lundi, 19 novembre 2007
Sur James Ensor
Sur James Ensor
19 novembre 1949: Mort du grand peintre Ostendais d’origine anglaise, James Ensor. On connaît très bien l’œuvre magnifique d’Ensor, ses tableaux et eaux-fortes satiriques, comme la Joyeuse Entrée du Christ à Bruxelles. Et tant d’autres chefs-d’œuvre ! Mais ce qui est beaucoup moins bien connu, c’est l’influence qu’a exercé sur lui, du moins dans ses jeunes années, la théosophie de Madame Blavatsky.
Récemment, dans un ouvrage de l’année 2001 (*), l’historien de l’art ostendais John Gheeraert a exploré l’influence de la théosophie de Mme Blavatsky sur la maturation intellectuelle du jeune Ensor. Gheeraert a découvert en effet que celle-ci a passé un an de sa vie (entre 1886 et 1887) à Ostende. Et que c’est là, dans cette cité balnéaire que l’on appelait à l’époque la « reine des plages », qu’elle écrivit son livre le plus connu, « La doctrine secrète », bible des théosophes. Ensor y a puisé la majeure partie de son inspiration, ce qui l’a conduit à entretenir une longue amitié avec une autre théosophe anglaise célèbre, Alexandra David-Neel, qui fut la première femme à avoir séjourné au Tibet et à avoir pénétré dans Lhassa, la « Cité interdite ».
Pendant cette amitié, Ensor aurait entrepris quelques voyages à Londres, pour y visiter des « gnostiques » anglais. Cette visite est la suite logique d’une lecture enthousiaste de « La Doctrine secrète » de Madame Blavatsky. Pour Gheeraert, ce sont surtout les chapitres sur la Kabbale, sur la numérologie juive à l’époque de notre moyen âge, sur les guerres menées dans les sphères ouraniennes, ainsi que les références au poète anglais Milton. Dans « Paradise Lost », Milton décrit la lutte entre les anges de la lumière et les anges de l’obscurité, qu’il mettait en rapport avec un tableau de Brueghel, « La chute des anges rebelles ». Ce théosophisme diffus, dans l’œuvre d’Ensor, aurait pu isoler l’artiste de la société, ou du moins en faire un sympathique marginal sans amis, connu pour son seul talent. Rien n’est moins vrai : Ensor avait le soutien de personnages aussi différents qu’Emile Verhaeren, que le socialiste Edmond Picard (figure aujourd’hui controversée, pour raison d’ « incorrection politique »), que l’écrivain Eugène Demolder et de bien d’autres. L’enquête de Gheeraert doit être poursuivie et approfondie. Elle indique le rapport essentiel entre ésotérisme (traditionaliste ou non) et univers de la peinture, rapport que l’on retrouve chez certains surréalistes, chez Evola, chez Eemans, chez de Chirico (Robert Steuckers).
(*) John Gheeraert, De geheime wereld van James Ensor. Ensors behekste jonge jaren (1860-1893), Uitgeverij Houtekiet, Antwerpen/Baarn, 2001.
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