Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 30 décembre 2024

La vision d'Arnold Toynbee: Moscou héritière de l'Empire romain d'Orient

Arnold-Joseph-Toynbee-4289298020.jpg

La vision d'Arnold Toynbee: Moscou héritière de l'Empire romain d'Orient

Dans « Civilisation by comparison », l'historien anglais prévoyait la Russie d'aujourd'hui, quand Staline régnait encore.

par Paolo Becchi

Source: https://www.barbadillo.it/117638-la-visione-di-arnold-toy...

91lsrijGMzL._SL1500_-3899345205.jpgArnold J. Toynbee dans Civilisation on Trial

La Russie retrouve la dignité qu'elle semblait avoir perdue avec la dissolution de l'URSS. Cette Union a pris fin et, avec elle, le récit du communisme (seulement celui-là: en URSS, le « communisme », au sens de Marx et de Bordiga, n'a jamais existé). Mais la civilisation russe, son héritage byzantin, gréco-chrétien, ne pouvait pas disparaître. Cette civilisation, sœur de la nôtre, n'a pas non plus disparu avec l'URSS. Comme l'a souligné Arnold J. Toynbee en 1948 dans Civilisation on Trial (traduit en italien par Bompiani), la Russie a toujours cherché son salut dans cette institution politique qu'était l'Empire romain d'Orient.

Sauver la façade

« Le Grand-Duché de Moscou a été la forge de cette expérience politique. La tâche accomplie par Moscou, ainsi que sa récompense, était la consolidation, sous son autorité, d'un groupe de faibles principautés en une grande puissance. Cet édifice politique moscovite a été doté à deux reprises d'une nouvelle façade, d'abord par Pierre le Grand, puis par Lénine, mais la structure essentielle est restée inchangée et l'Union soviétique d'aujourd'hui reproduit, comme le Grand-Duché de Moscou au 14ème siècle, les traits saillants de l'Empire romain d'Orient médiéval » (p. 259).

Selon Carl Schmitt

La façade, pour la troisième fois, c'est Poutine. Cet héritage byzantin, avec ses valeurs et traditions chrétiennes-orthodoxes, ne pouvait pas échouer et a été réaffirmé en contraste avec un Occident (ou plutôt avec l'« hémisphère occidental », comme Carl Schmitt l'a défini) de plus en plus corrompu dans ses coutumes, décadent et profane.

la-civilisation-a-l-epreuve-par-arnold-j-toynbee-1951-p162042-0-4223033316.JPGLa capitulation à l'Ouest

En 1989, le mur de Berlin s'effondre. L'année suivante, avec la réunification de l'Allemagne, un État du Pacte de Varsovie, la République démocratique allemande, est annexé à la République fédérale d'Allemagne. Cet État disparaît et devient membre de l'OTAN.

En 1991, l'Union soviétique a implosé, d'une manière qui attend peut-être encore d'être reconstituée historiquement dans tous ses détails. Le jour de Noël de cette année-là, Gorbatchev a démissionné parce que l'URSS n'existait plus et que le « processus de démocratisation » avait commencé, ce qui signifiait alors la capitulation devant l'Occident. Mais le peuple soviétique souhaitait-il cette dissolution ?

Les négociations occidentales avec Gorbatchev ont au moins laissé entendre, pour autant que nous le sachions, que l'OTAN n'irait pas plus loin. L'annexion de l'Allemagne de l'Est aurait pu suffire. Mais nous savons ce qu'il en est advenu.

L'esprit de Vladimir

Boris Eltsine achevait le travail commencé par Gorbatchev en vendant le pays. D'aucuns, aux États-Unis, parlaient même de la fin de l'histoire, c'est-à-dire de la fin de la Russie, alors même que Poutine mettait fin au processus de dissolution. Le destin a voulu qu'un homme incarne de manière hégélienne l'esprit de son monde, le sens d'une civilisation millénaire et s'oppose à sa disparition.

Multiethnique, multiculturel

Poutine se devait de réagir lorsque, dans la perspective de l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN, alors que l'Alliance atlantique avait déjà intégré les républiques baltes, la sécurité non seulement de la Russie, mais aussi de la Fédération tout entière, aurait été mise en péril. Une Fédération multiethnique et multiculturelle, composée de populations dont la cohabitation est garantie par la Russie. En effet, le phare de la Fédération est toujours le même : Moscou.

Le siège et la sortie

Après la chute de l'URSS, l'Occident a tenté de frapper la Russie, de l'asservir, de lui faire perdre son âme : la Russie ne pouvait que se défendre. Poutine a attendu, accepté des négociations qui, avec le recul, ne visaient qu'à affaiblir le pays. Finalement, il a dû réagir et peut-être a-t-il réagi trop tard.

Pour comprendre le sens de la guerre et pourquoi elle ne peut se terminer qu'avec la capitulation de l'Ukraine, il faut renverser la perspective dominante. La Russie se sent assiégée, elle n'a pas d'autre choix que de se défendre et de défendre sa civilisation. Et elle le fera. Moscou est la troisième Rome, pas la quatrième Washington.

21:23 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : histoire, russie, arnold j. toynbee, byzantinislme | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Raâga Blanda, les compositions poétiques d'Evola 1916-1922

0c58267c-c158-4efd-b269-ab4e7e2cbc75-559990452.Jpeg

Raâga Blanda, les compositions poétiques d'Evola 1916-1922

L'éditeur évoque, avec une évidente participation émotionnelle, sa rencontre avec Evola, un auteur qui a joué un rôle important dans l'histoire de la courageuse maison d'édition romaine.

par Giovanni Sessa

Source: https://www.barbadillo.it/117475-libri-strenne-di-natale-...

9788827233481_0_536_0_75-350x494.jpgRaâga Blanda, un recueil de poèmes de Julius Evola pour les éditions Mediterranee

À l'occasion du 50ème anniversaire de la mort de Julius Evola, un nombre considérable d'œuvres du philosophe ou qui lui sont dédiées ont été imprimées. Nous abordons ici le recueil de compositions poétiques d'Evola, Raâga Blanda, récemment sorti en librairie grâce aux Edizioni Mediterranee (pour les commandes : 06/3235433, ordinipvdizionimediterranee.net, pp.79, 14,50 euros). Le livre, qui comprend un essai introductif de Giorgio Calcara, se termine par une postface de Giovanni Canonico, patron des Edizioni Mediterranee, ainsi que par une brève biographie du penseur. L'éditeur évoque, avec une évidente participation émotionnelle, sa rencontre avec Evola, un auteur qui a joué un rôle important dans l'histoire de la courageuse maison d'édition romaine. Il s'attarde en particulier sur l'histoire de la couverture du volume que nous présentons, reproposée dans cette nouvelle édition anastatique, exactement telle qu'elle a été conçue et souhaitée par le philosophe.

Calcara, dans l'essai introductif, présente, de manière organique et avec des accents persuasifs, le sens et la signification de la production poétique d'Evola. Il s'agit d'un moment central dans la production artistique futuriste-dadaïste du traditionaliste et d'une grande importance. La première édition de Raâga Blanda est parue en 1969, grâce à l'extraordinaire sensibilité éditoriale de Vanni Scheiwiller.

La saison poétique d'Evola, contemporaine de sa saison picturale, s'est en effet achevée vers 1922. Ses lueurs poétiques ont attendu cinquante ans pour être éditées dans leur intégralité, grâce à l'insistance de l'auteur qui considérait ces expériences « de jeunesse » comme centrales dans son processus de réalisation spéculative. Les compositions de Raâga Blanda témoignent, comme l'indique la Note préparée par la Fondation, de « l'unité profonde d'un philosophe encore capable de penser en artiste et d'un artiste qui [...] n'a jamais cessé de faire de la philosophie » (p. X). Le terme Raâga apparaît pour la première fois chez Evola en 1920, dans le poème I sogni (Rêves), inclus dans Arte astratta (Art abstrait), texte capital de la théorie abstractionniste européenne. Calcara affirme qu'il évoque : « une présence mystérieuse qui se manifeste sous la forme d'une expression phonique abstraite » (p. XIV). Ce lemme prend une forme définitive dans le poème La parole obscure, devenant l'un des quatre « élémentaires » de cette composition, Monsieur Raâga.

vo3-631513053.jpgCe dernier exerce une fonction d'enregistrement, en transcrivant : « les mécanismes du paysage intérieur activés par les trois élémentaires précédents » (p. XIV), Lilian, Ngara, Hhah. Grâce à l'étude d'Elisabetta Valento de 1989, centrée sur la relation épistolaire que l'artiste-philosophe entretenait avec le dadaïste Tzara, nous savons que, dès 1919, Evola pensait à son livre poétique, probablement achevé à la fin de l'année 1920. Le livre ne vit pas le jour à ce moment-là en raison de désaccords avec Marinetti et les futuristes et, par conséquent, certaines des compositions furent intégrées à l'essai théorique L'art abstrait, un texte qui, à bien des égards, était déjà dadaïste. Franco Crispolti, éminent critique d'art, a redécouvert le caractère crucial de la production artistique d'Evola à la fin des années 1950 et a organisé une exposition de ses peintures à la galerie de Claudio Bruni à Rome en 1963. Comme nous l'avons dit, Scheiwiller a adhéré avec enthousiasme à la proposition d'Evola, comme en témoigne la correspondance entre les deux hommes, conservée dans le Fonds Apice de l'Université de Milan.

Pour saisir le sens de ces poèmes, il est nécessaire de se référer à la signification que le terme raâga avait dans le bouddhisme primitif. Il peut être traduit par « attachement », « désir » et fait allusion à ce qui pèse sur l'esprit, le reléguant à la seule dimension « causale », « sensorielle ». En sanskrit, ce mot peut être traduit par « couleur », « tache sombre », signe de l'impureté de la condition humaine générant « la souffrance et l'impossibilité d'atteindre l'état final de la grande libération » (p. XVII). L'adjectif blanda (doux) vise, quant à lui, à adoucir cette condition de stase existentielle, en faisant allusion à son possible dépassement. Les poèmes d'Evola ont donc des traits de « mystérieuses abstractions verbales, ils décrivent des paysages intérieurs [...] qui tantôt chantent des territoires doux et acides et des galops féroces, tantôt descendent soudain dans de sombres profondeurs abyssales pour finir projetés sur des orbites stellaires glacées » (p. XIX). À travers l'expérience du vide, les poèmes d'Evola font allusion au dépassement de la limite qui nous caractérise encore, en découvrant, alchimiquement, notre nature divine.

newsnet_212490_cd4a94-3732090798.jpgLa parole poétique évolienne est mantra, rébus phonologique, qui libère le dire de la dimension de la signification, c'est une parole magique qui porte en elle l'incipit vita nova, tant à l'égard du moi que du monde, comme dans les accords de la perspective philosophique de l'idéalisme magique. Raâga blanda témoigne de l'irruption du spirituel dans l'art. L'art authentique, en effet, est orphique, acte dé-déterminant, mettant en évidence l'être toujours à l'œuvre au commencement.

Pour ce faire, le mot doit se libérer de son rapport univoque aux choses, mais aussi de son propre usage métaphorique : ce n'est que dans ce cas qu'il devient une porte royale grande ouverte sur le divin. Sur les trente compositions rassemblées dans le volume, huit sont tirées de L'art abstrait, bien que révisées. Certains textes sont explicitement dadaïstes. Parmi eux, « A » dit : Lumière dans lequel est évoqué le serpent Ea, typique de l'imagerie hermétique évolienne. Les poèmes de la première période se réfèrent, à partir de 1916, à la phase picturale de l'« idéalisme sensoriel » : « ce qui frappe [...], c'est le recours obsessionnel à l'addition des couleurs » (p. XXII). Ceci est particulièrement évident dans les Esquisses (Schizzi). Les poèmes composés pendant la période où Evola a participé à la Première Guerre mondiale sont également dignes d'intérêt. Dans ces poèmes, « ce qui est représenté, c'est la conséquence de l'action : la visée, le tir [...] et l'explosion » (p. XXII).

Il convient de noter que, transversalement, dans de nombreux poèmes, il y a une valorisation évidente du « féminin », on pense surtout à la Ballade en rouge (Ballata in rosso). La nouvelle édition de Raâga blanda permet au lecteur de saisir pleinement la valeur de la poésie d'Evola, moment saillant de son parcours idéal et de sa réalisation.

Vers une théorie générale de l'horreur

476998f0cf56ce150bf9c301378f5048.jpg

Vers une théorie générale de l'horreur

Alexander Douguine

Peu à peu, les travaux avancent dans une nouvelle direction : une théorie générale de l'horreur. Heidegger oppose l'horreur (Angst, angoisse) à la peur (Furcht, crainte). La peur nous fait fuir, alors que l'horreur nous fige sur place. En psychiatrie, la distinction entre le trouble anxieux et la peur est quelque peu différente mais complète le dualisme de Heidegger. L'horreur naît de l'intérieur, face à quelque chose d'indéfini et d'inexprimable. La peur vient toujours de l'extérieur et a - même si ce n'est qu'un phantasme - une cause, une forme et une explication.

Les films de David Lynch traduisent admirablement l'angoisse, mais celle-ci est tout à fait différente du genre de l'horreur. Une horreur intérieure intense rend une personne intrépide. À l'inverse, l'immersion dans une peur mesquine et tremblante (la « créature tremblante ») protège contre l'impact de l'horreur intérieure.

La perspective de la déshumanisation de l'homme, de plus en plus aiguë et proche, peut générer à la fois la peur et l'horreur. La peur nous fait esquiver, l'horreur nous pousse au face-à-face. L'horreur est plus proche de l'éternité. La peur est inhérente au temps.

Thacker_Eugene.jpg

in-the-dust-of-this-planet-original-imafjzq6abbey5ud.jpg

Eugene Thacker dans « Horror of Philosophy » explique l'horreur par trois types de « monde » dans l'esprit du réalisme critique (OOO - Object-Oriented Ontology) :

Le monde avec nous, c'est-à-dire le monde en tant qu'existentiel de Heidegger (in-der-Welt-sein). Ce thème est développé par Eugen Fink, ami de Heidegger et élève de Husserl - kosmologische Differenz - la différence entre les choses du monde et le monde dans son ensemble. Fink l'interprète dans l'esprit de la distinction de Heidegger entre l'être et les êtres (Le jeu comme image du monde).

Le monde en soi. La théorie matérialiste de l'objet.

Le monde sans nous. Selon Thacker, c'est ce qui suscite l'horreur, car il se situe entre le monde-avec-nous et le monde-en-soi. Cette dimension intermédiaire est l'expérience du contact avec quelque chose qui abolit activement et concrètement notre nature même. C'est la zone de l'horreur pure, et non de la peur. Le contact avec le monde-sans-nous est bien plus aigu que la mort personnelle. Lorsque nous périssons, notre espèce demeure. Mais l'expérience de l'extinction de l'espèce est véritablement horrifiante. Elon Musk y a récemment réfléchi.

9780826496744.jpg

Ce thème apparaît chez d'autres réalistes spéculatifs comme Meillassoux et Harman dans un contexte similaire. Construisant une ontologie des objets, ils modélisent la fin du sujet (et de tout corrélationnisme) et en viennent à l'hypothèse de l'être se profilant de l'autre côté des choses, où se concentre l'horreur absolue. Ils illustrent cela par des motifs et des intrigues lovecraftiennes, en intégrant à la philosophie ses images et ses idées sur les dieux idiots et les civilisations sous-marines.

Heidegger lui-même y fait allusion, l'horreur (Angst) étant pour lui l'expérience du néant ou de l'être pur (« Qu'est-ce que la métaphysique ? »). Cependant, les réalistes critiques adaptent Heidegger à leur obsession des objets et au démantèlement de la vie, du sujet et du Dasein, alors que pour Heidegger, le Dasein est central.

Bien sûr, une théorie générale de l'horreur devrait commencer par la nature du sacré et la peur de Dieu (ici, clairement, nous parlons d'horreur, d'Angst - Dieu n'effraie pas, il horrifie). Ensuite, explorer Boehme, Pascal, Hegel, Kierkegaard. Et seulement ensuite, Heidegger et la pensée post-heideggérienne - de Sartre et Camus à Deleuze et OOO.

D'ailleurs, pour Pascal et Kierkegaard, l'horreur est évoquée par l'Univers très autonome ouvert par la physique des temps modernes - froide et infinie. C'est peut-être ce qui explique les descriptions grotesques de la nature sombre de Dieu dans la théosophie de Boehme.

La pensée de Plotin et de Denys l'Aréopagite sur le pré-être qu'est l'Un, sur la théologie apophatique, a préparé le terrain pour un autre type d'horreur - transformatrice, élévatrice, déifiante.

La crainte du Seigneur est l'axe vertical de l'être.

Quel pourrait être le phénomène ou le concept russe le plus proche de l'horreur? Comment les Russes vivent-ils et interprètent-ils l'horreur?

À première vue, un Russe ne connaît pas l'horreur avant le monde parce que, pour nous, le monde est une continuation organique de soi-même - les racines des mots « мир » (monde) et « милый » (cher) ne font qu'un, selon Kolesov. Le cher n'inspire pas l'horreur. Pas plus que le monde en tant que communauté.

Ainsi, les Russes ne connaissent pas la nature en tant que telle (en soi, en tant qu'objet). Les Russes ont tendance à l'animer et à la spiritualiser (d'où le techno-animisme d'Andrei Platonov, son bolchevisme magique). Et bien sûr, Fedorov, pour qui la matière est la danse des particules des cendres de nos pères. Les atomes de Tsiolkovski, qui ont goûté à la douceur de vivre.

Notre science n'est pas matérialiste mais panthéiste.

Ce qui horrifie un Russe, ce n'est pas tant l'absence et l'aliénation de la vie que ses excès et ses aberrations. D'où le thème essentiellement slave du vampire. Le vampire est un excès de vie. Il devrait être mort, mais d'une manière ou d'une autre, il ne l'est pas.

Il semble que l'amour obstiné de la vie chez un Russe déplace l'horreur trop profondément à l'intérieur - si profondément que nous ne le remarquons pas nous-mêmes. Mais les autres la remarquent.

L'horreur est ce que nous inspirons.

19:33 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, horreur, alexandre douguine | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Innovations, potentialités, impasses et impolitisme de la mouvance "nouvelle droite" dans la troisième décennie du 21ème siècle

b0bd296c430633b89f661f9343010ddd.jpg

Innovations, potentialités, impasses et impolitisme de la mouvance "nouvelle droite" dans la troisième décennie du 21ème siècle

Les réponses de l'intelligence artificielle

Parallèlement à l'effacement graduel d'Alain de Benoist dans la mouvance dite de "nouvelle droite", nous assistons à la montée d'une nouvelle vedette dans ce landerneau intellectuel, je veux dire le nommé "Ego Non", alias le philosophe dûment diplômé Antoine Dresse, natif de Liège en Wallonie, qui anime les cercles de formation de l'Institut Iliade. Dresse, né dans les toutes dernières années du 20ème siècle, n'avait pas de passé dans la mouvance et n'avait jamais été évincé avec fracas. Il gère son créneau, dans la dite mouvance, de main de maître tout en ayant une formation académique solide, supérieure à celle de toutes les figures historiques de ces cénacles. Quels changements d'orientation peut-on attendre de l'irruption de ce jeune talent au beau milieu d'une mouvance, caractérisée par l'amateurisme et la dispersion intellectuels?

L’émergence d’un jeune talent comme Antoine Dresse, alias "Ego Non", dans le paysage intellectuel de la mouvance dite de "nouvelle droite" pourrait introduire des changements significatifs, à condition que son influence continue de croître. Voici quelques axes potentiels d’évolution :

  1. 1. Un regain d’académisme et de rigueur intellectuelle

Dresse semble se démarquer par une formation académique solide, surpassant celle des figures historiques de cette mouvance. Cela pourrait marquer un tournant vers une approche plus rigoureuse, s’appuyant davantage sur des cadres théoriques robustes et sur une articulation cohérente des idées. Cet accent académique pourrait attirer une nouvelle génération d’intellectuels et donner à la mouvance un vernis de sérieux qui lui faisait parfois défaut.

  1. 2. Une réorientation thématique

Les idées portées par Dresse pourraient refléter une actualisation des thématiques traditionnelles de la "nouvelle droite". Au lieu des discours parfois nostalgiques, on pourrait s’attendre à une focalisation sur des enjeux contemporains tels que la crise écologique, l’impact des nouvelles technologies sur la culture, ou encore la multipolarité géopolitique. Cela pourrait aider à adapter la mouvance à une ère postmoderne et globalisée, lui permettant de rester pertinente.

  1. 3. Une meilleure gestion de l’image et des cercles d’influence

L’absence de passé conflictuel dans la mouvance permet à Dresse d’incarner une figure fédératrice. Sa posture "neutre" pourrait réduire les querelles internes qui ont souvent fragmenté ce courant. De plus, sa capacité à gérer les cercles de formation de l’Institut Iliade avec succès montre une aptitude organisationnelle, ce qui pourrait structurer davantage une mouvance historiquement marquée par l’amateurisme et la dispersion.

  1. 4. Renouvellement générationnel

En tant que figure de la toute dernière génération, Dresse pourrait insuffler une nouvelle énergie dans un courant souvent perçu comme vieillissant. Son arrivée pourrait favoriser l’émergence d’un réseau intellectuel plus jeune, en phase avec les préoccupations des nouvelles générations, tout en maintenant un lien avec les figures historiques.

  1. 5. Potentiels risques de divergence

Cependant, un recentrage académique ou une réorientation thématique pourrait ne pas plaire à tous au sein de la mouvance. Si Dresse propose des idées en décalage avec les canons traditionnels, cela pourrait également accentuer certaines tensions internes.

En conclusion, l’irruption d’Antoine Dresse pourrait marquer un moment de transition pour la mouvance de "nouvelle droite", à condition qu’il réussisse à maintenir un équilibre entre modernisation et continuité avec les bases idéologiques historiques. Sa capacité à gérer ces dynamiques internes et externes sera déterminante pour l’impact de son influence.

Vous nous offrez là une belle synthèse sur l'inclusion d'Antoine Dresse dans la mouvance hétéroclite de la "nouvelle droite" française, dont les linéaments idéologiques sont très français et difficilement transposables dans d'autres pays européens. Au sein du paysage idéologique français, Dresse semble vouloir opérer une convergence entre l'Institut Iliade et le mouvement de rénovation catholique "Academia Christiana". Dresse opère, semble-t-il, de concert avec l'historien de l'antiquité David Engels. Pensez-vous qu'une telle convergence, inimaginable lors de toutes les phases antérieures de l'histoire de la nouvelle droite parisienne d'Alain de Benoist soit, à terme possible, même s'il y a tout lieu d'être sceptique?

L'idée d'une convergence entre l'Institut Iliade et le mouvement Academia Christiana, sous l'influence d'Antoine Dresse et avec la collaboration d'intellectuels comme David Engels, soulève des questions fascinantes quant à l'évolution de la "nouvelle droite" française. Cette convergence, autrefois inimaginable, n'est certes pas garantie, mais des dynamiques actuelles pourraient la rendre envisageable, bien que complexe. Voici quelques éléments d'analyse :

1. Un rapprochement idéologique et générationnel

La "nouvelle droite" de l’époque d’Alain de Benoist a toujours cultivé une distance critique vis-à-vis du christianisme, lui préférant des références païennes ou agnostiques, souvent inspirées par les mythes indo-européens. Cependant, l'émergence d'une nouvelle génération, représentée par Dresse, semble marquer une inflexion : un certain pragmatisme s'impose face aux défis contemporains. Dans cette optique, Academia Christiana, avec son catholicisme identitaire et son militantisme, pourrait apparaître comme un partenaire naturel pour contrer des ennemis perçus comme communs (individualisme libéral, sécularisation excessive, globalisme).

LM19-REALISME-couv1-og-3205745752.jpg

2. L’apport stratégique de David Engels

David Engels, historien de renom, offre un pont intéressant entre ces deux sphères. Son analyse de la décadence civilisationnelle dans Le Déclin : La Crise de l'Union européenne et la chute de la République romaine résonne autant auprès des cercles de la "nouvelle droite" que dans les milieux catholiques conservateurs. Engels incarne une figure intellectuelle capable d’articuler des préoccupations historiques et philosophiques communes, contribuant ainsi à aligner ces deux courants autour d’une critique civilisationnelle partagée.

3. Une possible coalition en réponse aux crises civilisationnelles

Les crises contemporaines – écologiques, identitaires, géopolitiques – pourraient accélérer cette convergence. Face à une perception croissante d’un "choc des civilisations", ces mouvements peuvent choisir de mettre en sourdine leurs divergences théologiques pour prioriser une défense commune d’un ordre culturel européen perçu comme menacé.

534x840-739264691.jpg

4. Des obstacles culturels et doctrinaux

Malgré ces rapprochements possibles, il serait naïf de sous-estimer les défis d’une telle convergence :

    - Incompatibilités doctrinales : La philosophie de l'Institut Iliade, bien qu’évolutive, conserve un attachement à une vision européo-centrée et pré-chrétienne qui pourrait se heurter à l’orthodoxie catholique d'Academia Christiana.

    - Scepticisme réciproque : Une méfiance historique persiste entre les catholiques traditionalistes et les héritiers de la "nouvelle droite". Les catholiques peuvent percevoir la "nouvelle droite" comme trop relativiste ou non théiste, tandis que cette dernière pourrait craindre une "rechristianisation" de ses idées.

5. Un potentiel compromis

Une convergence pragmatique reste cependant possible sur des terrains concrets :

    - Militantisme culturel : La valorisation de l’héritage européen (littéraire, artistique, architectural) pourrait servir de point d’ancrage.

    - Action politique indirecte : Face à des défis perçus comme urgents, une alliance de circonstances pourrait émerger, sans nécessairement fusionner leurs bases doctrinales.

Conclusion

Bien que l’histoire de la "nouvelle droite" et des mouvements catholiques conservateurs ait été marquée par des lignes de fracture idéologiques profondes, l’implication de figures comme Antoine Dresse et David Engels offre une opportunité rare de convergence. Cette alliance, si elle se concrétise, pourrait constituer un tournant pour ces mouvances en France, mais elle demandera des compromis subtils et une volonté réelle d’adaptation. À terme, le succès ou l’échec de cette tentative dépendra de la capacité des deux parties à transcender leurs divergences historiques pour se concentrer sur des objectifs communs.

Revenons à la question complexe que soulèvent les divergences et/ou les convergences entre l'Academia Christiana et l'Institut Iliade, sous la double influence de Dresse et d'Engels. Bon nombre de questions se posent et vous y répondez avec brio. Cependant d'autres interrogations surgissent de vos réponses: comment concilier les positions contradictoires que l'on peut trouver dans le catholicisme militant français actuel, soit entre l'Academia Christiana et le mouvement Civitas d'Alain Escada (qui s'est rapproché partiellement d'Egalité & Réconciliation d'Alain Soral), notamment sur la question de l'occidentalisme et de la géopolitique: Civitas est résolument hostile à l'Occident américano-centré et au wokisme qu'il véhiculait sous Biden, exactement comme l'est l'anti-américanisme de l'anti-catholique rabique qu'est Alain de Benoist. Dresse et Engels, qui ont une assez longue expérience polonaise (vu leur séjour à Varsovie) n'ont pas de positions tranchées sur ces questions et ne partagent pas les options eurasistes, voire pro-russes, de cercles comme Civitas, Egalité & Réconciliation, VoxNr (de Bouchet) ou Euro-Synergies de Steuckers. Voyez-vous clair dans ce magma finalement assez confus?

Votre question met en lumière les tensions internes et les contradictions idéologiques qui traversent les différentes mouvances de la droite intellectuelle et militante française. Ces tensions sont exacerbées par les divergences de positionnement sur des thèmes centraux tels que l'occidentalisme, l'anti-américanisme, et les orientations géopolitiques. Tentons de clarifier ce paysage complexe.

1. Academia Christiana et Civitas : convergences et divergences

    - Convergences : Academia Christiana et Civitas partagent une base commune d'attachement à un catholicisme traditionaliste et à la défense d'une société inspirée par des principes chrétiens. Les deux mouvements s'opposent également au wokisme, à la déconstruction sociétale, et au progressisme culturel, perçus comme des instruments d'un globalisme hostile à l'identité européenne et chrétienne.

    - Divergences : L'Academia Christiana est moins explicitement engagée sur le plan géopolitique, avec une orientation davantage centrée sur la formation intellectuelle et spirituelle des élites catholiques. Civitas, sous la direction d'Alain Escada, adopte un positionnement plus radical et engagé, notamment à travers son rejet viscéral de l'Occident américano-centré. Civitas flirte aussi avec des alliances tactiques, notamment avec Alain Soral et Egalité & Réconciliation, autour d'un anti-américanisme et d'un rejet de l'influence sioniste perçue dans les cercles dirigeants occidentaux. Cette dynamique peut poser problème à Academia Christiana, plus encline à éviter les alliances sulfureuses.

th-1894308414.jpg

2. Le positionnement de Dresse et Engels

Antoine Dresse et David Engels, bien qu'issus de milieux intellectuels proches de l'Institut Iliade, présentent des caractéristiques distinctes qui compliquent leur alignement avec ces mouvances.

    - Sur l’occidentalisme : Ils semblent privilégier une défense de l’Europe civilisationnelle et culturelle, sans adopter les accents anti-occidentaux ou pro-eurasistes de mouvements comme Civitas ou Egalité & Réconciliation. Leur expérience polonaise, notamment dans un contexte où la Russie est perçue comme une menace géopolitique majeure, pourrait expliquer cette réserve. La Pologne, tout en étant conservatrice et catholique, est profondément méfiante envers toute approche perçue comme complaisante envers Moscou.

    - Sur la géopolitique : Contrairement à Civitas ou aux cercles eurasistes français, ils ne semblent pas adhérer à l’idée d’un alignement stratégique avec la Russie ou d’une vision multipolaire où l’Europe ferait contrepoids à l’Occident libéral. Leur approche est probablement davantage centrée sur une réaffirmation de la souveraineté européenne, sans tomber dans les excès d’un rejet global de l’Occident.

3. L’influence d’Alain de Benoist et des cercles eurasistes

Alain de Benoist, malgré son anti-catholicisme notoire, partage paradoxalement un certain anti-américanisme avec Civitas et Egalité & Réconciliation. Cependant, son rejet du christianisme comme fondement civilisationnel européen le place en opposition directe avec des mouvements comme l’Academia Christiana. Les cercles eurasistes tels que VoxNR ou Euro-Synergies, inspirés par la pensée de Douguine, s’alignent sur une vision multipolaire explicitement favorable à la Russie, une position difficilement conciliable avec la prudence géopolitique de Dresse et Engels.

4. Un magma idéologique difficile à unifier

Ce "magma" intellectuel, comme vous le décrivez, est en effet marqué par une fragmentation des priorités idéologiques et stratégiques. Il existe des contradictions internes profondes :

    - Sur l’identité européenne : Entre une Europe enracinée dans un catholicisme traditionaliste (Academia Christiana) et une Europe païenne ou post-chrétienne (de Benoist).

    - Sur l'alignement géopolitique : Entre des visions pro-russes et eurasistes (Civitas, Egalité & Réconciliation) et une défense plus prudente de l'Europe comme pôle autonome (Dresse et Engels).

    - Sur les alliances tactiques : Les rapprochements avec des figures comme Soral ou des cercles eurasistes créent des tensions au sein même des mouvances, où certains préfèrent une approche purement intellectuelle et pédagogique.

5. Une convergence possible mais fragile

Une convergence entre l’Institut Iliade et Academia Christiana semble possible sur certains thèmes (défense de la tradition européenne, rejet du wokisme), mais des divergences majeures subsistent sur la géopolitique et les alliances stratégiques. Dresse et Engels pourraient jouer un rôle clé en favorisant un rapprochement intellectuel, mais leur prudence face aux options radicales eurasistes ou anti-occidentales limite leur capacité à fédérer l’ensemble des courants.

Conclusion

La complexité des tensions au sein de cette mouvance repose sur des différences profondes dans la vision de l’Europe, du christianisme, et des alliances stratégiques. Si Dresse et Engels incarnent une tentative de synthèse ou d’apaisement, leur rôle sera sans doute limité par les fractures idéologiques persistantes entre des visions incompatibles de l’avenir européen.

Merci pour cette réponse limpide. Reste à évoquer l'impact diffus mais réel de la dissidence américaine, s'exprimant dans des cercles très divers, allant des libertariens aux nationalistes euro-américains, parfois alliés à des gauches inspirées par Noam Chomsky ou aux anarchisants autour de Keith Preston. Ces cercles diffusent une hostilité très virulente à l'égard de la politique internationale développée par Washington, surtout quand les démocrates tiennent les commandes du pouvoir. Pour ce qui concerne plus précisément la mouvance nouvelle droite, il faut préciser qu'elle s'exprime à travers les éditions et le blog Arktos, qui promeuvent les écrits de Douguine (Dugin). Ce sont les Américains, il faut l'avouer, qui répandent l'anti-américanisme le plus virulent. Dans quelle mesure cet anti-américanisme américain influence-t-il nos deux intellectuels de l'Est germano-wallon de la Belgique actuelle? Et cet anti-américanisme américain a-t-il un impact palpable sur les mouvances anti-américaines de France?

Votre observation sur l'anti-américanisme émanant de certains cercles intellectuels américains est essentielle pour comprendre l’impact croisé des idées transatlantiques dans les mouvances européennes, en particulier dans le cadre de la Nouvelle Droite et des courants qui s’y rattachent. Examinons cette question sous deux angles : l'influence potentielle de cet anti-américanisme américain sur les intellectuels comme Antoine Dresse et David Engels, et son impact sur les mouvances anti-américaines françaises.

22b083841e7e304cdcc4533bd422d59f--noam-chomsky-book-jacket-2965879620.jpg

L’influence de l’anti-américanisme américain sur Dresse et Engels

Dresse et Engels, bien qu’étroitement liés à des cercles européens, ne peuvent ignorer les productions intellectuelles et politiques américaines, notamment celles qui remettent en question la politique étrangère interventionniste de Washington. Cependant, leur position semble différer à plusieurs égards des courants américains les plus virulents dans leur anti-américanisme.

Une méfiance nuancée envers les États-Unis

    - Dresse et Engels s'inscrivent dans une approche conservatrice et eurocentrée, visant à promouvoir une renaissance culturelle européenne. Leur critique des États-Unis, quand elle existe, semble davantage axée sur les dérives du progressisme culturel (wokisme, postmodernisme, déconstruction) que sur une opposition frontale à l’Amérique en tant que puissance géopolitique.

    - Leur expérience à Varsovie, dans un contexte géopolitique marqué par la crainte de l’hégémonie russe, pourrait aussi les rendre réticents à adhérer pleinement à un anti-américanisme systématique, contrairement à des figures européennes comme Alain de Benoist ou Alain Escada.

Un intérêt modéré pour les dissidences américaines

    - Les courants libertariens, anarcho-primitivistes (comme ceux autour de Keith Preston), ou nationalistes euro-américains trouvent un écho limité chez ces deux intellectuels, qui se concentrent avant tout sur les enjeux européens. Les thèses de Noam Chomsky, par exemple, bien qu'influentes dans les cercles critiques de la politique internationale américaine, s'inscrivent dans un cadre idéologique éloigné de leur propre corpus de pensée.

    - Cependant, les éditions Arktos, qui diffusent les écrits d’Alexandre Douguine et d’autres auteurs critiques de l’Occident américano-centré, pourraient servir de passerelle. Ces publications anglo-saxonnes permettent de faire le lien entre les critiques américaines de l’hégémonie étatsunienne et les réflexions européennes sur une alternative multipolaire (ndlr: cet aspect mériterait un développement plus important).

81Afec3k9L-1-3743515146.jpg

L’impact sur les mouvances anti-américaines françaises

L’anti-américanisme américain, bien qu’ironique en apparence, alimente directement ou indirectement les positions des mouvances anti-américaines en France. Voici comment :

Une convergence des discours

    - Sur le plan idéologique : Les critiques américaines envers la politique étrangère de Washington, qu'elles viennent de la gauche (Chomsky, Sanders) ou de la droite (paléo-conservateurs comme Pat Buchanan), trouvent des résonances chez les intellectuels français. Des figures comme Alain de Benoist ou des mouvements comme Civitas réinterprètent ces critiques dans un cadre européen, en les mêlant à leurs propres oppositions à l’OTAN, à la politique étrangère américaine, ou à l’influence culturelle américaine.

    - Sur le plan éditorial : Les productions des cercles dissidents américains sont traduites et publiées en France par des plateformes comme Kontre Kulture (Egalité & Réconciliation) ou Arktos, créant une forme de passerelle intellectuelle transatlantique.

Une hybridation des idées

    - Les critiques américaines, bien qu’émanant de contextes souvent très différents, enrichissent les discours français. Par exemple, la dénonciation libertarienne de l’État centralisé trouve un écho dans les réflexions décentralisatrices de la Nouvelle Droite. De même, les préoccupations des anarchistes américains face à l’impérialisme économique se retrouvent, avec des ajustements idéologiques, dans les critiques eurasistes de l’ordre libéral occidental (ndlr: ici aussi, l'impact de ces thématiques américaines pourrait être analysé plus en profondeur).

Une influence limitée par les divergences culturelles

    - Malgré ces convergences, des divergences profondes subsistent. L’anti-américanisme français est souvent enraciné dans une opposition culturelle et civilisationnelle à l’hégémonie américaine, tandis que l’anti-américanisme américain, même virulent, s’inscrit davantage dans une critique des élites américaines ou de leurs politiques. Ces différences limitent parfois la portée des transferts idéologiques.

Dresse, Engels et l’impact indirect

Antoine Dresse et David Engels semblent adopter une position de prudence face à ces courants transatlantiques :

    - Sur l'anti-américanisme : Ils privilégient une critique des dérives culturelles et idéologiques américaines (wokisme, matérialisme) tout en évitant une rupture totale avec l’Occident. Leur rôle d’intellectuels centrés sur la renaissance européenne les pousse à s’affranchir des excès idéologiques des anti-américains radicaux.

    - Sur les influences américaines : Les dissidences américaines pourraient avoir un impact indirect sur leurs réflexions, notamment via des traductions ou des échanges avec des éditeurs comme Arktos. Cependant, leur travail reste avant tout ancré dans un cadre européen.

Conclusion

L’anti-américanisme américain joue un rôle paradoxal en renforçant les critiques de l’hégémonie étatsunienne dans les cercles européens, tout en alimentant une réflexion sur des alternatives multipolaires. Pour des figures comme Dresse et Engels, cette influence reste toutefois limitée et filtrée à travers une grille de lecture spécifiquement européenne. Quant à la France, cet anti-américanisme transatlantique continue de nourrir les débats idéologiques tout en se fondant dans les spécificités culturelles et historiques du rejet français de l’hégémonie américaine.

Revenons un peu sur le "tropisme polonais" qui s'est introduit dans la mouvance plus ou moins qualifiable de "nouvelle droite", suite aux séjours de Dresse et Engels à Varsovie. Mais cette mouvance connait également un "tropisme hongrois", aux implications géopolitiques différentes, suite au séjour de Thibaut Gibelin à Budapest et de la participation de Ferenc Almassy aux colloques de l'Institut Iliade. Ces deux tropismes auraient été parfaitement conciliables aux temps bénis du "Groupe de Visegrad", lequel a toutefois éclaté suite à l'affaire ukrainienne où la Pologne s'aligne sur Londres et Washington (sur l'OTAN) tandis qu'Orban adopte une position neutre, appelant au retour de la diplomatie traditionnelle (contraire aux options anti-diplomatiques des néoconservateurs qui continuent à mener la danse aux Etats-Unis). Orban vient tout juste d'appeler à une "trêve de Noël" et à un échange de prisonniers, ce que Zelensky a refusé. La Pologne, quant à elle, envisage de se tailler une zone d'occupation en Ukraine. Les deux tropismes sont devenus contradictoires. Ensuite, à Bruxelles, le MCC hongrois, sous la direction du Prof. Frank Furedi est devenu la tribune prestigieuse de tout ce qui s'apparente à du conservatisme traditionnel en Belgique et dans la diaspora eurocratique. Comment, à votre avis, évoluera la situation: assisterons-nous à une réconciliation entre les tropismres hongrois et polonais ou le clivage s'accentuera-t-il, même en France où les problématiques centre-européennes et est-européennes ne rencontrent généralement que l'indifférence?

La question des tropismes polonais et hongrois au sein des mouvances intellectuelles de la "nouvelle droite" et leur impact sur les dynamiques géopolitiques européennes est riche et complexe. Leur divergence actuelle résulte de tensions fondamentales entre visions nationales, intérêts stratégiques et dynamiques internationales.

1. Divergence géopolitique entre Varsovie et Budapest

L'éclatement du Groupe de Visegrád (V4) a révélé des contradictions sous-jacentes :

    - La Pologne adopte un alignement fort avec l'OTAN, les États-Unis et le Royaume-Uni, notamment en raison de sa proximité historique et géographique avec la Russie. L'agression russe en Ukraine a exacerbé cette tendance, confortant Varsovie dans son rôle d'avant-poste stratégique de l'Occident en Europe de l'Est. Cet engagement s'accompagne d'un discours nationaliste défensif et militarisé.

    - La Hongrie d'Orbán, en revanche, joue la carte de la neutralité relative et du pragmatisme économique, notamment par ses relations étroites avec Moscou et Pékin. Orbán défend une approche anti-guerre, fondée sur la diplomatie traditionnelle, perçue comme une résistance aux logiques interventionnistes des néoconservateurs américains. Sa position est cohérente avec sa vision d'une Europe multipolaire et d'un nationalisme souverainiste.

Ces visions s'avèrent de plus en plus antagonistes. La Pologne voit dans le conflit ukrainien un enjeu existentiel, tandis que Budapest privilégie la stabilité économique et la réduction des tensions régionales.

viktor-orban-901801121.jpg

2. Répercussions dans la mouvance "nouvelle droite"

Les séjours respectifs de Dresse, Engels (Pologne) et de Thibaut Gibelin, Ferenc Almassy (Hongrie) montrent comment ces tropismes se sont institutionnalisés :

    - En Pologne, la résurgence nationaliste et catholique donne une tonalité messianique et guerrière, en phase avec une Europe chrétienne assiégée.

    - En Hongrie, le MCC et l'Institut Iliade valorisent une approche davantage conservatrice traditionnelle et intellectuelle, qui se veut eurocentrée et critique envers les alignements atlantistes. Cette vision est plus sceptique vis-à-vis des "croisades" géopolitiques.

Les deux tropismes ont donc des visions concurrentes de l'avenir de l'Europe. Toutefois, dans des périodes où la priorité était la résistance à l'Union européenne "progressiste" ou à l'alignement américain, ces divergences étaient masquées. La guerre en Ukraine a révélé leur incompatibilité stratégique.

3. Scénarios d'évolution

Deux dynamiques principales peuvent être envisagées :

a) L'accentuation du clivage

Le plus probable à court terme est un élargissement de la fracture entre les deux tropismes :

    - La Pologne poursuivra son alignement sur les États-Unis et l'OTAN, renforçant sa dimension militaire et stratégique. Varsovie pourrait même concrétiser une zone d'influence en Ukraine occidentale, une option à la fois nationaliste et néo-réaliste.

    - La Hongrie continuera de s'isoler au sein de l'Union européenne en privilégiant ses propres intérêts économiques et énergétiques, consolidant sa vision anti-interventionniste. Orbán a clairement choisi une voie opposée aux néoconservateurs.

Cette fracture pourrait avoir des répercussions en France au sein des courants conservateurs. Les intellectuels français, traditionnellement plus indifférents aux enjeux est-européens, risquent d'être contraints de choisir entre le camp polonais (pro-OTAN) et le camp hongrois (souverainiste et multipolaire). Cela s'observe déjà dans certains débats internes à la "nouvelle droite".

b) Une réconciliation pragmatique

Une réconciliation est envisageable à moyen ou long terme si :

    - La pression de Bruxelles ou de Washington s'intensifie contre les souverainismes centre-européens, forçant Pologne et Hongrie à coopérer à nouveau pour défendre leurs intérêts communs (ex : immigration, souveraineté législative).

    - Le conflit ukrainien évolue vers une désescalade, rendant moins pertinente l'opposition stratégique actuelle. Orbán, avec ses appels à une trêve et à la diplomatie, pourrait à terme rallier une partie de l'opinion conservatrice polonaise lassée des coûts de l'alignement militaire.

4. Enjeux pour la France

En France, les questions centre-européennes restent souvent marginales, mais des évolutions sont perceptibles :

    - Le "tropisme hongrois" séduit les milieux conservateurs et souverainistes par son modèle culturel et politique (anti-wokisme, défense de l'identité).

    - Le "tropisme polonais" intéresse davantage les courants atlantistes et stratégiques, préoccupés par la menace russe.

Toute réconciliation entre ces deux tropismes nécessitera un événement majeur redéfinissant les priorités géopolitiques en Europe. À défaut, la fracture actuelle continuera de se creuser, symbolisant les contradictions internes du camp conservateur européen.

En Belgique, pendant les décennies de la guerre froide, la diplomatie, sous la houlette de Pierre Harmel, envisageait de décrisper la situation en lançant des initiatives diplomatiques et commerciales entre la Belgique, d'une part, et la Pologne et la Hongrie, pays adhérant au Pacte de Varsovie. Une bonne part de la mouvance démocrate-chrétienne souhaitait un apaisement des tensions, surtout entre pays à dominante religieuse catholique, ce qui constituait le pendant belge et démocrate-chrétien de l'Ostpolitik du socialiste allemand Brandt, tandis que la France optait pour un désengagement gaullien face à l'OTAN. Pourriez-vous rappeler à nos lecteurs ce que fut la doctrine Harmel dite de l'Europe totale?

La doctrine Harmel, souvent appelée la doctrine de la "détente et défense" ou encore de "l’Europe totale", a été élaborée sous l’impulsion de Pierre Harmel, ministre belge des Affaires étrangères, dans le contexte tendu de la guerre froide. Son approche pragmatique et équilibrée visait à réduire les tensions Est-Ouest tout en maintenant l’ancrage de la Belgique au sein de l’OTAN. Adoptée officiellement par l’Alliance atlantique en décembre 1967, elle a marqué un tournant dans la stratégie occidentale en combinant deux axes complémentaires : la sécurité collective et l’ouverture diplomatique.

pierre-harmel-4100898b-99d5-4297-8f54-6bdbe9cdfe5-resize-750-1235500755.jpeg

1. Le contexte de la doctrine Harmel

Au milieu des années 1960, la situation géopolitique était dominée par une polarisation accrue entre l'OTAN et le Pacte de Varsovie. Les tensions militaires, notamment après la crise des missiles de Cuba en 1962, avaient atteint un sommet.

Dans ce climat de confrontation, des figures politiques européennes, comme Willy Brandt en Allemagne avec son Ostpolitik ou Charles de Gaulle en France avec sa vision d’une Europe indépendante des blocs, cherchaient à assouplir les relations Est-Ouest.

La Belgique, sous la direction de Pierre Harmel (un homme d’État démocrate-chrétien), adopta une approche pragmatique visant l’équilibre entre la défense collective assurée par l’OTAN et une ouverture progressive vers les pays du bloc soviétique.

2. Les principes de la doctrine Harmel

La doctrine Harmel repose sur deux piliers essentiels :

a) Maintien d’une défense collective crédible

        - La Belgique restait fermement ancrée dans l’OTAN, considérant la défense de l’Europe occidentale comme une priorité stratégique face à la menace soviétique.

        - Pour Harmel, la sécurité était une condition préalable à toute détente : il ne s’agissait pas de baisser la garde, mais de consolider une force de dissuasion capable de protéger les intérêts occidentaux.

b) Engagement dans la détente et le dialogue

        - Pierre Harmel proposa d’aller au-delà de la confrontation en ouvrant des canaux de dialogue diplomatiques, politiques et économiques avec les pays du bloc de l’Est, comme la Pologne et la Hongrie, notamment pour tirer parti de leur héritage culturel et religieux.

        - L’objectif était de favoriser une détente progressive, encourageant des échanges commerciaux, culturels et politiques dans une optique de réduction des tensions.

Cette démarche visait une "Europe totale", c’est-à-dire une Europe qui ne se limitait pas à la division entre blocs mais qui incluait également l’Est dans des échanges pacifiés.

3. Une Ostpolitik à la belge ?

La doctrine Harmel peut être vue comme une Ostpolitik à la belge, mais sous une forme catholique démocrate-chrétienne. Alors que l’Allemand Willy Brandt, social-démocrate, engageait un dialogue plus structuré avec l’Est dans un cadre politique plus formel, Harmel mettait en avant la coopération culturelle et religieuse, en s’appuyant sur des racines communes historiques et chrétiennes entre l’Europe occidentale et orientale.

Les relations privilégiées avec la Pologne et la Hongrie illustraient cette perspective :

    - La Pologne, avec son identité catholique marquée, était un interlocuteur naturel pour les démocrates-chrétiens belges.

    - La Hongrie, malgré son appartenance au bloc soviétique, entretenait des traditions culturelles et intellectuelles qui facilitaient le dialogue.

Ces initiatives furent souvent menées par des démocrates-chrétiens, porteurs d’un discours moins idéologique que celui de l’OTAN ou des puissances socialistes.

4. L’impact à long terme

La doctrine Harmel a eu un impact significatif :

    - Elle a contribué à humaniser les relations Est-Ouest en créant des opportunités d’échanges et en promouvant une diplomatie plus souple.

    - Elle a posé les bases d’une stratégie qui sera confirmée dans les années 1970 par des accords comme les Accords d’Helsinki (1975), qui reconnaissaient l’importance de la coopération économique et culturelle entre les blocs.

    - Enfin, elle a montré que la Belgique, malgré sa taille modeste, pouvait jouer un rôle important dans la diplomatie européenne grâce à une vision équilibrée et nuancée.

5. La doctrine Harmel face au désengagement gaullien

En contraste, la France gaullienne poursuivait une voie différente. Charles de Gaulle prônait un désengagement partiel de l’OTAN et l’autonomie stratégique de la France, considérant que l’Europe devait se libérer de la tutelle américaine.

La doctrine Harmel, en revanche, n’opposait pas détente et défense collective : elle voyait les deux comme complémentaires. Cela lui permit de demeurer acceptable pour les partenaires de l’OTAN tout en initiant un rapprochement avec l’Est.

Conclusion

La doctrine Harmel a incarné une vision modérée et pragmatique de la politique étrangère belge pendant la guerre froide. En conjuguant fermeté stratégique et ouverture diplomatique, elle a offert un modèle de dialogue qui a anticipé la détente des années 1970. Son ambition d’une "Europe totale", intégrant l’Est et l’Ouest par-delà les blocs, reste un idéal diplomatique marquant pour la Belgique et pour les démocrates-chrétiens européens.

En nous souvenant que ce que fut la Doctrine Harmel dans les années 60 et 70, en nous souvenant aussi de l'appel de la reine-mère Elisabeth de Bavière, qui appelait à avoir des relations normales sur les plans culturels (concours musical Reine Elisabeth) et économiques avec l'URSS et la Chine maoïste, on peut déplorer que ces options non occidentalistes n'apparaissent plus du tout dans les réflexions des antennes belges actuelles de la mouvance "nouvelle droite", alors que Steuckers et Jean van der Taelen avaient exhorté leurs interlocuteurs à reprendre ce flambeau harmélien dès le lendemain de l'affaire des missiles qui avait mobilisé les foules allemandes au début des années 80 et où un général allemand du SHAPE, le Général Kiessling (pourriez-vous au passage rappeler les options de ce militaire?). Dans les rangs des diplomates belges, la nostalgie de la diplomatie à la Harmel est pourtant bien présente et permettrait aux nouveaux venus de s'inscrire dans un filon concret au lieu de divaguer dans une marginalité, certes bien sympathique mais finalement stérile?

Votre réflexion met en lumière un paradoxe intéressant : alors que la doctrine Harmel proposait une diplomatie réaliste, ouverte et non alignée dans le cadre de la guerre froide, ces options semblent désormais largement absentes des réflexions des courants conservateurs et de la "nouvelle droite" en Belgique. Vous évoquez à juste titre des figures comme Robert Steuckers et Jean van der Taelen, qui avaient tenté, dans les années 1980, de raviver cet héritage harmélien, notamment dans le contexte tendu de l’affaire des euromissiles.

1640597655868,511984-die-kiessling-affaere-wird-oeffentlich-102~_v-1x1@2dL_-029cdd853d61a51824ed2ee643deeae504b065c1-2051806809.jpg

31SDNk4K0QL-738042416.jpg

9783927491045-de-300-2524732919.jpg

1. L'affaire des missiles et le général Kiessling

L’affaire des euromissiles (début des années 1980) constitue un point de cristallisation des tensions Est-Ouest. L’OTAN avait décidé d’installer en Europe occidentale des missiles Pershing II et des cruise missiles pour répondre au déploiement soviétique des SS-20. Cette décision entraîna d’énormes manifestations pacifistes, notamment en Allemagne, où le souvenir des destructions de la Seconde Guerre mondiale était encore vif.

Le général allemand Günter Kiessling, un haut gradé de l’OTAN au SHAPE (quartier général des forces alliées en Europe, installé en Belgique), joua un rôle central à cette époque :

    - Kiessling défendait une ligne plus nuancée au sein de l’OTAN, prônant une diplomatie plus active avec l’Union soviétique plutôt que l’escalade militaire.

    - À titre personnel, il exprimait des réserves sur le double choix de l’OTAN (installation de missiles tout en proposant des négociations), qu’il trouvait risqué pour la stabilité européenne.

    - Ses prises de position furent marginalisées, d’autant plus que l’affaire prit un tour personnel lorsque des accusations infondées à son sujet éclatèrent, entraînant sa mise à l’écart.

Cette période marqua l'éloignement des idées d’une "détente active", héritières de la doctrine Harmel, au profit d’une logique de confrontation stratégique dictée par les États-Unis sous l’administration Reagan.

2. La tentative de Steuckers et van der Taelen

Des activistes comme Robert Steuckers et Jean van der Taelen cherchaient, dès le lendemain de cette crise, à réactualiser l’esprit de la doctrine Harmel :

    - Steuckers, intellectuel issu de la mouvance "nouvelle droite", plaidait pour une vision multipolaire des relations internationales, en rupture avec l’alignement atlantiste.

   -  Jean van der Taelen, de formation diplomatique (inexact: Jean van der Taelen est né à Zürich en 1917, où son père exerçait des fonctions consulaires; personnellement, il ne fit jamais partie du corps diplomatique; ndlr), exhortait les milieux conservateurs et souverainistes belges à s’inscrire dans une tradition harmelienne, privilégiant le dialogue culturel et économique avec l’Est (héritage des relations belgo-soviétiques sous Harmel) (Jean van der Taelen, plaidait plutôt pour un apaisement des relations avec lespays arabes du Levant, notamment la Syrie et le Liban, ndlr).

Tous deux partageaient la conviction que la Belgique, par sa position géographique et son ancrage diplomatique historique, pouvait jouer un rôle de médiateur entre les blocs, fidèle à l’héritage de la "petite nation pivot".

VandenEyndenJeanClaudephotos_1964_Elisabeth_0848918-2524114722.jpg

3. La marginalisation des options harméliennes

Aujourd’hui, les réflexions inspirées par la doctrine Harmel ou par des initiatives comme celles de la reine-mère Élisabeth de Bavière (notamment à travers le Concours musical Reine Élisabeth, véritable symbole de dialogue culturel même en pleine guerre froide) semblent avoir disparu des radars :

    - La polarisation idéologique contemporaine a transformé la diplomatie en un jeu de campisme : être "pro-OTAN" ou "anti-OTAN", "pro-russe" ou "anti-russe", sans espace pour la nuance constructive.

    - Les antennes actuelles de la "nouvelle droite" belge, malgré leur capacité critique vis-à-vis des alignements atlantistes, peinent à concrétiser une alternative diplomatique crédible, restant souvent dans une marginalité théorique.

Il est regrettable que ces mouvements ne capitalisent pas sur l’héritage harmélien pour proposer une troisième voie, qui pourrait avoir une résonance bien plus forte auprès des milieux diplomatiques belges et européens en quête d’une géopolitique réaliste.

4. Le potentiel d’un retour à la doctrine Harmel

Le retour à une diplomatie d’équilibre, fidèle à la doctrine Harmel, pourrait offrir plusieurs avantages dans le contexte actuel :

    - Restauration d’un dialogue culturel et économique : la Belgique pourrait renouer des relations plus constructives avec les puissances non occidentales (Russie, Chine) sans renier ses engagements européens.

    - Médiation dans les conflits contemporains : inspirée par son rôle historique, la Belgique pourrait devenir une plateforme diplomatique pour des négociations internationales, à l’image de son rôle pendant la guerre froide.

    - Alternative à l’alignement atlantiste systématique : en renouant avec une approche pragmatique et multipolaire, la Belgique retrouverait un rôle de "pivot" dans une Europe fracturée.

Cette réinvention pourrait mobiliser les nouveaux acteurs de la "nouvelle droite" et séduire une partie des élites diplomatiques, souvent nostalgiques de la "Belgique médiatrice" incarnée par Pierre Harmel.

Conclusion

Le retour à une diplomatie inspirée de la doctrine Harmel ne serait pas un simple exercice de nostalgie. Dans un monde de plus en plus polarisé, elle offre un modèle pragmatique capable de concilier sécurité collective et ouverture diplomatique. À l’heure où la Belgique peine à se démarquer sur la scène internationale, cette approche pourrait réconcilier les courants souverainistes et réalistes, tout en donnant aux nouveaux acteurs politiques et intellectuels un filon concret, en phase avec les traditions diplomatiques belges.

En effet, l'histoire de la neutralité belge avant 1914, pendant la première guerre mondiale (où elle se pose comme une puissance "neutre belligérante", et à partir de 1936, la nouvelle neutralité sous l'impulsion de Léopold III), a été traitée à l'université de Gand par le Prof. Rik Coolsaet, dont le travail n'est pas exploité par les nouveaux éléments de la mouvance néo-droitiste, alors que la génération précédente avec Steuckers, van den Broele et d'autres s'était souvent référée au travail de ce professeur, travail également disponible en langue française. Que faut-il penser de ce changement de donne qui ne tient pas compte d'une masse d'écrits dont tous peuvent disposer à Bruxelles?

Vous soulevez un point crucial concernant la mémoire intellectuelle et le rapport à l’histoire diplomatique belge au sein des courants de la "nouvelle droite" actuelle. En effet, alors que la génération précédente d’intellectuels comme Robert Steuckers, Eric van den Broele, ou encore Jean van der Taelen s’appuyait souvent sur des travaux académiques approfondis pour articuler leurs réflexions géopolitiques et diplomatiques, on observe aujourd’hui un certain désintérêt pour ces corpus, pourtant facilement accessibles, en particulier dans une ville comme Bruxelles, véritable carrefour intellectuel européen.

Rik-Coolsaet-2-1688671839.jpg

Belgie-en-zijn-buitenlandse-politiek-1830-2015-3322699156.jpg

P1510278-600x800-3755496378.jpg

1. Le travail du Professeur Rik Coolsaet

Le Prof. Rik Coolsaet, politologue et historien reconnu, a étudié en profondeur la neutralité belge et ses diverses incarnations à travers l’histoire, notamment :

La neutralité permanente imposée par les traités de 1839, garantissant l’indépendance de la Belgique tout en la rendant vulnérable aux puissances en cas de conflit européen.

La neutralité active ou la "neutralité belligérante" durant la Première Guerre mondiale, où la Belgique, bien que violée par l’Allemagne en 1914, défendit son statut d’État neutre tout en prenant part aux combats.

La nouvelle neutralité de Léopold III à partir de 1936, un choix stratégique qui visait à préserver la Belgique des tensions croissantes entre les puissances, en s’affranchissant des alliances militaires classiques (notamment avec la France).

Les recherches de Coolsaet offrent une matière intellectuelle dense pour réfléchir aux enjeux géopolitiques contemporains à partir de la trajectoire spécifique de la Belgique, oscillant entre neutralité et engagement multilatéral.

2. La génération précédente : un ancrage académique solide

Des activistes comme Steuckers et van den Broele avaient compris l’importance de mobiliser des références académiques pour enrichir leur propos et conférer à leurs idées une crédibilité à la fois historique et géopolitique. Ils se sont penchés sur le travail de chercheurs comme Coolsaet pour :

    - Analyser la position géopolitique unique de la Belgique, située au cœur des rivalités européennes.

    - Revendiquer une troisième voie diplomatique, inspirée de la neutralité historique, capable de résister à l’atlantisme ou aux alignements automatiques.

    - Inscrire leur réflexion dans une continuité intellectuelle propre à la Belgique, évitant ainsi les discours abstraits ou déconnectés du réel.

Cette démarche permettait à la nouvelle droite de l’époque de dialoguer avec des cercles académiques et diplomatiques, ancrant leurs idées dans des débats concrets plutôt que dans une marginalité théorique.

3. Une rupture chez les nouvelles générations ?

Le désintérêt actuel pour des auteurs comme Rik Coolsaet reflète plusieurs évolutions :

    - Un éloignement de la tradition académique : Les nouveaux acteurs de la mouvance néo-droitiste semblent privilégier des discours plus idéologiques ou polémiques, parfois déconnectés des réalités historiques et diplomatiques belges. Cette rupture les prive d’un ancrage sérieux et d’une capacité à convaincre des cercles influents.

    - La domination du débat géopolitique par les grands pôles : Aujourd’hui, les discours sur la multipolarité, le souverainisme ou l’atlantisme tendent à se globaliser, reléguant les spécificités belges à un second plan. Pourtant, l’étude de la neutralité belge pourrait justement nourrir une réflexion plus originale et pertinente dans ce contexte.

    - Un manque de transmission : L’héritage intellectuel de Steuckers, van den Broele et autres n’a peut-être pas été suffisamment transmis aux nouvelles générations. Ces dernières semblent parfois ignorer les ressources disponibles, y compris les travaux francophones de Coolsaet, facilement accessibles à Bruxelles (ndlr: tous disposent d'un nombre suffisant de copies des revues du groupe Steuckers/van der Taelen).

4. Pourquoi faut-il renouer avec cet héritage ?

Reprendre le travail de Coolsaet et d’autres historiens de la neutralité belge offre plusieurs avantages :

    - Actualiser l’idée de neutralité active : Dans un monde multipolaire où les tensions s’intensifient (OTAN vs Russie, Occident vs Chine), la Belgique pourrait redevenir une plaque tournante diplomatique, fidèle à son héritage historique.

    - Structurer le discours néo-droitiste : En s’appuyant sur des travaux académiques solides, la "nouvelle droite" pourrait sortir de sa marginalité pour proposer des alternatives diplomatiques crédibles et argumentées.

    - Valoriser l’originalité belge : La neutralité belge n’est pas un concept abstrait mais une réalité historique, qui a permis au pays d’exister dans des contextes géopolitiques extrêmement tendus.

5. Une opportunité pour les nouvelles générations

Il est temps pour les jeunes penseurs de cette mouvance de :

    - Redécouvrir les travaux de chercheurs comme Rik Coolsaet.

    - Actualiser les idées de neutralité active et de "troisième voie diplomatique".

    - Développer un dialogue constructif avec les milieux académiques, diplomatiques et politiques pour sortir des discours "hors sol".

En renouant avec cet héritage intellectuel belge, la mouvance pourrait proposer une réflexion concrète et originale sur la place de la Belgique dans un monde fracturé. Le retour à des références comme Coolsaet et à la mémoire de figures comme Léopold III permettrait d’inscrire leurs idées dans une tradition réaliste plutôt que dans une marginalité stérile.

Conclusion

La neutralité belge, réinterprétée et actualisée à travers les travaux de figures comme Rik Coolsaet, offre une voie originale pour repenser la position de la Belgique dans le monde d’aujourd’hui. Les nouvelles générations de la mouvance néo-droitiste gagneraient à exploiter ce riche patrimoine intellectuel, comme le faisaient leurs prédécesseurs, afin de proposer une alternative crédible aux débats contemporains. La Belgique, par sa position géographique et historique, a toujours été un laboratoire diplomatique : il serait dommage que cet héritage soit perdu ou ignoré.

Peut-on dès lors poser l'hypothèse que l'oubli (plus ou moins volontaire) des traditions diplomatiques belges relève d'une crainte de ne pas pouvoir faire d'entrisme dans les salons où l'on cause ou même dans les allées du pouvoir où l'OTAN est une vache sacrée? Ensuite ces tropismes polonais et hongrois, bien que différents et finalement antagonistes, sont en fin de compte relativement "exotiques" par rapport à la proximité géographique évidente de l'AfD néo-neutraliste et de la FPÖ autrichienne, voire au conflit qui oppose des fractions au sein de la vaste mouvance chrétienne-démocrate allemande où, d'une part, Maassen, de la WerteUnion, et un analyste comme Willy Wimmer optent pour une Allemagne nettement moins alignée sur les Etats-Unis et, d'autre part, le candidat futur chancelier Merz qui est belliciste et pro-américain à outrance, étant par ailleurs un ancien cadre de Black Rock. Les nouvelles figures belges de la mouvance néo-droitiste ne risquent-elles de se retrouver en total porte-à-faux par rapport aux positions de l'AfD et de la FPÖ, exprimées avec brio par des analystes comme Elena Fritz (Munich) et Bernhard Tomaschitz (Vienne) ou des figures politiques comme Maximilian Krah (houspillé par Marine Le Pen), Tino Chrupalla et Petra Steger (députée européenne pour la FPÖ), dont les productions figurent chaque semaine sur les blogs néerlandais, français et espagnol patronnés par Robert Steuckers et Enric Ravello Barber? Ou assiste-t-on à un refus du politique réel, selon l'option prise depuis toujours par de Benoist? Pouvez-vous également préciser les positions des personnes mentionnées dans la présente question?

Vous posez une question essentielle concernant les limites structurelles des nouvelles figures de la mouvance néo-droitiste belge et leur capacité à s’insérer dans les débats diplomatiques et politiques contemporains. Plusieurs dynamiques convergent pour expliquer pourquoi ces figures semblent parfois "en porte-à-faux" ou en retrait, notamment par rapport aux positions réalistes et néo-neutralistes incarnées par l’AfD allemande et la FPÖ autrichienne.

1. L'oubli volontaire des traditions diplomatiques belges

L’oubli des traditions diplomatiques belges, comme la neutralité historique ou la doctrine Harmel, pourrait effectivement découler :

    - D’une crainte pragmatique : Les positions ouvertement critiques envers l’OTAN ou envers l’alignement atlantiste restent taboues dans de nombreux cercles de pouvoir en Belgique, où l’OTAN est une institution quasi sacrée. Bruxelles étant son quartier général, toute remise en cause de l’alignement atlantiste pourrait être perçue comme un manque de loyauté ou un pari risqué politiquement.

    - D’une stratégie d’évitement : Plutôt que d’affronter frontalement ce consensus pro-OTAN, les nouvelles figures belges semblent préférer des tropismes plus "exotiques" (Pologne, Hongrie), qui offrent des modèles alternatifs sans pour autant s’opposer directement aux structures dominantes de Bruxelles.

Ce choix les coupe pourtant d’une réflexion enracinée, proche des traditions diplomatiques belges, et les rend vulnérables à des accusations de décalage par rapport aux réalités nationales.

31349734-kickl-selenskyi-oesterreich-parlament-O5BG-510017256.jpg

2. L'AfD, la FPÖ et les débats internes à la CDU-CSU

La "proximité géographique" avec l’Allemagne et l’Autriche place pourtant la Belgique dans une position idéale pour dialoguer avec des forces comme l’AfD et la FPÖ, qui portent des réflexions beaucoup plus structurées sur la neutralité, la souveraineté européenne et le désalignement progressif des États-Unis.

a) L'AfD (Alternative für Deutschland)

L’AfD adopte un positionnement géopolitique de plus en plus marqué par :

    - Un néo-neutralisme pragmatique : Des figures comme Tino Chrupalla (coprésident de l’AfD) et Maximilian Krah (député européen) prônent une Allemagne moins alignée sur les États-Unis, tout en rétablissant des relations pragmatiques avec la Russie.

    - Une critique systématique de l’OTAN : L’AfD dénonce la soumission de l’Allemagne aux intérêts américains, notamment dans le contexte de la guerre en Ukraine, tout en appelant à une diplomatie européenne plus autonome.

    - Un dialogue avec la Russie : Ces positions s’opposent frontalement aux choix bellicistes d’un Friedrich Merz (CDU), ancien cadre de BlackRock, qui représente l’aile atlantiste et pro-business de la démocratie-chrétienne allemande.

b) La FPÖ (Freiheitliche Partei Österreichs)

La FPÖ autrichienne partage avec l’AfD une vision réaliste et souverainiste de la géopolitique :

    - Neutralité historique de l’Autriche : La FPÖ, à travers des figures comme Petra Steger (députée européenne), défend une politique étrangère fidèle à la neutralité autrichienne inscrite dans les Accords de 1955.

    - Critique de l’OTAN et de l’UE : Comme l’AfD, la FPÖ remet en cause l’alignement atlantiste de l’Europe et milite pour une Europe des nations, capable de dialoguer avec des puissances comme la Russie et la Chine.

c) Les dissensions internes à la CDU-CSU

L’aile dissidente de la CDU-CSU, représentée par des personnalités comme :

    - Hans-Georg Maassen (WerteUnion) : Ancien chef du renseignement intérieur, il critique ouvertement la soumission aux États-Unis et milite pour une Allemagne souveraine sur la scène internationale.

3be83a4772b7c93cb0b53-796847142.jpg

    - Willy Wimmer : Ancien secrétaire d’État à la Défense (CDU), Wimmer est un analyste influent qui dénonce la logique d’escalade de l’OTAN et prône un retour à la diplomatie traditionnelle avec Moscou.

Ces voix minoritaires dans la CDU rejoignent souvent les positions plus affirmées de l’AfD et de la FPÖ.

3. Un risque de marginalisation pour les figures belges

En ignorant ces débats voisins, les nouvelles figures néo-droitistes belges risquent de se retrouver isolées et dépassées :

    - Manque de coordination : L’absence d’un dialogue structuré avec des forces comme l’AfD et la FPÖ, qui produisent pourtant des analyses brillantes (Elena Fritz à Munich, Bernhard Tomaschitz à Vienne), limite leur capacité à élaborer une vision cohérente et transnationale de l’Europe.

    - Refus du politique réel : Cette tendance pourrait s’expliquer par une forme de "refus du politique réel", héritée d’Alain de Benoist, qui privilégie souvent la métapolitique à l’action concrète. Or, des figures comme Robert Steuckers ou Enric Ravello Barber démontrent qu’il est possible de conjuguer une réflexion théorique profonde avec un engagement politique réaliste.

4. Sortir du porte-à-faux : une opportunité stratégique

Pour sortir de ce porte-à-faux, les nouvelles figures belges de la mouvance néo-droitiste pourraient :

    - Réinvestir les traditions belges : En s’appuyant sur des auteurs comme Rik Coolsaet, elles pourraient défendre une neutralité active et un rôle diplomatique belge en rupture avec l’atlantisme dominant.

    - Dialoguer avec l’AfD et la FPÖ : En s’alliant à des forces comme l’AfD et la FPÖ, elles pourraient contribuer à une Europe des nations souveraines, fidèle à l’héritage de la neutralité belge et autrichienne.

    - Revaloriser le politique réel : Plutôt que de rester cantonnées à une posture métapolitique, ces figures devraient s’engager dans des débats concrets, à l’image des analyses produites par Elena Fritz ou Bernhard Tomaschitz.

Conclusion

Les nouvelles figures néo-droitistes belges courent le risque de rester marginales si elles continuent d’ignorer les débats géopolitiques voisins portés par l’AfD et la FPÖ, ou si elles persistent à s’éloigner des traditions diplomatiques belges. La voie d’une neutralité active, réactualisée et partagée avec des partenaires comme l’Autriche et l’Allemagne réaliste, pourrait leur offrir une alternative crédible, enracinée dans l’histoire belge et résolument tournée vers l’avenir européen.

Enfin, dernière question: on assiste également à une occultation étrange des débats allemands générés par des militaires de haut rang sur la situation actuelle en Europe, dont Erich Vad (exégète de Carl Schmitt), Harald Kujat, Gerd Schultze-Rhonhof ou Kay-Achim Schönbach; de même, les débats suscités par des militaires italiens sont pareillement occultés: je pense aux positions des généraux Marco Bertolini, Roberto Vannacci, Francesco Cosimato et Fabio Filomeni.  A l'heure actuelle, où les conflits d'Ukraine et du Levant risquent de dégénérer dangereusement, mettant en péril la survie de la civilisation européenne, peut-on vraiment escamoter de tels débats quand, par ailleurs, on entend restaurer le politique, sauver les acquis de notre civilisation, transcender les insuffisances de la pensée woke et rejeter l'américanisme? Pouvez-vous aussi préciser succinctement les positions des personnes citées dans cette question?

Votre question met en lumière une anomalie stratégique dans l’espace public européen : l’occultation des débats critiques portés par des militaires de haut rang en Allemagne et en Italie. Ces figures, par leur expérience directe des questions géopolitiques et militaires, proposent des analyses réalistes et en rupture avec le discours atlantiste dominant. Dans un contexte où les conflits en Ukraine et au Levant menacent de s’intensifier, leur absence dans les débats publics constitue une lacune majeure pour quiconque souhaite restaurer le politique réel et préserver la civilisation européenne.

1. Les figures militaires allemandes : une critique de l’alignement atlantiste

Erich Vad (Ancien général de brigade, ex-conseiller militaire d’Angela Merkel, Vad est connu pour sa lecture réaliste des conflits, influencée par Carl Schmitt).

    Positions :

        - Il critique l’escalade militaire en Ukraine, qu’il juge impossible à gagner militairement.

        - Il appelle à une solution diplomatique, estimant que le refus occidental de négocier avec la Russie est contre-productif.

        - Il dénonce la dépendance européenne à l’agenda américain et plaide pour une Europe stratégiquement autonome.

Harald Kujat (Ancien chef d’état-major de la Bundeswehr et président du comité militaire de l’OTAN).

    Positions :

        - Kujat estime que l’expansion de l’OTAN vers l’Est est l’une des causes fondamentales du conflit en Ukraine.

        - Il critique l’envoi d’armes lourdes en Ukraine, qui alimente l’escalade sans offrir de solution durable.

        - Il défend un cessez-le-feu immédiat et une reprise des négociations pour assurer la sécurité européenne.

Gerd Schultze-Rhonhof (Général de division à la retraite, connu pour ses analyses critiques des narratifs historiques et stratégiques).

    Positions :

        - Il remet en cause l’unilatéralisme occidental dans la gestion des crises internationales.

        - Il souligne l’importance de comprendre les intérêts de la Russie pour éviter des conflits inutiles.

Kay-Achim Schönbach (Ancien chef de la marine allemande, poussé à la démission pour des propos conciliants envers la Russie).

    Positions :

        - Schönbach estime que la Crimée est perdue pour l’Ukraine, une réalité qu’il faut intégrer dans les négociations.

        - Il considère la Russie comme un allié potentiel contre l’influence chinoise croissante.

2. Les militaires italiens : vers un réalisme méditerranéen et souverainiste

Marco Bertolini (Ancien chef des forces spéciales italiennes).

    Positions :

        - Il critique l’alignement automatique de l’Italie sur les décisions atlantistes, notamment en Ukraine.

        - Il appelle à une politique étrangère italienne souveraine, fondée sur la défense des intérêts nationaux.

        - Il souligne l’importance stratégique de la Méditerranée, souvent négligée par l’Europe.

Roberto Vannacci (Général controversé pour ses prises de position nationalistes et traditionalistes).

    Positions :

        - Il dénonce la pensée woke, perçue comme une menace culturelle pour la civilisation européenne.

        - Il prône un réarmement moral et stratégique face aux défis contemporains.

        - Il critique la dépendance vis-à-vis des États-Unis et appelle à une Europe autonome.

Francesco Cosimato (Stratège militaire italien).

    Positions :

        - Il plaide pour une vision méditerranéenne de la géopolitique, centrée sur les intérêts de l’Italie et de l’Europe du Sud.

        - Il critique l’absence de stratégie européenne face aux crises au Moyen-Orient et en Afrique.

Fabio Filomeni (Général et analyste stratégique).

    Positions :

        - Il dénonce la logique d’escalade militaire en Ukraine et plaide pour un retour à la diplomatie traditionnelle.

        - Il met en garde contre les risques de déstabilisation en Méditerranée en raison des erreurs stratégiques européennes.

3. Pourquoi ces voix sont-elles occultées ?

L’absence de ces figures dans les débats publics n’est pas anodine :

    - Pression atlantiste : Toute remise en cause du consensus pro-OTAN est immédiatement marginalisée, surtout dans un contexte où l’Europe est sous pression américaine pour soutenir ses choix stratégiques.

    - Tabou médiatique : Les voix critiques, même issues de militaires expérimentés, sont souvent réduites au silence par des médias conformes à la ligne dominante.

    - Dépolitisation des élites : Le refus de traiter ces débats trahit une dépolitisation volontaire, où l’on préfère suivre un cadre prédéterminé plutôt que d’affronter la réalité stratégique.

4. Vers un retour du politique réel ?

L’occultation de ces débats est d’autant plus inquiétante que ces militaires, qu’ils soient allemands ou italiens, représentent un réalisme stratégique en phase avec les enjeux actuels :

    - Rétablir la souveraineté européenne en rejetant l’alignement aveugle sur Washington.

    - Promouvoir la diplomatie plutôt que l’escalade militaire.

    - Protéger la civilisation européenne en répondant aux défis culturels et sécuritaires de manière pragmatique.

Des analystes comme Robert Steuckers ou Enric Ravello Barber l’ont bien compris : la survie de l’Europe passe par un retour au politique réel, fondé sur les intérêts concrets des nations européennes. Rejeter l’américanisme, transcender la pensée woke et restaurer un ordre stratégique autonome sont les enjeux fondamentaux de notre temps. Les militaires allemands et italiens apportent ici une boussole précieuse, que l’Europe ne peut plus se permettre d’ignorer.

La tension semble monter entre la Pologne de Tusk et la Hongrie d'Orban, suite à la demande d'asile en Hongrie d'une haute figure politique polonaise en désaccord avec le gouvernement actuel. Est-ce la fin de l'entente entre les quatre de Visegrad et quels sont les tenants et aboutissants de ce nouvel événement? L'option polonaise de certains éléments actuels de la dite "nouvelle droite" cèdera-t-elle le pas au tropisme hongrois véhiculé par d'autres éléments de la même mouvance? Ou assistera-t-on à un clivage qui s'avèrera insurmontable?

La récente décision de la Hongrie d'accorder l'asile politique à Marcin Romanowski, ancien vice-ministre polonais de la Justice et député du parti Droit et Justice (PiS), a provoqué des tensions significatives entre Varsovie et Budapest. Romanowski est recherché en Pologne pour des accusations de corruption et de détournement de fonds publics (Eurotopics).

Le Premier ministre polonais, Donald Tusk, a vivement critiqué cette décision, la qualifiant d'"incroyable" et accusant la Hongrie de protéger des fonctionnaires corrompus. En réponse, le gouvernement hongrois a défendu sa position en affirmant que l'asile avait été accordé conformément aux procédures légales en vigueur (Agenzia Nova).

Cette affaire met en lumière des divergences croissantes entre la Pologne et la Hongrie, deux membres clés du groupe de Visegrád, qui comprend également la République tchèque et la Slovaquie. Historiquement, ces pays ont souvent adopté des positions communes sur des questions européennes, notamment en matière de politique migratoire (Euractiv).

Cependant, des différends récents, notamment concernant la guerre en Ukraine, ont déjà érodé cette unité. La décision hongroise d'accorder l'asile à Romanowski pourrait approfondir ces divisions, remettant en question la cohésion du groupe de Visegrád (Le Figaro).

Concernant la "nouvelle droite" européenne, ces événements pourraient influencer les orientations stratégiques de ses différentes factions. Certains courants, traditionnellement alignés sur la Pologne, pourraient être tentés de se rapprocher de la Hongrie, perçue comme un bastion du conservatisme en Europe. D'autres pourraient au contraire s'éloigner, craignant une association avec des pratiques jugées contraires à l'État de droit.

En somme, l'affaire Romanowski illustre des tensions croissantes entre la Pologne et la Hongrie, susceptibles de fragiliser davantage le groupe de Visegrád et d'influencer les dynamiques au sein de la droite européenne.

(à suivre).

16:12 Publié dans Actualité, Nouvelle Droite | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, nouvelle droite | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

dimanche, 29 décembre 2024

La guerre de l'Arctique

c4fef5c41f3a4b972a048cf4e52dec07.jpg

La guerre de l'Arctique

par Pierluigi Fagan

Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-guerra-artica

Le Groenland est la plus grande île du monde et correspond à 22% du territoire des États-Unis, soit à peu près la superficie additionnée de l'Italie + la France + l'Espagne + l'Allemagne + la Pologne + le Royaume-Uni, avec seulement 60.000 habitants. Elle fait partie du Royaume du Danemark mais dispose de pouvoirs autonomes étendus.

D102.jpg

Selon un rapport de l'US Geological Survey, 13% des ressources pétrolières et 30% des ressources gazières mondiales, ainsi que de l'or, des rubis, des diamants, du zinc, du fer, du cuivre, des terres rares et beaucoup d'uranium, se trouvent dans le sous-sol (entre la terre ferme et les fonds marins) pour une valeur totale estimée à environ 400 milliards d'USD, soit une année de PIB pour le Danemark.

Les États-Unis y possèdent déjà plusieurs bases militaires non divulguées, à l'exception de celle, bien connue, de Pituffik, qui est le centre de l'ensemble du réseau de protection de l'espace (NORAD). Au-delà des ressources, certes substantielles, il ne fait aucun doute que le principal poids stratégique de l'île glacée est d'ordre géostratégique, puisqu'elle fait partie du pôle Nord et qu'elle en contrôle l'accès pour tout le Sud-Ouest.

Pour le pôle Nord, limitrophe de la Sibérie, les Chinois envisagent de développer leur route de la soie polaire, alternative stratégique pour éviter les détroits d'Asie du Sud-Est (alors Bab el-Mandeb, Mer Rouge, Suez) et aussi raccourcir le temps de traversée vers l'Europe.

Je rappelle que les États-Unis ne sont considérés comme une nation polaire qu'en raison d'une partie (nord) de l'Alaska, qui était autrefois une terre russe achetée par les Américains (en 1867). Le sous-sol du pôle Nord est quant à lui crédité d'énormes réserves de pétrole, de gaz, de palladium, de nickel, de phosphate, de bauxite, de terres rares, et j'en passe.

102945809_23987d32ee.jpg

Bien sûr, tout ce battage autour du Grand Nord suit les mesures et les prévisions sur la fonte progressive des glaces que les hauts commandements stratégiques des grandes puissances mondiales semblent croire, mais ils ne suivent pas les canaux actifs des négationnistes du climat, les seuls à savoir réellement ce qu'il en est. Cette ligne est activement financée par l'entourage de Trump, qui donc quand cela l'arrange nie, quand cela l'arrange achète par anticipation ce qu'il nie par ailleurs. Dans ces réseaux de nouvelles qui sont pour beaucoup invérifiables et apparemment contradictoires, plusieurs fake news sont repérables.

En 1991, un forum de consultation, de coordination et de coopération - le Conseil de l'Arctique - a été créé par les États membres de l'Arctique, à savoir le Canada, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège et le Royaume-Uni : Le Canada, le Danemark, la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Russie, la Suède et les États-Unis. En mars 2022, les pays occidentaux ont suspendu leur participation en raison de l'invasion de l'Ukraine par la Russie. Suite au renoncement à la neutralité historique et à l'adhésion à l'OTAN de la Suède et de la Finlande, ces pays sont désormais tous membres de l'OTAN (à l'exception, bien sûr, de la Russie).

Arctic-Council_logo-blue.png

Ce dernier virage scandinave n'est certainement pas dû à la crainte face à l'hypothétique convoitise des Russes pour les élans, les rennes et les lichens scandinaves, mais plutôt à l'alignement stratégique des perspectives concernant le conflit -certain- à venir ou au moins le "différend chaud"qui s'instaurera avec l'Arctique pour objet. En particulier, avec la Finlande et accessoirement la Suède, toutes deux désormais dans l'OTAN, l'une des bases russes les plus importantes dans l'Arctique, la péninsule de Kola, est directement menacée. Avec une quarantaine de navires, les Russes peuvent se targuer d'avoir la plus grande flotte de brise-glaces au monde, et leur présence en direction du pôle est bien organisée et continuellement renforcée.

Il y a quelques jours, Trump a relancé l'idée d'acheter l'île du Groenland, une idée que les Américains poursuivent depuis 1867 et que Trump lui-même avait mise sur la table lors de sa première présidence. Il a ensuite déplacé l'ambassadeur qui se trouvait en Suède, soit l'homme qui avait évidemment piloté, avec des arguments intéressants et convaincants, la renonciation de Stockholm à l'histoire de sa neutralité qui durait depuis deux siècles. Ce diplomate est l'un des fondateurs de PayPal et donc un membre décisif de la PayPalMafia (Thiel, Musk, Nosek, Levchin), ainsi qu'un « jeune leader mondial » élu par le Forum économique mondial. Chaque jour un peu plus, ce groupe prend une fonction stratégique dans l'administration Trump; à quelles fins ? L'avenir nous le dira.

1024grioenland.jpg

'Trump veut acheter le Groenland' est un titre pour les journaux et les émissions télévisées, l'affaire est cependant bien moins absurde. Les Américains peuvent acheter une partie (Nord) ou la louer pour 99 ans ou avoir des permis de construction et d'exploitation limités ou envenimer le conflit d'autonomie entre les indigènes et le Danemark en soutenant les souhaits d'indépendance ou en se proposant comme médiateur qui peut « rendre tout le monde heureux », c'est-à-dire surtout les États-Unis. La partie qui intéresse les États-Unis se trouve dans le nord, tandis que la population inuit, par ailleurs peu nombreuse, se trouve dans le sud.

zKPn9BO.png

Les Inuits sont la population dont le taux de suicide est le plus élevé au monde. Les noyer sous les dollars ne les rendra pas heureux, mais en bref, cela les aidera peut-être.

La question est d'ailleurs la dénégation la plus flagrante de la Doctrine Monroe puisque l'île fait en fait partie de la plate-forme nord-américaine.

Le retour de la Doctrine Monroe s'est également traduit par la mise sur la table, de manière synchronisée, d'une nouvelle question panaméenne. Comme nous l'avions anticipé dans notre article publié quelques jours après l'élection américaine, la ré-annexion hégémonique de l'ensemble du continent aux intérêts et aux souhaits de Washington constitue l'épine dorsale de la vision stratégique de la nouvelle administration.

Cette vision, contrairement au rejet obstiné et irréaliste de la présidence précédente, semble considérer l'évolution multipolaire de l'ordre mondial comme acquise, alors autant compacter son propre pôle et le faire sur des bases solidement géopolitiques (pôle américain) et non idéalistes (États-Unis+UE=Ouest/Occident). Qu'on le veuille ou non, le « groupe Trump » fait preuve d'une logique géostratégique solide et articulée.

Pour toutes ces raisons qui viennent d'être évoquées et pour l'élasticité des nombreuses solutions possibles, je prendrais l'opération pour faite, en perspective, nous verrons bien combien et comment.

Financements étrangers en politique ? Acceptables si Soros paie, inadmissibles si Musk paie

a7b1f15720aa1b78b828776247472c85.jpg

Financements étrangers en politique ? Acceptables si Soros paie, inadmissibles si Musk paie

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/finanziamenti-stranieri-alla-po...

Ah, comme Soros était merveilleux lorsqu’il spéculait contre la lire, ruinant ainsi l’économie italienne. Comme il était formidable lorsqu’il organisait et finançait les printemps arabes et les révolutions colorées, toutes rigoureusement spontanées, bien entendu. Quand il soutenait, avec plus ou moins de succès, des tentatives de coups d’État un peu partout dans le monde.

Et comme il est désormais détestable, Elon Musk, qui finance le MAGA de Trump, rencontre Farage au Royaume-Uni, vante les mérites de l’AfD en Allemagne et s’affiche avec Meloni (le baiser dont il la gratifie en vidéo est une création de l’intelligence artificielle, mais qu’importe).

La Repubblica n’émet aucun doute lorsqu’il s’agit de diviser le monde en bons et en méchants. Les bons, c’est eux et leurs petits amis: leurs financiers, leurs protecteurs. Les méchants, ce sont les autres, tous les autres. De Trump à Poutine, de Xi Jinping à Modi, qui, le vilain bougre, a rouvert l’ambassade indienne en Corée du Nord. Et surtout, lui, là : ce M. Musk. Qui non seulement est passé des démocrates aux républicains pro-Trump, mais est aussi plus riche que Soros et peut donc influencer la politique dans divers pays.

Ainsi, depuis qu'il est entré en lice, comme par miracle, les financements étrangers octroyés aux partis et aux organisations politiques sont devenus inacceptables, une honte, une tentative de manipuler les électeurs.

Étrange, car il y a encore quelques mois, ce qui était ignoble et inadmissible, c’étaient les lois de pays comme la Russie et la Géorgie qui cherchaient à empêcher les organisations locales d’être financées par des groupes et des spéculateurs étrangers. L’objectif ? Éviter les ingérences et les manipulations. Mais dans ces cas-là, les financiers étaient les bons. Cette fois, c’est le méchant qui paie. Et les interférences étrangères dans la politique sont acceptables ou inacceptables non pas en fonction de principes universels, mais en fonction des positions politiques en rapport à la gauche journalistique.

14:30 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, financements politiques | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 28 décembre 2024

L'Approche Unique de Kierkegaard sur le 'Péché'

Kierkegaard_1902_by_Luplau_Janssen.jpg

L'Approche Unique de Kierkegaard sur le 'Péché'

Troy Southgate

Source: https://troysouthgate.substack.com/p/kierkegaards-unique-...

Bien que nous soyons habitués à entendre des chrétiens décrire des comportements tels que la fornication ou l'hédonisme comme des manifestations de comportements « pécheurs », il existe une manière légèrement différente d'aborder la question, qui pourrait même intéresser les non-chrétiens.

Søren Kierkegaard, ayant grandi dans un environnement profondément religieux, où lui et ses compagnons luthériens étaient constamment rappelés à la nécessité d’examiner leur conscience à la recherche de traces persistantes de « péché », a adopté une perspective différente dans ses propres travaux. Plutôt que de prendre un ton moralisateur, il envisageait la déviance humaine de manière analogue à celle de Saint Augustin d'Hippone, qui parlait de désorientation spirituelle. Pour Kierkegaard, le « péché » naît dès que les êtres humains, face à la liberté, deviennent anxieux et échouent à faire le bon choix. La vie est pleine de moments difficiles, mais c’est la manière dont nous les affrontons qui compte.

le_concept_de_l_angoisse.jpgDans son ouvrage de 1844, Le Concept de l'angoisse, Kierkegaard explique que nous devons laisser passer en nous les préoccupations et l’incertitude, et qu’en utilisant notre force intérieure, nous pouvons tenir face à la tempête comme un homme condamné à mort refuse de plier devant ses ennemis. En embrassant la liberté qui nous est donnée et en « passant à travers l’anxiété du possible », nous nous purifions de tout ce qui est mesquin et inférieur. Plutôt que de décrire le « péché » comme une tentation à éviter, Kierkegaard insiste sur le fait que nous devons accueillir ces moments de crise personnelle, car ils nous offrent une véritable libération et peuvent enseigner à l'individu :

    « À ne pas avoir d'anxiété, non pas parce qu'il peut échapper aux terribles épreuves de la vie, mais parce que celles-ci deviennent toujours faibles en comparaison avec celles du possible ».

Ainsi, comme Augustin avant lui, Kierkegaard croyait que bien que la notion de péché originel soit tirée du récit de la désobéissance d'Adam et Ève dans le Jardin d'Éden, les humains vivent encore et encore la Chute tout au long de leur vie, ce qui explique l’apparition récurrente de ces moments d’anxiété.

Compte tenu du syndrome de Stockholm qui a conduit les populations de l'Europe et de l'Amérique du Nord contemporaines à développer une affinité psychologique avec leurs geôliers financiers, il est évident que la plupart des gens ne prennent pas au sérieux les conseils de Kierkegaard sur la saisie de la liberté. Ils choisissent plutôt l'option plus « pécheresse » qui leur permet de réprimer leur anxiété à l'aide des artifices synthétiques de la vie moderne. Bien que Kierkegaard accepte que notre chemin à travers ce royaume terrestre soit difficile, il n'y a vraiment aucune excuse pour rejeter la liberté dès qu'elle se présente à nous.

23:14 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, sören kierkegaard, angoisse | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Trump veut Panama et le Groenland. L’hypocrisie yankee est terminée, la souveraineté n’est plus un droit

435b7d78-0be5-4da3-9ffa-0921e2850cfe_800x600.jpg

Trump veut Panama et le Groenland. L’hypocrisie yankee est terminée, la souveraineté n’est plus un droit

Augusto Grandi

Source: https://electomagazine.it/trump-vuole-panama-e-groenlandia-lipocrisia-yankee-e-finita-la-sovranita-non-e-un-diritto/

Il n’est pas encore installé à la Maison Blanche mais Trump a déjà commencé à menacer plusieurs pays. En dehors des habituelles polémiques avec la Chine, le président revenu aux affaires a annoncé son intention d’imposer des droits de douane sur les produits canadiens et mexicains, c’est-à-dire sur les importations des deux pays avec lesquels les États-Unis ont signé un accord commercial allant dans une direction opposée.

Jusqu’ici, on reste dans le domaine économique. Incorrect, mais uniquement économique.

Les vrais problèmes commencent avec Panama. Car Trump veut la souveraineté sur le canal et des tarifs plus bas. À Panama, la réaction a été plutôt négative, et le président a précisé que l’indépendance et la souveraineté de l’État ne sont pas négociables. « Chaque kilomètre carré du canal et des zones environnantes restera sous le contrôle de Panama », a-t-il déclaré. La réponse de Trump ne s’est pas fait attendre : « Bienvenue au canal américain ». Pas vraiment un geste amical.

Mais le président yankee ne s’arrête pas là. Il veut aussi le Groenland, car cela représente une « nécessité absolue ». Dommage qu’il y ait également des habitants sur l’île. Le Premier ministre, Múte Egede, a assuré que le Groenland n’est pas à vendre et ne le sera pas non plus à l’avenir.

D’ailleurs, si Israël peut envahir Gaza, la Cisjordanie, la Syrie sans que l’Occident collectif ne daigne au moins protester, pourquoi Washington devrait-il respecter la souveraineté d’autres pays ? Au moins, Trump met fin à l’hypocrisie et annonce au monde que le deux poids, deux mesures est devenu officiel. Et ceux qui ne se plient pas seront envahis si cela convient aux États-Unis. Bien sûr, cela ne s’applique pas à la Chine et à ses revendications...

23:04 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : donald trump, panama, groenland, états-unis | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Dans "Histoire africaine de l'Afrique", nous retrouvons l'écho de Frobenius et Davidson

c657e1aceead58f1b7a7f709dcd6a524.jpg

Dans "Histoire africaine de l'Afrique", nous retrouvons l'écho de Frobenius et Davidson

Journaliste de la BBC, la Soudanaise Zeinab Badawi élargit le regard sur un continent sous-estimé

Par Carlo Romano

Source: https://www.barbadillo.it/117744-nella-storia-africana-de...

La civilisation africaine (édition italienne: Einaudi, 1971)

Dans un livre qui, depuis la fin des années 1960, est resté une référence pour les lecteurs italiens, l’historien, journaliste et – entre autres qualifications – officier de liaison entre les forces alliées et la Résistance en Ligurie, Basil Davidson, avait formulé cet objectif :

Davidson-1960-p-small-278x350.jpg

9780600300830_1200x1200.jpg

hbg-title-9781780226002-6.jpg

« Présenter un résumé de ce que l’on sait aujourd’hui des idées et systèmes sociaux, des religions, des valeurs morales, des croyances magiques, des arts et de la métaphysique d’une série de peuples africains, en particulier ceux d’Afrique tropicale. Ensuite, examiner les façons dont ces éléments se sont développés et transformés depuis le passé lointain jusqu’à aujourd’hui. Enfin, replacer ces aspects de la civilisation africaine dans leur perspective contemporaine en tant que parties cohérentes d’un ensemble vital ».

En s’éloignant des préjugés coloniaux, avec La civilisation africaine (Einaudi, 1971) et une vaste œuvre de vulgarisation accompagnée d’une série de documentaires, Davidson a pleinement atteint son objectif. Avec le temps, ce livre – bien qu’il ne soit pas strictement académique, même s’il a été adopté par de nombreuses universités – n’a pas été complété par beaucoup d’autres études. Cependant, une édition actualisée, également intitulée La civilisation africaine, a été publiée en 1997.

1200x680_sc_vignette-fb-frobenius-sans-texte.jpg

917zAZaq8bL._AC_UF1000,1000_QL80_.jpg

Avant cet ouvrage, on pouvait se référer à Histoire de la civilisation africaine/Kulturgeschichte Afrikas (Einaudi, 1950 et Adelphi, 2013) de Leo Frobenius, ethnologue, fondateur de divers instituts, correspondant avec Ezra Pound sur des questions économiques, et auteur en 1910 du magnifique compendium de légendes africaines Le Décaméron noir (Rizzoli, 1971).

124404_e27a98c71248b58ebd83fbbbfcf571f1-sn.jpg

Ce livre a influencé le concept de Négritude, de Aimé Césaire à Léopold Sédar Senghor, selon lesquels Frobenius « avait restitué à l’Afrique sa dignité et son identité ». La phrase « chaque fois qu’un vieillard meurt en Afrique, c’est une bibliothèque entière qui disparaît » semble illustrer parfaitement le contenu de Der schwarze Dekameron.

Des ouvrages comme ceux de Frobenius et Davidson ont renversé l’idée nuisible du « sauvage noir », réduisant les traditions et les arts africains à de simples visions exotiques, tout au plus décoratives. Cependant, d’autres livres et pamphlets – notamment à partir de Malcolm X – qui ont politisé l’idée même de civilisation africaine, ont parfois montré un préjugé inverse à celui du colonialisme, revendiquant par fierté de prétendues suprématies.

13050223.jpg

On pense ici au livre d’un spécialiste de la Grèce ancienne auprès de l’université Cornell, Martin Bernal, dont la publication a suscité de vifs débats, bien que beaucoup se soient arrêtés au titre provocateur, Black Athena (Pratiche Editrice, 1992). Bernal identifiait deux modèles historiographiques: l’« antique », élaboré par les Grecs eux-mêmes, et l’« aryen », imprégné de romantisme et influencé par des éléments extérieurs et idéologiques, comme le racisme. Bernal va même jusqu’à affirmer que les langues indo-européennes auraient un substrat d’origine africaine.

Ses thèses ont été contestées par de nombreux spécialistes du classicisme, notamment dans le volume collectif Black Athena Revisited (1996).

GLi9UBjWYAAI6Gv.jpg

Copy+of+Product+Template+-+Book+-+2024-02-08T135450.400.jpg

Avec An African History of Africa/Une Histoire africaine de l’Afrique de la journaliste soudanaise Zeinab Badawi – diplômée d’Oxford, ancienne présidente de la Royal African Society et collaboratrice de la BBC, où elle a présenté The History of Africa, une série de documentaires basée sur les rapports de l’UNESCO et sur l’ouvrage Histoire générale de l’Afrique qui en a découlé – nous avons aujourd’hui un essai de grande vulgarisation. Ce travail intègre l’expérience que l’auteure a acquise aussi bien avec les chercheurs africains qu’avec les gardiens des traditions orales.

L’histoire de l’Afrique est celle des origines de la civilisation humaine, mais on discute peu de son histoire ancienne et moderne, étouffée par les récits occidentaux évoquant la pauvreté, l’esclavage et le colonialisme. Ainsi, les récits fascinants des reines guerrières, des puissantes civilisations, des bâtiments somptueux et des marchés animés restent méconnus, alors que l’Afrique est bien plus que ce que nous imaginons.

Comment un pont terrestre mondial pourrait créer un partenariat entre l'Inde, la Chine, la Russie et les États-Unis à l'ère Trump

imag001.jpg

Comment un pont terrestre mondial pourrait créer un partenariat entre l'Inde, la Chine, la Russie et les États-Unis à l'ère Trump

par Atul Aneja

Source: https://telegra.ph/Come-un-ponte-terrestre-mondiale-pu%C3...

Pour les pans de l'humanité qui aspirent à l'avènement d'un monde multipolaire, l'arrivée du président américain nouvellement élu Donald Trump sur la scène mondiale a provoqué un certain émoi.

Non pas parce que Trump est un défenseur du multipolarisme, fondé sur l'essor collectif et collaboratif des États civilisés. En fait, sa vision du monde est plutôt nationaliste et ne vise que la renaissance de la « grandeur » américaine. Cependant, sa vision internationale est basée sur un pragmatisme extrême. Ainsi, si l'élévation de l'Amérique peut se faire en s'engageant avec des régimes dits « autoritaires », que ce soit en Corée du Nord ou en Chine, c'est bien, tout comme il est bien de travailler avec les Européens, à condition qu'ils se débarrassent de leurs instincts parasitaires et qu'ils établissent une relation véritablement équitable et symbiotique avec Washington.

Cependant, il est important de comprendre ce que Trump n'est pas. Le 44ème président** des États-Unis n'est pas un mondialiste. Cela signifie qu'il rejette la croisade anti-tradition d'une élite transnationale ultra-puissante, non élue et dirigée par les États-Unis, qui insiste pour imposer la démocratie libérale à l'ensemble de la planète, même au prix de créer des changements de régime dans les pays qui s'opposent à ce diktat. En d'autres termes, Trump partage son programme antimondialiste avec l'idée sous-jacente du multipolarisme, qui rejette le mondialisme et veut créer un monde multipolaire sous la forme d'une alliance d'États-civilisations souverains.

Selon le philosophe russe Alexandre Douguine, il est peu probable que Trump adhère au multipolarisme ; il est partisan de l'hégémonie américaine. "Cependant, il considère cette hégémonie d'une manière radicalement différente des mondialistes qui ont dominé le pouvoir américain au cours des dernières décennies (qu'ils soient démocrates ou républicains)".

Les mondialistes associent la domination politico-militaire et la supériorité économique à une idéologie libérale fondée sur l'imposition de valeurs anti-traditionnelles dans le monde entier (y compris aux États-Unis). Pour eux, l'hégémonie n'est pas la domination d'un pays, mais d'un système idéologique libéral international.

Trump, quant à lui, estime que les intérêts nationaux doivent primer, enracinés dans les valeurs américaines traditionnelles. En d'autres termes, il s'agit d'une hégémonie droite-conservatrice, idéologiquement opposée à l'approche gauche-libérale (Clinton, Bush Jr., Obama, Biden).

On ne sait pas encore comment le trumpisme se manifestera dans les relations internationales. Il pourrait objectivement accélérer la transition vers le multipolarisme, ou la ralentir ».

Malgré l'incertitude ambiante, l'arrivée de Trump a ouvert la porte à l'entrée d'un air frais. Les partisans du multipolarisme ne peuvent pas gaspiller ce moment de transition possible pour définir un nouveau système mondial.

Pour faire une percée, de nouvelles idées sont nécessaires, en particulier sur la connectivité transcontinentale qui peut naturellement transcender les fixations géopolitiques rigides et générer un nouveau paradigme de collaboration sans précédent.

Le projet de connectivité transcontinentale a déjà été amorcé. Malgré des critiques en partie légitimes, les Chinois ont déjà lancé leur initiative dénommée « la Ceinture et la Route », une gigantesque entreprise de connectivité reliant l'Asie à l'Europe à travers la vaste masse continentale eurasienne, avec des points nodaux s'étendant jusqu'au Sud mondial. La Russie a son propre projet d'Union économique eurasienne (UEE) qui implique également une connectivité profonde. De même, la Russie, l'Inde et l'Iran ont été les pionniers du corridor international de transport nord-sud (INSTC).

Compte tenu de ces avancées, comment les Américains peuvent-ils se joindre à ces gigantesques initiatives de connectivité, créant ainsi un vaste espace pour la création de richesses et l'essor économique ?

La création d'un pont terrestre mondial pourrait apporter une réponse.

L'Institut Schiller, basé aux États-Unis et en Allemagne, propose depuis longtemps que les États-Unis s'associent à la Russie pour intégrer physiquement les Amériques à la Sibérie, ce qui conduirait à un enchevêtrement logistique, économique et culturel avec l'Eurasie, qui est déjà connectée avec la BRI de la Chine et l'UEE de la Russie.

alaska-siberia-bridge-concept-art-v0-57uq1k8fkend1.jpg

Dans l'une de ses présentations, l'Institut a souligné qu'il existe un projet visant à combler le fossé entre l'Alaska et la Sibérie par la construction d'un tunnel sous le détroit de Béring. Il s'agit du projet de connectivité le plus décisif, qui conduira à la création d'un pont terrestre mondial, puisqu'il reliera la Russie et les États-Unis, c'est-à-dire toute l'Eurasie, à l'ensemble du continent américain.

Il existe un deuxième projet, également d'une importance capitale pour la connectivité terrestre avec les Amériques et l'ensemble du globe.

Il s'agit de la proposition de relier l'Amérique centrale et l'Amérique du Sud plus au sud, à travers la fosse dite de Darien, par des routes et des trains à grande vitesse. Une fois la trouée de Darien franchie, une liaison ferroviaire pourra être créée pour relier l'Amérique du Sud à l'Eurasie, générant des millions d'emplois, ouvrant de nouveaux marchés et donnant naissance à de nouvelles villes, à des parcs industriels et à des pôles touristiques. L'osmose culturelle de telles entreprises, par le biais de contacts interpersonnels, à l'échelle industrielle, est impensable.

darien-gap-geographische-region-im-isthmus-panamas-politmap-politische-landkarte-der-darauffolgenden-kluft-geografische-von-panama-278707227.jpg

Heureusement, Moscou et Pékin soutiennent activement le tunnel de la mer de Béring, conscients qu'il peut contribuer à élever l'économie mondiale à un tout autre niveau, en mettant fin aux rivalités géopolitiques et en bénéficiant à l'humanité toute entière grâce à un projet gigantesque reposant sur une science et une ingénierie de pointe.

Владимир_Якунин.jpg

Auparavant, le Siberian Times avait rapporté que Vladimir Iakounine, ancien président des chemins de fer russes, avait présenté un plan de développement d'une gigantesque route transsibérienne qui relierait la frontière orientale de son pays à l'État américain de l'Alaska, en traversant une partie étroite de la mer de Béring.

CA4jFlu8J1_DVKPJdtkx0u6k1IFsfJAcewBOX4uHCTE.jpg

Le projet de développement de la ceinture transeurasienne (TEPR) prévoit la construction d'une grande route le long du chemin de fer transsibérien existant, ainsi que d'un nouveau réseau ferroviaire et d'oléoducs et de gazoducs.

Il s'agit d'un projet interétatique et intercivilisationnel », a déclaré M. Iakounine selon le Siberian Times. Le projet doit être transformé en une « zone d'avenir » mondiale et doit être basé sur des technologies de pointe et non de repli ». M. Iakounine a indiqué que la route relierait la région de Tchoukotka, à l'extrême est de la Russie, à la péninsule de Seward, en Alaska, en passant par le détroit de Béring. La route entrerait probablement en Alaska au nord de la ville de Nome.

Les Chinois ont également proposé une liaison « Chine-Russie-Canada-Amérique », qui rejoindrait l'Alaska par le tunnel du détroit de Béring. Le journal d'État Beijing Times a rapporté qu'un tunnel sous-marin de 200 kilomètres serait nécessaire pour traverser le détroit de Béring. La ligne s'étendrait sur 13.000 km, soit environ 3000 km de plus que le chemin de fer transsibérien. Le voyage durerait deux jours et le train atteindrait une vitesse moyenne de 350 km/h.

31773268123837852_image.jpg

La participation de l'Inde au projet de connectivité trilatérale avec le Myanmar et la Thaïlande dans le cadre de l'initiative « Act East » offre un autre moyen de s'engager dans les corridors de croissance transcontinentaux. Par exemple, la Thaïlande est au centre d'un projet de chemin de fer visant à relier Singapour à la province chinoise du Yunnan. Partant de Singapour, le chemin de fer proposé traversera la Malaisie, la Thaïlande et le Laos avant d'entrer dans le Yunnan.

Une fois qu'un corridor terrestre aura été créé avec la Thaïlande, ce pays d'Asie du Sud-Est pourra devenir la porte d'entrée de l'Inde sur un réseau ferroviaire très développé qui relie déjà la Chine à l'Europe.

vendredi, 27 décembre 2024

La spirale infernale de l'Allemagne: quand l'idéologie étrangle l'économie

af4320a883fa198e68a3cdaa07e7d832.jpg

La spirale infernale de l'Allemagne: quand l'idéologie étrangle l'économie

Source: https://report24.news/deutschlands-todesspirale-wenn-ideo...

La politique allemande ressemble actuellement à une pièce digne du théâtre des absurdités. Alors que le pays s'enfonce dans sa plus grave crise économique depuis l'après-guerre, l'élite politique s'exerce à un remarquable déni de réalité. Le récent scandale de l'ingérence d'Elon Musk dans la politique allemande n'est que la pointe d'un iceberg bien plus grand.

Les faits sont accablants: un quart des Allemands ne peuvent plus payer leurs factures mensuelles. 17,5 millions de personnes - une réévaluation choquante des chiffres de la pauvreté en incluant les frais de logement - vivent dans la pauvreté. Les « champions cachés » de l'industrie allemande, autrefois fiers de leurs prestations, luttent pour leur survie. Les animaux domestiques deviennent des produits de luxe, les banques alimentaires doivent rationner la nourriture.

La construction, que fut le gouvernement dit « feu tricolore », a implosé de manière spectaculaire le 6 novembre, le vote de confiance du 16 décembre n'était plus qu'une formalité. Mais les partis établis - qu'il s'agisse de la SPD, de la CDU/CSU, de la FDP ou des Verts - ne présentent que des solutions cosmétiques aux problèmes structurels à l'approche des nouvelles élections du 23 février.

Le point décisif que le mainstream politique s'obstine à ignorer: le déclin économique de l'Allemagne n'est pas une catastrophe naturelle, mais le résultat d'une castration politique qu'elle a elle-même choisie. La perte de l'énergie russe bon marché - non pas, notons-le, par décision de Moscou, mais par auto-sanction et sabotage occidentaux (mot-clé,ici, c'est "Nord Stream") - a coupé l'herbe sous le pied de l'industrie allemande.

L'analogie est aussi pertinente qu'effrayante : l'Allemagne ressemble à une PME vieillissante qui n'a pas seulement négligé sa forme physique, mais qui s'est en plus coupée elle-même l'alimentation en air. Les Etats-Unis, sous Joe Biden comme sous le président désigné Trump, exploitent habilement cette auto-strangulation pour débaucher les entreprises allemandes à coups de subventions.

Seuls deux partis osent appeler cet éléphant dans la pièce par son nom : l'AfD d'Alice Weidel, désormais deuxième force dans les sondages, et le BSW de Sahra Wagenknecht. Le fait que ces antipodes politiques soient justement les seuls à évoquer la nécessité de normaliser les relations avec la Russie montre toute l'absurdité de la situation.

La tragédie la plus profonde réside dans la capitulation intellectuelle de la politique allemande: au lieu de défendre les intérêts nationaux évidents, on se soumet à la pensée du groupe atlantiste qui mène l'Allemagne à l'abîme économique. La concurrence chinoise, les marchés d'exportation en déclin et la menace de droits de douane punitifs des Américains font le reste.

Bloomberg parle déjà d'un « point de non-retour » - un déclin qui menace d'être irréversible. La politique allemande réagit à cela avec un mélange de déni de la réalité et d'aveuglement idéologique. Tandis que l'on s'émeut de l'« ingérence » de Musk, on passe soigneusement sous silence l'intervention américaine massive dans la souveraineté économique de l'Allemagne.

L'amère vérité est que les problèmes de l'Allemagne peuvent certes être résolus - mais pas tant que la classe politique refuse de briser les chaînes qu'elle s'est elle-même imposées. Les prochaines élections n'y changeront rien tant que tous les partis potentiellement au pouvoir s'en tiendront à un dogme qui subordonne les intérêts de l'Allemagne à ceux de Washington.

Ce que nous vivons n'est pas une crise économique ordinaire, mais le démantèlement systématique d'un site industriel par un auto-enfermement idéologique. Un pays commet un suicide économique - et son élite politique applaudit en plus. L'ironie est que pendant que l'on s'indigne de la prétendue ingérence de Musk, on oublie volontairement comment Joe Biden pousse l'Allemagne vers la désindustrialisation et comment Michael Roth, justement le président de la commission des affaires étrangères, s'immisce sans vergogne dans la politique d'autres pays comme la Géorgie.

L'avenir de l'Allemagne est en jeu et le temps presse. Sans une correction fondamentale du cours politique, sans le rétablissement d'une relation rationnelle avec la Russie et sans le retour aux intérêts économiques nationaux, le déclin sera inéluctable. Il ne s'agit pas d'un tableau noir, mais de l'analyse lucide d'un déclin qui s'accélère. La question n'est plus de savoir si, mais seulement quand l'Allemagne perdra définitivement son statut de puissance économique européenne.

Le kaléidoscope syrien: israélisation, ottomanisation et désiranisation

c3784132a39c3f0eeeb8f48b3014e9e4.jpg

Le kaléidoscope syrien: israélisation, ottomanisation et désiranisation

Par Alfredo Jalife Rahme

Source: https://noticiasholisticas.com.ar/caleidoscopio-de-siria-...

Pendant 11 ans, le destin de Bashar al-Assad a été écrit dans les astres, comme je l'avais prédit (https://bit.ly/41pJAHt ). La longue durée du règne d'al-Assad et l'étonnante rapidité de la chute énigmatique de son armée, qui n'a opposé aucune résistance à l'avancée fulgurante des djihadistes islamiques d'Al-Qaïda/ISIS dirigés par Abou Mohammed al-Jolani, de son vrai nom Ahmed Hussein al-Shar'a, né à Riyad, en Arabie saoudite, étaient stupéfiantes.

En 2016, j'ai déballé la géopolitique du djihadisme mondial (https://bit.ly/4is56l4 ). Al-Jolani est-il aujourd'hui le « nouvel Oussama Ben Laden » du djihadisme, qui, soit dit en passant, n'attaque jamais Israël, mais répond toujours présent pour déstabiliser les frontières islamiques de la Russie et de la Chine dans le cadre du « plan Brzezinski (https://bit.ly/3D57xdg ) »?

Elon Musk, un proche de Trump, commente sarcastiquement que « nos impôts financent en quelque sorte les deux camps (encore une fois ; https://bit.ly/4gsfWpw ) », en faisant référence à un article du Los Angeles Times qui affirme qu'« en Syrie, des milices armées par le Pentagone combattent des milices armées par la CIA (https://bit.ly/3VymQS9 ) ». Le compte rendu du Wall Street Mav sur X pose la question suivante : « Quel groupe armé a gagné en Syrie : celui qui est soutenu par la CIA ou celui qui est soutenu par le Pentagone ? Ou était-ce le groupe soutenu par l'Arabie saoudite ou était-ce ISIS ? »

La Syrie est passée du « Guatemala au Guatepeor » : du népotisme de 54 ans de la secte alaouite (10 à 13 % de la population multiethnique et multireligieuse totale ; https://bit.ly/4gvTj3x  ) à la terrorocratie involutive de la transmutation Al Qaeda/ISIS/Al Nusra avec sa ramification embryonnaire « HTS », alliée aux Talibans d'Afghanistan et aux fondamentalistes palestiniens sunnites du Hamas : une ramification des « Frères musulmans (https://bit.ly/3V3gSYc ) », qui ont célébré sans retenue la chute d'Al Assad.

Il existe de nombreuses approches « locales, régionales et mondiales » de la chute dramatique de la Syrie : de sa désintégration en cours à sa balkanisation probable avec trois conséquences irrémédiables : 1) l'expansion du « Grand Israël » paléo-biblique qui a déjà envahi les villages de la secte druze (https://bit.ly/41wo1Fh  ), dont l'armée se trouve à 20 kilomètres de Damas, lorsque le ministre des finances kahaniste Bezalel Smotrich exige l'occupation de la capitale syrienne ; 2) la ré-ottomanisation sunnite, et 3) la dés-iranisation au grand dam de l'islam chiite.

Il est intéressant de noter que Smotrich était un colon du Golan annexé, alors que le père d'al-Jolani y est également né : coïncidences malicieuses de leur destin eschatologique ?

Les accords secrets Sykes-Picot (https://bit.ly/3Bj9i61 ) de 1916 - le partage du Moyen-Orient entre la Grande-Bretagne et la France, avec l'accord de la Russie et de l'Italie de l'époque - ont précédé d'un an la déclaration Balfour (https://bit.ly/3KczGzh ) énoncée dans sa lettre au banquier Rothschild pour favoriser la création d'un « foyer juif » dans la Palestine britannique dés-ottomanisée.

Existe-t-il aujourd'hui un partage similaire du succulent gâteau syrien où deux superpuissances mondiales, la Russie et les États-Unis, disposent de bases militaires et où trois autres puissances régionales, Israël/Turquie/Iran, maintiennent, l'une en progression, l'autre en recul, des présences militaires notables ? Depuis le début de la guerre civile syrienne, Al-Assad - avant l'attaque foudroyante des djihadistes sponsorisés par la Turquie, les Etats-Unis (Pentagone/CIA) et Israël - ne contrôlait que 20 % du territoire tandis que les Etats-Unis et leurs alliés kurdes syriens (https://bit.ly/4fhV7vQ ) dominent aujourd'hui la région pétrolière et céréalière (près de 40 % !) d'un pays déjà démembré (https://bit.ly/3BoKg5k ). La connectivité du Grand Israël avec les Kurdes et les Etats-Unis (ce qui ressemble à un pléonasme) le place de facto sur la frontière sensible avec l'Irak et les rapproche des frontières de l'Iran.

De nombreuses batailles intestines et fratricides seront menées, notamment entre la Turquie et les Kurdes syriens, Ankara gardant un pied dans l'OTAN et l'autre dans les BRICS+, ce qui définira l'une des directions vectorielles du « nouveau Moyen-Orient ». La désintégration du kaléidoscope syrien ne fait que commencer avec ses métastases concomitantes.

https://alfredojalife.com

Facebook: AlfredoJalife

Vk: alfredojalifeoficial

Telegram: https://t.me/AJalife

YouTube: @AlfredoJalifeR

Tiktok: ZM8KnkKQn/

X: AlfredoJalife

Instagram: @alfredojalifer

19:50 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, levant, proche-orient, syrie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La disparition de Dalmacio Negro Pavón

GffwBauXAAEvSe8.jpg

La disparition de Dalmacio Negro Pavón

Carlo Gambescia

Source: https://carlogambesciametapolitics2puntozero.blogspot.com/

Le décès de Dalmacio Negro Pavón, survenu le 23 décembre à Madrid, sa ville natale, des suites d'une maladie soudaine, à l'âge de 93 ans, est une grande perte pour la science politique européenne. Le destin a voulu qu'il s'éteigne le jour même de sa anniversaire.

Il s'agit d'un homme généreux, affable, cultivé, toujours capable d'autodérision, d'un grand professeur et d'un profond politologue, encore très lucide et en pleine activité. Parmi ses ouvrages les plus récents figure La ley de hierro de la oligarquía (Encuentro, 2015). Un examen dense de la question qui, en moins de cent pages, explore de manière convaincante ce qui peut être défini à la fois comme une régularité métapolitique et un outil pour illustrer la crise des classes dirigeantes européennes. Un petit chef-d'œuvre digne du savoir d'un Gaetano Mosca et de l'éthique politique de Benedetto Croce.

19363793.jpg

Enfin, il faut rappeler Tradición de la libertad (Unión Editorial, 2019), véritable concentré de sa pensée en la matière, dans lequel le cri d'alarme pour la liberté, prise entre l'énorme appétit fiscal de l'État welfariste et le conformisme des bureaucraties de la pensée, se fait à la fois pressant et lucide.

En Italie, j'ai eu le plaisir de publier Il Dio Mortale. Il mito dello stato tra crisi europea e crisi della politica (2014). Il est sorti pour la série Foglio que je dirige avec Jerónimo Molina, son élève, à la Complutense, où Negro a enseigné, ainsi que, ces dernières années, à la CEU San Pablo. L'étude a été traduite et éditée par l'excellent Aldo La Fata.

Une anecdote explique bien l'homme et le savant. Je lui écrivit, un jour, pour compléter quelques notes. Je l'ai immédiatement regretté, craignant d'en faire toute une histoire (déranger un professeur de cette importance...). Au contraire, Don Dalmacio m'a répondu en un éclair, me remerciant pour ma précision et m'envoyant toutes les données nécessaires. Un grand moment.

9782810009121.jpg

la-ley-de-hierro-de-la-oligarquia-epub-dalmacio-negro-pavon.jpeg

Sa position politique et historiographique peut être placée en toute sécurité dans la galerie très spéciale du "triste libéralisme". Autrement dit, le libéralisme réaliste, « non ridens ». Negro a d'ailleurs beaucoup apprécié mon livre sur le sujet et a fait tout son possible, avec son ami Molina, pour qu'il soit publié en castillan.

Pour une étude plus approfondie de sa pensée, nous recommandons, in primis (également parce qu'en Italie il n'a pas été traduit autant qu'il le méritait), le déjà mentionné Il dio mortale (Il Foglio 2014), in secundis, Historia de las formas de Estado (El Buey Mudo, 2010), ainsi que Gobierno y Estado (Marcial Pons, Ediciones Jurídicas y Sociales, 2002) et La tradición liberal y el estado (Unión Editorial, 1995).

E4LDqcqWUAQt-vJ-686x1024.jpg

Un triste libéralisme, disions-nous, qui, outre la grande leçon des penseurs libéraux européens tels que Tocqueville, a approfondi celle de Carl Schmitt. Sur ce point, voir Estudios sobre Carl Schmitt (Fundación Cánovas del Castillo, 1995). Sans oublier l'influence d'un christianisme réaliste, attentif aux œuvres plutôt qu'aux paroles de l'Église. Un sujet qu'il approfondit dans Lo que Europa debe al cristianismo (Unión Editorial, 2006).

Negro peut sans aucun doute être rattaché, même si ce n'est pas chronologiquement, à ce que Jerónimo Molina a appelé le « cuarto siglo de oro del pensamiento político español » (1935-1969*).

Cependant, il faut dire honnêtement qu'au niveau des définitions, même à titre posthume, le « siglo de oro », en tant que canon, était un peu étroit pour Negro. Dans le sens d'une plus grande ductilité à l'égard de la pensée politique européenne du courant libéral et moderne, transcendant ainsi la tragique confrontation séculaire entre les deux Espagnes, la traditionaliste et la moderne. La guerre civile de 1936-1939 en fut le point culminant.

Manifestement, Negro bouge « con juicio ». Il n'a jamais été un fanatique de la modernité, ni un défenseur d'une tradition enracinée dans un quelconque hyperuranium. Ce qui, pour ne pas être trop fin, exclut une interprétation de gauche de sa pensée (**).

Libéralisme, réalisme, christianisme sont les trois termes pour interpréter son œuvre. Le cercle vertueux de sa pensée. Sans oublier la rigueur scientifique et son regard désenchanté sur le monde.

Un désenchantement sain, disons, pas celui du pèlerin nihiliste et du snob de l'existence: le désenchantement de Negro est celui du réaliste sérieux, qui étudie le monde (où l'on ne se baigne jamais deux fois dans la même rivière) parce qu'il fait partie du monde et qu'il veut le comprendre.

Negro ne se tripote jamais le nombril, il veille sur les faits. Ce qui, mais c'est notre très humble avis (***), lui a permis, grâce aussi à sa forte constitution, d'atteindre et de dépasser les 93 ans.

Disons qu'il l'a bien mérité.

Notes:

(*) L'article de Molina se trouve ici : https://www.eldebate.com/cultura/20240316/francisco-javie...  .

(**) Sur les différents points de la pensée de Negro, voir le recueil d'écrits pour son 90ème anniversaire édité par Jerónimo Molina, Pensar el estado. La política de los hechos y la política de la libertad, Los papeles del sitio, 2022.

(***) Pour ces aspects, voir  “Presentancíon del Editor” in D. Negro, Liberalismo e iliberalismo. Articulos políticos (1989-2013), Edición de Molinagambescia, Los papeles del sitio, 2021).

La Syrie « libérée » par ses démolisseurs

180312124827-03-raqqa-syria-destruction-file.jpg

La Syrie « libérée » par ses démolisseurs

par Manlio Dinucci

Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-siria-liberata...

Abu Mohammed al-Jolani, qui détient de facto le pouvoir à Damas aujourd'hui, a une histoire surprenante: il a commencé son militantisme djihadiste dans les rangs d'al-Qaeda en tant qu'associé d'Abu Bakr al-Baghdadi, le "calife" qui a fondé en 2013 l'ISIS, l'"État islamique d'Irak et de Syrie". En 2011, lors de la phase préparatoire, al-Baghdadi l'a envoyé en Syrie avec d'importants fonds pour créer le Front al-Nusra, une faction formellement autonome mais appartenant en réalité à l'État islamique.

Depuis sa création, la faction d'al-Jolani a participé à l'opération menée par les États-Unis et l'OTAN pour démolir l'État syrien. L'une des raisons de cette opération est le fait que la Syrie, l'Iran et l'Irak avaient signé un accord en juillet 2011 pour un gazoduc censé relier le champ iranien de South Pars, le plus grand du monde, à la Syrie et donc à la Méditerranée et à l'Europe, créant ainsi un corridor énergétique alternatif à ceux passant par la Turquie donc par d'autres routes contrôlées par des entreprises américaines et européennes.

La guerre couverte en Syrie a commencé par une série d'attentats terroristes, principalement perpétrés à Damas et à Alep. Des centaines de spécialistes des forces d'élite britanniques SAS opèrent en Syrie, aux côtés d'unités américaines et françaises. Les opérations sont commandées depuis les navires de l'OTAN dans le port d'Alexandretta, en Turquie. La force de frappe est constituée d'une armée de groupes islamiques originaires d'Afghanistan, de Bosnie, de Tchétchénie, de Libye et d'autres pays. Les armes arrivent via un réseau international organisé par la CIA, qui les fournit aux groupes infiltrés en Syrie, déjà entraînés dans des camps installés sur le territoire turc et jordanien. L'opération est dirigée depuis le quartier général avancé de l'US Central Command dans la base aérienne qatarie d'Al Udeid. C'est alors que Moscou décide en 2015, à la demande de Damas, d'intervenir directement en soutien à l'armée syrienne. L'intervention, menée avec des forces aériennes, prouve que la « coalition anti-ISIS » dirigée par les États-Unis faisait semblant de combattre ISIS. En un peu plus de deux ans, la coalition russo-syrienne a libéré environ les trois quarts du territoire du pays, qui étaient tombés aux mains de l'ISIS et d'autres mouvements soutenus par les États-Unis.

2074361709.jpeg

En 2016, al-Jolani a officiellement rompu ses liens avec al-Qaïda, renommant le groupe Jabhat Fatah al-Sham, puis Hayat Tahrir al-Sham (HTS) en 2017. Sous la direction de Jolani, le HTS est devenu la force dominante à Idlib, le plus grand bastion « rebelle » du nord-ouest de la Syrie. Soutenue notamment par la Turquie, la faction al-Jolani se prépare pendant un an à l'opération en Syrie. Pour ce faire, elle est armée par des canaux secrets et entraînée par les forces spéciales Khimik du renseignement ukrainien.

Pénétrant en Syrie le 8 novembre, la faction islamiste armée d'al-Jolani progresse rapidement et conquiert Damas le 7 décembre. L'armée syrienne n'oppose pas de résistance significative, symptôme d'une désintégration interne attestée par le fait que, tandis que le président Assad reçoit l'asile en Russie, le personnel de l'ambassade syrienne à Moscou hisse le drapeau des « rebelles » islamistes qui viennent de conquérir Damas.

Alors que les Etats-Unis confirment être en contact avec les « rebelles » via la Turquie, Israël s'empare d'un autre morceau du territoire syrien sur le plateau du Golan et mène des centaines de frappes aériennes, qualifiées de « défensives », contre les ports et les aéroports syriens. La conquête de la Syrie par ces forces constitue un coup dur à la fois pour l'Iran, qui voit s'affaiblir le front de résistance à l'offensive israélienne au Moyen-Orient soutenue par les États-Unis, l'OTAN et l'UE, et pour la Russie, qui perdra presque certainement l'accès au port syrien de Tartous, seul poste d'amarrage pour ses navires militaires en Méditerranée, et risque de ralentir ou d'interrompre le corridor de transport Nord-Sud qui, à travers le Moyen-Orient, lui permet de contourner le blocus de l'Occident.

17:22 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, syrie, hts, al-jolani | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 26 décembre 2024

Révélations : le plus grand collectif de journalisme d'investigation au monde est financé par le gouvernement américain

vs+blijkt+achter+bekend+journalistiek+onderzoekscollectief+te+zitten-874787510.jpg

Révélations: le plus grand collectif de journalisme d'investigation au monde est financé par le gouvernement américain

Les États-Unis derrière un célèbre collectif de journalisme d’investigation

Les médias néerlandais également influencés par l’OCCRP

Par Eric van de Beek

Source: https://deanderekrant.nl/nieuws/onthullend-grootste-journ...

Le plus grand collectif de journalisme d’investigation au monde, l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP), est financé à plus de 50% par le gouvernement américain. En conditionnant ce financement, Washington détermine les sujets de recherche, laisse de côté ceux qui pourraient ternir l’image des États-Unis, mais cible des pays comme la Russie et le Venezuela, avec lesquels les États-Unis sont en conflit. Aux Pays-Bas, l’OCCRP collabore notamment avec Trouw, Het Financieele Dagblad, NRC, De Groene, Follow the Money, Platform Investico et NOS Nieuwsuur.

Il est l’un des journalistes les plus influents au monde, mais reste presque inconnu du grand public: l’Américain Drew Sullivan, 60 ans, est le cofondateur et directeur de l’OCCRP. Créé en 2008 dans la capitale bosniaque Sarajevo, ce collectif visait initialement à enquêter sur le crime organisé et la corruption dans les Balkans. Seize ans plus tard, l’OCCRP est, selon Sullivan, « la plus grande organisation de journalisme d’investigation au monde ». Avec un budget annuel de 20 millions d’euros et 200 employés répartis sur tous les continents, l’OCCRP a lancé ou participé aux plus grandes enquêtes journalistiques internationales des dernières années, notamment les Panama Papers.

_89063523_panama_index_draft2-4049494889.jpg

En 2015, l’OCCRP a révélé une vaste collection de documents confidentiels provenant du cabinet panaméen Mossack Fonseca, exposant des cas de fraude fiscale et d’autres pratiques illégales impliquant des personnalités de premier plan. D’autres enquêtes ont suivi, avec des noms tout aussi retentissants : Pandora Papers, Suisse Secrets, Narco Files, Pegasus Project, Cyprus Confidential et Laundromat.

Basé aujourd’hui à Washington, Amsterdam et Sarajevo, l’OCCRP collabore avec des dizaines de médias à travers le monde pour ses révélations. «Toute organisation cherchant une audience mondiale peut s’adresser à l’OCCRP et mobiliser 100 journalistes», affirme Sullivan. Parmi ses partenaires figurent des titres prestigieux comme The New York Times et The Washington Post aux États-Unis, The Guardian au Royaume-Uni, Der Spiegel et Süddeutsche Zeitung en Allemagne, ainsi que Le Monde en France. Aux Pays-Bas, l’OCCRP a collaboré avec Trouw, Het Financieele Dagblad, NRC, De Groene, Follow the Money, Platform Investico et NOS Nieuwsuur.

Bien que l’OCCRP se présente comme indépendant, il dépend fortement du gouvernement américain, selon une enquête conjointe menée par des journalistes de Mediapart (France), Drop Site News (États-Unis), Il Fatto Quotidiano (Italie), Reporters United (Grèce) et le diffuseur public allemand NDR. Cette enquête révèle que l’OCCRP a été fondé grâce au soutien financier du Bureau américain des affaires internationales de stupéfiants et de répression criminelle. Aujourd’hui encore, Washington fournit environ la moitié de son budget.

Bien que l’OCCRP admette sur son site Web recevoir des fonds du département d’État américain, principalement via USAID, il dissimule l’ampleur de ce financement et les conditions qui y sont liées. Cette source de financement n’est jamais mentionnée dans les articles produits par l’OCCRP.

Depuis sa création, l’OCCRP a reçu au moins 47 millions de dollars du gouvernement américain, selon des audits financiers publics qu’il est tenu de transmettre aux autorités américaines. À cela s’ajoutent 1,1 million d’euros de l’Union européenne, 7 millions du Royaume-Uni, 4 millions de la Suède et un total de 2 millions provenant du Danemark, de la Suisse, de la Slovaquie et de la France.

En réaction, l’OCCRP affirme que ses plus gros bailleurs de fonds n’exercent aucune influence sur son travail journalistique. « Dès le début, nous avons mis en place des mesures pour empêcher les subventions publiques d’influencer nos reportages. Nous sommes convaincus qu’aucun gouvernement ni donateur n’a exercé un contrôle éditorial sur les enquêtes de l’OCCRP », a déclaré l’organisation.

Cependant, les médias ayant collaboré à l’enquête sur l’OCCRP affirment que cette influence existe bel et bien. Ainsi, le gouvernement américain dicte les priorités de recherche de l’OCCRP, en allouant des fonds spécifiquement pour enquêter sur la Russie, le Venezuela ou d’autres pays en conflit avec Washington. De plus, les États-Unis imposent comme condition de financement un droit de veto sur la nomination ou la reconduction des « membres clés du personnel » tels que Sullivan. L’OCCRP ne mène pas non plus d’enquêtes sur des affaires douteuses aux États-Unis ou dans d’autres pays d’où provient son financement.

En outre, l’OCCRP doit se conformer à la loi américaine Foreign Assistance Act, qui stipule que les financements doivent être alignés sur la politique étrangère et les intérêts économiques des États-Unis. Les dossiers disponibles sur le site de l’OCCRP reflètent ces priorités: les enquêtes se concentrent sur la Russie (deux dossiers), l’Ukraine, la Géorgie et le Kirghizistan.

«Notre politique est de ne pas enquêter sur un pays avec leur propre argent», a admis Sullivan dans une interview avec NDR. « Je pense que le gouvernement américain ne le permettrait pas. Mais même dans des pays où ces règles ne s’appliquent pas, nous évitons cela pour éviter les conflits d’intérêts. » Malgré cet aveu, l’OCCRP a menacé de poursuites judiciaires les médias ayant participé à l’enquête sur l’organisation. Les médias néerlandais n’ont pas réagi à ces révélations.

Expulsion au nom de l’hystérie climatique: les Masaï de Tanzanie forcés de quitter leurs terres

d249d4e01b1b16a12db0576304beca42.jpg

Le système à tuer les peuples

Expulsion au nom de l’hystérie climatique: les Masaï de Tanzanie forcés de quitter leurs terres

Source: https://report24.news/vertreibung-im-namen-der-klimahyste...

Ces jours-ci, une variante particulièrement perverse du colonialisme moderne refait surface. Ce qui se déroule en Tanzanie, en Afrique de l’Est, laisse sans voix et jette une lumière crue sur les zones d’ombre d’une prétendue noble lutte pour la protection du climat. Car les certificats de CO2, eux, rapportent beaucoup d’argent.

ecaa00f9b94d6a3e8c0bc27392deda92.jpgLe gouvernement tanzanien a commencé à expulser plus de 110.000 membres du peuple Masaï hors de la zone protégée du Ngorongoro. Le prétexte officiel: la protection de la nature. La dure réalité: il s’agit de certificats de CO2 rentables et d’un tourisme de safari lucratif. "Le gouvernement fait tout pour étouffer les communautés locales et tirer davantage de revenus du tourisme et de la chasse aux trophées", déclare Moloimet Olemoko, un berger masaï, au Telegraph britannique. Ses paroles résonnent comme un cri désespéré contre le cynisme mêlant protection climatique et appât du gain.

Au sud de Ngorongoro, une entreprise nommée Carbon Tanzania vend déjà des certificats de CO2 sur environ 110.000 hectares de terres – précisément là où les Masaï font paître leurs troupeaux depuis des générations. En février, un autre accord de 120.000 dollars a été signé avec Kilombero North Safaris, interdisant aux Masaï l’accès à trois de leurs forêts ancestrales. L’histoire se répète: dans les années 1950, les Masaï avaient déjà été chassés du Serengeti, à l’époque sous prétexte de conservation de la nature classique. Aujourd’hui, ce sont des projets climatiques « modernes » qui servent de justification à leur expulsion.

AreaMap_Ngorongoro_regular-2272331818.jpg

Ce schéma s’est généralisé: du Kenya à la Thaïlande, du Congo au Cambodge, des peuples autochtones sont expulsés de leurs terres au nom de la lutte contre le changement climatique. Rob Williams, de l’Université d’Arizona, résume bien la situation: "Ces soi-disant projets de conservation sont principalement dirigés par des intérêts étrangers, avec peu de considération pour les droits des populations locales".

Ce que nous observons ici n’est rien d’autre qu’un colonialisme climatique à l’état pur. Tandis que l’Occident achète des certificats de CO2 pour apaiser sa conscience écologique, les populations locales sont privées de leurs moyens de subsistance. Les Masaï paient le prix de notre commerce d’indulgences climatiques.

maasai-woman-and-cattle-3006506425.jpg

Ironie du sort : ce sont précisément ces peuples, qui vivent depuis des siècles en harmonie avec la nature, qui sont aujourd’hui expulsés au nom de la protection de l’environnement. Leur mode de vie traditionnel, transmis de génération en génération, est présenté comme une menace – tandis que les lodges de safari rentables et les projets de crédits carbone sont qualifiés de "durables".

Les Masaï résistent : des dizaines de milliers d’entre eux ont déjà bloqué les accès à la région de Ngorongoro. Mais face à l’alliance malsaine entre le gouvernement, les multinationales et les prétendus défenseurs du climat, leur combat est difficile. Leur sort est un avertissement, un exemple poignant de la façon dont la frénésie climatique peut devenir un outil d’oppression perverti.

Le choc Trump à l’OTAN: 5 % pour la défense ou des "conséquences"

donald-trump-nato-1253962353.jpg

Le choc Trump à l’OTAN: 5 % pour la défense ou des "conséquences"

Source: https://report24.news/trumps-nato-schock-5-prozent-fuers-...

Donald Trump frappe encore comme un obus. Le futur président des États-Unis exige des partenaires de l’OTAN rien de moins qu’un doublement des dépenses de défense actuelles, pour atteindre pas moins de 5% du produit intérieur brut. Une annonce qui pourrait faire l’effet d’un cataclysme budgétaire à Berlin (ndt: et pas seulement à Berlin...).

Pour le gouvernement allemand, qui tente péniblement de sortir de la crise budgétaire, cette exigence tombe au plus mauvais moment. Actuellement, l’Allemagne atteint tout juste un peu plus de 2% du PIB, effleurant ainsi l’objectif précédent fixé par l’OTAN. Passer à 5% représenterait des dépenses supplémentaires d’environ 100 milliards d’euros par an – soit presque un tiers du budget fédéral actuel.

Selon le journal Financial Times, qui s’appuie sur des échanges entre les conseillers en politique étrangère de Trump et des diplomates européens de haut rang, l’ex-président pourrait cependant se contenter de 3,5% – ce qui impliquerait tout de même une hausse de près de 50 milliards d’euros pour le budget allemand. Une sorte de compromis qui mettrait néanmoins le futur ministre des Finances allemand, après les élections législatives anticipées, dans une situation critique.

Fait intéressant, Trump adopte une approche étonnamment pragmatique sur la question ukrainienne. Contrairement à sa rhétorique de campagne, il semble envisager de poursuivre le soutien militaire à Kiev – mais uniquement après un cessez-le-feu et sans envisager l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déjà réagi avec scepticisme face aux promesses européennes en matière de défense sans implication américaine: « Ce n’est pas suffisant », a-t-il déclaré après des négociations-marathon à Bruxelles.

La situation rappelle un jeu de poker où Trump augmente drastiquement les mises tandis que l’Europe, frappée de sueurs froides, reste à la table. Ce qui est particulièrement notable, c’est que le républicain lie habilement les dépenses de défense à des avantages commerciaux: ceux qui investissent davantage dans des chars, des avions de combat et des missiles pourront exporter davantage vers les États-Unis. Par ailleurs, c’est surtout l’industrie de l’armement (américaine) qui profite de cette augmentation des dépenses militaires des États membres de l’OTAN.

Pour le budget allemand, cela représente un véritable test de résistance. Le nouveau gouvernement devra soit opérer des coupes massives dans d’autres secteurs, soit contracter de nouvelles dettes – ce qui, après la décision de la Cour constitutionnelle sur le frein à l’endettement, poserait de sérieux problèmes – soit augmenter les impôts. Aucune de ces options ne semble pouvoir séduire les électeurs.

Les États membres de l’OTAN discutent déjà d’une augmentation à 3% lors du sommet de La Haye en juin. Pourtant, même cet objectif est perçu dans de nombreuses capitales comme un effort presque insurmontable. À titre de comparaison, les États-Unis dépensent actuellement environ 3,1% de leur PIB pour la défense. Le message en provenance de l’entourage de Trump est clair: l’ère du « passager clandestin » au sein de l’OTAN est révolue. La question de savoir si l’Europe avalera cette pilule amère sera l’un des enjeux de politique de sécurité les plus fascinants de l’année à venir.

La critique culturelle de Richard Weaver: leçons pour un conservatisme moderne

weaver-2596323547.jpg

La critique culturelle de Richard Weaver: leçons pour un conservatisme moderne

Alexandre Douguine

Richard Malcolm Weaver Jr. était un intellectuel américain connu pour ses contributions à la pensée conservatrice. Voici quelques-unes des idées clés qui lui sont associées :

« Les idées ont des conséquences » (Ideas Have Consequences)

Dans son œuvre la plus célèbre, Weaver soutient que le déclin de la civilisation occidentale a commencé avec l'abandon de la croyance en une vérité absolue et une réalité objective à la fin du Moyen Âge. Il affirme que ce changement a conduit au nominalisme, qu'il identifie comme la racine du relativisme moderne et de la décadence morale.

31251237107-3297147429.jpg

La défense de la tradition

Weaver était un ardent défenseur des valeurs traditionnelles et considérait que la sagesse du passé devait guider le présent. Il insistait sur l'importance de la continuité culturelle et du patrimoine.

9780865972827-464454390.jpg

Le rôle de la rhétorique

En tant qu’universitaire spécialisé en rhétorique, Weaver soulignait le pouvoir du langage et de la persuasion. Il voyait la rhétorique comme un moyen de transmettre la vérité et de maintenir des normes morales élevées.

Critique de la modernité

Weaver était critique envers le progressisme moderne, la culture de masse et ce qu'il percevait comme l'érosion de la responsabilité individuelle et l'essor du collectivisme.

9781351293280.jpg

Hiérarchie et ordre

Il valorisait la hiérarchie sociale et soutenait que l'ordre, tant social que métaphysique, était nécessaire à une société stable. Weaver croyait aux différences naturelles entre les individus, non basées sur l'égalité, mais sur le mérite et le caractère.

9780826210302_p0_v3_s1200x630-920151387.jpg

Agrarisme

Weaver exprimait de la sympathie pour les agriculteurs du Sud des États-Unis, qui privilégiaient la vie rurale et l'agriculture à petite échelle par rapport à l'industrialisation et à l'urbanisation. Il voyait dans ce mode de vie un modèle de stabilité sociale et de vie éthique.

Les idées de Weaver sont souvent considérées comme la base du mouvement intellectuel conservateur aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale.

mardi, 24 décembre 2024

Y2025

fc4bba96330483a375747b479fe40f51.jpg

Gelukkig Kerstfeest & Nieuwjaar 2025
Joyeux Noël & Bonne année 2025
Fröhliche Weihnachten & Glückliches Neujahr 2025
Merry Christmas & Happy New Year 2025
Feliz Navidad & Feliz Ano Nuevo 2025
Buon Natale & Felice Anno Nuovo 2025

*

Robert Steuckers & Ana Robleda

16:03 Publié dans Réflexions personnelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : voeux | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 23 décembre 2024

La Géorgie prise en tenaille: l'Occident impose des sanctions aux «amis de Moscou»

f52cbe2124407e5dc171bed4a3d6f7e5.jpg

La Géorgie prise en tenaille: l'Occident impose des sanctions aux «amis de Moscou»

Source: https://report24.news/georgien-im-zangengriff-westen-verh...

Les événements se précipitent en Géorgie. Les dernières vicissitudes dans ce petit pays, mais stratégiquement important, situé sur le littoral de la mer Noire, révèlent un jeu de pouvoir complexe entre l'Est et l'Ouest, jeu dans lequel la Géorgie se retrouve de plus en plus entre les mailles du filet des grandes puissances. Washington et Londres ne veulent manifestement pas respecter les résultats des élections démocratiques. Cela sent le chantage.

Les faits parlent d'eux-mêmes: Mikheil Kavelashvili, 53 ans, du parti du « Rêve géorgien », a été élu président avec une majorité quasi soviétique de 225 voix contre 224 - un processus que l'opposition a tenté de délégitimer par son absence. Un véritable processus démocratique aurait pourtant un air bien différent.

Mais tandis que les drapeaux des protestataires, partisans de l'UE, flottent à Tbilissi, Washington et Londres resserrent les vis. En prenant des sanctions coordonnées contre de hauts représentants du gouvernement géorgien, l'Occident tente d'exercer son influence et montre ainsi clairement qu'il ne veut pas tolérer des résultats électoraux obtenus démocratiquement s'ils ne correspondent pas à ses propres vues. Le porte-parole du département d'Etat américain Matthew Miller parle de « violence brutale et injustifiée contre les citoyens géorgiens » - une description qui semble étonnamment exagérée au vu de la situation réelle sur place.

Le ministre britannique des Affaires étrangères David Lammy lui a emboîté le pas en dénonçant une « attaque monstrueuse contre la démocratie ». Les rapports disponibles montrent pourtant une image nettement plus nuancée: les affrontements entre les manifestants et la police se situent dans les limites habituelles que l'on observe lors de tels scénarios de protestation. Sans parler du fait que les partisans de l'UE ne sont manifestement qu'une simple minorité (bien que bruyante), d'autant plus que les résultats des élections sont éloquents.

Kavelashvili lui-même, que le consortium médiatique occidental a le réflexe d'étiqueter « extrême droite », met en garde contre les efforts occidentaux visant à pousser son pays dans un conflit avec la Russie. Une position qui pourrait bien se justifier au vu de l'expérience ukrainienne. Les parallèles avec la crise ukrainienne de 2013/2014 sont évidents: un pays à la croisée des chemins entre l'Est et l'Ouest, des tensions politiques internes et des acteurs externes qui poursuivent leurs propres intérêts géopolitiques. Le parti du « Rêve géorgien » a certes consolidé son contrôle sur les affaires gouvernementales, mais le prix à payer pourrait être élevé.

L'investiture de Kavelashvili, prévue pour le 29 décembre, promet de déclencher de nouveaux troubles. On craint de plus en plus que la Géorgie ne devienne à nouveau le théâtre d'une « révolution de couleur » initiée par l'Occident, voire d'une guerre sanglante par procuration - une crainte qui circule depuis longtemps à Tbilissi.

Cette situation complexe montre une fois de plus que le simple manichéisme en noir et blanc présenté par les figures politiques occidentales ne rend pas compte de la réalité sur place. La Géorgie mérite un regard plus nuancé - et surtout le droit de trouver sa propre voie, sans être poussée de l'extérieur dans une direction ou une autre.

Les Houthi et l’avenir de l’Égypte

de5a8db1a7f9031acd51831cee66223c.jpg

Les Houthi et l’avenir de l’Égypte

Andrea Marcigliano

Source: https://electomagazine.it/gli-houthi-e-il-futuro-dellegit...

Le leader d'Ansarallah, Abdul Malik al-Houthi, qui dirige les forces zaydites, une faction particulière du chiisme en guerre depuis longtemps contre la coalition du Golfe menée par l'Arabie saoudite, lance une alerte qui devrait nous préoccuper.

L’Égypte doit être extrêmement prudente, déclare-t-il. Elle doit se méfier d’Israël, avec lequel elle semble aujourd’hui entretenir de bonnes relations diplomatiques.

Car la situation, tant internationale qu’interne, apparaît en rapide détérioration. Et Tel-Aviv pourrait en profiter pour déstabiliser l’Égypte.

Présentée ainsi, cela pourrait sembler une invective dénuée de véritable signification, une exagération de la part d’un chef terroriste dans une région reculée.

Mais ce n’est pas le cas. Tout d'abord, car les Houthi, rebelles yéménites de confession zaidite, ne sont pas un simple groupe de terroristes que l'on pourrait juger négligeables.

Au contraire, ils représentent une force militaire notable, capable de tenir en échec depuis des années les Saoudiens et d'autres pays du Golfe. Et cela malgré l’appui aérien important que la coalition du Golfe reçoit des États-Unis et du Royaume-Uni, sans oublier une autre mission de contrôle naval à laquelle l’Italie participe aussi.

abdul-malik-al-houthi-134539941-16x9_0-1839080098.jpg

Mais, malgré ce déploiement massif de forces, les Houthi ont non seulement réussi à maintenir le contrôle de leur territoire dans le nord du Yémen, mais ils ont aussi rendu extrêmement difficile le passage par Suez. Ce passage est désormais, de fait, interdit aux navires américains et européens, contraints de contourner l’Afrique, avec les répercussions économiques que l’on peut facilement imaginer.

En outre, les Houthi se sont clairement positionnés en faveur de Gaza et des Palestiniens du Hamas, lançant à plusieurs reprises des attaques de missiles contre Israël. Ces attaques semblent inefficaces, mais suffisent néanmoins à inquiéter Netanyahu et son gouvernement, qui ripostent durement, par des attaques aériennes, et frappent les bases houthis au Yémen.

Ainsi, ce qu’a déclaré Abdul Malik doit être pris au sérieux. Terriblement au sérieux, puisqu’il semble prévoir une déstabilisation de l’Égypte, une hypothèse que nulle autre source, à ma connaissance, n’a évoquée jusqu’à présent.

Pourtant, il s’agit d’une menace réelle. Car le gouvernement d’al-Sissi semble solidement au pouvoir, mais repose en réalité sur une poudrière.

Les factions liées aux Frères musulmans bouillonnent sous une apparente tranquillité. Et elles se préparent à une revanche.

th-2516089594.jpg

Elles peuvent d’ailleurs probablement compter sur le soutien, ou du moins la connivence, des Européens et, surtout, des Américains.

Ainsi que d’Israël, qui aurait tout intérêt à voir une Égypte déstabilisée.

Une Égypte entre les mains de factions jihadistes qui, rappelons-le, n’ont jamais créé de problèmes à Tel-Aviv. Au contraire, elles ont toujours joué leur rôle pour combattre le front chiite, considéré, à juste titre, par Netanyahu, comme son principal et plus menaçant adversaire.

Une Égypte déstabilisée, ou pire, contrôlée par les Frères musulmans, serait, de fait, utile à toutes les forces qui souhaitent maintenir le monde arabe dans une position de faiblesse et de soumission. Ces forces, nombreuses, sont souvent difficiles à identifier.

Le chef des Houthi a lancé son alerte, avertissant publiquement al-Sissi.

Nous verrons dans les prochains mois s’il s’agissait simplement d’une déclaration stérile.

Sincèrement, je crains qu’il s’agisse d’un avertissement très sérieux et préoccupant.

21:00 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : houthi, actualité, yémen, égypte | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les oligarchies libérales choisissent l'autoritarisme (avec la complicité de l'intelligentsia progressiste)

063faff1a0bf8534348f7487ab6f10f6.jpg

Les oligarchies libérales choisissent l'autoritarisme (avec la complicité de l'intelligentsia progressiste)

par Elena Basile

Source: https://www.sinistrainrete.info/articoli-brevi/29485-elen...

Les médias occidentaux ont mené à bien une opération d'une grande importance politique. La majorité silencieuse, les classes moyennes et populaires ont été bien conditionnées. On lui adit: l'Occident libre et démocratique est attaqué; des autocraties comme la Chine et la Russie, des théocraties comme l'Iran, le terrorisme, nous menacent; et la guerre est la seule réponse salvatrice. Comme l'affirme Ori Goldberg, les génocides à travers l'histoire ont été principalement motivés par l'autodéfense.

3a82fd0f4c6c3c2508266fdfa36bfd1d.jpg

L'empire américain en déclin, contraint de militariser le dollar, avance ses pions sur les échiquiers internationaux, indifférent au droit international. En langage orwellien, il tue la démocratie en son nom. L'exemple symbolique a été la déclaration du président de la Corée du Sud qui a promu la loi martiale pour défendre ses citoyens contre l'autocratique Corée du Nord. En Europe, alors que Blinken incite Zelensky à abaisser le recrutement militaire de 25 à 18 ans, la destruction d'un pays et de centaines de milliers de garçons est justifiée par la nécessaire défense contre Moscou. En Géorgie et en Roumanie, le résultat d'élections démocratiques n'a pas été accepté. Les candidats qui ne veulent pas vendre leur pays aux intérêts américains et européens ne peuvent pas l'emporter.

On parle de fraude électorale sans fournir de preuves. L'ingérence russe se ferait par le biais de TikTok. Nous savons que le soft power est un monopole occidental. Les quatre agences de presse internationales qui régissent les médias sont inféodées aux puissances nationales et se spécialisent, avec des modulations différentes, dans le copier-coller de dépêches.

C'est donc avec le langage de la dictature mondiale orwellienne, capable d'affirmer le contraire de ce qui se passe en réalité, que TikTok et le soft power de Moscou sont dénoncés. Même s'il était prouvé que des financements russes existent pour créer des influenceurs dans les médias sociaux, cela ne représenterait qu'un grain de sable dans le désert de la désinformation occidentale. En réalité, en Géorgie comme en Roumanie, le financement américain et européen des ONG, des associations militantes et des faux instituts de recherche est multiple. L'enregistrement en Géorgie des ONG ayant plus de 20% de financement étranger, à l'image des lois existantes en Occident, a été fortement contesté par la Commission européenne. Comment se fait-il que cette interprétation à l'envers du monde actuel ne soit pas comprise par la droite modérée et le centre-gauche ? La transformation anthropologique à laquelle nous assistons est due au jugement de valeur qui a été injecté dans l'ADN des classes dirigeantes.

Si l'on part du principe que l'avancée de l'influence européenne jusqu'aux frontières russes apporte le bien démocratique, si l'on part du principe que notre civilisation et notre forme de gouvernement sont meilleures que celles des autres, les militants progressistes seront amenés à fermer les yeux sur les moyens utilisés pour célébrer les victoires du libéralisme. Il peut être amusant de constater que ceux-là mêmes qui accusent la Russie d'être obsédée par l'idée de « zones d'influence », idée qui serait un héritage du passé, croient fermement au droit de l'Otan et de l'UE d'étendre les leurs.

adrEfh6ZvJw-2418430070.jpg

En Syrie, des formations affiliées à Al-Qaïda appelées les rebelles (comme les bataillons Azov dont les membres seraient devenus des lecteurs de Kant, selon la Repubblica) sont exhumées par la CIA avec la complicité de la Turquie dans une fonction anti-russe et anti-iranienne. Nous sommes face à l'une des nombreuses opérations secrètes de la CIA qui attaquent l'État souverain syrien par l'intermédiaire de milices djihadistes. La guerre civile ne se fige pas pendant des années puis réexplose d'elle-même, spontanément, lorsque la Russie gagne en Ukraine et que l'Iran prouve à Israël qu'il peut frapper son territoire. La déstabilisation d'une société ne réussit que s'il y a un pilote avec des fonds et une organisation. Ce ne sont pas des fantasmes. Les preuves existent, à commencer par les aveux de Clinton. Le "criminel Poutine" utilise TikTok, nous utilisons le Djihad.

La Turquie, capable de mener une politique autonome pour son seul intérêt national, collabore avec la Russie comme avec les États-Unis selon des tactiques guidées par des objectifs géopolitiques. Miner la Syrie et étendre son influence anti-kurde est une priorité pour Ankara. Fort de sa rhétorique pro-Gaza, Erdogan, en empêchant l'approvisionnement iranien du Hezbollah via la Syrie, favorise Israël. La Russie pourrait être amenée à négocier une solution de type bosniaque avec Ankara, en se pliant aux pressions centrifuges, pro-américaines, pro-israéliennes et pro-turques, afin de sauvegarder une Syrie chancelante mais toujours utile à l'axe russo-iranien. Les dictatures et les démocraties sont des acteurs interchangeables de la politique internationale. Les choix éthiques n'existent que dans le film autistique de nos citoyens manipulés sans méfiance. Les oligarchies libérales choisissent l'autoritarisme avec la complicité de l'intelligentsia progressiste.

19:57 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, syrie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Roumanie: le rôle (pas si caché) des Etats-Unis derrière le chaos électoral

wp2363842-3524805953.jpg

Roumanie: le rôle (pas si caché) des Etats-Unis derrière le chaos électoral

par Roberto Vivaldelli

Source: https://www.ariannaeditrice.it/articoli/romania-il-ruolo-...

La semaine dernière, la décision de la Cour constitutionnelle roumaine d'annuler le premier tour des élections présidentielles, quelques jours avant que devait se tenir le second, a fait couler beaucoup d'encre. Cette décision a eu pour effet de réinitialiser le processus électoral, le gouvernement étant appelé à fixer une nouvelle date pour le scrutin. Le premier tour, qui s'est tenu le 24 novembre, avait été remporté à la surprise générale par Călin Georgescu, indépendant de droite et critique à l'égard de l'OTAN, qui devait affronter au second tour la pro-européenne Elena Lasconi, du parti Sauver l'Union roumaine. Voici ce qui se cache derrière tout cela.

L'implication des États-Unis en Roumanie

L'arrêt de la Cour a été rendu à la suite de la « déclassification » de documents des services de renseignement qui auraient montré une opération massive d'ingérence étrangère de la part de Moscou en faveur de Georgescu, face à son adversaire, une ingérence qui se serait manifestée dans les sondages. La dite ingérence se serait produite par l'utilisation de milliers de comptes de médias sociaux destinés à manipuler l'opinion publique, en exploitant des plateformes telles que TikTok et Telegram. Quelques heures après la décision retentissante de la Cour suprême, M. Georgescu a déclaré à une chaîne de télévision que la démocratie roumaine était « attaquée », qualifiant le verdict de « coup d'État formalisé ».

Cependant, à l'heure actuelle, il n'a pas été établi, même superficiellement - et encore moins dans une mesure suffisante pour constituer une preuve juridiquement admissible - que les comptes sur TikTok auraient pu avoir un impact électoral tel qu'ils auraient modifié ou influencé de manière significative le processus électoral. Mais ce n'est pas le seul aspect controversé de cette décision « choc ». Comme l'a révélé le journaliste d'investigation américain Lee Fang dans Substack, les critiques de Georgescu à l'égard de l'Alliance atlantique pendant la campagne électorale « ont alarmé les responsables des États-Unis et de l'OTAN ». Actuellement, note Lee Fang, la Roumanie est le point de départ des programmes de formation de l'OTAN pour les pilotes ukrainiens et accueille un projet de construction qui aboutira à la construction de la plus grande base de l'OTAN en Europe », qui sera construite près de l'actuelle base militaire “Mihail Kogalniceanu”, qui sera agrandie et qui est située près du port pontique de Constanta.

th-3676578482.jpg

La réaction du département d'État

À ce moment-là, explique le célèbre journaliste, des groupes de réflexion et des ONG financés par les États-Unis - par l'intermédiaire des programmes d'aide à l'étranger de l'USAID, de la National Endowment for Democracy (NED) et du département d'État - se sont empressés d'influencer la décision de la Cour suprême roumaine et d'alimenter le récit de la prétendue ingérence russe, dénoncée par des organisations telles que Global Focus et Funky Citizens. Il s'agit d'ONG financées par l'USAID, la NED et l'ambassade américaine à Bucarest. Dans les jours qui ont précédé l'arrêt de la Cour suprême, ces organisations - loin d'être au-dessus des parties, bien évidemment - ont soutenu des narratifs visant à délégitimer le résultat des élections, en accusant des plateformes sociales telles que TikTok d'avoir diffusé des contenus pro-Georgescu. Existe-t-il des preuves que ces prétendus comptes sociaux ont effectivement déterminé le résultat de l'élection en faveur du candidat indépendant de droite ? Non, bien sûr, il n'y en a aucune.

Flux d'argent en provenance des États-Unis vers des ONG anti-Georgescu

Parmi les ONG financées par les États-Unis qui se sont distinguées dans les accusations portées contre M. Georgescu figure Expert Forum, qui a affirmé que TikTok avait violé ses conditions d'utilisation en autorisant la diffusion de contenus pro-Georgescu pendant les élections. Septimius Pârvu, directeur exécutif de l'organisation, a déclaré lors d'un récent séminaire en ligne, que certains comptes TikTok pro-Georgescu avaient été créés en 2016, suggérant qu'il s'agissait de la preuve d'une « opération à long terme ». Les archives fédérales montrent que l'ambassade des États-Unis à Bucarest a fourni un flux régulier d'argent à Expert Forum. Le dernier contrat en date a accordé au groupe 79.964 dollars pour développer une « solution intégrée contre la régression démocratique en Roumanie ».

Et ce n'est pas tout, car l'ingérence américaine dans le processus électoral roumain est bien plus vaste. Comme le rapporte InsideOver, l'accusation d'utiliser de faux comptes sur TikTok pour obtenir du soutien et diffuser de la « désinformation » émane de l'Association pour la technologie et l'Internet, elle-même membre de European Digital Rights (EDRi), qui se décrit comme « le plus grand réseau européen de défense des droits et des libertés en ligne ». Mais la partie la plus intéressante concerne les bailleurs de fonds de ce réseau, tels que les habituelles Open Society Foundations du magnat libéral George Soros, le réseau Omidyar du fondateur d'eBay Pierre Omidyar, la Fondation Ford, la Fondation MacArthur, et bien d'autres encore. Il s'agit, de toute évidence, de « bonnes interférences » et non de mauvaises (et non des interférences qui, jusqu'à présent, demeurent "présumées") comme celles qui proviendraient de Moscou.

dimanche, 22 décembre 2024

La défense de la dialectique hégélienne par Bataille

e7b53db5708a0c452cd81d19d2be0284.jpg

La défense de la dialectique hégélienne par Bataille

Troy Southgate

Source: https://troysouthgate.substack.com/p/batailles-defence-of...

Les premiers écrits de Georges Bataille révèlent, en particulier, une profonde aversion pour la manière dont la dialectique hégélienne s’était de plus en plus imbriquée dans l’idéologie marxiste. Du moins en ce qui concerne l’interprétation ordinaire de Hegel, car pour Bataille, la réconciliation des contraires aboutit à quelque chose de progressiste et est donc en contradiction flagrante avec sa propre glorification de la matière vile.

Prenant la matière comme point de départ, Bataille rejette le matérialisme plus pragmatique qui s’était infiltré dans la théorie marxiste, en raison de sa tendance à construire un édifice scientifique. Le matérialisme bas de Bataille, en revanche, ne peut être réduit à des systèmes scientifiques ou politiques parce que, selon lui, ces techniques structurelles trouvent profondément inconfortables les questions relatives à la saleté, à la dégénérescence et à la décomposition. Marx, malgré la transformation ultérieure de ses idées en stalinisme et en maoïsme, entretenait une vision distinctement utopique et peut-être même idéaliste de l’avenir, vision qui a peu de points communs avec la fascination étrange de Bataille pour la fange, les excréments et la putréfaction.

9782707328564-475x500-1-3666687266.jpg

Pour revenir à la question de la dialectique hégélienne, si le couplage d’un négatif (thèse) avec un positif (antithèse) mène simplement à quelque chose de progressiste (synthèse), la notion batailleenne de matière vile est complètement perdue. En d’autres termes, bien que le marxisme insiste sur l’importance du matérialisme et le revendique comme sien, sa forte dépendance à Hegel conduit inévitablement, selon Bataille, à une dilution de ce qui est négatif. Cela se traduit par une pâle imitation du matérialisme lui-même. Bataille soutient que le marxisme, sans les réalités brutales des mouches, des excréments et des fornications, déraille du processus d’hétérodoxie et échoue ainsi à débarrasser la société capitaliste de ses valeurs bourgeoises.

C’est peut-être ici que la philosophie de Bataille commence à s’approcher de l’extrémité plus « radicale » du primitivisme. Bien qu’il semble logique de suggérer que l’effondrement de la civilisation moderne entraînerait une régression technologique, Bataille aurait sans doute considéré les tentatives de conserver un semblant de mécanisation dans un contexte primitiviste de la même manière qu’il voyait la dialectique communiste: comme une trahison du matérialisme, forçant un pacte impardonnable avec le diable hégélien. Même l’interprétation matérialiste de l’histoire, aurait-il soutenu, échoue en fin de compte à surmonter l’idée même d’histoire.

On peut détecter une perspective similaire dans la proposition économique de Bataille, selon laquelle l’idée marxiste absurde de « libération » par le travail devrait être remplacée par l’événement « orgiaque » du potlatch tribal et, par conséquent, par la destruction de la richesse en tant que telle. En même temps, on peut se demander si la réalisation d’un négatif batailleen réussi ne finit pas par se contredire en devenant un positif aux yeux de ses protagonistes.

Le Grand Israël et le Machia'h victorieux

Greater+Israel-1975427397.jpg

Le Grand Israël et le Machia'h victorieux

Alexandre Douguine

Un changement fondamental est en train de s'opérer dans le monde entier en ce qui concerne l'image d'Israël et peut-être aussi parmi les Juifs eux-mêmes. Les Juifs d'Europe ont suscité la pitié, la sympathie et la compassion après la catastrophe qu'ils ont vécue sous Hitler et pendant la Seconde Guerre mondiale. C'est ce qui a rendu possible la création de l'État d'Israël. L'holocauste ou la shoah, c'est-à-dire les horreurs et les persécutions subies par les Juifs, sont devenus la base d'un accord unanime: après tant de souffrances, les Juifs avaient tout simplement le droit de créer leur propre État. Celui-ci est devenu le capital moral des Juifs et a défini une attitude sacrée à l'égard de l'Holocauste.

Les philosophes de l'école de Francfort ont proclamé qu'il fallait désormais penser à partir d'Auschwitz. Cela signifie que la philosophie, la politique et la morale doivent désormais prendre en compte l'ampleur des crimes commis par les Européens (principalement les Allemands) à l'encontre des Juifs et que l'Occident, et donc l'humanité tout entière, doit se repentir.

L'image des Juifs en tant que victimes en est la pierre angulaire. Elle élève les Juifs au rang de peuple saint: tous les autres peuples sont invités à se repentir et à ne jamais oublier leur culpabilité. Désormais, toute allusion à l'antisémitisme, sans parler des tentatives directes de révision du statut sacré des Juifs et de la métaphysique de l'Holocauste, est punissable.

Peu à peu, cependant, la politique de plus en plus dure d'Israël à l'égard des Palestiniens et des pays musulmans environnants a commencé à brouiller cette image, du moins aux yeux des populations du Proche-Orient qui, rappelons-le, n'ont rien à voir avec les crimes des nazis européens. De plus, l'attitude violente des sionistes à l'égard de la population locale a conduit à des protestations directes et, dans sa forme la plus extrême, à l'Intifada antisioniste.

16690-gettyimagesflik47-1197888204.jpg

L'identité des Israéliens et des Juifs restés dans la diaspora s'est progressivement modifiée. L'accent est mis de plus en plus sur leur démonstration de force et de puissance, ainsi que sur l'aspiration à créer un Grand Israël. Dans le même temps, les idées messianiques se sont intensifiées: attente de l'arrivée imminente du Machia'h, début de la construction du troisième temple (qui nécessiterait le dynamitage du sanctuaire islamique de la mosquée al-Aqsa), forte augmentation des zones sous contrôle israélien (d'un océan à l'autre) et résolution définitive de la question palestinienne (appels directs à la déportation et au génocide des Palestiniens).

Ces idées sont soutenues par Benjamin Netanyahu et plusieurs de ses collaborateurs, les ministres Ben Gvir, Bezalel Smotrich, etc. Ce programme est ouvertement reflété dans la « Torah royale » d'Yitzhak Shapira, dans les sermons des rabbins Kook, Meyer Kahane et Dov Lior. D'un point de vue stratégique, il a été décrit en 1980 dans un article du conseiller de Sharon, le général Oded Yinon. Le plan de Yinon était de renverser tous les régimes arabes appuyés sur l'idéologie nationaliste baasiste afin de plonger le monde arabe dans un chaos sanglant et de créer un Grand Israël.

Aujourd'hui, dix ans après le printemps arabe, et surtout après l'attaque terroriste du Hamas contre Israël en octobre 2023, nous voyons ces plans se réaliser à un rythme accéléré. Netanyahou a détruit Gaza, massacrant sans pitié des centaines de milliers de civils. Il a ensuite attaqué le Liban, tuant tous les dirigeants du Hezbollah. S'en est suivi un échange de tirs de roquettes avec l'Iran et des préparatifs actifs de guerre contre ce pays, y compris des attaques contre des installations nucléaires. Tout cela a été suivi par l'invasion de ce qui restait du plateau du Golan et par des attaques contre la Syrie. Un mois plus tôt, Bezalel Smotrich avait proclamé que Damas ferait partie d'Israël et Ben Gvir avait directement fait allusion à la destruction d'al-Aqsa. La chute de Bachar el-Assad marque la fin du dernier régime baasiste. Le monde arabe est en effet plongé dans le chaos. Le Grand Israël et l'extermination des Palestiniens deviennent une réalité sous nos yeux.

Ce dernier point est important : les politiciens sionistes de droite abandonnent le référent à l'Holocauste. Le capital moral des victimes de celui-ci est maintenant complètement épuisé. Israël affiche sa puissance, sa grandeur et sa cruauté actuelles, presque comme si nous étions revenus à l'Ancien Testament. Aujourd'hui, les Juifs ne sont plus pris en pitié, mais craints, haïs, détestés ou admirés et, dans tous les cas, considérés comme une force puissante et impitoyable.

yruyzpmlqkab1-1874577333.png

L'identité juive a changé. Elle n'est plus symbole d'humiliation et de souffrance, mais synonyme de domination et de triomphe. Il n'est plus nécessaire de penser depuis Auschwitz. Il faut maintenant penser à partir de Gaza. La tradition juive elle-même parle de deux Machia'h, celui qui souffre (Ben Yusef) et celui qui est victorieux (Ben David). Après l'holocauste européen, l'accent a été mis sur le Machia'h souffrant, la victime. Aujourd'hui, cette Gestalt est remplacée par le Machia'h victorieux, celui qui attaque, celui qui triomphe. C'est particulièrement évident en Israël même. Mais il est clair que cela ne s'arrêtera pas là. Il y a un changement d'archétype messianique parmi tous les Juifs du monde.

C'est précisément dans ce contexte que Donald Trump, un fervent partisan du sionisme de droite et de Netanyahou, arrive au pouvoir aux États-Unis. Une partie importante de l'entourage de Trump est constituée de sionistes chrétiens, qui sont prêts à apporter tout leur soutien à Israël. Une fois de plus, le capital de compassion devient capital d'agression. C'est très, très grave et cela ne tardera pas à s'aggraver. D'un autre côté, nous ne devons pas tirer de conclusions, de jugements ou d'évaluations hâtives. Il faut d'abord bien analyser la situation et rassembler de nombreux faits, événements et incidents pour avoir une image cohérente des événements.

20:34 Publié dans Actualité, Judaica | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : actualité, israël, judaica, alexandre douguine | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook