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samedi, 12 décembre 2020

Jean-François Gautier, l'Européen polyphonique

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Un hommage portugais à Jean-François Gautier

Jean-François Gautier, l'Européen polyphonique

Par Duarte Branquino

Jean-François Gautier (1950-2020) était un homme brillant et complet, un véritable esprit de la Renaissance, dont la sagesse s'étendait à des domaines de connaissance nombreux et variés.

410kjtYVbxL.jpgDocteur en philosophie, avec Lucien Jerphagnon comme maître, il était un profond connaisseur de l'Antiquité classique, grecque et romaine. En plus d'être un philosophe, il s'est également consacré à la science et à son histoire. Sa Grande aventure des sciences a été traduite et publiée au Portugal en 1993. Il était musicologue : il a publié des ouvrages sur Debussy et Palestrina ; en plus, il était thérapeute : il a étudié, pratiqué et enseigné l'étiologie, étant l'auteur de plusieurs livres dans ce domaine. Il a également publié deux essais qu'il convient de souligner : La sente s'efface, une poétique du paysage, principalement celui de sa Charente familiale, qu'il habitait et dont il explorait les profondeurs, et Le sens de l'histoire, une histoire du messianisme en politique.

Il a été l'un des grands noms de l'école de pensée du GRECE, d'Alain de Benoist, collaborant à plusieurs publications et signant une page régulière dans le magazine Éléments, intitulée "Anti-manuel de la philosophie". Il a également joué un rôle clé au sein de l'Institut Iliade, tant par sa participation à des colloques que par la paternité du premier volume de la collection "Longue Mémoire", lancée cette année, À propos des dieux. L'esprit des polythéismes.

J'ai eu l'honneur de deviser avec lui à la Maison de la Chimie, à Paris, lors du IIe Colloque de l'Institut Iliade, en 2015. Son discours inspirant portait sur la polyphonie, véritable révolution musicale dans l'Europe médiévale, où l'on redécouvre l'esprit du polythéisme ancien. Lors du dîner des orateurs, j'ai eu l'occasion de parler avec lui et de percevoir son intelligence captivante. Après le repas, je me suis assis à sa table et je me souviens de son sourire tranquille et de la facilité avec laquelle il a répondu à mes questions et m'a interrogé sur le Portugal tout en dégustant un verre de vin rouge. Nous avons surtout parlé de son livre L'Univers existe-t-il ?, un essai au titre provocateur qui m'a séduit et auquel je lui ai demandé de me consacrer un billet. Il a accepté ma demande avec une humilité que seuls ont les érudits au-dessus de la célébrité éphémère et, avec amitié, il m'a dédié le livre qu'il a décrit comme "un peu de physique et un peu plus de philosophie".

41s6jaZ4UPL.jpgIl nous a quitté le 6 décembre dernier, à l'âge de 70 ans, et ce jour-là, je suis retourné à ses livres pour lui rendre un hommage silencieux et personnel. Malgré la richesse de son œuvre, l'Europe devient plus aride, surtout parce que, comme il l'a si bien écrit, il manque le sens du mot "oikos", "le bien commun, c'est-à-dire à la fois la ville et ses institutions, ses terres, sa langue, ses monuments ou ses lois, toutes les ressources que chacun peut protéger et faire fructifier, dans son propre intérêt comme dans celui des autres". Un sens qui "ne peut être instruit que par la mémoire de nos origines et par ce qui, du passé, n'est pas effacé dans le présent, mais continue.

Sa vie, qui fut polyphonique, devrait inciter les Européens de notre époque sombre à redécouvrir la sagesse d'autres temps.

Texte publié dans l'hebdomadaire O Diabo, 11 décembre 2020.

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