation” blockade and that politically powerful voices there wanted to retaliate by pursuing a harsher submarine policy toward neutrals such as the U.S.), they may have realistically thought in 1916 that there was a good chance that the United States would shortly go to war whether they interceded or not, which meant it would be a wise move to make such a deal and be able to get credit for a result that was not of their own making.[5]

It is also of significance that the American Zionists promised to push the U.S. into war not because they believed that it was in their own country’s national interest—as was the case for a number of prominent Americans such as former President Theodore Roosevelt—but solely for what they considered to be in the interests of world Jewry. Ascribing “dual loyalty” to any Jews is regarded as a classic anti-Semitic canard. In this case, however, the American Zionists’ position did not even rise to the level of “dual loyalty,” being purely singular in that it evinced no apparent concern whatsoever for American interests.

Linked to the Balfour Declaration, Weir points out that “American Zionists may also have played a role in preventing an early peace with the Ottoman Empire.”[6] In 1917, the U.S. State Department had heard that the Ottomans were becoming weary of the war, and it decided to send a secret mission to explore the possibility of detaching the Ottoman Empire from its alliance with the other Central Powers. Such a separate peace would likely leave the Ottoman Empire (or Turkey as it would become shortly)[7] in control of its Asian possessions, which would mean that since Britain would not gain Palestine, no home for Jews could emerge there.

This mission was headed by former Ambassador Henry Morgenthau, who, though Jewish, was not a Zionist. However, he was persuaded by Zionists such as Brandeis protégé Felix Frankfurter, who was a member of the mission’s delegation, to abandon the effort. In a meeting with Morgenthau, Chaim Weizmann, a leading British Zionist who was alerted by American Zionists as to the danger posed by Morgenthau’s mission, also played a major role in stopping the potentially-peacemaking mission, as is indicated in Weir’s endnotes.[8]

Other obstacles to the Zionists’ goal in Palestine would also arise soon after the end of the war in November 1918. Important Christian Americans who were intimately involved in the Near East and supported self-determination for the Arabs recognized that this could not take place if the Zionists were able to set up an ethnic Jewish enclave on Arab land. They went to the Paris Peace Conference which, among a number of issues stemming from World War I, would deal with the territorial settlement.

As a result of the divergent views on the future status of the territory to be given up by the Ottoman Empire, President Wilson decided to send an investigatory commission to the region, which became known as the King-Crane Commission.[9] In line with Wilson’s goal of national self-determination, the commission sought to discover how the region’s inhabitants wanted to be governed, and they overwhelmingly expressed opposition to a Jewish home in Palestine.

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Weir points out that “Zionists through Brandeis dominated the situation, however, and the report was suppressed until after the Peace Accords were enacted.”[10] At the Paris Peace Conference, Weir writes, “[t]he U.S. delegation was forced to follow Zionist directives.”[11]

kingcranebook.jpgOne minor criticism here is that the reader might incorrectly get the impression that the King-Crane Commission dealt solely with Palestine, while it actually involved all the territories severed from, or expected to be severed from, the Ottoman Empire (Turkey).[12] The issue of Palestine made up about half of the report on “Syria,” which also included present day Syria and Lebanon. The other two geographical sections of the report were “Mesopotamia” and “Non-Arabic speaking portions of the Former Ottoman Empire (Asia Minor).”[13] Thus the suppression of the commission’s report was likely due not only to opposition by Zionists, but also to other interested parties disturbed by its findings in areas other than Palestine. These parties would include the British, French and Greeks.

In regard to the report’s description of Palestine, however, Weir’s presentation was completely on the mark. The King-Crane report reflected extreme opposition to Zionism expressed by those Muslims and Christians who lived in Palestine as well as by those who lived in neighboring areas.

Weir points out that during the inter-war period, when Palestine was governed by Britain under a League of Nations mandate, which was intended to prepare the country for eventual independence, the American Zionists moved away from openly pushing for the establishment of an exclusivist Jewish state in Palestine since this ran counter to the temper of the times—which reflected American opposition to militant nationalism and dual loyalty, and respect for majority rule and national self-determination. Instead, Zionists focused on the development of Jewish institutions in Palestine, which would serve as a basis for a Jewish state. Zionist leaders, such as David Ben-Gurion, still viewed American support as key to their establishment of a Jewish state.

With World War II on the horizon, Zionists began to return directly to their goal of a Jewish state. A precursor of the current Israel lobby, the American Zionist Emergency Council (AZEC), began in 1939. In order to pressure the U.S. government to support a Zionist state, AZEC worked to establish more than 400 local committees under 76 state and regional branches to promote this goal. These committees distributed Zionist pamphlets, circulated petitions, and engaged in letter writing campaigns to promote the Zionist cause. AZEC also funded books, articles and academic studies for this same purpose.

By the end of World War II, Zionist efforts gave them considerable power in American politics. In order to appeal to the general American populace, they stressed the needs of the many Jewish European refugees, connecting the refugee problem to Palestine, the latter destination purportedly being the only solution to their existing homelessness. By this humanitarian argument, Zionists could thus appeal to many Americans who did not necessarily believe the Zionists’ contention that Jews had a historical right to control Palestine.

As Britain opted to turn over the troublesome issue of Palestine to the United Nations in 1947, Zionists pushed for a partitioning of Palestine between Jews and the indigenous Palestinian population. The partition plan discriminated in favor of the Zionists, since while the Jewish population comprised about 30 percent of Palestine’s population, the plan would award them with 55 percent of the land. And the Zionists’ real goal was not to be content with that amount but to also grab the remainder.

U.S. State Department officials strenuously opposed the partition plan, looking upon this approach as both contrary to America’s professed principle of national self-determination and its vital interests in the Middle East, where a vast majority of the governments and their people were vehemently opposed to Zionism. A leading State Department official in this opposition was Loy Henderson, Director of the Office of Near Eastern and African Affairs. Zionists viciously attacked him, demanding his removal and even threatening his family. The State Department chose to move him elsewhere and in 1948 President Truman named him Ambassador to Nepal, which kept him far away from anything to do with Palestine.

Removing Henderson, however, did not make the State Department favorable toward transforming any part of Palestine into a Jewish state. Among the higher level opponents were the head of the State Department‘s Division of Near Eastern Affairs, Gordon P. Merriam; Undersecretary of State Dean Acheson, who later became Secretary of State; and George F. Kennan, the State Department‘s Director of Policy Planning, noted as the architect of America’s containment policy against Soviet Communism.

The State Department was not the only part of the executive branch of the United States government that opposed the Zionist goal for Palestine. The newly-created CIA reported in 1947 that the Zionists were seeking goals that would be harmful to both Jews and “the strategic interests of the Western powers in the Near and Middle East.”[14] The Joint Chiefs of Staff opposed partition and expressed the prescient fear that the Zionist aim was to involve the U.S. in their conflict with their Middle East enemies.

Despite this opposition from a consensus of foreign policy and national security experts within his own government, Truman opted to support the Zionist partition plan for political reasons, relying heavily on the views of his domestic political advisor, Clark Clifford, who maintained that the Jewish vote and financial backing were necessary to win the presidential election in 1948. Truman‘s Secretary of State George Marshall, noted for the famed Marshall Plan that helped to rebuild devastated Western Europe, and Secretary of Defense James Forrestal remained staunchly opposed to what they regarded as Truman’s willingness to sacrifice vital national security interests on the altar of domestic politics.

Weir points out that a number of wealthy Zionist Jews provided financial support for Truman’s presidential campaign in 1948, which may put us in mind of Zionist mega-donors of today such as Sheldon Adelson. One of these backers was Abraham Feinberg who funded Truman’s epic whistle-stop train campaign. Truman would give Feinberg credit for his victory. As quid pro quo, the Truman administration remained inert when the CIA later reported that Feinberg was involved in illegal gun-running to Zionist groups in Palestine.

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I should add that while Truman has become something of an idol for recent historians, he was looked upon during his time as being driven by what would benefit his own political interest. As the redoubtable journalist H. L. Mencken quipped about Truman’s 1948 campaign: “If there had been any formidable body of cannibals in the country he would have promised them with free missionaries, fattened at the taxpayer’s expense.” In Truman’s defense, however, it should be pointed out that two of his key opponents in the 1948 presidential election, Republican Thomas Dewey and the left-wing Progressive Party candidate Henry Wallace, Franklin Roosevelt’s former Vice-President, were both staunchly pro-Zionist.[15]

Weir describes a number of Zionists who maintained personal contact with Truman and likely played a role in shaping his policies. David K. Niles, Truman’s executive assistant, was regularly briefed by the head of the Washington Office of the Zionist Organization of America and was believed to be passing top-secret information to the Israeli government. Truman’s long-time friend and former business partner, Eddie Jacobson, was a staunch Zionist with close access to Truman who would describe his information to be of “decisive importance.”[16] Sam Rosenman, a political advisor to Truman, screened State Department memos to Truman.

Although the United States had announced its support for the partition of Palestine, it was apparent that the partition plan still lacked the necessary two-thirds vote to pass in the UN General Assembly. Consequently, the Zionists were able to get a delay in the vote and used that time to intimidate or bribe opponents to reverse their positions.

For example, Weir notes that Wall Street financier and perennial presidential adviser Bernard Baruch threatened war-torn France that it would be denied aid from the United States if it voted against partition. David Niles was able to get rubber baron Harvey Firestone to tell the Liberian president that he would terminate his planned expansion in his country if it did not vote in favor of partition. Haiti was promised economic aid if it would change its vote and support the measure. Costa Rica’s President Jose Figueres was said to have received a blank checkbook to get his country’s vote.

As a result of this behind the scenes skullduggery, the UN General Assembly on November 29, 1947, voted in favor of the adoption and implementation of the partition plan as UN General Assembly Resolution 181. Although this resolution is widely believed in the United States to have created Israel,[17] Weir correctly points out that it “was of limited (if any) legal impact” since General Assembly resolutions, as opposed to those of the Security Council, are not binding on member states. Although the resolution recommended that the UN Security Council implement the partition, it never did.[18]

The effect of the General Assembly’s resolution, however, was to increase the fighting in Palestine. While the Zionist myth would have it that the Jews in Palestine were simply a peaceful community set upon by violent Arabs intent on genocide, Weir points out that Zionist military forces had been covertly preparing for war for some time. They had amassed extensive armaments, some of it coming illicitly from the U.S., and their troop numbers exceeded those of their foes even after five Arab governments had joined the fray. The traditional Zionist portrayal of Israel’s war for independence (which, of course, prevented independence for the Palestinians) as a David versus Goliath conflict in which the Jews miraculously overcame overwhelming odds is pure fiction, but it is still believed in many quarters today and continues to generate sympathy for Israel. On May 15, 1948, Zionists announced the establishment of their new state of Israel, for which they did not establish any boundaries.

sniego.jpgA quick aside here: somewhat ironically, in my view, Weir barely touches on the United States decision to recognize Israel. Moreover, what does exist is largely in the endnotes. Although there will be a second volume to Weir’s history, and the cut-off point for this volume has to be somewhere, still the fact that the book does make reference to events in 1948 would seem to have made it appropriate to discuss in some detail the issue of America’s quick recognition of Israel.

A number of interlocking organizations operated in the U.S. to raise money for Zionist paramilitary groups in Palestine, though this goal was kept secret. These organizations were under the direction of the leader of the Irgun Delegation, Hillel Kook, who operated under the name of Peter Bergson. During World War II, these organizations purported to be trying to alert people to the genocide of European Jews and trying to rescue those still alive. By promoting this purpose these organizations were able to attract substantial public support, including from those who would be repulsed by their funding of terrorist activities, which, Weir implies, was their real intent. The latter, she maintains, was made manifest by the organizations’ failure to actually rescue Jews from Europe.

The Irgun group engaged in numerous public activities to raise money, one of the most successful being a pageant entitled “We Will Never Die!” which, woven within the backdrop of the Nazi genocide, celebrated the Jewish contribution to Western civilization. Written by Ben Hecht, an Academy Award-winning screenwriter, the pageant included such Broadway and Hollywood celebrities of the era as Edward G. Robinson, Dean Martin, Frank Sinatra, and Leonard Bernstein. Forty thousand attended the extravaganza’s New York performances. It went on to play in a number of other large American cities. The group produced a number of other plays and rallies, one of which featured a young Marlon Brando, and raised $1 million.[19]

Some American Zionists, Weir observes, actually planned terrorist activities outside of Palestine in order to influence developments there. One such terrorist activity conceived by a group of American Zionists headed by an Orthodox Rabbi named Baruch Korff consisted of a plan to drop bombs along with threatening leaflets on the British foreign office in London, or anywhere in London if that were too difficult. The airplane pilot sought for this task, however, went to the Paris Police—he and Korff both being in France at the time—and Korff was arrested. Powerful people rushed to Korff’s defense and the charges were dropped. Korff thus was able return to his former activities in America as if nothing had happened. With this particular event thrown down the Orwellian “memory hole,” Korff resurfaced over two decades later as a public figure close to President Richard Nixon, influencing the latter’s Middle East policies.

The amount of money raised for Zionist groups during in the United States during these years is impossible to calculate accurately, but it would be enormous. Weir writes that between 1939 and May 1948 the Jewish Agency for Israel alone raised the equivalent of $3.5 billion in today’s dollars.

David Ben-Gurion, then de facto leader of the Jewish community in Palestine, realized that the international concern for Jewish refugees could be used to advance the cause of a Jewish state by making it appear that no other safe refuges for Jews existed. Weir illustrates this deception by a discussion of the famous ship Exodus, which carried Holocaust survivors to Palestine when the British were not allowing illegal immigration there.

Weir points out that what is generally unknown to the public is that the French were willing to take in those Exodus refugees but Ben-Gurion rejected that solution, forcing those survivors to remain on board the ship for seven months. Weir quotes historian Baruch Kimmerling on the significance of the Exodus affair: “Ben-Gurion‘s strategy in the Exodus affair paid off. The fate of the refugee ship attracted considerable and sympathetic attention around the world, and served the Zionist cause well. Few observers at the time knew that many of the refugees from the Exodus had applied for immigration visas to the United States, and were hardly anxious to settle in Israel . . . . By dramatizing the fate of the survivors, in whom he had little interest except as future residents of the state he was building . . . Ben-Gurion helped to make Israel the world’s chief power broker over Jewish affairs.”[20]

urisexo.jpgWeir includes a brief reference to Leon Uris’s bestselling 1958 novel on the Exodus ship, and though it falls outside the chronological purview of this volume, I would add that the impact of the already mythologized Exodus event was greatly magnified by Uris’s book, which sold over 7 million copies and was turned into a blockbuster movie in 1960 by Otto Preminger, a leading film director of the era. The film has been identified by many commentators as having greatly enhanced support for Israel in the United States by Jews as well as gentiles and in the view of some scholars this movie has had a lasting effect on how Americans view the Israeli–Palestinian conflict. Weir even acknowledges that it had initially shaped her thinking on the subject.[21]

While the pro-Zionist propaganda that inundated the American media played up the existence of Jewish refugees who allegedly sought to come to Israel, there was little popular attention paid toward the hundreds of thousands of Palestinians who were being driven from their homeland as a result of Zionist massacres and other forcible expulsion measures. A State Department study in March 1949 found the American public was “unaware of the Palestine refugee problem, since it has not been hammered away at by the press or radio.”[22]

To underscore the importance of what Weir presents on this subject, it should be pointed out that until fairly recently, Israel’s denial of ever having expelled the Palestinians dominated the public discourse in the U.S. It was alleged that when Arab armies were about to invade the newly-declared state of Israel, Palestinians left their homes in the new Israel at the behest of their leaders, expecting to return with the victorious Arab armies. Beginning in the 1980s, however, Israel’s so-called “New Historians,” relying on newly released Israeli documents, exploded this myth. They concluded that the major cause of Palestinian flight was Israeli military action, which included terrorist massacres and the fear of them.

Even without the discovery of this Israeli documentary evidence, or any other documentary evidence for that matter, the use of the cui bono test would strongly point to Zionist culpability for the removal of the native Palestinians. For the Zionists planned to create a state that was both democratic and Jewish. This would be impossible if a large number of non-Jewish people, who were largely hostile to Zionism, resided within the country. From this fact, it would seem reasonable to conclude that the emptying of Palestine in 1948 was not a serendipitous development from the perspective of the Zionists, but one that was intentionally brought about by them.

Weir observes that U.S. State Department experts at the time were aware of Israel’s inhumane actions and sought to take action to at least moderate Israel’s effort to achieve a permanent removal of Palestinians. The State Department threatened to withhold $49 million of unallocated funds from an Export-Import Bank loan to Israel if it did not allow at least 200,000 refugees to return to their homes. Although Truman sympathized with the Palestinians’ plight, and in early 1948 even briefly considered backtracking from the partition and supporting a UN trusteeship for the entirety of Palestine, he ultimately prevented the State Department’s move from being implemented.

Weir points out that those in the mainstream media who attempted to alert the American people to the reality of the dispossession of the Palestinian people were effectively prevented from doing so by pro-Zionists. The latter relied on hurling the career-destroying charge of “anti-Semitism” and threatening economic measures to harm any media outlet that would dare to disseminate information they deemed to be too negative toward Israel.

The individual whom the Zionists caused to fall the farthest was Dorothy Thompson. Weir deserves much credit here for pulling this once well-known figure out of the Orwellian memory hole. Thompson happens to have been one of the principal figures in my doctoral dissertation titled, ”The Intellectual Wellsprings of American World War II Interventionism, 1939-1941.”[23] And I have added a few additional points to what Weir has in her book to illustrate the high reputation Thompson had at one time.

Thompson was an early and persistent critic of Nazism. She had an interview with Hitler in 1931 before he had become German Chancellor, which was made into a book. Thompson portrayed Hitler and Nazism in a negative light and in 1934, the now Nazi government of Germany expelled her when she attempted to visit the country. From 1934 onward, the bulk of her writing dealt with the danger posed by Nazism to the Western democracies. After the start of World War II in Europe in September 1939, Thompson was a staunch interventionist who initially advocated greater American aid to the allies but by the latter part of 1941 she was advocating American entrance into the war.

doroth.jpgIn 1939, Time Magazine named Thompson the second most popular and influential woman in America behind Eleanor Roosevelt.[24] She spoke out about anti-Semitism and the plight of the Jews in Europe, and urged a relaxation of immigration restrictions so the U.S. could be a safe haven for Jews under threat in Europe. She also was a strong supporter of Zionism.

In early 1945 she took a trip to Palestine where she saw firsthand Jews oppressing Palestinians. She came to realize that the Zionists sought to create a Jewish exclusivist state, not one that would include all of its current inhabitants. Her criticism of Zionism led to charges against her of “anti-Semitism” and even pro-Nazism, as absurd as that was given her background.[25] As a result of this all-out Zionist attack, newspapers began to drop her columns. Especially harmful was her loss of an outlet in New York City—where she had received a large proportion of her income—when the New York Post dropped her column with no other major New York City daily being willing to pick it up. Her radio program and speaking engagements also disappeared. Despite these problems, Thompson would not back away from her criticism of Zionism. And she continued to do so in the dwindling number of newspapers that still took her column, which did not end until 1958.

It is significant that the black-out of Dorothy Thompson has continued after her death, and perhaps even become worse. In the effort to make the subject of American history more inclusive, recent historians have often added women who were little known in their own eras, whereas Thompson who had been an important figure remains unmentioned. It seems likely that she has remained largely unmentioned both for what she had to say about Zionism and also by the fact that she was blacklisted by pro-Zionists, the power of whom one is not allowed to publicly acknowledge. (This contrasts with those Americans who were blacklisted for being pro-Communist, who are now often praised as martyrs because of this treatment.)

To conclude the review, it should be emphasized that this concise book should be of value to a wide audience. The general reader with little background knowledge should easily pick up a number of key points that serve to dispel the many myths that loom large today in the mainstream media, while even those individuals familiar with the subject are almost guaranteed to profit from little known facts, especially in the notes section, that should augment their knowledge. And it is essential that many more Americans become aware of this knowledge if America’s position is to change regarding Israel and the Middle East in general. Such a change is essential not only to bring about some degree of justice for the Palestinians but in order to extricate the United States from the debilitating regional conflicts that its close connection with Israel has entailed. It will be interesting to see how Weir, in her forthcoming volume, deals with the problems America has faced in more recent years that ineluctably derived from the events described in this work.

References

[1] Alison Weir, Against Our Better Judgment: The Hidden History of How the U.S. Was Used to Create Israel, (CreateSpace Independent Publishing Platform, 2014), Kindle Edition, Kindle Location 364. Weir contends that there were a number of factors that caused the United States to enter World War I in April 1917, some of which she lists, and that “Zionism appears to have been one of those factors.”

[2] Some historians have diluted this Jewish factor, attributing motivation to British foreign policy goals in the Near East. A Jewish homeland allegedly could serve as a buffer zone that would protect the Suez Canal.

[3] Chaim Weizmann was a leading figure in the Zionist movement who served as President of the Zionist Organization and later as the first President of Israel.

[4] Tom Segev, “‘View With Favor’, Review of The Balfour Declaration: The Origins of the Arab-Israeli Conflict by Jonathan Schneer, International New York Times, August 20, 2010, accessed December 13, 2015, http://www.nytimes.com/2010/08/22/books/review/Segev-t.ht...

In other parts of his review, Segev’s analysis is impressive. For example he writes: “The Balfour declaration thus finds its place among a multitude of fruitless schemes and indulgent fantasies, except, of course, that in this case, surprisingly, the British by and large kept their word. For at least two decades they allowed the Zionist movement to bring hundreds of thousands of Jewish immigrants into Palestine, and these new arrivals set up hundreds of settlements including several towns, as well as the political, economic, military and cultural infrastructure of the future state of Israel. But if Israel’s existence originated with the British, so did the Palestinians’ tragedy.”

[5] The controversial House-Grey memorandum, developed with Britain in February 1916, stated that at an appropriate time Wilson would call for a peace conference. If the Allies accepted the offer and Germany rejected it or acted intransigently at the conference, the United States would go to war against Germany. And if Germany accepted the offer and a peace conference did take place, the settlement would not be unfavorable to the Allies. Wayne S. Cole, An Interpretive History of American Foreign Relations (Homewood, Ill.: Dorsey Press, 1968), 363

[6] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Location 449.

[7] The Wikipedia entry for “Ottoman Empire,” states that the “’Ottoman Empire’ and ‘Turkey’ were often used interchangeably, with ‘Turkey’ being increasingly favored both in formal and informal situations. This dichotomy was officially ended in 1920–23, when the newly established Ankara-based Turkish government chose Turkey as the sole official name,” accessed December 13, 2015, https://en.wikipedia.org/wiki/Ottoman_Empire .

[8] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Locations 2668-2669 .

[9] The King-Crane Commission was originally created as the American Section of the Inter-Allied Commission on Mandates in Turkey, which was also to include British and French members, and be like a number of other fact finding missions stemming from the Paris Peace Conference of 1919. These two countries failed to participate. Ken Grossi, Maren Milligan, and Ted Waddelow, Restoring Lost Voices of Self-Determination: Background to the Commission, August 2011, Part of the King-Crane Commission Digital Collection, Oberlin College Archives, accessed December 13, 2015, http://www.oberlin.edu/library/digital/king-crane/intro.h... .

[10] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Locations 502-503.

[11] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Location 505.

[12] The King-Crane Commission Report, August 28, 1919, http://www.hri.org/docs/king-crane/. The report includes discussions of territory intended to have been taken from Turkey in the Treaty of Sevres, which Turkey never accepted and was not implemented.

[13] Ibid.

[14] Quoted in Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Location 798.

[15] Wallace had no chance of winning the election but Truman’s backers feared that he could syphon off enough liberal votes in large Northern and Midwestern states to enable Dewey to win the election. The issue of Israel did not play a role in Strom Thurmond’s 1948 campaign in the South, which focused on states’ rights and racial issues.

[16] Quoted in Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Location 894.

King-Crane Commission Report, August 28, 1919.

[17] Jeremy R. Hammond, “The Myth of the U.N. Creation of Israel,” Foreign Policy Journal, October 26, 2010, accessed December 13, 2015, http://www.foreignpolicyjournal.com/2010/10/26/the-myth-o...

[18] More than this, the UN General Assembly, after the vote, created another committee that came to quite different conclusions. Jeremy Hammond writes: “The Ad Hoc Committee on the Palestinian Question was established by the General Assembly shortly after the issuance of the UNSCOP report in order to continue to study the problem and make recommendations. A sub-committee was established in turn that was tasked with examining the legal issues pertaining to the situation in Palestine, and it released the report of its findings on November 11. It observed that the UNSCOP report had accepted a basic premise ‘that the claims to Palestine of the Arabs and Jews both possess validity’, which was ‘not supported by any cogent reasons and is demonstrably against the weight of all available evidence.’ With an end to the Mandate and with British withdrawal, ‘there is no further obstacle to the conversion of Palestine into an independent state’, which ‘would be the logical culmination of the objectives of the Mandate’ and the Covenant of the League of Nations. It found that ‘the General Assembly is not competent to recommend, still less to enforce, any solution other than the recognition of the independence of Palestine, and that the settlement of the future government of Palestine is a matter solely for the people of Palestine.’’’ Hammond, “The Myth of the U.N. Creation of Israel.”

[19] Marlon Brando was very close to Jews before he became a movie star and later donated a considerable amount of money to Zionist causes. He expressed more negative views of Jews toward the end of his life. See: Allan M. Jalon, “How Marlon Brando Became Godfather to the Jews,” Forward, September 16, 2015, accessed December 13, 2015, http://forward.com/culture/320671/how-marlon-brando-becam...; Danielle Berrin, “Marlon Brando and the Jews,” Jewish Journal, July 30, 2014, accessed December 13, 2015, http://www.jewishjournal.com/hollywoodjew/item/marlon_bra....

[20] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Locations 1249-1256.

[21] The movie had an all-star cast (and a very popular, award winning theme song), which included: Paul Newman, Eva Marie Saint, Peter Lawford, Sal Mineo, and Lee J. Cobb.

[22] Weir, Against Our Better Judgment, Kindle Locations 1370-1371.

[23] Stephen John Sniegoski, “The Intellectual Wellsprings of American World War II Interventionism, 1939-1941,” (PhD diss., University of Maryland-College Park, 1977).

My research on Thompson included a visit to the archival collection of her papers at the George Arents Research Library at Syracuse University in Syracuse, New York, in 1976, where I perused some material dealing with her break with American Jews, which was outside the scope of my dissertation.

[24] Thompson’s correspondence in her manuscript collection at Syracuse University illustrates her importance. The Overview of the Collection states: “Correspondents include authors (John Gunther, Wallace Irwin, Alfred M. Lilienthal, Edgar A. Mowrer, Vincent Sheehan, Johannes Urzidil), literary figures (Jean Cocteau, Rose Wilder Lane, Thomas Mann, Rebecca West), politicians and statesmen (Bernard M. Baruch, Winston Churchill, Ely Culbertson, Ralph E. Flanders, Felix Frankfurter, Charles de Gaulle, Cordell Hull, Clare Boothe Luce, Jan Masaryk, Gamal Abdel Nasser, Franklin D. and Eleanor Roosevelt, Harry S. Truman).” Overview of the Collection, Dorothy Thompson Papers, Syracuse University Libraries, accessed December 13, 2015, http://library.syr.edu/digital/guides/t/thompson_d.htm.

[25] Thompson’s relationship with American Jews actually began to sour toward the end of the war before the emergence of the issue of Zionist mistreatment of Palestinians. She differed with the Jewish establishment regarding her opposition to the Anglo-American incendiary bombing of German cities, which involved the killing of tens of thousands of civilians, and also the demand for a Carthaginian peace with Germany that was reflected in the Morgenthau Plan. She viewed these actions as violating the alleged idealistic purpose of the war, whereas many Jews sought punishment of the German people because of what the Nazis had done to their co-religionists.

lundi, 05 octobre 2015

Shlomo Sand : «Israël se diabolise lui-même chaque jour»

Shlomo Sand : «Israël se diabolise lui-même chaque jour»

ShlomoSand.jpgL’historien israélien Shlomo Sand a répondu à une tribune de Pierre-André Taguieff publiée dans Le Monde, à propos de l’antisémitisme en France.  « De mon point de vue, la principale caractéristique de la judéophobie parmi les groupes marginaux de banlieues est l’identification dangereusement erronée entre : sionisme, Israël et juifs. Or, c’est précisément ce que font, sans relâche et sans distinction, les dirigeants d’Israël, le CRIF…. et toi.»

Je viens de lire ton article publié dans Le Monde, en date du 23 septembre: « L’intelligentsia française sous-estime l’antisémitisme », et, une fois de plus, je suis stupéfait !

Lorsque nous nous sommes connus, dans les années 80 au siècle dernier, j’avais la plus grande estime pour tes travaux investiguant les fondements du racisme théorique, dans la France de la deuxième partie du 19ème siècle.

J’avais beaucoup apprécié tes apports dans l’analyse et la déconstruction de la judéophobie qui a, effectivement, joué un rôle de tout premier ordre, dans la constitution d’une partie des identités de l’Hexagone, et ce jusque vers le milieu du 20ème siècle. Toutefois, depuis quelques années, à la lecture de tes publications, j’ai de plus en plus de mal à comprendre la logique qui t’anime : affirmer que la judéophobie demeure hégémonique en Occident, considérer l’islamophobie comme un phénomène plutôt marginal, dont les intellectuels exagèrent l’importance, et se faire, en en même temps, le défenseur inconditionnel du sionisme et d’Israël me laisse très perplexe !

En vérité, tu as notablement baissé dans mon estime lorsque tu as soutenu, avec enthousiasme, la guerre de George Bush contre l’Irak, et lorsque tu as exprimé une sympathie manifeste pour  « La rage et l’orgueil  », le livre islamophobe d’Oriana Fallaci (dans lequel, il est écrit, notamment, que les musulmans « se multiplient comme des rats »).

Tes prises de positions passées me paraissent, cependant, moins préoccupantes que celles que tu développes, ces temps-ci, alors que se profile, dans la société française, un dangereux terrain miné, lourd de menaces pour « l’autre ».

Tu sais bien que la haine envers celui qui est un peu différent, et que l’imaginaire apeuré face à celui qui affiche une singularité, ne se limitent pas aux émotions stupides de gens incultes, situés au bas de l’échelle sociale. Tu sais bien que cela n’épargne pas les classes sociales bien éduquées. Durant la période tragique pour les juifs et leurs descendants (1850-1950), le langage judéophobe ne se donnait pas uniquement libre cours dans les faubourgs populaires, mais il s’exprimait aussi dans la haute littérature, dans la philosophie raffinée, et dans la grande presse.

shlomo9782081307872.jpgLa haine et la peur des juifs faisaient partie intégrale des codes culturels, dans toutes les couches de la société européenne. Cet état de fait s’est, fort heureusement, modifié dans les années qui ont suivi la fin de la seconde guerre mondiale. Et si, bien sûr, il subsiste encore des préjugés à l’encontre des descendants imaginaires des meurtriers de Jésus Christ, il n’en demeure pas moins que, dans le monde occidental : de Los Angeles à Berlin, de Naples à Stockholm, de Buenos-Aires à Toronto, quelqu’un d’ouvertement judéophobe ne peut plus être journaliste ou présentateur à la télévision, ni occuper une place dirigeante dans la grande presse, ou encore détenir une chaire de professeur à l’université.

En bref, la judéophobie a perdu toute légitimité dans l’espace public. L’antisémitisme de Barrès, de Huysmans ou de Céline n’est plus admis dans les cénacles littéraires, ni dans les maisons d’éditions respectables du Paris d’aujourd’hui. Le prix à payer pour la disparition de cette « belle haine », ( pour user d’un qualificatif de l’antisémitisme en vogue , il y a un siècle), fut, comme l’on sait, très élevé. De nos jours, la « belle haine » est effectivement tournée vers d’autres gens, et nous ne savons pas encore quel en sera le prix.

Cela ne veut pas dire qu’une hostilité à l’encontre des juifs n’existe pas aux confins de la société, parmi des marginaux issus de l’immigration venant du monde musulman. Dans des cités-ghettos, certains jeunes, qui n’ont pas ingurgité la judéophobie chrétienne multiséculaire, sont, malheureusement, à l’écoute de quelques imams délirants ou de gens comme Alain Soral ou Dieudonné. Comment combattre cet inquiétant phénomène marginal ? Faut-il, comme tu ne cesses de le faire, justifier la politique menée par Israël ? Faut-il, comme tu t’y emploies également, nier que l’islamophobie a, effectivement, remplacé la judéophobie, et jouit d’une légitimité croissante dans tous les secteurs culturels français ?

T’es-tu demandé quels livres ont été des « best sellers », ces derniers temps : des pamphlets ou des romans contre les juifs, comme à la fin du 19ème siècle, ou bien des écrits qui ciblent les immigrés musulmans, (et cela ne se limite pas à Houellebecq, Finkielkraut et Zemmour ) ? Quels partis politiques ont le vent en poupe : ceux qui s’en prennent aux anciens « sémites » d’hier, ou ceux qui affichent leur rejet des nouveaux « sémites » d’aujourd’hui, et au passage, ne tarissent pas d’éloges sur la façon dont Israël traite les arabes (Marine Le Pen n’est pas la seule concernée !).

Et cela m’amène au dernier point, qui m’a le plus indisposé, dans ton article. De mon point de vue, la principale caractéristique de la judéophobie parmi les groupes marginaux de banlieues est l’identification dangereusement erronée entre sionisme, Israël et juifs.

Or, c’est précisément ce que font, sans relâche et sans distinction, les dirigeants d’Israël, le CRIF… et toi.

Les voyous de quartier ne sont pas devenus judéophobes uniquement sous l’effet de prêches venimeux prononcés par des démagogues. Il y a à cela bien d’autres causes : et notamment, l’identification constante des institutions juives officielles avec la politique israélienne. Pas une seule fois, le CRIF n’a émis la moindre protestation face à l’oppression subie par la population palestinienne. Et qu’on ne vienne pas nous parler de « diabolisation d’Israël »; Israël se diabolise lui-même chaque jour !

Comment un État considéré comme une démocratie occidentale peut-il, depuis bientôt cinquante ans, dominer un autre peuple, et lui dénier tout droit politique, civique, syndical , et autres ? Comment dans une ville–capitale démocratique, où des intellectuels français ont fondé un institut Emmanuel Levinas, de philosophie et d’éthique juives, un tiers de la population, qui y a été annexée de force en 1967, se trouve-t-elle encore privée de tout droit politique, et exclue de toute participation à la souveraineté ?

Et par delà tout ceci : que signifie être sioniste, aujourd’hui ? Simple est la réponse : soutenir Israël comme État des juifs. Comment un État à prétention démocratique, peut-il se définir, non pas comme la République légitime de tous ses citoyens israéliens, mais comme un État juif, alors même qu’un quart de ses citoyens ne sont pas juifs ? Es-tu capable de comprendre que l’Etat « juif », qui t’est si cher, appartient plus, en principe à ceux qui en France se disent juifs, qu’aux étudiants palestino-israéliens à qui j’enseigne l’Histoire à l’université de Tel-Aviv ?

Est-ce la raison pour laquelle tu te considères comme sioniste et fervent sympathisant d’Israël ? Si l’on suivait ton raisonnement sur cette question, la France ne devrait-elle pas cesser de se définir comme la République de tous ses citoyens, pour devenir « l’État gallo-catholique » ? Non ! Bien évidemment non, après Vichy et le génocide nazi.

Peut-être serait-il plus facile de définir un État français ressemblant à Israël, en recourant à un terme qui fait aujourd’hui florès parmi l’intelligentsia parisienne : « République judéo-chrétienne » ?

Shlomo Sand

Cette réplique à Pierre-André Taguieff a été publiée sur le blog « Les invités de Médiapart », sous le titre : « Lettre ouvert à un ex-ami ». Traduit de l’hébreu par Michel Bilis.

Shlomo Sand est historien, spécialiste de l’histoire contemporaine. Il est professeur à l’université de Tel Aviv depuis 1985.
Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont plusieurs ont été publiés en français, tels que: Comment le peuple juif fut inventé (Fayard – 2008) – « Comment j’ai cessé d’être juif » (Flammarion – 2013), Les mots et la terre – Les intellectuels en Israël (Flammarion – 2010), Comment la Terre sainte fut inventée – De la Terre sainte à la mère patrie (Flammarion – 2014)

Source: http://www.pourlapalestine.be/shlomo-sand-israel-se-diabolise-lui-meme-chaque-jour/

vendredi, 15 mai 2015

Martin Buber

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Martin Buber

By John Ellerby

Transcribed by Luke Dodson

Originally published in Anarchy 54 (Vol 5 No 8) August I965 (Freedom Press)

Ex: http://www.attackthesystem.com

Martin Buber, who died in Jerusalem on June 13 at the age of 87, belonged to a generation of central European Jews for whom it was a privilege to die in old age, in bed. We discuss him in this issue of Anarchy together with two of his contemporaries, the German anarchists Gustav Landauer and Erich Mühsam, who both died by violence, one murdered in the reaction to the revolutionary period after the First World War, the other, one of the first victims of Nazism. In a sense, looking back in the light of history, one could say that they were privileged too, in that their deaths were noticed.For, as Martin Buber wrote to Gandhi (who had suggested that the Jews in Germany should use satyagraha as a reply to Nazi atrocities), “Now do you know or do you not know, Mahatma, what a concentration camp is like and what goes on there? . . . An effective stand may be taken in the form of non-violence against unfeeling human beings in the hope of gradually bringing them thereby to their senses; but a diabolical steamroller cannot thus be withstood . . . Testimony without acknowledgement, ineffective, unobserved martyrdom, a martyrdom cast to the Winds – that is the fate of innumerable Jews in Germany. God alone accepts their testimony, and God ‘seals’ it, as is said in our prayers. But no maxim for suitable behaviour can be deduced therefrom . . . ”

Landauer, Mühsam and Buber were all Jews in the racial sense, if indeed there is such a thing, but Buber was also a Jew in the religious sense: in fact he was world-famous as a religious thinker who transcends the limits of any particular faith. (Though he remarked in a television interview, “I must confess I don’t like religion very much”) One might almost say that there is a “cult” of Martin Buber in the same way as there has been a cult of Simone Well. We do not subscribe to this cult: we are simply interested in Buber’s social ideas, but at least it has meant that his works are available in translation – while none of those of Landauer, the close friend who deeply influenced his ideas, have been published in English.

Buber was hardly an anarchist, but the essay Society and the State, reprinted in this issue of Anarchy, seems to me to have the greatest value for anarchists and especially for anarchist propagandists, because of the clarity of the light it throws on what we might call the sociological bases of anarchist thought: the idea of the social principle and the political principle and the inverse relationship between them in any society, and of the notion of the “political surplus” and the “latent external crisis” are surely more useful to anarchists than to anyone else in explaining the nature of the world we live in.

Again, Buber was not a revolutionary. “Just as I do not believe,” he wrote, “in Marx’s ‘gestation’ of the new form, so I do not believe either in Bakunin’s virgin-birth from the womb of Revolution. But I do believe in the meeting of idea and fate in the creative hour.” He was not a revolutionary, but his approach to the moral problems of revolution was identical with that of Malatesta (see V. Richards: Malatesta: His Life and Ideas). Buber, contrasting the revolutionary with the soldier, wrote that “the revolutionary stands, according to the situation, in the tension between goal and way, and within its responsibility, neither of which the soldier knows. His personal statement is not, ‘I must here use force, but I do not want to do so’; but, ‘I have taken it on myself to use as much force as is necessary in order that the revolution be accomplished, but alas for me and for it if more force is used than is necessary!’ The personal responsibility of the soldier stems from principle; he can carry the contradiction out to its logical conclusion in his soul, reaching perhaps a decision to allow himself to be killed rather than to kill; even if he does not follow this conclusion in practice, he at least achieves the fundamental formulation of it. But the personal responsibility of the revolutionary is, according to its nature, one of demarcation. The watchword of his spirit is “Up to here’, and for that ‘Up to here’ there is no fast rule, each moment presenting it with ever new face. The revolutionary lives on the knife’s edge. The question that harasses him is, in fact, not merely the moral or religious one of whether he may kill; his quandary has nothing at all to do, as has at times been said, with ‘selling his soul to the devil’ in order to bring the revolution to victory. His entanglement in the situation is here just the tension between ends and means. . . . ”

bub1.jpgIn his book Paths in Utopia (Routledge 1949), Buber relates the collective settlements in Palestine (he was writing before the establishment of the State of Israel) to the tradition of Proudhon, Kropotkin and Landauer. The book is a defence and restatement of that stream of socialist thought which was castigated by Marx and Engels as “utopian”:

“Kropotkin summed up the basic view of the ends in a single sentence: the fullest development of individuality ‘will combine with the highest development of voluntary association in all its aspects, in all possible degrees and for all possible purposes; an association that it is always changing, that bears in itself the elements of its own duration, that takes on the forms which best correspond at any given moment to the manifold strivings of all’. This is precisely what Proudhon had wanted in the maturity of his thought. It may be contended that the Marxist objective is not essentially different in constitution; but at this point a yawning chasm opens out before us which can only be bridged by that special form of Marxist utopics, a chasm between, on the one side, the transformation to be consummated some time in the future – no one knows how long after the final victory of the Revolution – and, on the other, the road to the Revolution and beyond it, which road is characterised by a far-reaching centralisation that permits no individual features and no individual initiative. Uniformity as a means is to change miraculously into multiplicity as an end; compulsion into freedom. As against this the ‘utopian’ or non-Marxist socialist desires a means commensurate with his ends; he refuses to believe that in our reliance on the future ‘leap’ we have to have now the direct opposite of what we are striving for; he believes rather that we must create here and now the space now possible for the thing for which we are striving, so that it may come to fulfilment then; he does not believe in the post-revolutionary leap, but he does believe in revolutionary continuity.”

When we examine capitalist society, says Buber, “we see that it is a society inherently poor in structure, and growing poorer every day”. (By the structure of a society is to be understood its social content or community content: a society can be called structurally rich to the extent that it is built up of genuine societies: that is local communes and trade communes and their step by step association.) He compares Proudhon with Saint-Simon: “Saint-Simon started from the reform of the State. Proudhon from the transformation of society. A genuine reconstruction of society can only begin with a radical alteration of the relationship between the social and the political order. It can no longer be a matter of substituting one political regime for another, but of the emergence, in place of a political regime grafted upon society, of a regime expressive of society itself.”

Buber sees Kropotkin as amplifying Proudhon’s thought in stating the simple antithesis between the principles of the struggle for existence and mutual help. He regards Kropotkin’s earlier theory of the State as historically under-substantiated and regards as more correct the later view in Modem Science and Anarchism (French edition of 1913):

“All through the history of our civilisation, two contrary traditions, two trends have faced one another; the Roman tradition and the national tradition; the imperial and the federal; the authoritarian and the libertarian.” In his critique of Kropotkin, Buber declares that “As in his inadequate distinction between the excessive and the legitimate State, or the superfluous and the necessary State, so in another important respect Kropotkin’s view, although perceiving many historical relationships unnoticed by Proudhon is not realistic enough. . . . The danger of collective egoism, as also that of schism and oppression, is hardly less in an autonomous community than in the nation or party, particularly when the community participates as a co-partner in production.” He thinks that Landauer’s step beyond Kropotkin consists in his insight into the State. “The State is not, as Kropotkin thinks, an institution which can be destroyed by a revolution. ‘The state is a condition, a certain relationship between human beings, a mode of human behaviour; we destroy it by contracting other relationships, by behaving differently’.” Therefore, says Buber, we shall always be helping to destroy it to the extent to which we do in fact enter into other relationships.

He then examines the ideas of Marx, Engels, Lenin and Stalin, and shows how in their changing and contradictory attitudes to the old Russian communal institutions, the Mir and the Irtel, and in their attitudes to co-operatives and workers’ councils, they regarded them simply as a tool in the political struggle. “From the standpoint of Leninism,” said Stalin, “the collective economies and the Soviets as well, are, taken as a form of organisation, a weapon and nothing but a weapon.” One cannot in the nature of things, comments Buber, “expect a little tree that has been turned into a club to put forth leaves”. And he goes on to consider the history of the co-operative movement: “But for the most part the running of large co-operative institutions has become more and more like the running of capitalist ones, and the bureaucratic principle has completely ousted, over a wide field, the voluntary principle, once prized as the most precious and indispensable possession of the Co-operative movement. This is especially clear in countries where Consumer Societies have in increasing measure worked together with the State and the municipalities, and Charles Gide was certainly not far wrong when he called to mind the fable of the wolf disguised as a shepherd and voiced the fear that, instead of making the State ‘Co-operative’ we should only succeed in making the Co-operative ‘static’.”

Of the repeated attempts in the last 150 years in Europe and America to found co-operative settlements, he says he would apply the word failure not merely to those attempts, which after a more or less short-lived existence, either disintegrated completely or took on a capitalist complexion, thus going over to the enemy camp; he would also apply it to those that maintained themselves in isolation. “For the real, the truly structural task of the new Village Communes begins with their federation, that is, their union under the same principle that operates in their internal structure. Even where, as with the Dukhobors in Canada, a sort of federation itself continues to be isolated and exerts no attractive and educative influence on society as a whole, with the result that the task never gets beyond its beginnings and, consequently there can be no talk of success in the socialist sense. It is remarkable that Kropotkin saw in these two elements – iso1ation of the settlements from one another and isolation from the rest of society – the effective causes of failure even as ordinarily understood”.

If the “Full Co-operative” in which production and consumption are united and industry is complemented by agriculture, is to become the cell of the new society, it is necessary, says Buber, that “there should emerge a network of settlements, territorially based and federatively constructed, without dogmatic rigidity, allowing the most diverse social forms to exist side by side, but always aiming at the new organic whole”. There is one effort, he concludes, “which justifies our speaking of success in the socialistic sense, and that is in the Jewish Village Commune in its various forms, as found in Palestine”. He calls it a signal non-failure, he cannot say a signal success, because he is too aware of the setbacks and disappointments, of the intrusion of politics, of the “lamentable fact that the all important attitude of neighbourly relationship has not been adequately developed,” of how much remained to be done. But of the importance of this non-failure he writes:

“There can hardly be any doubt that we must regard the last war as the end of the prelude to a world crisis. That crisis will probably break out – after a sombre interlude that cannot last very long – first among some of the nations of the West, who will be able to restore their shattered economy in appearance only. They will see themselves faced with the immediate need for radical socialisation, above all the expropriation of the land. It will then be of absolutely decisive importance who is the real subject of an economy so transformed, and who is the owner of the social means of production. Is it to be the central authority in a highly centralized State, or the social units of urban and rural workers, living and producing on a communal basis, and their representative bodies? In the latter case the remodelled organs of the State will discharge the functions of adjustment and administration only. On these issues will largely depend the growth of a new society and a new civilisation.”

There are two poles of socialism, Buber concluded, between which our choice lies, one we must designate – so long as Russia has not undergone an essential inner change – by the formidable name of Moscow. “The other I would make bold to call Jerusalem.”

bub2.JPGAnother crucial reason why he thought that the kibbutzim were the germs of a new form of social life was the variety to be found among them: “New forms and new intermediate forms were constantly branching off in complete freedom. Each one grew out of the particular social and spiritual needs as these came to light – in complete freedom, and each one acquired, even in the initial stages, its own ideology – in complete freedom, each struggling to propagate itself and spread and establish its proper sphere – all in complete freedom. The champions of the various forms each had his say, the pros and cons of each individual form, were frankly and fiercely debated – always, however, on the plane which everybody accepted as obvious; the common cause and common task, where each form recognised the relative justice of all the other forms in their special functions. All this is unique in the history of co-operative settlements.”

At this point something must be said of Buber’s attitude to Zionism. According to the Jewish Chronicle’s obituary, it was when he was a student in Vienna that he became the spokesman of a group known as the Democratic-Zionist Fraction “which opposed the purely political trend of Herzlian nationalism and stressed the culture side of the Jewish renascence. . . But the rejection of the brand of spiritual and cultural Zionism favoured then by Buber disappointed him so much that he withdrew for some time in the Zionist political field. . . Finding himself in agreement with many of the views on nationalism held by A. D. Gordon and his Hapoel Hatzair group, he gave his support to them and to the Chalutz movement . . . (but) it was not long before he saw, once more, that he could not agree with his fellow Zionists and their militant nationalism.” (Hapoel Hatzair means “the young worker” and Aaron David Gordon, about whom Buber wrote movingly in his book Israel and Palestine was a kind of Tolstoyan anarchist.) Buber himself, who left Germany at the last possible moment in 1938, to become Professor of Social Philosophy at the University of Jerusalem, continued to hold unpopular views, he did not want a Jewish state, but like Judah Magnes and Ernst Simon, sought co-operation with the Arabs. The Guardian notes that “In Palestine his idea of binationalism caused him to be ostracised by the orthodox as ‘an enemy of the people’.” It is 44 years since Buber warned his fellow Zionists that if the Jews in Palestine do not live with the Arabs as well as next to them, they will find themselves living in enmity to them, and he never ceased to give his support to Brit Shalom and its successor Ihud, the organisations seeking co-operation with the Arabs.

In 1951 Buber was criticised for accepting the Goethe Prize of the University of Hamburg. Was he not, it was asked, in too much haste to forgive? His reply was to accept another German prize and in doing so, to say these words:

“About a decade ago a considerable number of Germans – there must have been many thousands of them – under the indirect command of the German government and the direct command of its representatives, killed millions of my people in a systematically prepared and executed procedure, whose organised cruelty cannot be compared with any previous historical event. I, who am one of those who remained alive, have only in a formal sense a common humanity with those who took part in this action. They have so radically removed themselves from the human sphere, so transposed themselves into a sphere of monstrous inhumanity inaccessible to my conception, that not even hatred, much less an overcoming of hatred, was able to arise in me. And what am I that I could here presume to ‘forgive’! . . .

“When I think of the German people of the days of Auschwitz and Treblinka, I behold, first of all, the great many who knew that the monstrous event was taking place and did not oppose it. But my heart, which is acquainted with the weakness of men, refuses to condemn my neighbour for not prevailing upon himself to become a martyr. Next there emerges before me the mass of those who remained ignorant of what was withheld from the German public, and who did not try to discover what reality lay behind the rumours which were circulating. When I have these men in mind, I am gripped by the thought of the anxiety, likewise well known to me, of the human creature before a truth which he fears he cannot face. But finally there appears before me, from reliable reports, some who have become as familiar to me by sight, action, and voice as if they were friends, those who refused to carry out the orders and suffered death or put themselves to death, and those who learned what was taking place and opposed it and were put to death, or those who learned what was taking place and because they could do nothing to stop it killed themselves. I see these men very near before me in that especial intimacy which binds us at times to the dead and to them alone. Reverence and love for these Germans now fills my heart.”

Buber was often described as a mystic, and parried this by declaring that he was in fact a rationalist, that being “the only one of my world views that I have allowed to expand into an ism”. For, he wrote, “my innermost heart loves the World more than it loves the spirit”. Nine years ago I heard him lecture in London on “That Which is Common”, relating his philosophy of dialogue, of “I and Thou” with his views on community and society. He took as his text an account of Aldous Huxley’s experiments with the drug mescalin, which became, in Buber’s slow and emphatic English, a parable of the disjointed society of Western individualism. Huxley, in his escape from the “painful earthly world” under the influence of the drug, found that his lips, the palms of his hands, and his genitals (the organs of communication with others, interpolated Buber) became cold, and he avoided the eyes of those who were present. For, said Buber, to regard the eyes of the others, would be to recognise that which is common. And after this flight from selfhood and environment, Huxley “met them with a deep mistrust”. Huxley regarded his mescalin intoxication as a mystical experience, but, declared Buber, those whom we call mystics, like those we call creative artists, do not seek to escape from the human situation. “They do not want to leave the authentic world of speech in which a response is demanded. They cling to the common world until they are torn from it.”

dimanche, 29 juin 2014

Le triangle fatidique: la Russie, l'Ukraine et les juifs

Le triangle fatidique: la Russie,

l'Ukraine et les juifs

par Israël Adam Shamir

Ex: http://www.plumenclume.net


Les bas-reliefs érotiques des temples hindous, avec leurs positions qui défient la gravité et les lois de l'anatomie ont désormais de la concurrence, avec la crise ukrainienne. Chaque partie veut avoir les juifs de son côté, tout en prétendant que l'autre bord est anti-juif et néanmoins téléguidé par les juifs tout à la fois. Cette position intenable et kamasoutresque est le résultat d'une série d'alliances extrêmement confondantes. Le régime actuel de Kiev comporte des juifs tout dévoués et des antisémites sauvages aux places capitales. Les figures de proue du régime (y compris le président élu) sont d'origine juive; l'homme fort et le financier en chef Igor Kolomoysky est une éminence publique parmi les juifs, édificateur de nombreuses synagogues et fervent d'Israël. Mais la force la plus décidée et agissante du régime, les ultra-nationalistes du parti Svoboda et le Secteur Droit, admirent Hitler et son quisling ukrainien, Stepan Bandera, ces "libérateurs de l'Ukraine qui ont su rejeter le joug judéo-moscovite", comme ils disent. Les juifs sont ambivalents, et les deux bords aussi sont ambivalents chez eux, si bien qu'on est au cœur d'une intrigue très divertissante.

Les Russes ont essayé d'attirer Israël et les juifs américains dans leur camp, mais n'ont pas eu beaucoup de succès. Le président Poutine a condamné l'antisémitisme du parti Svoboda; il a mentionné la profanation du cimetière d'Odessa dans son discours décisif. Les Russes ont revitalisé le récit de la Deuxième Guerre Mondiale, en identifiant pleinement le régime de Kiev avec les gangs de Bandera et l'ennemi nazi. Et pourtant, cette rhétorique n'est pas prise au sérieux par les juifs, qui refusent de se sentir menacés par le féroce Kolomoyski. "Ces nazis-là ne sont pas contre les juifs, ils sont contre les Russes, donc ce n'est pas un problème juif", disent-ils.

Le régime de Kiev a repris en miroir l'attitude russe, et même la tactique russe. N'ayant guère de faits à brandir, ils ont fabriqué un faux tract attribué aux rebelles de Donetsk, s'adressant aux juifs locaux pour qu'ils aillent s'enregistrer et payer une taxe spéciale pour les élections, "parce que les juifs soutiennent le régime de Kiev". Cette imposture grossière et improbable a été immédiatement désavouée, de façon convaincante, mais Barak Obama a quand même eu le temps den tirer profit, ainsi que John Kerry. Le quotidien américano-juif Forward a embrouillé tout cela en disant que Russes comme Ukrainiens sont antisémites de naissance, et que leurs dénégations sont à prendre avec des pincettes. Mais le torrent de boue a fait son effet, l'imposture avait fait les unes nécessaires, et le démenti n'a figuré qu'en dernière page des journaux.
Les Russes avaient les faits pour eux, et l'Occident le savait: les US ont refusé un visa à Oleg Tyagnibok et à d'autres dirigeants de Svoboda (qui sont maintenant membres du gouvernement de Kiev) pour cause d'antisémitisme jusqu'en 2013. Mais les appels russes à la sensibilité juive et américaine n'ont pas réussi à avoir le moindre impact. Ils savent quand il faut feindre l'indignation et quand il convient de se taire. Les commémorations pro-hitlériennes sont fréquentes en Estonie, en Lettonie, en Croatie, et ne provoquent pas un froncement de sourcil, parce que ces contrées sont solidement anti-russes. En mars de cette année, l'envoyée spéciale de l'administration Obama pour se pencher sur l'antisémitisme, Ira Forman, a tout nié platement, et a dit à Forward que les assertions de Poutine au sujet de l'antisémitisme de Svoboda "n'étaient pas crédibles." Les US veulent décider seuls qui est antisémite et qui ne l'est pas, comme Hermann Goering voulait décider qui était juif et qui ne l'était pas, dans la Luftwaffe. Dans la crise ukrainienne, les juifs restent divisés, et suivent les préférences de leurs pays respectifs.

Israël est neutre

Récemment, le premier ministre Netanyahu a téléphoné au président Poutine. Poutine est toujours joignable et toujours courtois, pour Netanyahu, à l'opposé du président Obama, qui montre des signes d'irritation (il faut bien reconnaître qu'Obama est obligé d'écouter Netanyahu nettement plus souvent, et ce, pendant des heures). Netanyahu s'est excusé de ne pas pouvoir venir à Saint-Pétersbourg pour la semaine de la culture israélienne; Shimon Peres, expérimenté et de toute confiance, le remplacerait, en tant que président israélien. Il s'est confondu en excuses pour avoir laissé fuiter l'annulation de sa visite dans les médias, en plus.

C'est typique, chez le premier ministre israélien: d'abord, il demande à être invité, après quoi la Russie lui envoie son invitation, puis il annule et le fait savoir à la presse, ce qui lui permet de gagner des points côté américain. Il l'avait fait pour les JO de Sotchi, il remet ça à Saint-Pétersbourg. C'est comme ça que s'exprime la neutralité israélienne.

Israël est explicitement neutre dans la crise ukrainienne. Les Israéliens sont sortis et n'ont pas voté lors de l'Assemblée générale de l'Onu, ce qui a consterné leurs sponsors américains. Ils avaient une excuse fumeuse: le Foreign Office était en grève. Les Américains n'ont pas apprécié cette explication. Grève ou pas grève, on vote!

Nous avons appris de nos collègues israéliens les détails de l'échange téléphonique entre Poutine et Netanyahu, sur lequel s'est élaborée la neutralité israélienne. Israël est fort ennuyé du fait qu'en réponse asymétrique aux sanctions US, la Russie puisse livrer ses système de défens aérienne puissants à l'Iran et à la Syrie. L'Iran et la Syrie avaient signé un contrat de fourniture d'armes il y a quelques années, l'Iran avait payé son dû, puis la livraison a été suspendue. L'Iran a fait appel aux tribunaux pour réclamer un dédommagement massif pour rupture de contrat. De même, les Syriens devaient avoir accès au système de missiles sol-air S-300, qui leur permettrait de protéger leur espace aérien des raids israéliens. Les livraisons avaient commencé. Netanyahu a supplié Poutine d'y mettre le hola. Poutine a tout d'abord objecté, en soulignant la nature défensive du système. Alors Netanyahu a expliqué au président russe que le S-300 permettrait aux Syriens de couvrir tout le nord d'Israël, ou du moins la route vers Haïfa, ce qui rendrait inutilisables d'importants terrains d'aviation, et mettrait également l'aviation civile en péril. Poutine a accepté d'arrêter les livraisons.

Vladimir Poutine est amical avec Israël. Il a promis qu'il ne permettrait pas la destruction d'Israël; il a promis de sauver sa population si la situation devenait vraiment dangereuse. Au cours de la récente visite de Netanyahu à Moscou, Poutine ne s'est pas laissé entraîner par les projets que Lieberman et Netanyahu lui faisaient miroiter d'une ré-alliance avec Moscou plutôt qu'avec Washington. Il a dit aux Israéliens que leurs liens avec les US étaient trop solides pour qu'un tel renversement d'alliance soit concevable. Poutine a dit que la Russie était satisfaite du niveau actuel de leur amitié, et qu'il ne demandait nullement à Tel Aviv de relâcher ses liens avec Washington. Poutine a visité Israël à quelques reprises, et il a reçu le premier ministre israélien au Kremlin. L'ambassadrice israélienne, Mme Golender, rencontre plus souvent Poutine que ses homologues américain ou français.

Cette attitude amicale repose sur une raison terre-à-terre: c'est que Poutine se débrouille mal en anglais ou en français, alors que l'ambassadrice lui parle en russe, ce qui permet de se passer d'ennuyeux interprètes. Plus profondément, il y a le passé de Poutine: c'est un surgeon des élites libérales, il a été élevé à Saint-Pétersbourg, a été formé par l'ultra-libéral maire Sobchack, puis a reçu l'onction de Boris Eltsine. Tout cela fait de lui un sympathisant naturel des juifs et d'Israël. Cette attitude chagrine certains Russes ultra-patriotes, qui ont fait circuler avec empressement sa photo, avec kippa de rigueur, près du Mur des Lamentations. Ils ont aussi compté et recompté les oligarques juifs de Moscou.

Certes, certains d'entre eux –les Berezovsky, Gusinsky, Hodorkovsky – ont dû décamper de leur base russe, mais le président russe n'est certainement pas un châtiment pour les grands pontes juifs, ni le nouvel Hitler que l'on prétend parfois. Abramovitch et Friedman, pour n'en mentionner que deux, gardent sa confiance et sa porte leur est toujours ouverte. Tant qu'ils ne se mêlent pas de politique, aucun oligarque, juif ou gentil, ne dérange Poutine.

Il est également très amical avec les intellectuels juifs et ces messieurs des médias, même lorsqu'ils lui sont outrageusement hostiles. Ainsi en va-t-il de Masha Gessen, éditorialiste, juive, lesbienne et vilipendant Poutine à tout bout de champ; Alexei Venediktov, rédacteur en chef juif de l'Echo Mosky, un journal libéral et populaire qui attaque Poutine tous les jours, et bien d'autres, jouissent d'un accès privilégié à Poutine en personne, alors que pas un nationaliste russe, Alexander Dougine au premier chef, ne peut se vanter de l'avoir jamais rencontré en privé.

L'affabilité de Poutine ne fait pas de lui une source jauillissante de bienfaits en réponse à chaque initiative juive. Il a suspendu la livraison des S-300 à l'Iran, mais a rejeté toutes les ouvertures israéliennes pour couler l'lran,la Sy rie ou le Hamas. Au cours de leur dernière conversation au téléphone, Netanyahu a glapi que les Israéliens avaient découvert des preuves de frappes nucléaires iraniennes. Poutine a exprimé poliment ses doutes, et lui a dit de s'adresser à l'AIEA. Il a accepté de recevoir les soi-disant experts israéliens avec leurs preuves à Moscou, mais il n'en est rien ressorti. Le soutien de la Russie à la Palestine est immuable, et il y a aussi une ambassade palestinienne à Moscou.

Poutine a apporté son soutien à la construction d'un musée juif spacieux à Moscou, et il a personnellement contribué à le financer, mais les panneaux publicitaires proclament dans les rues de la Russie la Résurrection du Christ, la Pâque chrétienne et la Nativité à Noël. Pas de vœux saisonniers, mais l'affirmation, ouvertement, de la chrétienté. La Russie n'est pas comme les US ou l'UE, d'où les signes extérieurs de la foi chrétienne sont bannis, et jusqu'à la mention de Pâques ou de Noël, tandis que toute requête provenant des juifs doit être immédiatement satisfaite. Les juifs occidentaux s'offusquent (du moins c'est ce que prétendent leurs organisations) à chaque déploiement public de foi chrétienne, mais les juifs russes s'en fichent; d'ailleurs, ils se marient avec des chrétiens, ils se convertissent en rejoignent l'Église en nombre jamais atteint auparavant. Et ils ne sont pas solidement pro-israéliens, ceux qui avaient été cédés à Israël.

De sorte que les juifs de Russie ne sont pas un facteur d'influence pour le président russe. Poutine fera ce qui est juste selon la foi chrétienne, et ce qui est bon pour la Russie, tel qu'il l'entend, et nul ne saurait le convaincre de capituler sur les points réellement importants. D'autres considérations, comme par exemple l'amitié avec Israël, n'auraient qu'un rang tout à fait mineur parmi ses priorités. Cependant, pris dans la crise ukrainienne, comme les Russes sont bien ennuyés par les sanctions et les menaces d'isolement, ils essaient d'attirer les juifs de leur côté. Ceci les rend de plus en plus accessibles à la manipulation israélienne, qu'il s'agisse de manœuvres décidées en haut lieu ou d'initiatives privées.

La semaine dernière, l'historien militaire israélien Martin van Creveld est passé par Moscou. En 2003, il s'était rendu célèbre en menaçant l'Europe d'anéantissement nucléaire (l'option "Sanson") en disant: "Israël a la capacité de couler le monde entier avec nous, et c'est ce qui va se passer, avant qu'Israël se soumette à d'autres". Cette fois-ci il a expliqué aux Russes la nouvelle politique israélienne: tandis que les US entrent dans leur déclin, Israël doit diversifier et consolider ses projets en se rapprochant de Moscou, de Pékin et de Delhi, a-t-il écrit dans le quotidien Izvestia. Peut-être, mais sans aller trop loin. Un flirt, certes, mais pas une galipette, pas pour le moment.

Israël préfère s'en tenir à sa neutralité. C'est facile, parce que e commun du peuple (à l'exception des Russes) ne s'intéresse pas aux affaires russo-ukrainiennes, ignore la différence entre Ukraine et Russie, et est plutôt hostile aux uns comme aux autres. Ceci est valable pour la gauche et pour la droite; la gauche israélienne est encore plus pro-américaine que la droite israélienne. Et pour les Israéliens d'origine russe, ils sont divisés à égalité entre partisans de la Russie et partisans du régime de Kiev. Tout en gardant la politesse avec la Russie, Israël ne cherche pas à se ranger aux côtés de Moscou.

Les oligarques juifs d'Ukraine, les Kolomoysky, Pinchuk, Rabinovitch, sont intégrés au régime de Kiev, et ils soutiennent l'extrême-droite israélienne à grande échelle. Les hommes d'affaire israéliens ont des investissements en Ukraine, et les oligarques en ont en Israël. Kolomoysky contôle YushMash, le prestigieux complexe de construction de missiles à Dniepropetrovsk, et il détient les secrets du missile balistique Satan, l'arme stratégique russe la plus puissante. On prétend qu'il tente de partager ces secrets avec les Israéliens. Si Israël voulait se placer aux côtés de Moscou en ce qui concerne l'Ukraine, la rupture avec Washington serait inévitable, et Israël ne cherche pas à la provoquer.

Quelques Israéliens de droite, marginaux, soutiennent la Russie; ils prétendent représenter l'opinion publique israélienne et le gouvernement. Ils s'efforcent de faire des collectes dans le cadre de leurs promesses, avant de fournir quoique ce soit. Mais ce n'est pas là une entourloupe ordinaire; ils essaient en fait d'obliger la Russie à soutenir l'extrême droite sioniste.

Prenons le cas de l'activiste russo-israélien d'extrême droite Avigdor Eskin. Il clame que le gouvernement israélien a d'ores et déjà décidé de sauter du train US pour monter dans les wagons russes, que des commandos israéliens sont en route pour aller se battre pour les Russes à Donetsk, et que les autorités israéliennes vont retirer sa nationalité israélienne à Kolomoysky. Naturellement, c'est un tombereau d'insanités, mais les Russes mordent à l'hameçon avec appétit.

Avigdor Eskin est une personnalité haute en couleurs, un converti à la foi juive (dans la mesure où sa mère n'est pas juive), un juif pratiquant, un ex-kahaniste qui a été arrêté en Israël pour une tentative de profanation de la mosquée Al-Aqsa et d'un cimetière musulman, et qui a passé deux ou trois ans dans une geôle israélienne; il se donne du "Rabbi" lui-même, et porte la barbe longue. Après son stage en prison, il a déménagé en Russie et a bâti un réseau de soutien à Israël parmi les Russes d'extrême-droite. Son message, c'est: "Israël est un ami véritable de la Russie, tandis que les musulmans sont les ennemis de la Russie." Il ajoute en outre que les colons israéliens sont anti-américains et pro-russes. Si vous y croyez, vous allez bientôt croire aux contes de fée.

Il a récemment prétendu que le Bataillon Aliya, composé "de commandos israéliens expérimentés et de tireurs d'élite" était arrivé au Donbass en guerre pour se battre avec les Russes, contre les troupes du régime de Kiev. En fait il s'agit d'un bataillon au sens où l'Armée du salut est une armée. Pendant un court moment, l'ONG a fourni des gardes pour les colonies juives à Gaza et en Transjordanie, mais les colons ont cessé de faire appel à eux parce qu'ils n'étaient pas fiables du tout. Ils se sont vantés du meurtre de civils palestiniens, de torturer et de flinguer les enfants palestiniens, mais c'était juste un fantasme sadique, maladif et raciste, disent les gens. Après quoi, les chefs du dit Bataillon ont fait de leur nom un slogan rentable, saignant les communautés judéo-américaines et collectant des dons pour leurs activités secrètes supposées. Une fois que cette arnaque a été exposée sur une TV israélienne (RTVI network, en ligne sur youtube), ils ont disparu du champ de vision, jusqu'à ce qu'Avigdor Eskin réactive la vielle entourloupe, et fasse de gros titres dans les médias russes avec ça.

Eskine a trouvé un frère spirituel en Vladimir Solovyev, éminence des médias russes. Il s'agit d'un partiellement juif, qui vivait à l'étranger, puis est rentré en Russie; il dirige le programme politique important Sunday Evening à la télé russe. Le Saker (blogueur désormais bien connu) l'a décrit comme suit: "Ce show se fait dans l'espace d'une personnalité célèbre, Vladimir Solovyev, un garçon très intéressant. C'est un juif, et il n'a pas peur de le rappeler à son public, et il a même été élu membre du Congrès juif de Russie. C'est aussi un patriote russe, et un défenseur, ouvertement, de Poutine et de sa politique. Sa position sur l'Ukraine est simple; en tant que juif et en tant que russe, il ne tolère pas le nationalisme ukrainien, le néo-nazisme ou le bandérisme. C'est un ennemi déterminé et sans concession du nouveau régime de Kiev."

Il se pourrait que Soloviev soit en train de traverser une crise d'identité personnelle: à partir de la célébration de ses racines russes, il est passé à la proclamation de son origine juive. Alternativement, il se peut (et c'est même bien probable) que les décideurs russes veuillent attirer les juifs de leur côté, et Soloviev agit en ayant à l'esprit les juifs américains. C'est ce que faisait Staline, et Poutine pourrait bien tenter le même coup. En 1942, alors que le carnage nazi menaçait la Russie, Staline avait envoyé certains juifs russes aux US pour parler yiddish aux communautés juives et pour faire du lobbying en faveur de l'URSS. La communauté juive américaine pèse sûrement quelque part. En ce moment Soloviev et d'autres essayent de faire pression sur les juifs de l'étranger, ou du moins de montrer à leurs supérieurs qu'ils sont en train de le faire.
Le rendement que tire Eskin de ses histoires fantastiques est élevé. Dans l'émission prime time de Soloviev, il a appelé à la destruction de la mosquée Al Aqsa et à l'édification du temple juif à la place. Il a appelé les Palestiniens "le peuple de l'Antéchrist". Même en Israël, des assertions de ce genre ne peuvent pas se faire sur une chaîne publique. A Moscou ébahie, Eskin a été propulsé dans un autre programme politique important, celui de Arcadi Mamontov. Lequel fait le jeu de l'autre? Eskin roule-t-il ses hôtes russes, ou les médias qui l'hébergent sont ils en train de l'utiliser pour berner leurs supérieurs, ou encore sont-ce les dits supérieurs qui essaient d'enfariner le peuple russe? A moins qu'Israël soit derrière? Qui sait?.

Les juifs ukrainiens tiennent à diverger

Les juifs sont arrivés en Ukraine il y a mille ans, peut-être du pays khazar. Ce n'est pas une communauté homogène, ils représentent plutôt des communautés diverses. Beaucoup ont émigré en Israël, d'autres, encore plus nombreux, se sont établis en Russie. Ils parlent russe et habituellement ne parlent pas ukrainien, quoiqu'ils en soient familiers depuis vingt ans. Normalement, ils n'auraient cure de l'indépendance de l'Ukraine, parce que les juifs sont traditionnellement du côté des plus forts, que ce soit les Polonais à l'époque de la domination polonaise, ou les Russes au temps de Moscou, ou les Allemands dans l'orbite de Vienne ou de Berlin. Maintenant, beaucoup ont décidé de se ranger au côté des US ou de l'UE. L'une des raisons pour lesquelles tant de gens d'origine juive s'en sortent bien est que le groupe ethnique dominant fait confiance aux juifs et à leur loyauté envers les puissants, ainsi qu'à leur absence de compassion pour leurs voisins non juifs.

Autre raison, le flou des définitions. Pendant les trois ou quatre dernières générations, les juifs ont fait librement des mariages mixtes; les enfants de ces unions sont souvent considérés comme juifs. Voilà ce que sont "les juifs" sous le régime actuel: en fait ils n'ont bien souvent qu'un seul grand parent juif.

L'Ukraine, après son indépendance en 1991, s'est tournée vers la sphère d'influence occidentale, mais l'Ukraine orientale (la Novorussie) a gardé son caractère et ses attaches russes. Les juifs s'en sortent bien des deux côtés. Kolomoysky est un membre éminent de la communauté juive, et un pilier du régime de Kiev. C'est un homme d'affaire rustique, célèbre pour ses rapines sur les propriétés d'autrui, et pour ses liens avec la Maffia. Des rumeurs circulent, qui le mentionnent autour de nombreux assassinats d'adversaires dans le business.

De l'autre côté, à Kharkov, le maire et le gouverneur du district, surnommés Doph et Gepah, sont juifs, et peuvent être considérés pro-russes. On pensait que Kharkov deviendrait le centre de la Novorussie émergente, le président Yanoukovitch s'est enfui à Kharkov en pensant y trouver des alliés et des soutiens. Mais Dopa et Gepa l'ont désabusé, si bien qu'il a repris son envol pour la ville russe de Rostov. Leur décision de rester loyaux à Kiev ne leur a pas réussi; l'un a été abattu, l'autre a été embastillé et sa tentative de se porter candidat à la présidentielle remballée.

Kharkov est aussi proche de Hodos, un juif riche et éminent qui a combattu vaillamment contre Habad, le mouvent spirituel juif dont M. Kolomoysky est membre influent. Les juifs de Novorussie soutiennent apparemment la tendance générale pro-russe, mais il y a des exceptions. Pratiquement tous les juifs ukrainiens ont de la famille en Russie, et ont reçu une éducation russe.

Israël a un solide réseau d'agents en Ukraine. Ils ont capturé un ingénieur palestinien et l'ont envoyé dans un cachot israélien, ce qui n'aurait pas pu se faire sans la collaboration des services de sécurité ukrainiens. Cependant, les histoires de soldats israéliens combattant en Ukraine sont quelque peu exagérées: ce sont des individus qui ont la double nationalité et qui agissent à leur guise, ce ne sont pas des représentants de l'État.

Les juifs US sont divisés

Les juifs US sont divisés sur l'Ukraine, comme ils l'étaient au sujet de la Palestine. Les amis de la Palestine, les gens qui ont un passé anti-impérialiste robuste et qui semblent s'y connaître en histoire d'Europe de l'Est, tels Noam Chomsky et Stephen F. Cohen, ont reconnu et désavoué la tentative US de baser leur hégémonie sur l'affaiblissement de la Russie. Un sous groupe, ceux que Gilad Atzmon a judicieusement appelé les AZZ (antisionistes sionistes), trotskystes et autres faux gauchistes, sont complices de l'Otan, tel Louis Proyect, et ont appelé à une intervention américaine, assoiffés de sang russe.

Le lobby notoirement pro-israélien est strictement anti-russe. Victoria Nuland, représentante du Département d'Etat (et célèbre pour son "Fuck EU") a dirigé personnellement le coup d'État de Kiev; elle a a handicapé le gouvernement et le président de la nouvelle colonie américaine sur le Dniepr. Son mari, Robert Kagan, est fondateur du FPI, successeur de l'infâme PNAC, le groupe de réflexion sioniste extrême qui a poussé à la guerre en Irak, en Afghanistan et en Iran. Faute de mieux, ils attaquent maintenant la Russie, mais n'oublient nullement de soutenir Israël.

Considérons le cas d'un jeune militant du gender, américain et journaliste, James Kirchick. Il est entré dans le réseau néo-con en tant qu'agent consentant du Lobby. Il a dynamisé l'image "pink" d'Israël "patrie des gays" ("Israël est le meilleur ami des gays sur terre, tandis que les Palestiniens sont des homophobes qui méritent d'être bombardés"). Après avoir fait le sale boulot israélien, il s'est mis à combattre la Russie. Il a travaillé pour Radio Free Europe (propriété de la CIA et financée par le Congrès US); c'est lui qui a transmis la sensationnelle démission de Russia To-day en direct de Liz Wahl, et a protesté contre la maltraitance supposée des gays en Russie. Ses coups bas ont été révélés par Max Blumenthal, un journaliste juif américain, connu pour son antisionisme ('il travaille avec la Palestinienne Rania Khalek).

Alors qu'Israël est neutre envers l'Ukraine, les amis d'Israël en Europe et aux US sont hostiles à la Russie, et soutiennent l'hégémonie américaine, tandis que les amis de la Palestine applaudissent au défi Russe face à l'empire. Le philosophe sioniste français et médiatique Bernard Henri Lévy est un exemple de la première tendance, tandis que Michel Chossudovsky, de Global Research, représente la deuxième. Les sites moteurs de la réflexion critique (dits "antisionistes) Counterpunch, Antiwar, Global Research sympathisent avec la Russie, tandis que les sites pro-israéliens sont hostiles à la Russie.

Les sionistes sont des ennemis pénibles et vicieux, mais ils font des amis encore pires. Edward N. Luttwak est amical avec la Russie; il a appelé les US à faire cause commune avec la Russie. L'union stratégique entre Russie et Amérique est nécessaire, dit-il. Qui se soucie de l'Ukraine? Et voici son coup de pied de l'âne: la Russie devrait attaquer la Chine, au profit des US. Un autre ami sioniste, Tony Blair, appelle aussi à la paix avec la Russie de façon à ce que la Russie puisse combattre le monde musulman pour les beaux yeux d'Israël. Tout à fait dans le style d'Eskin qui offre son soutien pathétique à la Russie afin de neutraliser son influence positive et sa défense de la Palestine.

Résultat: Israël reste neutre pour des raisons qui lui sont propres. Tandis que les juifs en tant qu'individus divergent sur l'Ukraine, il y a une corrélation avec leur position sur la Palestine et sur la Syrie. Les ennemis de Poutine en Russie, en Ukraine, en Europe et aux US soutiennent effectivement Israël et sont hostiles à la Palestine, à la Syrie de Bachar, au Venezuela de Chavez. Et le lot le plus dangereux, ce sont ceux qui soutiennent Israël et la Russie, parce qu'ils mijotent certainement quelque embrouille.

Traduction: Maria Poumier
Pour joindre l'auteur: adam@israelshamir.net

mercredi, 19 mars 2014

Tsahal et les juifs orthodoxes

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Jan Ackermeier:

Tsahal et les juifs orthodoxes

Plusieurs centaines de milliers de juifs orthodoxes ont récemment manifesté à Jérusalem contre le projet de les enrôler dans l’armée et de leur imposer, comme à tous les citoyens israéliens, le service militaire obligatoire. Par des prières en pleine rue, ils protestent contre un projet de loi qui a été débattu au Parlement la semaine du 10 mars 2014. Cette nouvelle loi permet, pour la première fois depuis la fondation de l’Etat d’Israël en 1948, de prendre des mesures répressives contre les jeunes orthodoxes qui ne donnent aucune suite à l’ordre de rejoindre l’armée.

De tous les coins du pays, les ressortissants de tous les courants possibles et imaginables de l’orthodoxie juive s’étaient rendus à Jérusalem pour participer aux manifestations. La police a estimé leur nombre à plusieurs centaines de milliers. Un porte-paroles des forces de l’ordre a déclaré que 3500 policiers avaient été déployés pour éviter les débordements comme lors des manifestations précédentes.

Les juifs, qui suivent à la lettre les préceptes de leur religion, refusent généralement le service militaire en arguant que cela les empêche de pratiquer leurs rituels. En effet, dans l’armée israélienne, il n’y a pas de séparation nette entre hommes et femmes et le commandement exige souvent de mener des missions à bien le samedi, jour sacré de repos pour les juifs orthodoxes. Plusieurs milliers d’hommes ultra-orthodoxes servent pourtant déjà dans des unités spéciales de l’armée. Il y a deux ans, le Tribunal Suprême de l’Etat d’Israël avait décrété que le fait de libérer les juifs orthodoxes du service militaire était un expédient anti-constitutionnel. Cet expédient date de l’époque de la fondation de l’Etat hébreu en 1948. A l’époque, on ne comptait que 400 objecteurs de conscience ultra-orthodoxes par an. Mais, aujourd’hui, le taux de fécondité des familles orthodoxes est nettement supérieur à celui des autres strates de la population, marquées par le mode de vie occidental et dès lors moins religieuses.

De nos jours, le nombre d’hommes orthodoxes libérés de tout service militaire est estimé à 60.000 ou 70.000. Ce débat houleux sur le service militaire avait fait tomber la grande coalition du premier ministre Benjamin Netanyahou en 2012. La majorité des Israéliens, selon les sondages, réclame l’abolition des privilèges liés à la religion.

Jan Ackermeier.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°10/2014, http://www.zurzeit.at ).

dimanche, 09 mars 2014

Aux sources de l’idéologie sioniste

Robert STEUCKERS:

Aux sources de l’idéologie sioniste

Extrait d’une conférence sur le Proche Orient, prononcée à la tribune du “Cercle Proudhon” à Genève, avril 2010

Le sionisme suscite l’enthousiasme dans une bonne part de la communauté juive, tous pays confondus, chez les “chrétiens sionistes” américains, qui sont des fondamentalistes protestants, et chez les occidentalistes et les atlantistes de toutes obédiences (de gauche comme de droite). En revanche, pour beaucoup d’autres, et a fortiori dans les pays arabes et les communautés arabo-musulmanes immigrées dans les pays occidentaux, le sionisme est considérée comme une forme de racisme juif dont les victimes sont les Arabes de Palestine. Une vive passion s’est emparée de toutes les discussions relatives à cette question, tant et si bien que les parties prenantes de ce débat ont une vision généralement propagandiste et militante sur le fait sioniste, oublieuse, comme toutes les autres visions propagandistes et militantes, des racines historiques du complexe d’idées qu’elles exaltent ou qu’elles vouent aux gémonies. L’esprit partisan est toujours rétif aux démarches généalogiques. Il répète à satiété ses “ritournelles”, sans tenir compte ni du réel ni du passé.

Le Prince de Ligne et Napoléon

ottoman.gifNotre position ne peut être ni propagandiste ni militante car nous ne sommes ni juifs ni arabes, car nous ne pouvons raisonnablement nous identifier aux uns ou aux autres, tout en étant désireux de ne pas voir l’ensemble du Levant et du Moyen Orient plongé dans une guerre sans fin, qui, dans tous les cas de figure, serait contraire à nos intérêts. Le sionisme, c’est-à-dire la volonté de transplanter tous les juifs d’Europe dans l’ancienne Palestine romaine ou ottomane, n’a pourtant pas, au départ, des origines juives. Le tout premier à avoir émis l’hypothèse d’une telle transplantation est mon compatriote, le Feldmarschall impérial Charles-Joseph de Ligne, envoyé comme attaché militaire autrichien auprès de Catherine II la Grande en guerre contre l’Empire ottoman, auquel elle arrachera la Crimée, sanctionnant ainsi la prépondérance russe en Mer Noire. A cette époque qui a immédiatement précédé les délires criminels de la révolution française, Russes et Autrichiens envisageaient de porter un coup final à cet empire moribond qui avait assiégé l’Europe du Sud-Est pendant plusieurs siècles. Pour y parvenir, le Prince de Ligne a suggéré d’envoyer toute la population des ghettos d’Europe centrale et orientale dans la partie médiane de l’Empire ottoman, de façon à ce qu’un foyer de dissidence se crée, au bénéfice des Russes et des Autrichiens, entre l’Egypte, province de la Sublime Porte, et l’Anatolie proprement turque. L’objectif de ce “sionisme” ante litteram, non idéologique et non religieux mais essentiellement tactique, était donc de séparer l’Egypte de la masse territoriale anatolienne, sur un territoire, qui, dans l’histoire antique, avait déjà été âprement disputé entre les Pharaons et les souverains hittites (bataille de Qadesh) voire, aux temps des Croisades européennes, entre Fatimides d’Egypte, alliés occasionnels des rois croisés, et Seldjouks.

La révolution française, fomentée par Pitt pour venger la défaite de la flotte anglaise à Yorktown en 1783 lors de la guerre d’indépendance des Etats-Unis, va distraire Russes et surtout Autrichiens de la tâche géopolitique naturelle qu’ils s’étaient assignée: parfaire la libération de l’Europe balkanique, hellénique et pontique afin de conjurer définitivement la menace ottomane. Napoléon Bonaparte, fervent lecteur des lettres galantes et coquines du Prince de Ligne, reprendra l’idée à son compte, sans pouvoir la réaliser, sa campagne d’Egypte s’étant soldée par un fiasco total avec la défaite navale d’Aboukir. En occupant provisoirement l’Egypte, Bonaparte s’oppose à l’Empire ottoman, déjà considérablement affaibli par les coups que lui avaient portés les armées russes et autrichiennes près d’une vingtaine d’années auparavant. Les visées françaises sur l’Egypte obligent, d’une part, les Anglais à soutenir les Ottomans (aussi contre les Russes qui font pression sur les Détroits) et, d’autre part, Napoléon à envisager de créer une sorte d’Etat-tampon juif francophile entre une future Egypte tournée vers la France et la masse territoriale anatolienne et balkanique, d’où étaient généralement issus les meilleurs soldats ottomans, dont les pugnaces janissaires et leurs successeurs. L’enclave juive devait servir à protéger le futur Canal de Suez encore à creuser et les richesses du Nil, notamment les cultures du coton, richesse convoitée par la France révolutionnaire. Le militant sioniste de droite Jabotinski, ancêtre intellectuel des droites israéliennes, faisait directement référence à ces projets napoléoniens dans ses écrits militants, marqués par des linéaments idéologiques bonapartistes, garibaldistes et... mussoliniens. Mais les projets du Prince de Ligne et de Bonaparte resteront lettre morte. Ce sionisme non juif et purement tactique sera oublié pendant plusieurs décennies après la défaite napoléonienne à Waterloo et les dispositions prises lors du Traité de Vienne.

Lord Shaftesbury

Le projet sera réexhumé dès la fin des années 30 du 19ème siècle quand l’Empire ottoman sera déchiré par une guerre interne, opposant le Sultan d’Istanbul, soutenu par l’Angleterre, et Mehmet Ali, d’origine albanaise, khédive d’Egypte appuyé par la France. A Londres, Lord Shaftesbury relance l’idée dans les colonnes de la revue Globe et dans un article du Times (17 août 1840); il réclame dans ces publications “a land without a people for a people without a land” (“une terre sans peuple pour un peuple sans terre”), esquissant un plan, qui, finalement, se concrétisera un peu plus d’un siècle plus tard, lors de la création de l’Etat d’Israël. Le père du “sionisme”, qui n’a pas encore de nom, est donc un lord conservateur anglais. Outre le fait qu’il émet l’idée fausse d’une Palestine vide, prête à accueillir une population errante en Europe et jugée indésirable, Lord Shaftesbury préconise dans son article la création d’un Etat indépendant en Syrie-Palestine ouvert à la colonisation juive (et donc non entièrement juif), un Etat qui fera tampon entre l’Egypte et la Turquie, projet où l’Angleterre aura le beau rôle du “nouveau Cyrus” qui ramènera les juifs en Palestine. Disraëli, d’origine juive, relance à son tour l’idée en lui donnant une connotation plus romantique, un peu dans le style du “philhellénisme” de Lord Byron, autre figure tragique et originale anglaise qui a permis à Londres d’intervenir dans le bassin oriental de la Méditerranée. Mais l’idée “pré-sioniste” est très vite abandonnée après la Guerre de Crimée où la France et l’Angleterre s’allient à l’Empire ottoman contre la Russie, afin de la contenir au nord du Bosphore. L’Angleterre devient la protectrice de l’Empire ottoman, le soutient à fond lors de la guerre russo-turque de 1877-78 tout en occupant Chypre et en étendant sa protection à l’Egypte en 1882: Albion ne fait rien pour rien! Dans un tel contexte, il est donc bien inutile de fabriquer un Etat-tampon entre deux entités d’un même empire dont on est l’allié ou dont on “protège” le fleuron. On ne ressortira l’idée sioniste du placard que lorsque l’Empire ottoman s’alignera progressivement sur l’Allemagne de Guillaume II, faute d’une politique cohérente de ses alliés français et anglais, qui ont d’abord protégé la Sublime Porte contre la Russie, entre 1853 et 1856 (Guerre de Crimée) et en 1877-78, quand Russes, Bulgares et Roumains envahissaient les possessions balkaniques du Sultan, tout en menaçant Constantinople. La politique franco-anglaise était marquée par la duplicité: les alliés occidnetaux avaient deux fers au feu: protéger l’Empire ottoman moribond, tout en le dépouillant de ses territoires les plus stratégiques; imaginer une politique de dislocation de ce même Empire ottoman, en pariant sur l’éventuelle royauté d’Abdel Khader au Levant ou en créant une élite arabe pro-occidentale au Liban et en Syrie (cf. infra), pour affaiblir le nouvel allié du Kaiser allemand.

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Abdel Khader

Après la guerre “inter-ottomane” entre le Sultan et Mehmet Ali, en 1847, Abdel Khader capitule et se rend aux Français en Algérie, pays auquel il avait voulu rendre l’indépendance. Le Duc d’Aumale, vainqueur, lui accorde sa garantie et sa protection. Il croupit d’abord dans une prison française de 1848 à 1852 puis s’exile à Damas en Syrie en 1853. Il est autorisé à y séjourner avec sa suite, une troupe d’un millier de soldats maghrébins aguerris, avec leur famille. Cette émigration hors de l’Algérie devenue française permet au Second Empire de se débarrasser des éléments les plus turbulents de la première révolte algérienne et, comme nous le verrons, d’exploiter leur dynamisme et leur fougue guerrière. Les Ottomans ne contestent pas cette présence: ils ont besoin de leurs nouveaux alliés français contre la Russie qui a attaqué les ports turcs de la Mer Noire, déclenchant ainsi la Guerre de Crimée. En 1860, après cette guerre qui a ruiné les principes pan-européens (et eurasistes avant la lettre) de la Sainte-Alliance, des troubles éclatent au Liban et dans le Djebel druze, où la population locale musulmane ou druze massacre les chrétiens, obligeant la France, protectrice de jure de ces minorités chrétiennes dans l’Empire ottoman, à intervenir. Abdel Khader, devenu instrument militaire de la France avec son armée algérienne installée en Syrie, intervient et sauve les chrétiens syriens du massacre. Ces troubles du Levant avaient éclaté parce que le Sultan avait envisagé d’accorder aux puissances européennes, surtout la France et l’Angleterre, toutes sortes de concessions, notamment celles qui consistait à lever le statut de dhimmitude pour les chrétiens d’Orient et à autoriser les puissances chrétiennes à ouvrir des écoles dans tous les vilayets entre Antioche et le Sinaï. La politique occidentale, franco-anglaise, n’est plus, alors, de créer un Etat-tampon juif mais de créer une nation arabe moderne, favorable à l’Occident, en rébellion contre la Sublime Porte, formant un verrou grand-syrien cohérent entre l’Egypte et l’Anatolie. Dans ce projet, la France et l’Angleterre visent surtout à asseoir leur domination sur le Liban actuel, où on fabriquera, grâce aux nouvelles écoles catholiques ou protestantes, une élite intellectuelle occidentalisée, au départ de groupes de Maronites nationalistes arabes, hostiles à la Sublime Porte, qui ne les avait pas protégés en 1860 dans le Djebel druze.

En 1876, Abdülhamid monte sur le trône ottoman. En 1877-78, ses armées sont écrasées par les Russes qui volent au secours des Bulgares et des Roumains qui venaient de proclamer leur indépendance. Les territoires balkaniques de l’Empire ottoman se réduisent comme une peau de chagrin, entraînant une crise générale dans tout l’Empire. Il est fragilisé à l’extrême: les Bulgares ont campé devant les murs de Constantinople et sont désormais en mesure de réitérer cette aventure militaire avec l’appui russe. La Turquie ottomane se tourne de plus en plus vers l’Allemagne, tandis que les Français rêvent d’un royaume arabe du Levant, dont le souverain serait... Abdel Khader. On ne songe plus à envoyer dans la région les juifs d’Europe.

Rabbi Alkalai, Zvi Hirsch Kalisher, Joseph Natonek

L’idée sioniste est alors quasiment absente dans les ghettos juifs d’Europe, a fortiori au sein des judaïsmes émancipés dont les représentants n’ont nulle envie d’aller cultiver la terre ingrate du Levant. On peut cependant citer des prédécesseurs religieux, dont le rabbin de Sarajevo Alkalai (1798-1878), sujet ottoman, qui énonce, non pas l ‘idée d’aller s’installer en Palestine, mais une idée neuve et révolutionnaire au sein du judaïsme européen: le judaïsme ne doit plus être la religion qui attend en toute quiétude que revienne le Messie. Pour Alkalai, il ne faut plus attendre, il faut se libérer activement et le Messie viendra. Pour développer une action, il faut un projet, qu’Alkalai n’énonce pas encore mais son refus de l’attitude d’attente de la religion mosaïque traditionnelle implique ipso facto de sortir de sa quiétude impolitique, de se porter vers un activisme qui attend son heure et ses mots d’ordre. Par ailleurs, à Thorn en Posnanie prussienne, Zvi Hirsch Kalisher (1795-1874) propose, pragmatique à rebours de son collègue de Sarajevo, la création d’une société de colonisation en 1861-62. C’est le premier projet “sioniste” juif non purement tactique, émanant d’une géopolitique française, russe ou autrichienne. On notera que ces projets constituent une réaction contre l’émancipation (qui, disent ces pré-sionistes, va aliéner les juifs par rapport à leur héritage ancestral) et non contre les persécutions. Leur attitude est dès lors assez ambigüe: il faut rester juif mais non pas à la mode traditionnelle et “quiète”; il faut le rester en pratiquant un nouvel activisme qui, dans ses principes, serait juif, non transmissible aux non-juifs, mais simultanément non traditionnel, ce qui conduit les traditionalistes quiets à rétorquer qu’un activisme ne peut être juif, mais seulement copie maladroite des manies des “goyim” et que seul l’attente est signe de judaïsme véritable.

Un peu plus tard, Joseph Natonek (1813-1892) élabore un plan plus précis, celui que reprendra Herzl et son fameux “Congrès sioniste” de 1897. Natonek suggère la création d’un “Congrès juif mondial”, de demander ensuite une charte aux Turcs, d’amorcer une colonisation agricole puis de favoriser une émigration de masse vers la Palestine et de créer une langue hébraïque moderne. Natonek ne donne pas de nom à son projet: on ne peut pas parler de sionisme, puisque le terme n’existe pas encore. Personne ne suit Natonek: l’alliance israélite universelle refuse ses plans en 1866 et se borne à aider, via des initiatives philanthropiques, les juifs ottomans de Palestine, ceux du “vieux peuplement” ou “vieux yishuv”. Natonek, dépité, se retire de tous les débats que ses idées avaient lancés. Deux membres de sa famille partent en Palestine pour fonder une colonie agricole, la toute première de l’histoire du sionisme.

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Moïse Hess

Le socialiste allemand de confession juive Moïse (Moshe) Hess, issu de l’écurie des Jeunes Hégéliens comme Karl Marx (avec qui il se disputera), observe, après 1848, l’agitation politique que suscitent les mouvements nationaux partout en Europe, surtout en Italie, en Pologne et dans les Balkans. Il voyait la faiblesse du judaïsme dans son particularisme, face à un christianisme qui se voulait universel (positions assez différentes de celles, bricolées, d’un Bernard-Henri Lévy qui, lui, voit des peuples goyim indécrottablement “particularistes” ou “vernaculaires” et un judaïsme essentiellement universaliste). Errant dans un espace idéologique sans limites perceptibles, dans un flou conceptuel, le socialisme de Hess l’induit d’abord à lutter pour l’émancipation du prolétariat, indépendamment de toute appartenance religieuse. Plus tard, il revient au judaïsme, noyau religieux de la “nationalité juive”, et réclame le droit des juifs à avoir un Etat à eux puisque personne ne veut les assimiler, les accepter. Il en déduit que les juifs sont inassimilables et que cette “inassimilabilité” —qu’il juge finalement positive— caractérise leur nationalité, en même temps que leur particularisme. Par conséquent, il pense que la France, qui a défendu les Maronites de Syrie contre les Druzes avec l’aide des guerriers d’Abdel Khader, pourrait aider les juifs d’Europe à se créer un foyer au Levant qui, en même temps, serait un modèle de société socialiste et égalitaire. Il n’est pas pris au sérieux par la majorité de ses co-religionnaires d’Europe occidentale et centrale qui le prennent pour un utopiste (exactement comme Marx!).

Leo Pinsker

Avant le manifeste de Theodor Herzl, qui lancera le sionisme proprement dit, une idée motrice émerge dans le monde intellectuel juif, chez un certain Leo Pinsker: celui-ci préconise un “retour à la normalité”. Il argumente: c’est parce que les juifs ne sont pas “normaux” qu’il y a de l’antisémitisme. Si les juifs revenaient à une “normalité” qu’ils partageraient avec les autres citoyens des Etats dans lesquels ils vivent, l’antisémitisme n’aurait plus raison d’être. Or l’antisémitisme devenait virulent en Europe orientale: les pogroms se succèdaient en Russie et la Roumanie, devenue indépendante, ne reconnaissait pas les juifs comme citoyens; de même, les émeutes et les pillages antijuifs, commis par les Européens de souche et les autochtones arabo-berbères en Algérie française se multiplient dans les années 90 du 19ème siècle. L’idée sioniste, avant la lettre, trouvera par conséquent un large écho en Roumanie. Parmi les tout premiers immigrants juifs du “nouveau yishuv”, on comptait beaucoup de ressortissants des ghettos de Roumanie, mal accueillis par leurs coreligionnaires du “vieux yishuv”. Quant aux juifs de Russie, la route de l’immigration leur est barrée en 1893 par ordre du Sultan, qui craint que les Russes appliquent l’idée purement tactique du Prince de Ligne et de Napoléon, en créant, par l’envoi massif de juifs de Russie, un judaïsme fidèle à l’ennemi slave sur le flanc sud de l’Anatolie turque. Par la volonté du Sultan, les juifs russes ne peuvent donc plus acheter de terres en Palestine. En 1890, Nathan Birnbaum forge le mot de “sionisme” dans la revue Kadima, en faisant référence à la colline de Sion à Jérusalem. Mais Birnbaum abandonne bien vite l’idée sioniste: il plaidera pour l’éclosion de “judaïsmes nationaux”, notamment en Allemagne, dont la langue serait le yiddisch et non pas un “nouvel hébreu” comme l’avait demandé Natonek. Il tranche ainsi à sa manière le dilemme activisme/quiétude: il replonge dans les traditions juives/yiddish tout en refusant l’activisme sioniste/moderniste (et “simili-goy”). Mais Herzl est un disciple de Birnbaum, qui ne retient que l’idée de revenir à la colline de Sion, d’y créer un Etat où les juifs pourraient vivre la vie de citoyens modernes normaux, selon les critères préconisés par Pinsker (et aussi, avant lui, par Hess).

Théodore Herzl

TheodorHerzl.jpgJusqu’à la parution du petit livre de Théodore Herzl en février 1896, intitulé L’Etat juif, le sionisme est une idéologie vague et confuse, affirmée puis critiquée, acceptée puis reniée. Le livre de Herzl n’était pas moins confus car il ne disait rien de précis sur le site géographique de ce futur et très hypothétique “Etat juif”. Il pourrait se situer en Palestine mais aussi ailleurs dans le monde. Son manifeste, bien que confus, attire quelques personnalités influentes (Nordau, Kahn, Lazare, Goldschmidt, Montagu, etc.) et recueille les signatures de milliers d’étudiants juifs d’Europe centrale. Mais les assimilationistes et les quelques colons de Palestine (issus du mouvement ‘Hovevei Zion) ne le soutiennent pas, parce qu’ils craignent d’éveiller un nouvel antisémitisme ou de voir les frontières des vilayets ottomans du Levant se fermer à tous nouveaux arrivants par crainte d’une submersion. Herzl développe alors une véritable “diplomatie sioniste” tous azimuts pour tenter, vaille que vaille, d’arriver à ses fins, avec l’appui, non pas d’une bourgeoisie juive assimilationiste, mais de dizaines de milliers de petites gens qui n’ont guère d’espoir d’avancer socialement, surtout en Pologne, en Russie et en Roumanie. Cette agitation autour de Herzl va, suite au “Congrès de Bâle” d’août 1897, donner naissance au sionisme moderne, autonome, capable, théoriquement, de faire avancer ses idées sans le soutien d’une puissance impériale. Guillaume II d’Allemagne, qui n’est certainement pas antisémite, décourage cette volonté romantique de faire l’alya (le retour à la Terre de Sion) pour ne pas heurter son nouvel allié turc. Les Russes, qui auraient pu pratiquer à leur profit la politique jadis préconisée par le Prince de Ligne ou Napoléon, répugnent à le faire. Le rêve sioniste de Herzl ne pourra cependant pas se concrétiser sans la “Déclaration Balfour” de 1917 qui donnera le coup d’envoi à la colonisation massive des terres de Palestine par des colons juifs venus d’Europe après la première guerre mondiale, surtout de Russie (ceux qui refusaient la bolchevisation de l’Empire des Tsars comme Jabotinsky) et d’Europe centrale, après les réactions hongroises et roumaines contre le régime “judéo-bolchevique” de Belà Kun à Budapest.

Conclusion

Les origines de cette idée sioniste, assortie d’une volonté de créer un nouvel Etat au Levant, sur territoire ottoman, ne sont cependant pas juives au départ. Elles résultent de calculs froids et cyniques de militaires européens soucieux de briser la cohérence territoriale de l’Empire ottoman en enfonçant, tel un coin, une entité nouvelle, à leur dévotion, entre l’Egypte et l’Anatolie: cette entité envisagée a été tour à tour juive, avec de Ligne et Napoléon, puis arabe, avec Abdel Khader ou les Maronites occidentalisés. Pendant la première guerre mondiale, les Britanniques avaient d’ailleurs parié sur les deux: sur les Hachémites avec Lawrence d’Arabie, sur les juifs avec la “Jewish Legion” et la “Déclaration Balfour”. Par conséquent, il ne serait pas faux d’affirmer que tout sionisme pratique découle d’un calcul stratégique non juif, parfaitement impérial, destiné à contrôler le Levant et à affaiblir et l’Egypte (grande puissance potentielle au temps de Mehmet Ali) et la Turquie ottomane: le “sionisme” des non juifs n’est pas au départ une volonté de faire du “favoritisme” au bénéfice des juifs; ce n’était ni le cas hier, où l’on était parfois naturellement cynique, ni le cas aujourd’hui, où l’on camoufle ses hypocrisies derrière une façade d’humanisme; le mobile principal est d’avoir une population, quelle qu’elle soit —au départ exogène (les Algériens d’Abdel Khader ou les juifs sionistes) ou minoritaire, en conflit avec son environnement géographique et historique— mais qui puisse toujours servir à créer un Etat-bastion pour disloquer les territoires de l’ancien Empire ottoman, pour empêcher la soudure Egypte/Anatolie, pour tenir l’ensemble de la Méditerranée jusqu’à son “bout” sur les côtes du Levant, pour garder les approches du canal de Suez, pour avoir une fenêtre sur la Mer Rouge (le port d’Elat à côté d’Akaba en Jordanie). L’attitude de la Grande-Bretagne de Lloyd George, désireuse d’affaiblir les Turcs et de créer une zone-tampon en lisière du Sinaï et du Canal de Suez, pour protéger le protectorat britannique sur l’Egypte, ne relève pas d’un autre calcul.

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Les Anglais, toutefois, voulaient un “foyer” juif et non un Etat juif car ils devaient ménager leurs protégés arabes grâce auxquels ils avaient pu chasser les Turcs du Levant. L’idée de “foyer” permet d’avoir un territoire disloqué, présentant une mosaïque de diversités, sans cohésion aucune et donc plus facilement contrôlable. Les sionistes d’extrême-droite, dont l’idéologue principal fut au départ Vladimir Jabotinsky, voudront un Etat en bonne et due forme et ne se contenteront pas d’un simple “foyer”, immergé dans une population arabe majoritaire, dont ils ne partageaient ni les moeurs ni les aspirations. Ces sionistes radicaux, qui, au fond, ne voulaient de cette mosaïque judéo-arabe envisagée par les stratèges londoniens, se révolteront contre la puissance mandataire britannique en s’inspirant des écrits de Michael Collins, le leader révolutionnaire irlandais, et de l’action de l’IRA. Jabotinsky ne suivra pas ses disciples les plus virulents sur cette voie maximaliste et terroriste: il était un officier britannique de la “Jewish Legion”, d’origine russe, fidèle à l’Entente franco-anglo-russe et hostile aux Bolcheviques de Lénine. Il restera donc loyal à l’égard de l’Angleterre. Aujourd’hui, l’Etat d’Israël, né en 1948, ne survit que pour une seule raison: il est la zone-tampon au Levant dont se sert une nouvelle puissance impérialiste, américaine cette fois, pour asseoir sa domination dans le bassin oriental de la Méditerranée, pour tenir l’Egypte, la Syrie et, éventuellement, la Turquie en échec.

 

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La preuve la plus tangible de cette inféodation d’Israël à l’hegemon américain est, bien entendu, la présence permanente de la flotte US de la Méditerranée, qui y a évincé toutes les flottes européennes riveraines, faisant automatiquement de l’Etat d’Israël la “tête de pont” de cette redoutable flotte au fond de cette mer qui s’enfonce très profondément dans les terres “eurafricaines” et qui, par cette configuration géographique, a acquis pour l’éternité une importance stratégique cardinale. Les Israéliens lucides, dubitatifs face aux outrances de leurs gouvernants ou de leurs extrémistes, savent que ce statut d’Etat-tampon est fragile sur le long terme: d’une part, ils craignent aujourd’hui que les Etats-Unis ne reviennent à leur ancienne alliance avec l’Iran, situation qui les déforcerait considérablement, déplorent le chaos créé en Syrie, savent que les Etats-Unis ne peuvent indéfiniment froiser le monde arabo-musulman, où ils perdraient alors tous leurs avantages stratégiques. D’autre part, ces Israéliens lucides commencent à réfléchir sur la fragilité des mythes sionistes (pures fabrications?) avec l’école dite “post-sioniste” qui développe une critique argumentée de l’idéologie et des pratiques du sionisme réellement existant et s’interroge sur la substantialité réelle de toute la mythologie politique de l’Etat d’Israël, né au lendemain de la seconde guerre mondiale par l’afflux des “personnes déplacées”, suite aux expulsions et déportations qui ont tragiquement marqué les années 1945-1950, où l’Europe n’était qu’un champ de ruines où régnait la misère et la famine. Pour pallier ces doutes et ces inquiétudes, bien présentes dans la société israélienne, les forces sionistes qui structurent l’Etat hébreu comptent essentiellement sur deux facteurs: sur l’électorat juif des Etats-Unis et, surtout, pour faire poids et masse, sur les millions de “Christian Zionists” fanatisés par les téléprédicateurs d’Outre-Atlantique. Tant que les juifs d’Amérique et les “Christian Zionists” seront capables d’imposer et de ré-imposer, par leurs voix, une politique pro-israélienne aux Etats-Unis, le rêve sioniste des innombrables juifs jadis manipulés par les grandes puissances restera réalisable mais dans la douleur et dans une tension permanente, harassante, décourageante.

Robert Steuckers.

(Forest-Flotzenberg, Fessevillers, Genève & Nerniers, avril 2010; rédaction finale: mars 2013).

Bibliographie:

Delphine BENICHOU (éd.), Le sionisme dans les textes, CNRS Editions, Paris, 2008.

Alain BOYER, Les origines du sionisme, PUF, Paris, 1988.

Gudrun KRÄMER, Geschichte Palästinas – Von der osmanischen Eroberung bis zur Gründung des Staates Israel, Verlag C. H. Beck, München, 2002-2006 (5. Auflage).

Shlomo SAND, Les mots et la terre – Les intellectuels en Israël, Flammarion, coll. “Champs”, n°950, Paris, 2010.

Colin SHINDLER, Israel, Likud and the Zionist Dream – Power, Politics and Ideology from Begin to Netanyahu, I. B. Tauris, London, 1995.

Zeev STERNHELL, Aux origines d’Israël, Gallimard, coll. “Folio”, n°132, Paris, 1996-2005.

 

vendredi, 03 janvier 2014

Réflexions sur les “chrétiens sionistes”

 

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Wolfgang CASPART:

Réflexions sur les “chrétiens sionistes”

 

Les “chrétiens sionistes” aux Etats-Unis sont notamment ces évangélistes qui prêchent un lien indéfectible entre Washington et Tel Aviv

 

Les calvinistes puritains partagent avec les juifs le culte de l’Ancien Testament. Ce n’est pas simplement une option religieuse, donc gentiment confinée à la sphère religieuse, mais une option bel et bien sécularisée qui a des retombées immédiates dans le domaine du politique. La plupart des calvinistes, tout comme une majorité de juifs, vivent aujourd’hui aux Etats-Unis, ce qui fait que les intérêts calvinistes et juifs ont de plus en plus tendance à fusionner Outre-Atlantique. Ceux qui ne veulent pas comprendre cette collusion d’intérêts se condamnent à ne pas comprendre les orientations spirituelles et politiques de l’hegemon mondial.

 

Certes, le christianisme ne saurait être perçu comme un bloc homogène et unitaire; cette remarque vaut également pour le calvinisme qui se subdivise en de nombreuses églises libres. Le judaïsme n’est pas davantage homogène. A l’intérieur du calvinisme, toutes tendances confondues, ce sont toutefois les évangélistes fondamentalistes qui donnent le ton, tout comme le font les sionistes au sein du judaïsme. Pour de nombreux observateurs des faits religieux et politiques, l’Amérique, et non pas l’Etat d’Israël, est le véritable siège du sionisme dans le monde (cf. Michael Collins Piper, “The New Jerusalem. Zionist Power in America”, Sisyphus Press, 2005).

 

Les “Evangelicals” sont des calvinistes qui, sur la base de leur doctrine, se sentent proches des juifs en général et des sionistes en particulier. Pour les juifs sionistes, Israël est la patrie de tous les juifs; les “Evangelicals”, eux, voient les juifs et Israël sous un angle très spécial, celui du “pré-millénarisme”. Celui-ci s’explique suit à une lecture fondamentaliste de l’Apocalypse de Saint Jean dans le Nouveau Testament. La philosophie chrétienne de l’histoire —qui s’en déduit— voit le monde actuel plongé dans le péché comme un monde soumis au Diable, au Semeur de confusion, au Séducteur, à Satan, Lucifer, l’Antéchrist, etc. A son tour, cette vision d’un monde soumis au Diable implique que ce monde doit passer par un temps de troubles et de désordres graves avant qu’une catastrophe apocalyptique le détruise et amène le retour triomphal du Christ. Après le retour du Christ, la première parousie, le Diable sera pris prisonnier et le Règne de Mille Ans, le “Millenium” des justes et des saints, adviendra. Mais le Diable va brièvement échapper à sa captivité puis sera vaincu et définitivement exilé dans les enfers. Le Christ reviendra alors une seconde fois (deuxième parousie) et prononcera le Jugement Dernier.

 

Les pré-millénaristes parmi les “Evangelicals” voient dès lors le retour des juifs en Palestine comme le préliminaire nécessaire à l’imminent premier retour du Christ. C’est pour cette raison qu’ils favorisent le retour des juifs en Palestine: ce retour précipitera le retour du Christ. Selon Ezéchiel 37:12, l’alliance vétéro-testamentaire repose sur la promesse suivante: “Ainsi parle le Seigneur votre Dieu: voyez, je veux ouvrir vos tombeaux et vous en sortir, ô mon peuple, et sortis de vos tombeaux, je vous mènerai au pays d’Israël”.

 

Le site visé par la promesse  dans Ezéchiel est donc Jérusalem ou Israël: les pré-millénaristes fondamentalistes chrétiens, de manière bien étonnante, ne prennent pas pour argent comptant les paroles du Christ dans l’Evangile de Saint Jean 18:36, qui disent: “Mon royaume n’est pas de ce monde”. Ils ignorent tout autant le verset de l’Apocalypse (21:2), où l’on peut lire: “Et moi, Jean, je vis aussi la ville sainte, Jérusalem nouvelle, descendre du ciel d’auprès de Dieu”. Dans l’“Epitre aux Hébreux” (12:22): “Vous vous êtes approchés, vous, de la Montagne de Sion avec la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste”. Propos similaires dans l’”Epitre aux Galates” (4:26): “Mais la Jérusalem d’en haut est libre, et c’est elle notre mère”. On peut déduire de ces textes que la Jérusalem et l’Israël du futur, d’un point de vue chrétien, ne sont pas des lieux géographiques, comme le veut le sionisme des “Evangelicals”, mais des lieux métaphysiques. Les prises de positions des “Evangelicals” pour l’occupation factuelle du territoire palestinien par les sionistes ne correspondent donc pas aux paroles du Nouveau Testament.

 

Il faut rappeler ici la parole de Jésus, rapportée par l’Evangile selon Saint Matthieu (5:17): “Ne croyez pas que je sois venu abolir la loi ou les prophètes, mais pour les accomplir”. Cette parole doit se définir dans une perspective chrétienne selon l’Evangile de Saint Jean (14:6): “Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi”. A quoi s’joute les mots de l’”Epitre aux Romains” (13:10): “La charité est donc l’accomplissement plenier de la Loi”. Les calvinistes étant théoriquement chrétiens, donc lecteurs du Nouveau Testament, on ne voit donc pas comment ils peuvent en arriver à penser “que chaque grain de sable entre, d’une part, le Jourdain et la Mer Morte, et, d’autre part, la Méditerranée appartient aux juifs et que, donc, leur appartiennent aussi la Cisjordanie et Gaza”. Et qu’ils puissent faire leur ce slogan: “Nous nous battons pour le droit à posséder tous les pays que Dieu a donné à Abraham au moment de l’Alliance il y a 4000 ans, pays qui appartiennent dès lors à Israël... Il n’y a pas de Palestiniens” (cf.: Jane Lampman, “Mixing Prophecy and Politics”, in: “Christian Science Monitor”, 7 juillet 2004). L’interprétation des calvinistes est donc contraire aux principes du Nouveau Testament.

 

En constatant cette interprétation sioniste et non néo-testamentaire des écritures, on ne s’étonnera pas que “les chrétiens sionistes américains, avec les forces armées israéliennes, sont les derniers bastions actifs de l’Etat hébreu” (cf.: Daniel Pipes, “[Christian Zionism]: Israel’s Best Weapon”, in: New York Post (on line)”, 15 juillet 2003). Le chef des services de communication de Benjamin Netanyahou écrivait un jour: “Remercions Dieu de l’existence des chrétiens sionistes” (cf. Michael Freund, “Christian Zionists Key to Continued U.S. Support for Israel”, in: “Jewish Press (on line)”, 27 décembre 2006).

 

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Que cela nous plaise ou non, l’avenir des relations entre Israël et les Etats-Unis dépend finalement moins des juifs américains que des chrétiens américains”. Le représentant de la majorité républicaine, Richard Armey, déclarait naguère être satifsfait “du fait qu’Israël s’empare de toute la Cisjordanie” et ne s’est distancé que bien plus tard des paroles qu’il avait ajoutées à ses propos pro-israéliens, paroles selon lesquelles “les Palestiniens devaient partir” (cf. Matthew Engel, “Senior Republican Calls on Israel to Expel West Bank Arabs”, in: “The Guardian”, 4 mai 2002).

 

Certes, il faut bien admettre aussi que “la plupart des juifs américains ne veulent rien avoir à faire avec la nouvelle droite chrétienne” (cf. Naomi M. Cohen, “Dual Loyalties: Zionism and Liberalism” in Allon Gal, “Envisionning Israel. The Changing Ideals and Images of American Jews”, Magnes Press & Wayne State University Press, Jerusalem/Detroit, 1996, p. 326). Ces juifs, qui ne supportent pas les discours enflammés de la nouvelle droite chrétienne des “Evangelicals”, estiment que coopérer avec ceux-ci équivaut à forger une “alliance malsaine” (cf. Jo-Ann Mort, “An Unholy Alliance in Support of Israel”, Los Angeles Times, 19 mai 2002). Par ailleurs, les sionistes eux-mêmes craignent les intentions missionnaires qui se profilent derrière les déclarations d’amour des “Evangelicals” (cf. Gershom Gorenberg, “The End of Days: Fundamentalism and the Struggle for the Temple Mount”, Free Press, New York, 2000).

 

Finalement, malgré ces réticences perceptibles dans la communauté juive, David Harris, directeur de l’American Jewish Committee, voit les choses sous un angle pragmatique: “La fin des temps peut advenir demain mais ce qui importe aujourd’hui, c’est Israël” (cité par Bill Broadway, “The Evangelical-Israeli Connection: Scripture Inspires Many Christian to Support Zionism Politically, Financially”, in “Washington Post”, 27 mars 2004).

 

40 millions de personnes se déclarent “Evangelical Christians” dans le camp de la droite américaine et des Républicains (cf. John J. Mearsheimer et Stepehn M. Walt, “Die Israel-Lobby. Wie die amerikanische Aussenpolitik beeinflusst wird”, Campus verlag, Frankfurt am Main, 2007). Ces quarante millions d’“Evangelicals” travaillent au projet du “siècle juif” (cf. Yuri Slezkine, “Das jüdische Jahrhundert”, Vandenhoeck und Rupprecht, Göttingen, 2006). Selon d’autres sources, il y aurait 70 millions d’“Evangelicals” aux Etats-Unis et même 600 millions dans le monde entier (cf. Craig Nelson, “Christian Zionists: Evangelicals a New Lifeline for Israelis”, in “Atlanta Journal-Constitution”, 25 décembre 2003). A ce poids considérable, il faut ajouter les tendances généralement philo-sémitiques des églises évangéliques plus conventionnelles ou d’autres confessions chrétiennes après 1945.

 

Concluson: les “Evangelicals” qui s’engagent politiquement aux Etats-Unis, hegemon dans le monde, prennent parti pour l’un des deux grands partis, en l’occurrence les Républicains, tandis que la majorité des juifs opte pour les Démocrates (cf. Jeffrey Helmreich, “Amerikas Juden sind mehrheitlich für Obama”, in “Mittelbayerische Zeitung”, 28 juin 2012). Donc en Amérique, croit-on, dur comme fer, que le Millenium ou l’accomplissement des prophéties de l’Ancien Testament sont sur le point de devenir très bientôt réalité?

 

Wolfgang CASPART.

(article paru dans “zur Zeit”, Vienne, http://www.zurzeit.at , n°6/2013).

mercredi, 20 février 2013

Towards a Christian Zionist Foreign Policy

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Towards a Christian Zionist Foreign Policy

By Philip Giraldi

Ex: http://attackthesystem.com/

Countries frequently define themselves by what they believe to be true. When reality and belief conflict that definition might well be referred to as a “national myth.” In the United States many believe that there exists a constitutionally mandated strict separation between religion and government. In practice, however, that separation has never really existed except insofar as Americans are free to practice whatever religion they choose or even none at all. The nation’s dominant religion Christianity has in fact shaped government policy in many important areas since the founding of the republic. Tax exemption for the churches would be one example of legislation favoring organized religion while in the nineteenth century the governments of a number of American states had religious clauses written into their constitutions and also collected special tithe taxes to support the locally dominant Christian denomination. The practice only ended with the passage of the Fourteenth Amendment in 1868.

Christian Zionism is not a religion per se, but rather a set of beliefs based on interpretations of specific parts of the Bible – notably the book of Revelations and parts of Ezekiel, Daniel, and Isaiah – that has made the return of the Jews to the Holy Land a precondition for the Second Coming of Christ. The belief that Israel is essential to the process has led to the fusion of Christianity with Zionism, hence the name of the movement.

 

The political significance of this viewpoint is enormous, meaning that a large block of Christians promotes a non-reality based foreign policy based on a controversial interpretation of the Bible that it embraces with considerable passion. Christian Zionism by definition consists of Christians (normally Protestant evangelicals) who believe that once the conditions are met for the second coming of Jesus Christ all true believers will be raptured up into heaven, though details of the sequence of events and timing are disputed. Many Christian Zionists believe that the Second Coming will happen soon, within one generation of the return of the Jews to the Holy Land, so they support the government and people of Israel completely and unconditionally in all that they do, to include fulfilling the prophecy through encouraging the expansion by force into all of historic Judea, which would include what remains of the Palestinian West Bank.

One other aspect of Christian Zionism is the belief by some that the end times, as they refer to it, will be preceded by world government (conveniently seen as the United Nations) and years of war and turmoil with a final enormous battle pitting the forces of good against the forces of evil in which all the evildoers will be destroyed and the righteous will be triumphant. The battle is supposed to take place at Armageddon, an undisclosed location in the Middle East that some believe is derived from the name of the ancient Hittite capital Megiddo.

That Christian Zionists believe the return of Christ is imminent and that there will be major wars and a final battle in the Middle East preceding it would appear to be irrelevant to most of us, but it has in this case real world consequences because of their involvement in American politics and most particularly in some aspects of US foreign policy. Evangelical Christians began to mobilize and became a potent political force in the late 1970s and 1980s in reaction to moves by the Jimmy Carter White House to challenge the tax status of independent Christian schools.

Many of the issues Christian Zionists initially supported were sectarian, reflected in their antipathy towards Catholicism which they describe as the “whore of Babylon” and their belief that the Pope is the Antichrist, or social, such as being anti-abortion and hostile to homosexual rights, but there was also from the start an abhorrence of “Godless Communism” and an identification with Israel. It was widely held that Israel should be protected above and beyond the normal American foreign policy interests in the Middle East region. Through the creation of organizations like the two million strong Christians United for Israel (CUFI), headed by Pastor John Hagee, this focus on Israel has obtained a mechanism for uniting evangelicals and providing them with the means and direction to lobby congress to continue high levels of aid for Israel and also to resist any attempts to challenge support for Israeli policies. This mechanism was most recently observed in action on January 28th when 200 CUFI leaders were flown to Washington all expenses paid by an “anonymous donor” to lobby their Senators against the confirmation of Chuck Hagel as Secretary of Defense, Hagel having been criticized as being less than completely supportive of Israel and hesitant to go to war with Iran on Israel’s behalf.

Though it is an organization that defines itself as Christian, CUFI supports war against Iran as a precursor to total global conflict. Hagee explains “The United States must join Israel in a pre-emptive military strike against Iran to fulfill God’s plan for both Israel and the West… a biblically prophesied end-time confrontation with Iran, which will lead to the Rapture, Tribulation, and Second Coming of Christ.”

Most evangelicals, even if they do not share all of the detailed CUFI agenda, favor Israel and have made Israel’s enemies their own. This focus on Israel coming from possibly as many as 60 million evangelicals is seen most powerfully in the Republican Party, which caters to their views, but it also has a certain appeal among Democrats. It is concentrated in a number of southern and border states, the Bible belt, which has meant that few congressmen from those states feel it to be in their interests to question what Israel does. In fact, they find it in their interests to do the contrary and frequently express loud and long their love for Israel, which may or may not be genuine. Some congressmen, including former Speaker of the House Dick Armey of Texas, embrace the full Armageddonist agenda, leading one to wonder why anyone would vote for a politician who fervently desires to bring about the end of the world.

This powerful block of pro-Israel sentiment provides a free pass to the illegal Israeli settlements and also to Tel Aviv’s brutal foreign policy vis-à-vis its neighbors, which has damaged other American interests in the region. It also means that any consideration of Arabs as aggrieved parties in the Middle Eastern fandango is seldom expressed, even though many of the Arabs being victimized by the Israel-centric policies are in fact Christian.

John Hagee has stated falsely that the Quran calls on all Muslims to kills Christians and Jews. The persistent identification of Muslims as enemies of Israel and also as supporters of terrorism by evangelicals in general and Christian Zionists in particular has led to a quite natural growth in Islamophobia in the United States. This prejudice arises from the perception that Islam is integral to the problems with the Arab world, leading to an unfortunate surge in those Americans, including congressmen like Peter King and Michelle Bachmann, who believe that Islam is an evil religion and that Muslims should be monitored by the authorities and even denied some basic civil rights or deported because they cannot be trusted. Because the Armageddonists believe that there will be a final confrontation with the forces of evil it has been necessary to identify the enemy and that enemy is, all too often, characterized as Muslims. Hagee has construed this conflict against the Muslim world as ongoing resistance to satanic proxies opposing the end time.

Neoconservatives, who most often might best be described as non-religious, were quick to identify the advantages derived from linking their cause with the evangelicals and established strong ties during the Reagan administration. Israel also recognized the benefits to be derived from a close and continuing relationship with the Christian Zionists even though Israel’s leaders almost certainly hold their noses while doing so, finding the return of Christ eschatology invidious as all Jews but those who convert will also die and go to hell when the world ends. When groups like CUFI organize their mass pilgrimages to visit Israel they spend all their time in Israel, often refusing to visit major Christian holy sites in Arab areas and never meeting with Palestinian Christians, whom they do not recognize as coreligionists. When the Christian Zionists gather in Jerusalem, they are often feted by Israeli leaders, including Prime Minister Benjamin Netanyahu, who frequently speak to them.

Some evangelical leaders to include John Hagee have also benefited from the relationship directly in other ways. The Israeli government has presented Hagee with a Lear executive jet, complete with crew, to make his evangelizing more comfortable. It has, of course, been suggested that American aid and tax free charitable contributions to Israel are thus recycled to support those groups that inevitably are willing to provide still more aid until the well in Washington finally runs dry.

So the bottom line is that the Christian Zionist involvement in American politics on behalf of the Washington’s relationship with Israel does not serve any conceivable U.S. national interests unless one assumes that Israel and the United States are essentially the same polity, which is unsustainable. On the contrary, the Christian Zionist politicizing has been a major element in supporting the generally obtuse U.S. foreign policy in the Middle East region and vis-à-vis other Muslim countries, a policy that has contributed to at least four wars while making the world a more dangerous place for all Americans. Christian Zionist promoted foreign policy serves a particularly narrowly construed parochial interest that, ironically, is intended to do whatever it takes to bring about the end of the world, possibly a victory for gentlemen like Pastor John Hagee if his interpretation of the bible is correct, but undeniably a disaster for the rest of us.

samedi, 06 octobre 2012

Shlomo Sand: Comment le peuple juif fut inventé

Shlomo Sand:

Comment le peuple juif fut inventé

 

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jeudi, 06 octobre 2011

Israël et les exigences surréalistes du Pentagone

Israël et les exigences surréalistes du Pentagone

 
04/10/2011 - Ex:  www.dedefensa.org

     
Quelques remarques du nouveau secrétaire à la défense Leon Panetta, hier en route pour une visite en Israël (avant un passage à Bruxelles, pour une réunion des ministres de la défense de l’OTAN), ont douloureusement résonné dans les oreilles des dirigeants israéliens. En un mot, Panetta reproche à Israël son isolement actuel, à cause du “printemps arabe“ et tout ce qui s’ensuit, et recommande avec insistance à ce pays de reprendre les négociations avec les Palestiniens et de se réconcilier avec l’Egypte et la Turquie. Venant du Pentagone et des USA, cette recommandation peut sembler assez peu ordinaire, notamment à cause de la politique erratique et maladroite de Washington vis-à-vis des derniers événements, qui a constitué une des causes de l’isolement d’Israël, peut-être la cause fondamentale de cet isolement. Mais cette sorte de contradiction typiquement washingtonienne n’est ni la première, ni la dernière.
Le Guardian du 3 octobre 2011 fait rapport des déclarations de Panetta.
«In a blunt assessment made by Leon Panetta, the US defence secretary, as he was travelling to Israel, he said the ongoing upheaval in the Middle East made it critical for the Israelis to find ways to communicate with other nations in the region in order to have stability. “There's not much question in my mind that they maintain that [military] edge,” Panetta told reporters travelling with him. “But the question you have to ask: is it enough to maintain a military edge if you're isolating yourself in the diplomatic arena? Real security can only be achieved by both a strong diplomatic effort as well as a strong effort to project your military strength.”[…]
»The Pentagon chief said Israel risks eroding its own security if it does not reach out to its neighbours. “It's pretty clear that at this dramatic time in the Middle East, when there have been so many changes, that it is not a good situation for Israel to become increasingly isolated. And that's what's happening,” he said. Panetta said the most important thing was for Israel and its neighbours “to try to develop better relationships so in the very least they can communicate with each other rather than taking these issues to the Streets”.»
Les milieux les plus “durs” israéliens ont réagi avec amertume et vigueur aux propos de Panetta. Encore une fois, DEBKAFiles (le 3 octobre 2011) donne une bonne idée de ces réactions, surtout venues des milieux de la sécurité nationale. L’argumentation développée se fait en plusieurs points.
 
 
• Si Israël est isolé, ce qui est un fait indéniable, c’est parce que ce pays a suivi les recommandations de Washington (ce que DEBKAFiles a d’ailleurs souvent reproché à Netanyahou), en suivant la politique de Washington. D’ailleurs, observe justement DEBKAFiles, «The United States – and not just Israel – appears to be increasingly isolated in the Middle East with the resulting curtailment of its leeway for determining events.» En recommandant une ligne plutôt conciliante mais surtout hésitante et incertaine vis-à-vis du “printemps arabe”, – comme eux-mêmes faisaient, – les USA ont ôté à Israël l’argument de sa fermeté et de sa force sans rien gagner en échange, mais au contraire en paraissant faible et désorienté. DEBKAFiles cite en exemple, comme attitude exemplaire vis-à-vis du “printemps arabe”, la politique suivie par l’Arabie Saoudite, – extrêmement ferme.
DEBKAFiles va jusqu’à accuser les USA d’une complète hypocrisie, interprétant (un peu audacieusement) la phrase de Panetta «Real security can only be achieved by both a strong diplomatic effort as well as a strong effort to project your military strength» comme un reproche fait à Israël de n’avoir pas attaqué l’Iran pour avoir une position de force, alors que les USA empêchent Israël d’attaquer l’Iran depuis 2007. C’est une interprétation extrêmement sollicitée, qui marque surtout le reproche majeur de ces milieux extrémistes israéliens contre le gouvernement israélien de n’avoir pas réalisé cette opération.
• Le reproche majeur de l’hypocrisie et de l’incohérence US fait dans cette appréciation se trouve substantivée notamment dans la critique de l’actuelle politique US en Libye, en Syrie et en Egypte. Dans ces trois pays, les USA sont accusés par les Israéliens de soutenir les islamistes, ceux qui se trouvent chez les “rebelles” libyens, ceux qu’on trouve dans l’opposition syrienne anti-Assad, et les Frères Musulmans en Egypte que les USA voudraient voir participer au prochain gouvernement. Ce faisant, les USA affaiblissent et éloignent leurs “alliés naturels”, comme les militaires en Egypte, qui sont découragés par cette politique US de maintenir la “ligne Moubarak”.
• Enfin, il y a le reproche majeur d’avoir “assigné” à Erdogan et à la Turquie un rôle majeur d’influence dans les pays arabes, basé sur un antagonisme forcené contre Israël. («President Obama chose to assign Turkish Prime Minister Tayyip Erdogan the role of bridge to Muslim forces in the region.») De ce point de vue, selon cette perception israélienne, la Turquie remplacerait, dans les plans US, l’Iran qui polarisait jusqu’alors l’opposition anti-Israël. L’argument est faiblard, sinon complètement sollicitée : les USA ne peuvent à la fois être complètement isolés au Moyen-Orient, exactement comme Israël, et en même temps continuer à manipuler leurs pions comme s’ils dominaient le Moyen-Orient ; à cet égard, on jugera un peu court, sinon complètement déformé par la vindicte perceptible dans l'argumentation, l'affirmation concernant Erdogan, – lequel est tout ce qu'on veut sauf un “pion” dans les mains de quiconque, surtout des USA…
(On notera que dans une autre analyse, le 2 octobre 2011, DEBKAFiles rapporte que la marine turque effectue des manœuvres de pression et d’intimidation contre des navires marchands israéliens en Méditerranée orientale, près de Chypre. DEBKAFiles écrit que l’OTAN est très inquiète de la chose, ainsi que les USA. Le SACEUR de l’OTAN, l’amiral Stavridis s’est rendu en Isaël puis en Turquie, et a demandé aux Turcs qu’ils cessent cette politique de pression. DEBKAFiles note : «Turkish harassment of Israeli cargo vessels began after those interchanges, indicating that the Erdogan government has no intention of meeting exasperated US and NATO efforts to cool rising tensions in the eastern Mediterranean.» C’est au moins la démonstration de la très faible influence des USA sur la Turquie, ridiculisant l’affirmation ci-dessus qu’Erdogan est un pion des USA…)
Cet incident de l'intervention de Panetta, pris par les Israéliens activistes et extrémistes pour un double jeu hypocrite et cynique des USA, prouverait plutôt, à notre sens, que même les Israéliens n’ont pas vraiment perçu la façon dont fonctionne aujourd’hui le pouvoir aux USA. Il n’y a aucune ligne directrice, aucun “double jeu”, etc., notamment vis-à-vis de la situation au Moyen-Orient et du “printemps arabe”. On a pu avoir une belle démonstration de cette impuissance et de ce désordre complets, assortis de la fragmentation complète du pouvoir US. Devant l’ONU, Obama fait un discours, sur la question palestinienne, que Netanyahou aurait pu reprendre mot pour mot. Ce n’est pas de l’hypocrisie, c’est le plus complet cynisme qui règne, dans le chef d’un président réduit aux acquêts minables de la recherche d’un électorat pour une réélection bien compromise : Obama n’a fait ce discours que pour rassembler l’électorat juif aux USA, et les fortunes juives pour son soutien – absolument rien d’autre en fait de “pensée politique”. La “sortie” de Panetta, elle, concerne les intérêts du Pentagone, qui veut garder ses liens avec Israël mais qui veut aussi, aussi fortement et peut-être même plus, éviter une détérioration supplémentaire de ses liens avec ces deux pays qui étaient deux formidables points d’appui stratégiques de sa politique au Moyen-Orient : l’Egypte et la Turquie. Panetta demande donc l’impossible à Israël, dans une situation où les USA portent évidemment l’essentiel des responsabilités pour ce qui est des influences extérieures (on ne parle pas de la dynamique intérieure du “printemps arabe” qui est un facteur également essentiel et ne dépend certainement pas d’une hypothétique “politique US”) ; “l’impossible”, c’est-à-dire rester l’Israël dont le Pentagone a besoin, puissant et militairement dominateur au Moyen-Orient, et en même temps suffisamment arrangeant pour se réconcilier avec la Turquie et l’Egypte.
“Arrangeant” avec la Turquie, par exemple ? Panetta sait-il que pour se réconcilier avec la Turquie, Israël doit aller a Canossa et s’excuser platement auprès d’Erdogan, à propos de l’affaire de la “flottille de la liberté”, c’est-à-dire perdre la face par rapport à ses positions antérieures, – et perdre évidemment et complètement, du même coup, les pauvres restes de sa position de force au Moyen-Orient… Mais Panetta se fout de cette sorte de contradictions, puisqu’il obéit au Système, dans ce cas suivant les recommandations de la bureaucratie du Pentagone préoccupée de sa seule logique interne de puissance, sans soucis des vérités extérieures. De toutes les façons, les pressions US, c’est-à-dire du Pentagone, sur Israël, aboutissent à cette sorte d’impasse par contradiction directe. Le Pentagone veut conserver des positions de puissance qu’il n’a d’ores et déjà plus et, pour cela, fait porter le poids de cette contradiction sur ses alliés les plus privilégiés, disons sur ses “annexes extérieures” dont Israël est la plus évidente, en exigeant pour ce cas d’Israël qu’il rétablisse à lui seul la situation antérieure. La mission que Panetta assigne à Israël est donc complètement absurde et (bis repetitat) Panetta s’en fout puisque cet aspect-là de la logique des situations ne l’intéresse pas.
La même indifférence à la logique des situations, aux véritables intérêts et enjeux, pousse effectivement les USA à soutenir les islamistes, éventuellement en Syrie, en Libye et en Egypte, plongeant Israël dans l’horreur supplémentaire d’une contradiction qui détruit toute sa politique maximaliste développée depuis 9/11 et réduit à mesure sa “position de force” qu’il devrait pourtant conserver selon les “plans” (!) US. Washington répondrait éventuellement, s’il reconnaissait honnêtement sa contradiction politique, qu’il n’a pas le choix devant l’ampleur des dégâts et les pressions politiques, – ce qui, d’ailleurs, serait reconnaître sa déroute et son isolement dans la région. Israël reconnaîtrait alors qu’il se trouve désormais dans une situation où sa sécurité militaire et matérielle (la quincaillerie militaire, sur laquelle est basée toute sa politique de force) dépend d’une force militaro-politique (les USA) en complètes perdition et déroute, qui lance des initiatives désespérées dans tous les sens, sans ne tenir plus aucun compte des intérêts réels de ses “annexes”, dont Israël est le fleuron.
Curieuse dichotomie : dans la rhétorique, un soutien presque hystérique de Washington à Israël, aussi bien du pauvre président Obama que du Congrès plongé dans le désordre de son impuissance face aux questions les plus pressantes (économie, maintien de la cohésion intérieure). (Cela, avec l’habituelle aide financière venue d’une dette colossale et d’une monnaie réduite au papier sur lequel elle est imprimée, et l’obligation d’acheter la quincaillerie US.) Dans la vérité de la situation, une force de pression grandissante sur Israël pour une politique constituée d’axes absolument contradictoires, donc une politique impossible à appliquer. Le soutien de Washington à Israël tend à faire de plus en plus partie d’un univers qui n'a plus le moindre rapport, même fortuit, avec la vérité de la situation, tandis que le “printemps arabe”, lui, met en pleine lumière cette “vérité de la situation”. Israël est en train de mesurer combien le pouvoir d’influence (le lobbying à Washington) poussé à l’extrême, basé sur la corruption et la rhétorique terroriste, contient, à son terme, un double pervers qui contient peut-être, lui, les germes de sa perte.

vendredi, 19 août 2011

The New Jewish Question of Guillaume Faye

The New Jewish Question of Guillaume Faye

By Michael O'MEARA

Ex: http://www.counter-currents.com/

Guillaume Faye
La nouvelle question juive  
Chevaigné: Editions du Lore, 2007

“I don’t know whether God loves or hates the English; I only know that they must be driven out of France.”— Saint Joan

In his critique of this controversial book, the Swiss “revisionist” scholar Jürgen Graf, now exiled in Russia, writes that Guillaume Faye has permanently discredited himself “in racial nationalist and nationalist circles worthy of the name.”[1] The reason: His “dishonest” and defamatory attack on those who challenge the Holocaust story and on those who uphold the traditional “Judeophobic” orientation of the nationalist right.

“The New Jewish Question” (henceforth NJQ) may indeed mark the end of Faye’s career as a leading identitarian and nationalist ideologue among certain segments of the racially conscious community—though by no means all of it, maybe not even the majority of it. For the sharp differences pitting the Holocaust-debunking exile against the militant anti-Islamic Frenchman reflect differences that divide nationalists throughout Europe, as long-standing historical-theoretical identities closely associated with the anti-liberal wing of the nationalist right clash with the electoral imperatives of national-populist parties endeavoring to stem the pro-immigrant policies of their respective states.[2] The white man’s future may well hinge on how these differences are resolved.

The Argument

Faye’s anti-revisionism is part of a larger argument related to what he claims is the changing Jewish relationship to white society.

Central to this change is the Third World colonization of the European heartland—and all the world-destroying effects that have followed in its wake.

Since the late 1990s, as the colonizers became bolder and more assertive, attacks on French Jews (in the form of vandalized synagogues, school violence, murders, etc.) have steadily risen. The Mainstream Media routinely denounce the “radical right,” but these attacks are largely the work of Muslim immigrants. Still of “low intensity,” Faye claims they are symptomatic of a new, more virulent anti-Semitism, which mixes anti-Zionist politics with the Koran’s traditional ethnocidal aversion to the Jews, threatening in this way to move Europe ever closer to Eurabia.

In appraising this new phenomenon, Faye, who has long been persecuted by Jewish advocacy groups for his nationalism, professes to be neither pro- nor anti-Jewish. His single avowed concern as a writer and activist is the survival of Europe. In his treatment of the NJQ, he thus fully acknowledges that the Jews are not “white” (i.e., not of Aryan or European Christian descent) and that their relationship to European society has often been negatively affected by their “schizophrenic” attitude toward Europeans (or what Kevin MacDonald more forthrightly calls their ethnocentric “double standard”).[3] He also acknowledges that the Jewish Question was once “pivotal to the issue of European, especially French, identity, for, historically, the Jews were seen as the métèque [i.e., the ‘wog,’ the ‘wop,’ the offensive foreigner] who threatened the corruption of the nation’s blood and morals” (p. 23).

Given the present Third-World inundation, the Jews, he argues, can no longer seriously be taken as either an alien menace or a métèque, especially considering that more and more of them are allegedly beginning to doubt the wisdom of open borders. Not a few nationalists and identitarians have consequently abandoned their traditional anti-Semitism. The Vlaams Belang, Europe’s most successful nationalist formation, has, for example, formed a tacit alliance with the Jewish community of Flanders in order to stem the nation’s Islamization; he also cites the Jews’ role in Jared Taylor’s American Renaissance and could have mentioned Griffin’s BNP, Fini’s National Alliance, Kjaersgaard’s Danish People’s Party, and many others.

Anti-Jewish sentiment nevertheless persists on the nationalist right, in Faye’s view distorting its movement and distracting it from its principal tasks.

He also claims that nationalist and far right anti-Semites have, in face of the invasion, altered their view somewhat, seeing Jews less as an immediate physical threat than a pernicious influence—as Zionism and elite social engineering—responsible for policies, immigration preeminently, that threaten white survival. Contemporary anti-Jewish ideology, as a result, now rests on three general tenets: That (1) the Jews dominate the world through the cultural and financial powers they wield; that (2) they are the principal force promoting white decadence; and that (3) they immunize themselves to criticism through their manipulation of the Holocaust Story. Much of the NJQ seeks to refute these tenets, revealing not just their alleged political inappropriateness to the nationalist cause, but their role in occultating the challenges facing it. More specifically, the NJQ seeks to sever all association with historic anti-Semitism, the Third Reich, and everything else that might alienate whites from joining nationalists in repelling the Muslim advance. In the name of political realism, then, Faye makes a case for abandoning principles and positions that Graf, among others, considers essential to the nationalist project.

Decadence

The poorly researched and poorly argued case Faye makes in support of his argument, especially regarding the third tenet, is amply demonstrated in Graf’s review and need not be rehashed here. Two larger and equally serious questions raised by Faye do, however, deserve revisiting: Namely (1) are the Jews, traditional purveyors of anti-ethnic and anti-racial principles, the cause of the white man’s present decline, and (2) are the Jews, as the most powerful group in society, the principal enemy in the battle for white survival?

In respect to the first question, Faye says that though white or European decadence may have been promoted by certain Jewish intellectuals, its real origins lie in the inner recesses of the European soul—specifically in the secular and religious distillations of Christianity. Jews, in other words, have only exacerbated tendencies already indigenous to white life.

The French Catholic Church, he points out, dwarfs French Jewish efforts in promoting not just open borders, race mixing, and pro-immigrant policies, but cosmopolitanism, universalism, and a self-denying love of the Other.

Faye’s argument here is certainly correct in claiming that the ultimate responsibility for our race replacement lies with ourselves and that Christianity, along with its various secular offshoots (egalitarianism, individualism, universalism, etc.), has had a terrible effect on white identity, helping foster processes destructive of both the race’s organic and cultural substratum.

The problem with this aspect of his argument is that Catholicism, like other forms of Christianity, is a temporal institution subject to history. And as a historical subject, it has been different things in different periods. Thus it was that Bishop Turpin in La Chanson de Roland confronted the “Saracens” as a “Christian” warrior bearing the arms of the Frankish hero cult, while antebellum Episcopalians defended the legitimacy of negro slavery with chapter and verse. Even if the argument is only that the deep structure of Christian belief harbors an anti-white or anti-ethnic impetus, it still doesn’t explain why for centuries it served an opposite purpose. Finally, and most importantly, it was the secularization of Christian belief, associated with modernization, that provoked (or, at least, marked the beginning of) the “crisis of Western man” and the subsequent assault on the unique worth of his specific being—and not Christianity itself.[4]

In a similar way, this historical factor also affects the anti-Semitic argument. When Jew-hatred shed its religious forms in the latter part of the nineteenth century, becoming an “anti-Semitism” (implying a critique of Jewish behavior) instead of an anti-Judaism (implying a critique of Jewish religion), it did not explain why the Jews’ anti-gentile disposition (which, after all, had been around since the Hellenistic Age) was suddenly becoming hegemonic. Many of the great anti-Semites (e.g., Proudhon, Dühring, Drumont, Sombart, etc.) consequently directed their critique not just against the Jews but against those white elites who collaborated with them and especially against the emerging social-economic order which fostered such collaboration and made Jewish subversion possible. (Hence also the prominence of anti-Semites in nineteenth- and twentieth-century anti-modernist movements). The point here is that this people “that shall dwell alone” may have evolved a psychology destructively opposed to white society—a psychology, given its biological foundation, that transcends historical contingencies—but in itself this doesn’t explain why in one period Jews were fleeing pogroms and in another managing the White House.

Faye is much more convincing when he emphasizes those larger processes that turned Europeans against themselves, noting that the history leading to the white man’s present self-destruction—the history whose distant origins reside in the Renaissance, the Reformation, and the French Revolution and whose most imposing forms were philosophically expressed in the Enlightenment, politically in liberalism, and economically in capitalism—was part of a long, complex chain of causes and effects that cannot seriously be attributed to a Jewish conspiracy. Egalitarianism, human rights, materialism, individualism, and the categorical imperative, moreover, may all have been promoted by Jewish intellectuals at the white man’s expense, but to think that they are not preeminently products of European culture is possible only through an ignorance of that heritage. The sources of what Faye calls the present decay lie, as a consequence, as much in ourselves as elsewhere.[5] Since Jews, then, are only the occasional instrument of this historical subversion, they are no worse than the multitude of whites who also serve the subversive forces. To blame them for the predicament we’re in is not only false, Faye insists, but dishonorable.

There is a truth in this, just as vulgar or obsessive anti-Semitism which attributes all the white man’s woes to the “highly-ethnocentric, Christian-hating” Jews is something of a bugaboo, justifying its critics’ contempt. But there is nevertheless sound reason for seeing the forces assaulting white life and culture as Judaic in spirit—in the sense that they either stem directly from the Jews’ innate hostility to white existence, reflect the white man’s embrace of Jewish behavioral norms, represent what it means to be “modern” in Yuri Slezkine’s use of the term and “postmodern” in the current multicultural sense, or constitute part of the Jews’ historic campaign against Europe’s traditions, aristocracies, symbols, and transcendent values.[6] Relatedly it is hardly coincidental that for millennia European peoples designated the esprit juif—the spirit of “rule breakers, border crossers, and go-betweens”—as not just alien to their own, but destructive to their unique “synthesis of spirituality and virility.” (The more extreme forms of this designation went so far as to link Jews with “those cosmic forces which are destructive and evil and inimical to human life.”) This still doesn’t make the Jews the chief source of white decadence, and Faye is certainly correct in emphasizing that Europeans have never needed them to engage in ethnomasochist behavior—for the entire course of modern, especially twentieth-century, history has been cause enough. But it does suggest that white and Jewish spirits are fundamentally opposed and that the hegemony of the latter cannot but have a distorting effect on white being. Indeed, it is the white man’s alienation from his spirit that causes him, as Heidegger says, to “fall out of being” and thus into decay, decline, and decadence.[7]

Revealingly, Faye ignores the fact that anti-Semitism appears in virtually every period of European history. He understands the Jewish Question only as a facet of nineteenth- and early twentieth-century developments and does so without actually examining the nature of our increasingly Hebraicized world. Moreover, it is only the Jews’ “schizophrenia,” the divided loyalties they harbor toward Europe, that he sees as arousing European hostility and provoking gentile opposition. Though acknowledging the often negative offshoots of this “schizophrenia,” he also claims it is nowhere near as threatening as the menace posed by Islam and that it is frequently mitigated by the Jews’ identification with “Western Civilization.” Faye thus joins those nationalists who seek “freedom from history” in order to pursue anti-immigrant politics without being associated with the demobilizing tags of anti-Semitism, Nazism, and extremism, dismissing, in effect, the contention that it is the anathematization of these earlier expressions of European being that empowers and legitimatizes the system’s anti-European policies.

It would be historically unserious, I believe, to dispute Faye’s claim that the Jews are not wholly responsible for the white man’s decline. But at the same time it is quite another thing to then claim, as Faye does, that the Jewish Question is today passé and of no political interest to the struggle for white survival. There’s a difference he ignores between discarding the baggage of past failures and avoiding the challenges the past poses for the present. A case in point is the Holocaust Story, whose misrepresentation, as Graf, among many others, points out, is used to defame Europe’s greatest people, the Germans, demonizing not only their history and ethnos, but that of all Europeans. A European or white nationalist movement to stave off the race’s destruction by accepting this defamation and demonization, along with the lies, propaganda, and repression accompanying them, might arguably enhance its electoral prospects, but the proponents of such a system-accommodating movement never seem to concern themselves with the kind of “nationalism” it would represent or the sort of goals it could possibly achieve—or if it would actually be able to address the real sources of European decay. Following Heidegger, I would go further and argue that Europe and the “West” will never be reborn without the spiritual rebirth of the Germans and that this is impossible as long as they are forced to cower in the shadow of the Holocaust Story.

The Enemy

Of even greater concern for Faye is his belief that nationalists and identitarians fixated on the Jewish Question ignore the real enemy: The non-white, Muslim-led hordes encamped on Europe’s southern border who threaten to replace the indigenous European population.

Confronted with six million non-whites inside France and the millions to arrive in the near future, Faye argues that 600,000 French Jews (the largest Jewish community in Europe) are hardly an enemy. He even argues that the power and influence of France’s Jewish minority, virtually omnipotent in anti-Semitic eyes, are waning. Unlike the nineteenth and first half of the twentieth century, Jews no longer dominate the nation’s financial heights, having been supplanted by the holders of Anglo-American pension funds, Arab petro-dollars, and the new East Asian economies; he also stresses that none of the world’s top fifty banks are Jewish owned. Likewise, in French education, the judiciary, the unions, and the civil service, Jewish power is marginal and in French politics, ideas, and media, while still prominent, is hardly dominant. Possessing powers incommensurate with their demographic weight, these powers are not, then, what they once were. Future trends (world opinion’s increasingly negative image of Israel, European Islamization, and the rise of the East Asian powers and a non-Eurocentric world order, etc.), Faye insists, will exacerbate this tendency. At the same time, Jews are allegedly becoming less and less supportive of mass Third World immigration.[8] In a period when Europe is under assault by Islam, revisionism and other anti-Jewish engagements, he argues, are “a typical example of a phony problem, a strategy of avoidance, of taking shelter in the past” (p. 171).[9] Anti-Semitism, in a word, has become “an ideological relic of a dead past,” irrelevant to the great challenge posed by the rising tide of color.

I imagine TOQ readers will find this a strange argument, given that Jewish power in the United States has never been greater or more destructive and that even France, the one European country not completely subject to American hegemony, has recently been captured by “semi-neocons.”[10] How, then, can Faye, given his history and publishing record, make such a claim?  One obvious reason, touched on above, is that anti-Jewish politics have the effect of politically marginalizing nationalists and that for them to break out of their ghetto they need to conform to the system’s underlying principles or else risk continued irrelevance. His argument (which is not entirely wrong) nevertheless rests on the assumption that the European situation is roughly analogous to the American one. Jewish power in Europe, however, has never been as great as its American counterpart and has a different nature, for it is a product of the American-centric system introduced in 1945—a system, I would argue, whose deracinating, globalizing, and totalizing economic and technological tendencies are preeminently Jewish, though it takes an ostensibly American form (Graf describes it as “a Frankenstein monster with a non-Jewish body and a Jewish head”).[11]

Given the power of this system’s centripetal forces and the degree to which the old European order was destroyed during the Second World War (and thus the degree to which it is no longer possible to speak of Europe as an autonomous actor), Faye in my view underestimates the external (American) sources of Jewish influence. For this system—which today subjects the entire planet to its “democratic” terrorism—is geared to the transnational imperatives of U.S. planners, which has the effect of subordinating Europe to its inherently Judeo-American logic. When Faye points out that France’s pro-immigration policies were mainly the work of gentiles and that countries like Sweden, Ireland, and Spain, with negligible or non-existent Jewish communities, have enacted similar ethnocidal policies, he is quite right to argue that Jewish involvement, if any, was peripheral. Nevertheless, the anti-European system prompting the implementation of these policies—the system which transferred sovereignty from the nation-state to the New World’s global economic order—is very much Jewish in depriving whites of everything that might prevent their submersion in its great coffee-colored market.[12] In effect, Europe’s philosemitic policies are facets of the “invisible empire” to which its comprador elites are irreparably tied, and this empire (with its liberal-capitalist impetus and often Jewish leadership) is inherently disposed to destroying the white man’s “racial and blood values.” Faye, in fact, has himself in numerous previous works emphasized the degree to which the United States has lobbied, if not compelled, Europeans to promote multiculturalism, mass Third World immigration, and Muslim Turkey’s admission to the EU.[13]

All this is mentioned by way of getting to Faye’s most important question: Who is the enemy?

From the Schmittian perspective of twentieth-century nationalism, the designation of the enemy is at the heart of every grande politique. “The enemy,” Carl Schmitt writes, “exists only when . . . one fighting collectivity of people confronts a similar collectivity.”[14] Historically, the enemy was a rival state that threatened one’s survival. But the political—which poses man’s highest existential tasks—is invoked whenever friend and enemy polarities come into play, as one adversary “intends to negate his opponent’s way of life.”[15] That the question of race replacement touches on the continued existence of the white biosphere makes racial politics “political” in the highest sense.

Even though “some” Jews continue to employ their double standard, Faye believes they are not the life and death threat that the non-white invaders pose. And though their open border advocacy and their pathologization of white identity have helped foster conditions facilitating the replacement of the indigenous white population, Faye questions if this makes the Jews a greater threat than the Third World interlopers—who are presently ethnically cleansing neighborhoods, disrupting traditional ways of life, and de-Europeanizing Europe. Worse, an obsession with Jews has caused not a few nationalists to ally with their enemy—the Muslims, who are qualitatively more anti-white and supremacist than the Jews. (The latest, most disastrous example of this was the 2007 presidential campaign of Le Pen’s National Front.) He claims, moreover, that the Jews (specifically their intellectuals) are not solely responsible for opening the gates to the “barbarians,” that they have in fact been joined by other, often more consequential, white culprits, and that to waste energy focused on their gate-opening activities is to neglect the real danger lurking in the suburbs and on the border. If nationalists are to mount an effective resistance to the anti-European forces, it is imperative, Faye insists, that they jettison their anti-Semitism and wage their struggle within the system’s philosemitic terms.

There is both a political and a theoretical issue at stake here. In our postmodern age, when the jus publicum Europaeum has given way to globalism’s anti-European order, nationalists confront a situation where they are obliged to fight a multi-front, asymmetrical war: Against an external enemy, the non-white hordes replacing Europeans, and against an internal enemy, those liberal elites, Jewish and otherwise, who promote and make possible this replacement. Faye and the reformists focus on the external enemy, his critics, like Graf, on the internal enemy. And, as in every multi-front war, the question inevitably arises: Who is the principal enemy, the gate keepers or the gate crashers?

For Faye, it’s the non-white immigrants, and every distraction from this realization is a step closer to the European’s impending Islamization. For Graf, it is the system responsible for the Third World invasion. “Effective struggle against immigration within the current framework,” he writes, “is totally impossible. In order to stop the invasion the system has to be overthrown either by a popular insurrection or a coup d’état.” This is a revolutionary answer that strikes at the root of the problem.[16] Of course, such an anti-institutional answer is one that neither Faye nor the conservative majority in nationalist ranks is presently willing to entertain—if for no other reason than it slights the visible enemy in our midst and complicates white efforts to reform existing policies.

How one sees the system, then, affects how one defines the principal enemy. And how one sees the Jews in relation to the system decides if this makes them the principal enemy or not. To the degree, therefore, that the esprit juif is the system’s spirit and favors specifically Jewish interests at the expense of white ones, the Jews are the real danger. But—and this is the qualification that muddies the waters—to the degree that it is the system itself, independent of the Jews, that is responsible for our predicament and thus the degree to which the Jews are only one of its instruments, then they are just facets of a larger, more complex web of subversion—which makes them an adversary to be sure, and one with a very distinct visage, but not, in themselves, the principal enemy.[17]

There is, admittedly, nothing neat and tidy in this, yet it is characteristic of late twentieth-century struggle that nationalists, compelled to fight both foreign invaders and their own collaborating ruling class, face nearly insurmountable challenges under the worst possible conditions.[18] The totalizing character of such struggle, with its universalization of enmity and its confusion of opponents, again owes a great deal to the breakdown of the Eurocentric system of nation-states after 1945, for this breakdown, in addition to threatening the existence of white people and denying a future to their children, completely undermined the traditional European “bracketing” of war—to such an extent that it now increasingly pits the state against the nation, conflates the forces of civil war, revolution, and national liberation, and entails a struggle that is as much about class as it is about race.[19] This makes it very difficult to designate the principal enemy. Relatedly, it raises a question of the highest political order, which Faye neglects entirely: For instead of exonerating the Jews, whose collaboration with the system is either necessary or sufficient to its purpose, and instead of abandoning our European past, which offers numerous historical examples of successfully waged anti-system struggles, Faye might have asked if anything meaningful can possibly be accomplished within a system which he himself once described as “the destroyer of nations” (le tueur des peuples).

Notes

[1] Jürgen Graf, “The New Jewish Question, or The End of Guillaume Faye,” http://www.adelaideinstitute.org/LEGAL2006/Faye.htm [2]; my quotations come from the French original, “La nouvelle question juive ou la fin de Guillaume Faye,” http://www.juergen-graf.sled.name/articles/graf-la-fin-de-guillaume-faye.html [3]. Cf. “Dr. Robert Faurisson on Guillaume Faye,” http://www.thecivicplatform.com/2007/ 11/23/dr-robert-faurisson-on-guillaume-faye-2/ [4]; Michael O’Meara, “Guillaume Faye and the Jews [5].”

[2] For disclosure’s sake, I should mention the divided loyalties affecting my review of this work. Revisionism, especially as disseminated by Mark Weber’s IHR, played a major role in shaping my work as a professionally trained historian and as a racial nationalist; relatedly, revisionist ideas led to the termination of my short-lived academic career. My identification with Graf is thus both personal and intellectual. At the same time, I helped introduce English-speaking nationalists to Faye’s ideas, which I continue to think are an invaluable contribution to the coming European Revolution.

[3] Kevin MacDonald, The Culture of Critique (Bloomington, Ind.: 1stBooks, 2002).

[4] This is not an apology, but a simple historical observation—one, moreover, made with the knowledge that most non-Orthodox distillations of Christianity are today objectively anti-white and that, at the same time, any credible nationalist movement in America cannot be anti-Christian.

[5] In probing the sources of European decay, our greatest thinkers are closer to Faye than to the anti-Semitic vulgate: Think of Nietzsche’s theory of nihilism, Weber’s Iron Cage, Heidegger’s evasion of being, Spengler’s organic cycles, or Evola’s loss of Tradition—all of which emphasize the self-destructive tendencies inherent in European culture. Kevin MacDonald’s own work, in considering the role that individualism, weak ethnocentrism, and moral universalism have played in making whites vulnerable to Jewish subversion, also acknowledges the effects of these European sources (though he tends to emphasize the primacy of the Jewish ones).

[6] When Slezkine argues (further substantiating MacDonald’s argument in The Culture of Critique) that the “Modern Age is the Jewish Age,” he affirms, in effect, the essentially Judaic character of the existing system. Yuri Slezkine, The Jewish Century (Berkeley: University of California Press, 2004). Julius Evola, whom I consider the most profound anti-Jewish critic of the twentieth century, actually ended up abandoning his anti-Semitism after 1945 because he thought it “absurd” to continue posing the Jewish Question when the “negative behavior attributed to Jews had become that of the majority of Aryans.” Julius Evola, Il Camminino del Cinabro (Milan: Scheiwiller, 1972). See also Michael O’Meara, “Evola’s Anti-Semitism [6].”

[7] Martin Heidegger, Introduction to Metaphysics, trans. by G. Fried and R. Polt (New Haven: Yale University Press, 2000).

[8] As evident in the immigration policies of Nicolas Sarkozy, French Jews are becoming less supportive of the present Afro-Arab immigration, which is the principal source of the growing anti-Semitism. But this does not mean, as Faye assumes, that they are beginning to oppose Third World immigration tout court. Rather, Sarkozy’s “select immigration” is increasingly oriented to East Asians, who are both less of a welfare charge and indifferent to Judaism. See Michael O’Meara, “Racial Nationalism and the French Presidential Election of 2007,” http://www.vanguardnewsnetwork.com/?p=1703 [7].

[9] This argument bears comparison to the argument he makes against European anti-Americanism. See Guillaume Faye, Le coup d’Etat mondial: Essai sur le Nouvel Impérialisme Américain (Paris: L’Æncre, 2004); Michael O’Meara, “Europe’s Enemy: Islam or America? [8]

[10] “Semi” because Sarko l’Américain has on several occasions threatened (and threatens still) to mutate into Sarko l’Européen—given that the geopolitical imperatives of France’s leadership of Europe overrides the pro-Americanism of his neocon ideology. See “Candide postmoderne, avec Ray-Bans, jeans et ‘esprit apocalyptique’” (1-11-08), http://www.dedefensa.org/article.php?art_id=4819 [9].

[11] The history of this system has yet to be written. It was anticipated as early as 1950 in Carl Schmitt, The Nomos of the Earth, tr. by G. L. Ulmen (New York: Telos Press, 2006). Its origins have been examined in Jean-Gilles Malliarakis, Yalta et la naissance des blocs (Paris: Eds. du Trident, 1982, 1995). One of its better recent theoretical conceptualizations is Alexandre Zinoview, La grande rupture: Sociologie d’un monde bouleversé (Lausanne: Eds. L’Age d’Homme, 1999). Faye himself attempted to grasp the system’s nature in one of his more important early works, Le Système à tuer les peuples (Paris: Ed. Copernic, 1981).

[12] Julius Evola, Three Aspects of the Jewish Problem (NP: Thompkins & Cariou, 2003).

[13] “What we call Americanism is nothing else . . . than the Jewish spirit distilled.” Werner Sombart, The Jews and Modern Capitalism, trans. by M. Epstein (New Brunswick: Transaction Books, 1982). Writing at the end of the twentieth century, Kevin MacDonald makes a similar contention in The Culture of Critique. The difference is that Sombart believed the liberal-capitalist core of American civilization was inherently Judaic, while MacDonald contends that it was imposed.

[14] Carl Schmitt, The Concept of the Political, trans. by G. Schwab (Chicago: University of Chicago Press, 1996).

[15] Schmitt, Concept of the Political.

[16] Cf. Michael O’Meara, “The Defeat of the Jewnited States as Imagined by H. A. Covington,” http://www.vanguardnewsnetwork.com/?p=1936; and “Through the Barrel of a Gun or Not at All,” http://www.vanguardnewsnetwork.com/?p=2236.

[17] For decades now, the Jewish spirit has obviously influenced the “hostile elite” managing America’s world system, but whether this elite is Jewish in essence is something that anti-Jewish critics have yet to prove.

[18] Think of France in the early Sixties, when General Salan’s Organisation Armée Secrète had to fight a non-white enemy in Algiers and a French enemy in Paris; or the situation today in Iraq, as Sunni insurgents simultaneously battle Shi’ites, the puppet government in Baghdad, and the foreign army of occupation.

[19] Carl Schmitt, “Theory of the Partisan,” Telos no. 127 (Spring 2004).


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Guillaume Faye and the Jews

Guillaume Faye & the Jews

By Michael O'Meara 

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Faye.jpgFew postwar thinkers in my view have played a greater role in ideologically resisting the forces assaulting Europe’s incomparable bioculture than Guillaume Faye. This was publicly evident at the international conference on “The White World’s Future” held in Moscow in June 2006, which he helped organize. It’s even more evident in the six books he’s written in the last seven years and in the innumerable articles, interviews, and conferences in which he’s alerted Europeans to the great challenges threatening their survival.

In this spirit he has developed an “archeofuturist” philosophy that takes its inspiration from the most primordial and Faustian urgings of our people’s spirit; he has incessantly warned of the threat posed by the Third World, specially Islamic, invasion of the former white homelands; he has promoted European collaboration with Russia and made the case for a white imperium stretching from Dublin to Vladivoskov; he privileges biopolitics over cultural or party politics; he’s developed a theory of the interregnum that explains why the existing system of subversion will soon collapse; and he’s successfully promoted anti-liberal ideas and values in a language and style that transcends the often ghettoized discourse of our movement. But despite his incomparable contribution to the forces of white resistance, he has always remained suspiciously silent on certain key issues, particularly regarding the Jews, the so-called Holocaust, and the interwar heritage of revolutionary nationalism — even though he is routinely referred to in the MSM as a fascist, a racist, and a negationist. On those few occasions he has spoken of Israel or the Jews, it has been to say that their cause is not ours and that we need to focus on the dangers bearing down on us. To this degree, his silence was tolerable. Recently, however, he’s broken this silence and taken a stance likely to alienate many of his supporters.

The occasion was an interview granted to the Zionist France-Echos — now posted at subversive.com. When asked in the interview about anti-Semitism in the “identitarian” movement he leads, Faye responded in explicitly philosemitic terms:

Anti-Judaism (a term preferable to anti-Semitism) has melted away like snow in the sun. There are, of course, pockets of resistance . . . . But this tendency is more and more isolated . . . because of the massive problem posed by Islamizaton and Third World immigration. In these circumstance, anti-Judaism has been forgotten, for the Jew no longer appears as a menace. In the milieux I frequent, I never read or hear of anti Jewish invectives. . . . [A]nti-Judaism is a political position that is obsolete, unhelpful, out of date, even when camouflaged as anti-Zionism. This is no longer the era of the Dreyfus Affair. Anti-Jews, moreover, are caught in an inescapable contradiction: they despise Jews, but claim they dominate the world, as if they were a superior race. This makes anti-Judaism a form of political schizophrenia, a sort of inverted philosemitism, an expression of resentment. One can’t, after all, detest what one aspires to . . . . My position is that of Nietzsche: To run down the Jews serves no purpose, it’s politically stupid and unproductive.

Besides ignoring the fact that Jewish influence has never been more dominant and more destructive of white existence, three questions are raised in this quote:

(1) Is it that the problems posed by immigration and Islam have trivialized those once associated with the Jews?

(2) Or is it that Islam and immigration reveal that the Jews are not (and never were) a problem, that the anti-Judaism of the Dreyfus era, like other historical expressions of anti-Judaism, was simply a product of a culture whose traditionalism or resentment “stupidly” demonized the Jew as the Other?

(3) Or is it that one can’t have two enemies at the same time, that the threat posed by Islamic immigration is greater than whatever threat the Jews might pose, making it strategically necessary to focus on the principal enemy and to relegate the other to a lesser degree of significance?

Faye tends to conflate these questions, leaving unsaid what needs to be said explicitly. He assumes, moreover, that the Islamic or Third World threat (both in the form of the present invasion and internationally) is somehow unrelated to the Jews. He acknowledges, of course, that certain Jews have been instrumental in promoting multiracialism and immigration. But the supposition here is that this is just a tendency on the part of certain Jews and that to think otherwise is to commit the error of seeing them in the way that “old-fashioned” anti-Semites once did. At first glance, his argument seems to be that of Jared Taylor and American Renaissance, being a tactical decision to take the path of least resistance (which many of us don’t support but nevertheless can live with). Faye, though, goes beyond Taylor, making claims about the Jews that will inevitably compromise our movement.

The anti-Islamism and philosemitism that Faye here combines reflect a deep ideological divide in French nationalist ranks. This divide is symptomatic of a larger schism that is rarely discussed by white nationalists, but has had worldwide ramification for our movement. Since 1945, when the anti-white forces of triumphant American liberalism and Russian Communism, in alliance with Zionism, achieved world hegemony, the hounded and tattered ranks of the nationalist right, in Europe and America, split into a number of divergent, if not contradictory tendencies. With the advent of the Cold War and the formation of the Israeli state, these tendencies tended to polarize around two camps. One tendency, including certain ex-Nazis, allied with postwar anti-Communism, viewing the Russian threat as the greater danger to Western Civilization. Given Israel’s strategic place in the Cold War alignment, these anti-Communists treated organized Zionism as an ally and downplayed the “anti-Semitism” that had traditionally been part of their anti-liberal nationalism. This tendency was opposed by another, which also included former Nazis, but it saw Russian Communism in terms of Stalin’s alleged anti-Semitism and nationalism. This led it to assume an anti-American, anti-Zionist, and pro-Third World position.

The legacy of this polarization continues to affect white nationalist ranks, even though elements of it have been jumbled and rearranged in recent years. As ideal types, however, neither tendency is completely supportable nor insupportable. White nationalism, I suspect, will succeed as a movement only in synthesizing the positive, pro-white elements in each tendency. For a long time, I thought Faye represented this synthesis, for he was both pro-Russian without being hysterically anti-American, anti-Third World without supporting the globalist super-structure dominating the “West.” More impressive still, his orientation was to a revolutionary, racially conscious, and archeofuturist concept of the European race that refused any accommodation to the existing regime.

Recently, however, his anti-Islamism seems to have morphed into a Zionism that cannot but trouble our movement. In the France-Echos interview he says in reference to his nationalist critics that it is nonsensical to call him a Zionist since he is not a Jew. But in the same breath he adds:

How could I be anti-Zionist . . . . Unlike Islamism, Communism, Leftism, human rights, and masochistic, post-conciliar Christianity, Zionism neither opposes nor restrains in any significant way the ideals I defend, that is, the preservation of [Europe's biocultural] identity. How would the disappearance of Israel serve my cause? For a European identitarian to think that the Hebrew state is an enemy is geopolitically stupid.

He goes on to argue that those who are viscerally anti-American and anti-Zionist are implicitly pro-Islam, pro-Arab, and immigrationist, allies in effect of the Left’s Third-Worldism. Pointing to Alain de Benoist’s GRECE, Christian Bouchet’s revolutionary nationalist movement, and those “Traditionalist” European converts to Islam, all of whom are fascinated by Iran’s new leadership and by Hezbollah, he claims, with some justice, that these anti-Zionists are in the process of abandoning their commitment to Europe.

Faye’s contention that Islam (the civilization) is a mortal threat to Europe is solidly grounded. While one might appreciate Amadinehjad’s critique of Zionist propaganda, especially as it takes the form of the Holocaust, or Nasrallah’s humbling of the IDF, to go from there to supporting Iran’s Islamic Republic or Islamic insurgents in general (think of the Paris Ramadan riots of November 2005) is, for white nationalists, a betrayal of another sort. Faye here acts as an important bulwark against those in our ranks who would leave it to others to fight our battles — others, if history is any guide, who won’t
hesitate to subjugate us once the opportunity arises.

Where Faye crosses the line in my view is in arguing that Jews ought to be considered part of European civilization, that the defense and reinforcement of the Israeli state is a vital imperative for Europe, and that Israel is the vanguard in the struggle against “our common enemy.” The collapse of Israel, he claims, would “open the door to the total conquest of Europe.” He concludes by declaring that he is no Judeophile. “I consider the Jews allies, as part of European civilization, with a very particular and original status as a people apart.” He rejects anti-Judaism “not because it is immoral, but because it is unuseful, divisive, infantile, politically inconsistent, out dated.” For ostensively strategic reasons, then, he rejects anti-Judaism.

It is not my intention here to critique Faye’s new-found Zionism (which I find insupportable) — that would require a format different from this report. It is also not my intention to put his other ideas in doubt, for I continue to believe that he has made an incomparable intellectual contribution to the cause of white resistance. I do, however, question how Faye can consider a non-European people like the Jews to be part of our biocivilization; how he can ignore the destructive role they have played in European and especially American history; how he can dismiss their role in fostering the anti-white forces of multiculturalism, globalism, and the existing regime; and how he can think that Israel is not a geopolitical liability to Europe and Russia?

Finally, I can’t help but recall an earlier occasion when Faye argued that our survival as a people depends on “ourselves alone” — and not on appeals to those whose interests are inevitably served at our expense.

From VNN, July 31, 2006


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