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samedi, 12 mars 2016

Introduction aux nouvelles guerres de l'image

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Introduction aux nouvelles guerres de l'image

par François-Bernard Huyghe

Ex: http://www.huyghe.fr

La guerre de l'image c'est-à-dire l'utilisation d'images pour contribuer à la finalité générale de la guerre - faire céder la volonté politique d'un adversaire - est tout sauf récente. De ce point de vue, utilisée comme arme voire en conjonction avec des armes, elle obéit à des constantes. Ceci vaut pour la guerre au sens strict, celle qui implique la mort collective infligée de façon systématique dans un but politique, mais aussi pour cette "guerre pour les cœurs et les esprits" qu'est la conquête idéologique des territoires mentaux.
Nous proposerons de distinguer trois types, qui se mêlent largement dans la pratique :
- l'image exaltante
- l'image probante
- l'image offensante.

L'image exaltante doit produire de l'enthousiasme, source de combativité et de cohésion. Ainsi, il est bien connu que le "moral", des troupes, des civils ou des militants, est à la fois une ressource à augmenter et un bien à protéger des attaques adverses. Or il se nourrit d'une imagerie commune. L'enthousiasme suppose un mélange variable d'amour (pour notre chef, notre nation, notre cause, nos ancêtres, notre communauté), d'admiration pour ces entités qui nous dépassent, d'identification et de sens la continuité (nous partageons ces sentiments sublimes avec d'autres frères et des ancêtres), mais aussi de colère au moins potentielle contre ceux qui viendraient à offenser les principes ainsi représentés. Un portrait du roi ou du petit père des peuples, un tableau de bataille, ou la photographie de trois GI's dressant le drapeau américain à Iwo Jima en guise de legs à la "mémoire de nos pères" et autres idéalités idéalisées répondent parfaitement à cette définition.

L'image probante se situe dans un autre registre : elle démontre une réalité qui devient facilement preuve à charge (leurs crimes qui expliquent pourquoi nous combattons). La démonstration de l'atrocité ou de la défaite et punition de l'autre fournit, au moins depuis l'invention de la photographie, une source d'inspiration inépuisable.

L'image "rassurante" (oui nos troupes ont belle allure et bon moral, oui, nos camarades étaient effectivement nombreux et mobilisés) n'est certes pas négligeable, mais son impact est souvent moindre. Difficile en ce domaine de rivaliser avec de grandes icônes comme une petite fille courant sous le napalm, par exemple.
L'image probante est toujours un enjeu majeur, d'autant qu'une telle image appelle par nature la citation ou la reprise.

Quant à l'image offensante elle est censée produire un effet d'humiliation qui n'est en rien inconciliable avec son caractère probant (oui, cela s'est bien produit ainsi) ou exaltant (oui, nous nous réjouissons de voir nos adversaires ainsi défaits et notre triomphe affirmé). L'offense résulte du ridicule de l'adversaire (et en ce sens cela inclut le très riche domaine de la caricature), comme de la vision de son abaissement et de sa souffrance (ici la violence par l'image du 11 septembre est insurpassable) mais dans tous les cas il s'agit d'une diminution d'autrui. La notion de ce qui est offensant pour l'autre ou de ce qui peut lui infliger une souffrance psychique est l'objet de débats incessants. Ils portent sur ce qu'il licite de montrer soit, parce que cela donnerait trop de plaisir ou trop d'impact à l'adversaire (par exemple, l'ennemi ou le terroriste serait "trop content" de voir les dégâts qu'il a faits), soit du fait qu'elles touchent au non-représentable (voir la question des photos de la Shoah dont des photos seraient pour certains comme une concession faite aux révisionnistes de rentrer sur le terrain de la preuve par l'image) soit, plus rarement sur le fait que certaines images seraient trop cruelles, qu'elles stigmatiseraient une communauté, qu'elles témoigneraient de trop d'hostilité pour être tolérées. D'où des effets d'abîme et des problèmes d'interprétation. Faut-il filmer les morts du 11 septembre ou ceux de la seconde guerre du Golfe au risque de réjouir les islamistes ou de leur donner des arguments ? Accepter qu'un hebdomadaire français montre des talibans paradant avec les dépouilles de soldats français ?
 

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Et les caricatures de Mahomet ? Qu'est-ce qui les rend intolérables ? Qu'elles enfreignent la prohibition de l'image portant sur le sacré ? Qu'elles fassent à des musulmans une offense que n'éprouveraient pas des catholiques devant une couverture de Charlie hebdo sur le pape et le préservatif ? Qu'elles traduisent une crainte irrationnelle de leurs auteurs (crainte du nom d'islamophobie), crainte dangereuse et contagieuse, donc agressive ? Qu'elles énoncent une thèse implicite et fausse (en transformant le turban du Prophète en bombe on affirme que "tous" le musulmans sont intolérants et violents par nature") ?

Que ces fonctions soient des constantes n'empêche pas que la production et propagation des images bouleverse leurs règles d'utilisation. L'apparition de la photographie dans les conflits a largement été commentée à mesure de son caractère irréfutable présumé (oui, cette scène a bien été présente devant l'objectif, je ne peux en douter). La valeur probante de l'image peut être remise en cause par bien des stratégies réelles ou supposées. Et les arguments qui nourrissent la méfiance à leur égard sont bien connus:

- elle peut être truquée, du caviardage de Trotsky sur les photos argentiques aux trucages numériques de vidéos presque en temps réel.
- elle peut être scénarisée comme l'érection du drapeau à Iwo Jima, produite pour être filmée, constituer un pseudo-événement ....
- elle peut être sortie de son contexte, réinterprétée par un titre ou un commentaire trompeur, remontée si elle est animée, sélectionnée selon une intention
- elle se prête à des lectures contradictoires. Là où l'un voit une bouleversante photo des camps, l'autre s'étonne de l'attitude ou de la morphologie de tel personnage qui lui paraît sentir le trucage. Là où l'un voit la chute des Twin Towers touchée par un avion, l'autre constate l'effondrement d'un édifice qu'il croit physiquement inconciliable avec l'explication "officielle" et se persuade que la preuve que les tours étaient truffées d'explosifs crève les yeux.

- et bien sûr nos codes décidant quelles sont les images licites ou sacrilèges varient énormément : la télévision US tente de cacher les morts (provoqués ou subis par son armée), les vidéos jihadistes se exaltent mort annoncée (testaments de kamikazes), valant martyre (les victimes musulmanes) ou manifestant le châtiment divin (ennemis tués, otages exécutés).

Or le mode de circulation des images ouvre encore davantage le jeu. Celui qui contrôle militairement ou politiquement un territoire en contrôle de moins en moins les flux d'images. Il était déjà bien connu durant la Guerre Froide que le rideau de fer n'arrêtait pas les ondes (celles de radio Free Europe, mais surtout, celles infiniment plus subversives de la télévision ouest-allemande). Il est devenu évident au cours des années 90 que le monopole US des télévisions d'information internationale (voir CNN pendant la première guerre du Golfe) était éphémère. La circulation de l'image sur Internet rend caduque toute tentative de censure totale des images probantes ou offensantes adverses.

 Ce qui ne veut pas dire que des censures partielles soient impossibles (voir la Chine) ni qu'il soit impossible de s'abriter des images de l'autre soit en s'isolant dans sa bulle informationnelle, soit en décrédibilisant les images adverses. Voir les organisations pro-israéliennes démontrant "preuve à l'appui" que les images de victimes civiles de Tsahal ne sont que du "Palywood", un cinéma hollywoodien truqué et posé par des Palestiniens abusant des journalistes européens jobards.

Le-Honzec-Levy-Dictateur.jpgDans les années 60, Mc Luhan écrivait : « Les guerres chaudes du passé se faisaient au moyen d’armes qui abattaient l’ennemi homme par homme. Même les guerres idéologiques consistaient au XVIII° et XIX° siècle à convaincre les individus un par un d’adopter un nouveau point de vue. La persuasion électrique par la photographie, le cinéma et la télévision consiste, au contraire, à plonger des populations tout entières dans une nouvelle imagerie. »

Certes, mais la culture (ou si vous préférez l'idéologie) se venge de la technique en permettant de construire des digues et défenses contre les flux d'images concurrentes, de protéger notre interprétation du conflit et du réel par d'autres images.

Le féminisme, une idéologie dépassée

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Le féminisme, une idéologie dépassée

Ex: http://zentropa.info

Les combats des femmes d’aujourd’hui ne peuvent être ceux des féministes d’hier : les Antigones entendent sortir de l’impasse idéologique du féminisme conventionnel, système mensonger qui détourne les femmes des enjeux réels de notre société. Notre féminité retrouvée et assumée sera notre arme pour construire le monde de demain !

Dans le combat culturel de notre siècle, sortir de l’impasse féministe est une nécessité et une urgence. Le féminisme conventionnel, dont les mots d’ordre n’ont pas changé depuis les années 1950, est une idéologie dépassée incapable de faire face aux enjeux réels de notre temps. Le féminisme d’autrefois était une force de révolte et de contestation contre des normes aberrantes : nous saluons toutes celles qui ont lutté pour rendre leur dignité sociale aux femmes, en les sortant de l’impasse du XIXe siècle bourgeois. Nous sommes les héritières de leurs luttes. Mais notre époque est celle d’une rébellion bien conventionnelle : les institutions féministes sont devenues des tentacules étatiques prônant la liberté du producteur-consommateur. Le féminisme a vécu : il est temps de le dépasser. Pour commencer, abandonnons les combats illusoires.

Refuser les combats illusoires
Les féministes conventionnelles combattent encore et toujours un patriarcat imaginaire, bataillant contre quelques arbres qui cachent la forêt, orientant la société vers des débats contre-productifs, sinon dangereux.


Le débat est-il vraiment celui de la parité dans les conseils d’administration ? Ne serait-ce pas plutôt celui d’une redéfinition de notre système économique basé sur l’exploitation illimitée de nos ressources naturelles et humaines ?


Le débat est-il vraiment celui de la taxe tampon ? Ne serait-ce pas plutôt le moment de nous affranchir de la culture du jetable ? Les tampons sont toxiques et à usage unique, une coupe menstruelle se garde dix ans.


Parlons pilule : le débat est-il vraiment celui de la libre disposition de son corps ? Ne serait-ce pas plutôt celui de se libérer de cette castration chimique supportée par les femmes, de ces hormones de synthèses que l’on achète tous les mois, qui bloquent l’ovulation sous couvert de confort ? Ne serait-ce pas plutôt de se reconnecter à son corps, d’apprendre à reconnaître son cycle et à maîtriser soi-même sa fécondité ?
Le débat est-il vraiment celui du partage du temps dans le congé parental ? Ne serait-ce pas plutôt celui de la redéfinition de la place de la famille dans la société, du rôle primordial de la mère les premiers mois du nourrisson ?


Le combat est-il vraiment celui du Madame ou du Mademoiselle quand des femmes sont agressées dans les rues de Cologne ? Le combat est-il vraiment celui de l’ « égalité réelle » quand 80% des travailleurs du dimanche dans les zones touristiques sont des femmes à temps partiel ? Le combat est-il vraiment de sortir madame Sauvage de prison quand les coupables de violences sont relâchés après deux mois d’incarcération?

Nous pourrions écrire un livre sur ces faux sujets sur lesquels s’escriment les féministes actuelles, jouant ainsi parfaitement le jeu du capitalisme libéral-libertaire ! Ce féminisme déconnecté du réel n’a aucune réponse à apporter aux Françaises.

Retrouver notre féminité
Les mouvements idéologiques des dernières décennies n’ont eu de cesse de déconstruire les rapports hommes/femmes pour mieux atomiser la société, en faisant de la femme un homme comme les autres ou en défendant l’idée de la guerre des sexes. Nous dressons de leurs actions un bilan dévastateur. Ces raisonnements stériles ont gravement impacté les rapports entre les sexes, que les féministes considèrent soit comme une interminable lutte entre oppresseur et opprimé, soit comme une rivalité jalouse. Nous sommes les deux moitiés du même ensemble, aussi indispensables l’un à l’autre que le jour et la nuit ! L’homme et la femme ne s’additionnent pas, ils forment un tout cohérent qui tend vers l’harmonie, ils sont interdépendants et essentiels à la fécondité de l’humanité, dans tous les sens de ce terme. Le nier relève de postures politiques et idéologiques qui minent nos vies quotidiennes et hypothèquent l’avenir.

Nous pensons que la culture s’ancre dans la nature, que les différences sexuelles existent biologiquement et, en s’exprimant, structurent symboliquement la société. Il n’y a pas rupture, mais continuité et interpénétration entre la nature et ses mises en scène culturelles. Vivre pleinement son sexe biologique constitue le meilleur moyen d’en renouveler la construction sociale et d’obtenir des changements en accord avec ce que nous sommes. Tandis qu’affirmer, sans nuance, que le genre n’est qu’une construction culturelle source d’injustices, qu’il convient de supprimer les normes et les repères constitue une erreur fondamentale et destructrice !

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Cette complémentarité des sexes ne doit pas être vécue de manière fixe, avec une liste de tâches « féminines » ou « masculines ». Pour autant, calquer nos comportements sur ceux des hommes est vain. La différence n’est pas synonyme de domination ou de hiérarchie ; un peu d’altérité ne ferait pas de mal dans ce monde de Narcisse !

Construire la société de demain
Nous ne sommes pas les victimes des hommes ou du patriarcat international. Notre combat est ailleurs : nous voulons nous libérer d’une société déshumanisée, qui n’est plus qu’une machine économique sans âme, sans passé ni avenir. Avec la complicité des féministes, les femmes sont les premières consommées et les premières consommatrices de notre « société kleenex ». Nous avons une place essentielle dans cette lutte.
Les Antigones prônent l’autonomie des femmes et leur enracinement dans leurs familles, dans la vie locale, dans la société. Construire l’avenir est notre combat essentiel : nous ne reposons pas seulement sur nous-mêmes, et avons des comptes à rendre à nos héritiers. Alors que le féminisme beauvoirien ose affirmer que la maternité est un fardeau, une discrimination, nous considérons que donner la vie, permettre à demain d’exister, est un bel et bien un privilège. Et nous entendons en user comme tel. Afin de créer le lien entre le passé et l’avenir, de transmettre la mémoire et le sens des choses, la chair et le sang d’une civilisation. Or la maternité est aujourd’hui mise en danger par sa technicisation : GPA, congélation d’ovocyte, demain utérus artificiel, etc. Si la maternité est un moment par nature féminin, il n’est pas la propriété des individus, mais la condition d’existence de l’humanité. Permettre aux femmes de vivre une maternité libre et sereine devrait donc être une préoccupation féministe de premier ordre, au lieu de l’envisager comme une servitude ou un frein à la carrière !

Cela dit, les femmes ne vivent évidemment pas leur fécondité uniquement à travers la maternité, d’autres voies, toutes aussi importantes, demandent encore et toujours à être explorées. Transmettre peut se faire de mille façons et notre féminité, notre nature féconde et créatrice, est une arme dans ce combat. Cela commence par les actes : changeons nos habitudes de vie qui servent le capitalisme de séduction. Obstinément, jour après jour, grain de sable après grain de sable.

Le combat des femmes, c’est ici et maintenant. Dans la rue, les journaux et les livres pour faire entendre nos voix. Au foyer, centre d’où l’on rayonne. Dans les bois, les champs et nos jardins pour nous réapproprier la nature. Loin des systèmes idéologiques, ancrées dans la réalité de nos vies.

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Accord sur les migrants. Naïveté ou mensonge?

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Accord sur les migrants. Naïveté ou mensonge?

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Lundi 7 mars, les 28 dirigeants réunis à Bruxelles n'ont pas été jusqu'à entériner le nouveau plan « germano-turc » consistant à renvoyer des Syriens, candidats à l'asile, de Grèce en Turquie. Mais les « principes » de « mesures audacieuses » étudiées dans la plus grande discrétion, la veille, par la chancelière Angela Merkel et le premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, ont été clairement fixés dans une déclaration finale commune.
 
Les dirigeants européens ont toutefois décidé de repousser la formalisation d'un véritable accord aux 17 et 18 mars, lors d'un nouveau conseil « spécial migrants ».Tout laisse penser qu'ilss ne reviendront pas alors sur les termes de l'accord.

La chancelière allemande et le premier ministre turc, avec la bénédiction de la Commission, ont proposé de renvoyer massivement des Syriens déjà présents dans les îles grecques, y compris certains d'entre eux qui y auraient déjà déposé une demande d'asile, vers la Turquie. Puis, sur la base « d'un Syrien admis pour un Syrien expulsé », d'acheminer ceux qui sont dans des camps en Turquie directement vers l'Europe, selon une procédure contrôlée, copilotée par les Nations Unies.

L'ensemble des associations humanitaires s'est élevé contre ces mesures, qualifiées de déportation. Apparemment, elles se trouveront bien, pour des raisons qui sont sans doute plus politiques qu'humanitaires, d'une arrivée en Europe, généralement via la Turquie, de migrants économiques provenant de pays n'ayant rien de particulièrement dictatorial. Quant aux réfugiés politiques, il sera impossible pratiquement de les distinguer non seulement de migrants économiques mais aussi de candidats terroristes infiltrés par Daesh.

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Ce qui surprend davantage est l'affirmation par Berlin et Ankara, confortée par Bruxelles, du fait qu'il sera possible, à la suite de l'accord, de demander à la Turquie de reprendre les migrants et les réfugiés arrivés en Grèce et de les réinstaller chez elle. Les Syriens en situation irrégulière, jusqu'ici tolérés sinon invités en Allemagne, seront aussi réadmis en Turquie. Par ailleurs, on voit mal comment acheminer vers l'Europe , sur la base « d'un Syrien admis pour un Syrien expulsé », les Syriens dotés du statut de réfugié politique et actuellement dans des camps en Turquie.

Résolutions inapplicables

Toutes ces résolutions, qui satisfont peut-être les gouvernements et les opinions, seront en pratique totalement inapplicable. Ceci pour plusieurs raisons:

- Les entrées massives par la mer se poursuivront. Ni Frontex ni l'Otan n'ont reçu mandat pour repousser manu militari, et moins encore détruire, les bateaux de migrants. Or sinon comment les garde-côtes turcs, à
supposer qu'ils le veuillent, et les quelques navires européens, pourront-ils, sur des centaines de kilomètres de côtes découpées, arrêter des embarcations de migrants qui chaque nuit, s'élancent par dizaines à l'assaut de la Grèce? Quant aux départs de Libye, ils ne cesseront pas, bien au contraire. On peut sur les images des sauvetages observer l'utilisation de pneumatiques flambants neufs et de bateaux en bois qui, manifestement, ont été récemment construits. D'où proviennent-ils ?

Les renseignements militaires et les services douaniers européens ont fini par comprendre comment les passeurs libyens disposaient d'une réserve de moyens nautiques pour ainsi dire inépuisable. Concernant les pneumatiques et les moteurs, les tra
fiquants semblent se fournir auprès de plusieurs réseaux très vraisemblablement asiatiques et plus particulièrement chinois. Des conteneurs venus d'Asie utilisent le transport maritime international pour être débarqués, notamment au port libyen de Misrata. Inutile de préciser que la fabrication en grande série et à bas coût de pneumatiques de qualité extrêmement médiocre par des fournisseurs asiatiques permet aux passeurs d'acquérir à très bon marchés des embarcations que les prix extorqués aux migrants permettront vite de récupérer.

Les trafiquants disposent également de bateaux en bois. Dans ce cas, la matière première utilisée pour les construire proviendrait au moins en partie d'Europe du nord.  Les réseaux criminels se fourniraient ainsi en Scandinavie et dans certains autres pays riverains de la Baltique, sous couvert de pseudos besoins, par exemple la construction de maisons. Dans ce cas, le bois transite lui aussi, à l'instar des gonflables produits en grande quantité en Asie, grâce au transport maritime régulier. La Finlande, la Suède et la Norvège, grands producteurs de bois en Europe du nord, ne peuvent pas ignorer ce trafic.

Les entrées par les routes terrestres se poursuivront aussi, malgré les frontières de barbelés mises en place. Celles-ci ne résistent pas à une foule déterminée. Certains gardes frontières, en Macédoine, ont été accusés d'avoir fait épisodiquement usage d'armes à feu. Mais comment pourraient-ils faire autrement, sauf à laisser passivement passer les foules, comme cela se produit partout ailleurs?

- Evoquons un autre problème. Comment espérer contrôler les titres de centaines de milliers de migrants, sans papiers, dotés de papiers illisibles ou munis de faux-papiers fabriqués par milliers en Libye et en Turquie. Et comment assurer l'ordre et un minimum de moyens sanitaires au sein de files d'attente en permanence sur le bord de l'insurrection? Pour ce faire, il faudrait mettre en place des milliers de douaniers ou gendarmes habilités à opérer ces contrôles. Ces effectifs n'existent évidemment pas.

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- Parmi les autres impossibilités que les diplomates, notamment allemands, se refusent à voir, il faudra faire en sorte que des individus et groupes qui ne veulent pas bouger d'un mètre de l'endroit où ils sont installés puissent être contraints à se rendre en Turquie ou à retourner en Syrie. Ce seraient alors des dizaines de milliers de policiers et militaires qu'il faudrait mobiliser, vu la nécessité de se mettre à quatre pour maitriser les récalcitrants Et sur quels moyens de transport les embarquer?

- Un dernier point, tout aussi préoccupant, mais rarement abordé, concerne de qu'il adviendra des migrants regroupés dans les camps prévus en Turquie. Ceux qui accepteront d'y rester seront en proie à tous les maux nés de l'oisiveté, du mauvais état sanitaire et des conflits internes dont les femmes seront les premières victimes. Alors à juste titre les humanitaires pourront parler de véritables camps d'extermination sur le mode nazi.

Félicitations à Erdogan

Il est clair qu' à l'occasion de l'accord du 7 mars, Erdogan a de nouveau fait une très bonne affaire. Il recevra de nouveaux milliards d'euro, fera supprimer la nécessité de visa pour les dizaines de milliers de citoyens turcs voulant se rendre dans l'Union, verra les demandes d'adhésion de la Turquie à l'Union examinées avec une tolérance nouvelle, malgré les massacres de Kurdes et les répressions aux libertés civiles qu'il ne cesse de multiplier.

En considération de cette accumulation d'incohérences et d'impossibilités, sinon de mensonges délibérés, ce ne serait pas faire preuve de conspirationnisme que se demander qui, finalement, mène le jeu. Si nous avions un Donald Trump en Europe, au lieu d'un Donald Tusk, la réponse serait vite apportée.

On observera que le même jour 7 mars, des forces djihadistes qui prolifèrent en Libye ont attaqué la frontière tunisienne à Ben Gardane. Elles ont tenu la ville pendant 24h. Il en est résulté 54 morts. Tunisie-Europe, moyens différents, mêmes objectifs.

08/03/2016

Faut-il envisager un tremblement de terre à Washington?

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Faut-il envisager un tremblement de terre à Washington?

par Jean Paul Baquiast

Ex: http://www.europesolidaire.eu

Ceci se produira presqu'à coup sûr lors des élections présidentielles du 8 novembre prochain. La perspective est peu évoquée en Europe. Ce serait une raison de plus pour s'y préparer!

Un certain nombre d'articles expliquent aujourd'hui (cf ceux cités par notre confrère Dedefensa http://www.dedefensa.org/article/et-hillary-dans-tout-ca) que, quel que soit le président élu, le système politique américain actuel ne s'en remettrait pas. Nous employons le terme de président et non celui de présidente, car selon ces observateurs, Hillary Clinton traine avec elle tant de casseroles qu'elle ne pourra faire face aux critiques déchainées de Donald Trump, non plus qu'à celles, plus mesurées mais plus en profondeur, de Bernie Sanders. Elle pourra d'autant moins faire face qu'elle a montré une remarquable inaptitude à s'engager sans mauvaise foi et maladresses faciles à relever dans des débats quelque peu percutants.

donald-trump-history-hair-ss15.jpgExit donc Clinton. Resteront en lice Donald Trump et Bernie Sanders, chacun d'eux pouvant susciter des dizaines de millions de votes favorables. Sanders fera probablement une remontée remarquable au sein du parti démocrate, mais il sera probablement et pour cette raison en butte à l'hostilité de ce qui en Amérique rejette l'idée même de ce que l'on appelle en Europe la social- démocratie, à plus forte raison si elle est orientée à gauche. Sanders aura contre lui tout l'appareil politique des conservateurs et néo-conservateurs, des maîtres de Wall Street et sans doute d'une partie des militaires. L'establishment démocrate préféra perdre les élections que se rallier à lui.

Les fortes sympathie que suscite actuellement Sanders parmi ce que nous appelons à l'européenne les forces de gauche, se reporteront voyant les chances de celui-ci s'amenuiser, vers Donald Trump. Celui-ci sera donc élu à coup sûr, même s'il continue à susciter l'opposition de tout ce que le parti républicain continue à comporter de néo-cons et assimilés. Que fera-t-il alors de ce pouvoir? S'il se révélait un président agressif, interventionniste contrairement à Obama, intelligent fut-il vitupérant, il s'appuierait sur la majorité de l'électorat qu'il aura rassemblée pour mettre en application les plus importantes des idées qu'il aura défendues et qui d'ores et déjà le rendent populaire.

Mais ceci ne pourra pas prendre la forme d'un changement en douceur de l'Amérique. Il s'agira d'un véritable tremblement de terre, avec l'émergence de nombreux groupes d'intérêts jusqu'ici maintenus dans le silence par les institutions actuelles. Ces intérêts pourront être contradictoires. Ils s'affronteront donc, provoquant une partie du tremblement de terre. Mais, avec l'appui de Trump, et dans la ligne qu'il a déjà esquissée, ils pourraient notamment provoquer une refondation complète de la politique étrangère américaine, tant vis à vis de la Russie et du Brics, que vis-à-vis des pays arabes et des migrations dites économiques. Les ennemis de Trump parleront  de capitulation devant Moscou, doublée d'islamophobie et de racisme, mais l'Amérique profonde devrait très probablement le soutenir.

Dans ce cas, le tremblement de terre s'étendra jusqu'à l'Europe. Celle-ci s'est montrée jusqu'à ce jour incapable de définir une politique conforme à ses besoins de survie dans les domaines résumés ci-dessus. Elle a toujours attendu que Washington lui dicte les comportements à suivre, au service de ses propres intérêts. L'élection de novembre ne changera rien à ce rapport de dépendance dont l'Europe paraît ne jamais pouvoir s'émanciper.

La dépendance à l'égard d'une Amérique de Trump obligera les Etats européens, tardivement suivis par les institutions de l'Union européenne, à revoir au mieux de leurs intérêts leurs positions concernant, là encore, les rapports avec la Russie et les Brics, avec les pays arabes et avec les régions du monde qui, si rien n'est fait, détruiront l'Europe, fut-ce à leur corps défendant, par l'exportation prochaine de dizaines de millions de migrants.