jeudi, 26 juin 2025
Le philosophe français Marcel Gauchet voit le progressisme se déliter en un autoritarisme technocratique
Le philosophe français Marcel Gauchet voit le progressisme se déliter en un autoritarisme technocratique
Peter W. Logghe
Source: https://www.facebook.com/peter.logghe.94
Marcel Gauchet, né en 1946, est considéré en France comme l’un des penseurs les plus stimulants de notre époque. D’après Wikipedia, son œuvre révèle une vision aiguë des enjeux tels que les conséquences politiques de l’individualisme dominant, la relation entre religion et démocratie, et les dilemmes de la mondialisation. Dans son récent essai Le Noeud démocratique, il tire une fois de plus la sonnette d’alarme, car la démocratie occidentale risque de se transformer en un autoritarisme éclairé, refusant d’écouter la voix du peuple.
Gauchet part de la définition classique de la démocratie, avec la souveraineté populaire comme fondement. Une souveraineté qui se manifeste lors des élections. Mais ce principe se voit concurrencé par une démocratie dirigée par des juges, où les décisions politiques sont filtrées ou même dictées par des décisions judiciaires. Sous prétexte de protéger les droits fondamentaux, on marginalise, par voie judiciaire, des majorités électorales, soupçonnées de basculer dans le « populisme ». Une caste judiciaire est ainsi placée au-dessus de la légitimité du peuple.
Les figures politiques dérangeantes sont éliminées — le débat démocratique disparaît.
De la Roumanie à l’Allemagne, en passant par la France et les États-Unis, on observe l'émergence d'une certaine logique: les tribunaux sont utilisés pour neutraliser les figures politiques qui dérangent l’établissement. Trump, Marine Le Pen ou Weigel: des pans entiers de l’électorat sont effacés, en invoquant toutes sortes de raisons techniques. Le philosophe Marcel Gauchet estime que cette manière rend impossible tout débat démocratique sur des thèmes comme l’immigration, la sécurité ou la souveraineté nationale. Ce n’est pas une renaissance démocratique, mais le symptôme d’une démocratie qui a peur de son propre peuple, de ses propres électeurs.
La démocratie moderne est dominée, selon l’auteur, par un individualisme démesuré, au point que sa dimension collective — et, en lien, l’intérêt général — disparaissent totalement du radar. Le lien entre droits fondamentaux et volonté du peuple s’efface. Les élites technocratiques refusent toute remise en question de leur vision du progrès. Si le peuple s’écarte de cette ligne, il est considéré comme une anomalie qu’il faut corriger, voire exclure totalement du processus décisionnel.
Gauchet lance une nouveau cri d’alarme, et il est une voix très crédible en France. Mais les élites technocratiques et progressistes l'écouteront-elles ?
19:01 Publié dans Livre, Livre, Philosophie, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marcel gauchet, philosophie, philosophie politique, politologie, sciences politiques, livre, démocratie, gouvernement des juges | |
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La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient
La proposition en quatre points de Xi Jinping pour apaiser le conflit au Moyen-Orient
Giulio Chinappi
En pleine escalade de grande envergure entre Israël et l’Iran, Pékin propose une feuille de route vers la paix visant un cessez-le-feu immédiat, la protection des civils, la relance des négociations politiques et le soutien actif de la communauté internationale.
SOURCE première de l'ARTICLE : https://giuliochinappi.wordpress.com/2025/06/21/la-propos...
Jeudi 19 juin 2025, dans l'après-midi, le président chinois Xi Jinping a eu un entretien téléphonique avec le président russe Vladimir Poutine, au cours duquel les deux dirigeants ont échangé leurs points de vue sur la situation au Moyen-Orient. Xi Jinping a présenté une proposition en quatre points: le cessez-le-feu doit devenir une priorité urgente, garantir la sécurité des civils doit être la priorité absolue, le dialogue et la négociation sont les solutions fondamentales, et les efforts de paix de la communauté internationale sont indispensables. Cet échange a eu lieu dans un contexte critique, alors que le conflit entre Israël et l’Iran ne cesse de s’intensifier. La coordination des positions entre Xi et Poutine reflète non seulement la profondeur de la coopération stratégique entre la Chine et la Russie, mais envoie aussi un message clair à la communauté internationale: un appel à contenir les tensions et à préserver la paix régionale.
La crise actuelle au Moyen-Orient a dépassé les limites d’un conflit conventionnel. Lors d’une nouvelle série d’attaques aériennes jeudi 19, Israël a visé trois installations nucléaires iraniennes, tandis qu’un missile lancé par l’Iran a frappé un hôpital en territoire israélien. Les deux parties ont promis des représailles, et le risque d’une escalade incontrôlable s'avèrerait gravissime.
Pendant ce temps, les États-Unis, malgré leur influence déterminante sur Israël, n’ont pas joué un rôle constructif. Au contraire, ils ont continué à alimenter le conflit, allant jusqu’à indiquer leur disponibilité à « intervenir directement », ce qui mine sérieusement les attentes de la communauté internationale en matière de désescalade. La situation étant devenue telle que « rien ne peut être exclu », la fenêtre d’opportunité pour éviter le pire est désormais très étroite.
Une fois que le conflit échappe à tout contrôle, il sera beaucoup plus difficile d’en inverser la trajectoire. Dans ce contexte, la Chine a été la première grande puissance à proposer un plan global et visionnaire, capable de répondre à la fois aux besoins immédiats et aux solutions à long terme, faisant preuve d’un fort sens des responsabilités.
La « proposition en quatre points » est ciblée et va au cœur des enjeux actuels. Elle exhorte en premier lieu les parties en conflit, en particulier Israël, à arrêter rapidement les opérations militaires pour éviter que de nouveaux dégâts soient infligés aux civils. Elle invite ensuite à soutenir fermement une solution politique à la question nucléaire iranienne, et sollicite la communauté internationale, et en particulier ces pays qui exercent une plus grande influence sur les belligérants, à faire des efforts pour apaiser les tensions.
De nature orientée vers le problème, cette proposition ne se limite pas à identifier les voies fondamentales pour la résolution de la crise, mais trace également des parcours efficaces pour atténuer le conflit. Elle met au centre la recherche d’une paix durable et d’une sécurité collective, dans le respect total de l’ordre et de l’équité internationaux. Elle reflète l’analyse précise de Pékin et s’aligne sur les sollicitations répandues dans la communauté globale, en proposant un cadre d’action concret et réalisable.
La Chine a toujours agi comme facteur de paix et de stabilité au Moyen-Orient, comme en témoignent des gestes concrets: faciliter la réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran, soutenir le retour de la Syrie à la Ligue arabe, défendre la cause des droits nationaux palestiniens, promouvoir la paix à Gaza et l’unité palestinienne, contribuer à des missions de maintien de la paix régionales ou aux aides humanitaires. En tout état de cause, Pékin a basé ses actions sur les principes de justice et sur les intérêts fondamentaux des populations du Moyen-Orient, proposant un nouveau modèle de sécurité commune, inclusive, coopérative et durable.
De l’autre côté, les accords de réconciliation entre l’Arabie Saoudite et l’Iran signés à Pékin, ainsi que la déclaration palestinienne d’unité, témoignent de la confiance de la région dans la position impartiale de la Chine et dans l’esprit de sa nouvelle conception de la sécurité. La récente « proposition en quatre points » de Xi sur le conflit entre Israël et l’Iran confirme cette ligne morale, visant à favoriser concrètement la paix au Moyen-Orient.
Avec une région instable, la paix mondiale reste un objectif difficile à atteindre. Les efforts pour promouvoir un cessez-le-feu et engager des négociations ne sont pas seulement nécessaires pour la région, mais indispensables à la stabilité mondiale. Cela requiert coordination et consensus entre les grandes puissances. La récente conversation téléphonique entre Xi et Poutine illustre cette étroite communication et coordination entre la Chine et la Russie sur les grandes questions internationales. En tant que membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, Pékin et Moscou coopèrent main dans la main sur la scène mondiale, jouant un rôle stabilisateur pour la paix régionale et mondiale. Cela met en évidence non seulement la contribution des pays émergents à la gouvernance globale, mais indique aussi la voie correcte pour que les grandes puissances coexistent dans un esprit de responsabilité partagée.
La crise au Moyen-Orient confirme que le monde est entré dans une « époque de turbulences et de transformations », et la « proposition en quatre points » représente la perspective cohérente de la sécurité selon les vues chinoises. De la guerre russo-ukrainienne à la question israélo-palestinienne, il est évident que les propositions de Pékin sont de plus en plus adoptées par de nombreux pays. Maintenant que des nuages de tension obscurcissent le Moyen-Orient, il est à espérer que la communauté internationale passe des paroles aux actes, en adoptant la « proposition en quatre points » de la Chine. Celle-ci se déclare prête à renforcer la communication et la coordination entre toutes les parties, à construire un consensus, à lutter pour la justice et à jouer un rôle constructif dans le rétablissement de la paix dans la région.
15:02 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actuyalité, politique internationale, chine, asie, affaires asiatiques, moyen-orient, iran, israël, arabie saoudite, paix | |
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Saint-Pétersbourg: le discours de Poutine à SPIEF comme miroir d’un nouvel ordre mondial
Saint-Pétersbourg: le discours de Poutine à SPIEF comme miroir d’un nouvel ordre mondial
Elena Fritz
Source: https://pi-news.net/2025/06/st-petersburg-putins-spief-re...
La politique de sanctions de l’Union européenne s’est depuis le début de la crise ukrainienne transformée en un instrument central du pouvoir eurocratique – et en une épreuve de légitimité démocratique. Autrefois justifiées comme une mesure ciblée contre les élites politiques de Moscou, les sanctions frappent aujourd’hui principalement la population elle-même: par des prix de l’énergie qui montent en flèche, des chaînes d’approvisionnement qui sont interrompues, par une désindustrialisation et une fragmentation croissante du marché intérieur européen.
Alors que les ménages allemands souffrent de coûts énergétiques explosifs, que des secteurs industriels sont délocalisés ou liquidés, et que la classe moyenne se trouve coincée entre une pression fiscale accrue et une incertitude quant à sa position prochaine, la Russie, lors du 28ème Forum économique international de Saint-Pétersbourg (SPIEF), se présente comme un pôle de stabilité – non par l'effet d'une propagande, mais par des chiffres, des stratégies et des alliances (PI-NEWS en a rendu compte ici https://pi-news.net/2025/06/spief-2025-die-multipolare-re... - et ici - https://pi-news.net/2025/06/weltwoche-daily-putin-dritter-weltkrieg-ich-bin-besorgt/ ).
Discours de Poutine : résilience face aux crises et réorganisation sociétale
Vladimir Poutine a ouvert le forum plénier devant une assemblée internationale de dirigeants – dont le président indonésien Prabowo Subianto, des représentants de la Chine, de l'Afrique du Sud et de la famille royale bahreïnienne. Leur présence contredisait le récit occidental qui pose la Russie comme isolée.
Poutine a accueilli plus de 20.000 participants venus de 140 pays, insistant sur le fait que la nature du SPIEF prend de plus en plus d’importance dans un contexte de bouleversements mondiaux. Les thèmes centraux étaient les suivants: décalages tectoniques dans l’économie mondiale, bouleversements démographiques, crises régionales, changement climatique et transition technologique vers une ère de systèmes autonomes.
Il a clairement indiqué: le progrès technologique doit être accessible à tous, sinon les inégalités mondiales se creuseront. Les nouvelles plateformes, l’intelligence artificielle et l’économie numérique ne doivent pas conduire à une hiérarchisation de l’humanité, mais plutôt favoriser la prospérité, l’éducation et l’inclusion sociale.
L’économie russe: de l’exportation de matières premières à un centre d’innovation
Poutine a fourni des chiffres concrets sur l’évolution macroéconomique : malgré les sanctions, le PIB russe croît depuis deux ans de plus de 4% par an. La part de l’économie hors pétrole et gaz a augmenté de 7,2% en 2023. Même en 2024 – malgré le maintien des régimes de sanctions – une croissance de 5,9% a été enregistrée. La contribution du secteur des matières premières à la performance économique est même légèrement négative, ce qui indique que la diversification fonctionne.
Les moteurs de cette croissance sont nombreux: agriculture, construction, industrie manufacturière, logistique, services financiers et TIC. Selon Poutine, la Russie devient “non seulement plus grande, mais aussi plus complexe, intelligente et résiliente”.
L’emploi, les salaires et la justice sociale au centre
Un point central de son discours était la transformation du marché du travail: 2,4 millions d’emplois nouveaux ont été créés ces dernières années. Le taux de chômage est à un niveau historiquement bas de 2,3%. Le chômage des jeunes est également très faible, à 7,5%, comparé à 16% en France ou 11% au Royaume-Uni, selon Poutine.
Il a annoncé une “économie à hauts salaires” – non par contrainte, mais par investissements dans la productivité, la qualification et la digitalisation. Il a souligné que, à l’avenir, les salaires devront refléter l’efficacité et la création de valeur, plutôt que la pénurie de main-d’œuvre.
Lutte contre la pauvreté: chiffres à forte portée politique
En 2000, selon Poutine, 29% de la population russe vivait sous le seuil de pauvreté – 42 millions de personnes. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 10,5 millions, soit 7,2%. La tendance est à la baisse continue. La réduction de la pauvreté n’est pas un simple effet secondaire, mais un objectif explicite de la politique économique. Il a également souligné que ces succès sont visibles régionalement, notamment dans des régions traditionnellement défavorisées comme le Caucase du Nord.
Science, numérisation et réforme éducative
Poutine a annoncé qu’il allait fortement développer la commercialisation de la science. Actuellement, une seule demande de brevet sur cent est réellement exploitée sur le marché. Universités, instituts de recherche et entreprises doivent être connectés par des standards uniformes et des outils de financement communs. L’objectif est de faire de la Russie un lieu de souveraineté technologique.
Il a évoqué la rapide mise en place du rouble numérique, des plateformes de transport publiques, des marchés numériques pour la main-d’œuvre et de nouvelles formes de crédit basées sur des garanties de brevets. Un paquet législatif spécifique est en préparation pour soutenir l’identité régionale et la puissance économique locale dans la culture et l’économie créative.
Perspective mondiale: la multipolarité comme responsabilité
Poutine a présenté le groupe BRICS comme une plateforme qui ne repose pas sur l’exclusion, mais sur l’intégration. Ses membres représentent déjà 40% du PIB mondial. L’idée n’est pas de créer un contre-bloc, mais un cadre multilatéral pour favoriser la croissance, l’infrastructure et la coordination technologique – notamment par le développement de standards communs, de systèmes de paiement et de cadres juridiques.
Conclusion
Le discours de Poutine n’était pas une dénonciation, mais une esquisse stratégique détaillée. Il adressait un message clair à l’Europe: pendant que l’UE affaiblit ses citoyens par des sanctions imposées d’en haut, la Russie oriente sa stratégie économique vers la résilience, la cohésion sociale et l’indépendance technologique.
Le forum SPIEF 2025 n’était pas un lieu où l'on fit du triomphalisme. C’était une invitation géopolitique et économique à la coopération – dans un contexte changé, mais sans exclusions idéologiques. La décision d’y participer ne revient pas à Moscou. Elle appartient à Bruxelles – ou peut-être n’y appartient-elle déjà plus.
14:02 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : spief, russie, vladimir poutine, brics, europe, affaires européennes | |
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Le socialisme de marché de Chen Yun
Le socialisme de marché de Chen Yun
Luca Bagatin
Source: https://electomagazine.it/il-socialismo-di-mercato-di-che...
Chen Yun (1905 – 1995) fut un homme d'État et révolutionnaire important qui contribua à construire l'économie socialiste dans la République populaire de Chine, à la moderniser et à la guider vers le progrès.
Cette année marque le 120ème anniversaire de sa naissance, et le président chinois Xi Jinping a voulu lui rendre hommage et le remettre en mémoire, lors d’un discours prononcé le 13 juin dernier dans la Grande Salle du Peuple à Pékin.
Inscrit au Parti communiste chinois (PCC) depuis 1924, Chen Yun fut élu en 1930 comme membre suppléant du Comité central du PCC. Quatre ans plus tard, il entra dans le Bureau politique du parti, puis dans le Comité permanent.
Dans les années 40, il fut nommé responsable économique des zones occupées par les communistes, et après la fondation de la République populaire en 1949, il fut nommé Vice-Premier ministre jusqu’en 1966, s’occupant des secteurs liés à l’économie, aux finances et aux infrastructures. Entre 1956 et 1958, il occupa le poste de ministre du Commerce.
Chen Yun, que l’on pourrait, à mon avis, qualifier de « Roberto Tremelloni chinois » en raison de son pragmatisme et de ses compétences économiques, a occupé, durant à peu près les mêmes années, les mêmes fonctions que notre excellent ministre de l’Économie social-démocrate. Contrairement à Mao, Chen Yun pensait que le socialisme ne pouvait se développer qu’à travers l’économie de marché et une décentralisation accrue. Avec le temps, les faits leur donneront raison.
En réalité, Chen Yun, critiqué pour ses idées lors de la Révolution culturelle, fut un soutien de Deng Xiaoping dans les années suivant la mort de Mao, et, avec lui, l’un des promoteurs de la nouvelle voie réformatrice du socialisme chinois.
En 1979, il fut à nouveau nommé Vice-Premier ministre et, sous la direction de Deng Xiaoping, il lança les réformes économiques qui ouvrirent la Chine au marché, tout en maintenant les secteurs clés sous contrôle public et en préservant la planification économique.
Ce sera la recette du succès de la République populaire chinoise: non pas la transition vers le capitalisme, mais le renouvellement et le renforcement du socialisme par la libération des forces productives du pays.
L’action de Chen Yun fut et demeure une source d’inspiration pour les générations suivantes de dirigeants communistes chinois, de Jiang Zemin à Hu Jintao, jusqu’au président actuel, Xi Jinping.
Dans son discours commémoratif du 120ème anniversaire de la naissance de Chen Yun, le président Xi a rappelé son ardeur de révolutionnaire ouvrier et marxiste, qui contribua à libérer la pays de l’oppression et du chaos.
Il a notamment souligné que « le camarade Chen Yun a consolidé et maintenu des idéaux et des convictions solides, un esprit fort et des principes de parti, un style pragmatique et une recherche de la vérité, un sens simple du service public et l’esprit d’étudier avec diligence, qu’il a cultivés et conservés tout au long de sa longue carrière révolutionnaire, incarnant les nobles qualités des communistes. Il a affirmé : « La chose la plus agréable pour une personne est de participer à la révolution et de lutter pour les intérêts du peuple. Quiconque abandonne le peuple et le parti ne peut rien réaliser ». Lors de moments critiques, il a toujours maintenu la position politique correcte, exprimé clairement ses attitudes, et quand le développement de la cause du parti rencontrait des difficultés, il a toujours su garder sa lucidité, présenté des opinions originales sur la base d’une réflexion attentive, et trouvé des moyens efficaces de résoudre les problèmes».
Le Chine d’aujourd’hui, d’ailleurs, regarde avec fierté et confiance son socialisme aux caractéristiques chinoises, qui a des racines anciennes et solides, et qui est le fruit des efforts de ceux qui ont contribué à le bâtir. Elle est, par ailleurs, en première ligne pour la paix, la coopération et le bénéfice mutuel entre les pays, dans un monde de plus en plus à la dérive et irresponsable.
Comme l’a écrit notre ami le professeur Giancarlo Elia Valori, grand ami de la Chine et de la coopération internationale, dans un récent article: « En 2023, le président Xi Jinping a solennellement proposé l’Initiative pour la Civilisation mondiale, soutenant la promotion des valeurs communes de toute l’humanité, soulignant l’héritage et l’innovation des civilisations, et renforçant les échanges et la coopération internationale dans les sciences humaines. (…) Premièrement, il faut défendre l’égalité des civilisations, afin qu’il n’y ait pas d’ethnies hiérarchisées avec des cheveux blonds et des yeux bleus qui dominent sur les autres, car il n’y a pas de supériorité ou d’infériorité des civilisations. Les chemins de développement et les systèmes sociaux de tous les peuples doivent être respectés; il faut rejeter les conflits entre civilisations; s’opposer à l’ingérence dans les affaires intérieures; résister à l’arbitraire unilatéral; préserver l’équité et la justice; et partager la dignité égale ».
« Il est un devoir de soutenir un multilatéralisme authentique ; d’appuyer l’ONU dans son rôle important dans la promotion du dialogue entre civilisations; de remplacer la confrontation par la coopération; de faire en sorte que le système gagnant-gagnant prévaut sur celui à somme nulle; et d’adopter la voie de la coexistence pacifique entre différentes civilisations ».
« Deuxièmement, il faut promouvoir les échanges entre civilisations. La communauté internationale doit renforcer ces échanges et l’apprentissage mutuel; tirer la sagesse du dialogue entre les civilisations pour résoudre les problèmes mondiaux et élargir le chemin de la modernisation mondiale. (…) Troisièmement, il faut promouvoir le progrès de la civilisation (…) Seul le dialogue compose la mélodie de l’intégration et peut bâtir une civilisation humaine meilleure, qui soit la synthèse de toutes les réalités ethniques et culturelles de notre seule planète habitée».
Des paroles sages en une époque où la sagesse — de « notre côté » — semble avoir disparu. Remplacée par un vide assourdissant rempli d’idéologie, de fanatisme, d’ignorance, d’irresponsabilité, de préjugés, de haine et de violence.
12:16 Publié dans Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chen yun, chine, économie | |
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mercredi, 25 juin 2025
La guerre risquée de l'Europe contre la "flotte fantôme" russe
La guerre risquée de l'Europe contre la "flotte fantôme" russe
Anatol Lieven
L'Union européenne souhaite cibler les navires pétroliers illégaux, une mesure qui pourrait élargir la conflit en Ukraine et impliquer davantage les États-Unis.
Les dernières mesures adoptées par l'Union européenne (dans le cadre du 17ème paquet de sanctions contre la Russie annoncé en mai) visant à frapper de manière beaucoup plus forte la soi-disant “flotte fantôme” russe composée de pétroliers et d’autres navires, mettent en évidence le danger qu’avec la poursuite de la guerre en Ukraine; le risque d’un incident impliquant l’OTAN et l’UE dans un affrontement militaire direct avec la Russie persiste.
Les sanctions de l’UE prévoient l’interdiction d’accès aux ports, aux eaux nationales et aux zones économiques maritimes des États membres. Les navires entrant dans ces eaux risquent d’être saisis et confisqués. Il ne semble pas que Washington ait été consulté sur cette décision, malgré les risques évidents pour les États-Unis.
Dans le cadre de cette stratégie, le 15 mai, une vedette estonienne a tenté d’arrêter et d’inspecter un pétrolier dans le golfe de Finlande. La Russie a envoyé un avion de combat qui a survolé le navire estonien (volant probablement brièvement dans les eaux territoriales estoniennes) et les Estoniens ont fait marche arrière, du moins pour cette fois. En janvier, la marine allemande a saisi un pétrolier panaméen, l’Eventin, dans la mer Baltique après que ses moteurs soient tombés en panne, laissant le navire à la dérive dans les eaux territoriales allemandes.
La Suède a désormais annoncé qu’à partir du 1er juillet, sa marine militaire arrêtera, inspectera et potentiellement saisira tous les navires suspects transitant dans sa zone économique exclusive, mobilisant l’aviation suédoise pour soutenir cette menace. Étant donné que la zone économique maritime combinée de la Suède et des trois États baltes couvre la totalité de la mer Baltique centrale, cela revient à une menace virtuelle de couper tout commerce russe à partir de la Russie via la Baltique, ce qui représenterait un coup économique très dur pour Moscou.
Cela pourrait également menacer de couper l’accès de l’enclave russe de Kaliningrad, entourée par la Pologne, à la mer.
C’est le genre d’action qui a traditionnellement mené à des guerres. L’hypothèse avancée par la partie suédoise semble être que la marine et l’aviation russes dans la Baltique sont maintenant si faibles, et si encerclées par le territoire de l’OTAN, que Moscou ne pourrait rien faire. Toutefois, il est très peu probable que les Suédois prennent cette mesure sauf s’ils croient aussi que, en cas de confrontation, Washington viendrait défendre la Suède, même si les décisions de l’UE et de la Suède ont été prises sans l’approbation des États-Unis et ne sont pas strictement couvertes par l’engagement de l’article 5 de l’OTAN.
Et malgré tout le langage hystérique sur la Russie “en guerre” avec les pays de l’OTAN, ces mesures de l’UE et de la Suède reposent aussi sur l’hypothèse que la Russie ne perdra pas son sang-froid et réagira par la force militaire. Les dirigeants européens pourraient cependant vouloir réfléchir à plusieurs questions: par exemple, que feraient les États-Unis si des navires transportant des marchandises américaines étaient interceptés par des navires étrangers ? Nous savons parfaitement que les États-Unis couleraient ces navires de guerre et déclareraient l’avoir fait en défense de la règle sacrée de la navigation libre, en laquelle l’UE prétend aussi croire.
Les dirigeants de l’UE et les amiraux devraient aussi consacrer un peu de temps aux médias sociaux russes et lire les attaques incessantes contre l’administration Poutine de la part des extrémistes, qui soutiennent précisément que Moscou a été trop molle et modérée dans sa réponse aux provocations occidentales, et que cette modération a encouragé l’Occident à intensifier ses actions. Ces extrémistes (surtout au sein des forces de sécurité) représentent de loin la plus grande menace politique intérieure que Poutine doit affronter.
À cet égard, il est important de noter que les actions visant à nuire à la “flotte fantôme” russe ne se sont pas limitées aux sanctions. Ces derniers mois, une série d’attaques contre ces navires en Méditerranée, utilisant des mines magnétiques et d’autres engins explosifs, ont été peu couvertes par les médias occidentaux.
En décembre 2024, le cargo russe Ursa Major a coulé au large de la Libye après une explosion qui a tué deux membres d’équipage. Le titre de Reuters rapportant ces attaques était assez caractéristique : “Trois pétroliers endommagés par des explosions en Méditerranée au cours du dernier mois, causes inconnues, selon des sources.” Inconnues, vraiment ? Qui pensons-nous être les responsables probables ? Les forces spéciales laotiennes ? Les Martiens ? Et que font les gouvernements européens pour enquêter sur ces causes ?
Si les Russes coulaient un navire de guerre suédois ou estonien, l’administration Trump se retrouverait face à une décision terriblement difficile: intervenir et risquer une guerre directe avec la Russie, ou rester passive, créant une crise profonde avec l’Europe. La nouvelle serait alors qu’il serait sage et légitime pour Washington de déclarer publiquement qu’il désapprouve et qu’il ne contribuera pas à appliquer cette décision.
Washington doit aussi – enfin – prêter attention à ce que pense le reste du monde de tout cela. La majorité écrasante des sénateurs proposant d’imposer des droits de douane de 500% à tout pays achetant de l’énergie russe ne semble pas avoir réalisé qu’un des deux plus grands pays dans cette catégorie est l’Inde, maintenant considérée à Washington comme un partenaire essentiel des États-Unis en Asie. Et désormais, les alliés européens de l’Amérique comptent sur le soutien des États-Unis pour saisir les navires fournissant cette énergie à l’Inde.
L’administration américaine ferait bien d’avertir les pays européens que si cette stratégie mène à des affrontements maritimes avec la Russie, ce seront eux qui devront en assumer les conséquences. Surtout face au nouveau risque de guerre avec l’Iran, la dernière chose dont Washington a besoin est une nouvelle escalade des tensions avec Moscou qui nécessiterait un déploiement militaire américain massif en Europe. Et la dernière chose dont l’économie mondiale a besoin, ce sont des mesures qui pourraient faire encore augmenter les prix mondiaux de l’énergie.
Les gouvernements et institutions européens semblent avoir perdu toute capacité d’analyser les conséquences plus larges de leurs actions. Donc, une fois de plus, l’Amérique devra réfléchir à leur place.
Article original d’Anatol Lieven : https://responsiblestatecraft.org/russia-shadow-fleet/
18:11 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : mer baltique, europe, affaires européennes, flotte fantôme, russie | |
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La dernière bataille: Trump et le destin de l'humanité
La dernière bataille: Trump et le destin de l'humanité
Alexandre Douguine
Tout semble aller mal, très mal. Trump est tombé dans le piège tendu par les globalistes et les néoconservateurs. Il continue de mener « leur guerre » contre la Russie en Ukraine et s’est maintenant engagé dans une autre « guerre qui n’est pas la sienne » au Moyen-Orient, et il n’y a aucune trace « de sa liste Epstein ».
Mais... malgré tout, le président Trump reste la personne la plus haïe et attaquée au monde, notamment par les réseaux globalistes. Il est en difficulté, et le mouvement MAGA est divisé par les guerres qu’il n’a pas initiées, mais qu’il continue de soutenir et d’alimenter: c’est une erreur fatale. Néanmoins, c’est toujours Trump, et il est en difficulté.
Nous devons être stratégiques. Trump reste une chance pour l’humanité d’éviter la catastrophe finale que nous imposent les globalistes. Il vaut mieux le soutenir, en essayant de corriger et d’améliorer ses erreurs, que de l’abandonner complètement.
Il est clair que les États-Unis n’ont pas besoin de guerres suicidaires. Théoriquement, Trump peut les arrêter. Les autres ne le veulent pas et ne le feront pas. Les globalistes sont pure malveillance. Trump se trouve entre le mal et le bien. Son hésitation entre deux pôles métaphysiques est déjà quelque chose de grand en ces temps très sombres. Il faut faire preuve de patience.
L’État sioniste d’Israël est l’ennemi absolu de l’Iran, des chiites, des Arabes et du monde musulman. C’est leur guerre, et nous devons laisser qu’ils la mènent. Deux eschatologies religieuses opposées se battent entre elles pour Jérusalem, Al-Aqsa et la Palestine. Cela n’a rien à voir avec le christianisme.
15:00 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, donald trump, alexandre douguine | |
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La fin de la prétendue suprématie morale de l'Occident
La fin de la prétendue suprématie morale de l'Occident
par Andrea Zhok
Source : Andrea Zhok & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/91803
Alors que la tension monte au Moyen-Orient et que la possibilité d'une guerre totale, sans exclusion de coups inédits, devient de plus en plus réaliste, une réflexion culturelle d'ordre général pourrait sembler hors de propos, mais je pense qu'elle est néanmoins utile pour évaluer les développements à long terme.
Dans tous les principaux conflits en cours, nous assistons à une configuration oppositionnelle assez nette, avec peu de cas ambigus: la ligne de démarcation oppositionnelle est celle où un Occident, culturellement hégémonisé par les États-Unis d'Amérique, s'oppose à tous ceux qui ne sont pas directement ou indirectement soumis à lui.
Il s'agit donc d'une opposition franche le long des LIGNES DE POUVOIR, dans laquelle un « empire » consolidé s'oppose à d'autres pôles de pouvoir influents mais non soumis (Russie, Chine, Iran, etc.).
Mais tout pouvoir a toujours besoin d'une COUVERTURE IDÉOLOGIQUE, car tout pouvoir nécessite un certain degré d'adhésion généralisée de ses subordonnés: le pouvoir ne peut s'exercer sous forme de contrôle et de répression que jusqu'à un certain point, mais pour la grande majorité de la population, une adhésion idéologique générale doit prévaloir.
La couverture idéologique des pôles de résistance anti-occidentale est variée. À l'exception d'une certaine méfiance générale à l'égard de l'idée d'un « marché autorégulé », il n'y a pas d'idéologie commune entre la Chine, la Russie, l'Iran, le Venezuela, la Corée du Nord, l'Afrique du Sud, etc. Leur seule « idéologie » commune est le désir de pouvoir se développer de manière autonome, sur une base régionale, selon leurs propres lignes de développement culturel, sans ingérence extérieure. Cela ne fait pas nécessairement d'eux des porte-drapeaux de la paix, car il existe toujours des divergences de projet, même au niveau des relations régionales, mais cela rend néanmoins tous ces blocs réfractaires aux projections agressives et mondiales.
Cela représente une limite en termes de projection pure et simple de puissance par rapport au « bloc occidental » qui, dans le cadre de l'OTAN ou non, continue d'agir de manière concertée dans tous les scénarios conflictuels. Tout comme en Ukraine, la Russie affronte de fait les forces de l'Occident unifié, même si c'est indirectement, il en va de même pour l'Iran ces jours-ci (des fournitures militaires en provenance d'Allemagne, ainsi que des États-Unis, viennent d'arriver en Israël). En revanche, les alliances et les liens de soutien mutuel entre les blocs de la « résistance anti-occidentale » sont beaucoup plus occasionnels, éventuellement avec des accords bilatéraux limités.
La supériorité de la coordination occidentale dans l'usage de la force va toutefois de pair avec un autre processus, éminemment culturel, dont nous avons du mal à prendre conscience depuis l'intérieur même de l'Occident. Pendant longtemps, l'Occident post-lumières s'est présenté au monde et à lui-même comme l'incarnation d'une rationalité universaliste, d'une légalité internationale, de droits généralement étendus à tous les humains. La lecture opposée à l'Occident comme seul lieu de la raison et du droit, lequel se profile par opposition à la « jungle » que serait le reste du monde où prévaudraient la violence et l'abus de pouvoir, est encore aujourd'hui un élément standard de l'endoctrinement occidental: on la retrouve partout, des journaux aux manuels scolaires.
La situation paradoxale est que le seul élément vraiment fondamental pour l'unité idéologique de l'Occident n'a rien à voir avec la raison ou le droit, mais tout à voir avec l'idée de légitimation conférée par la FORCE. L'idéologie réelle de l'Occident est forgée d'une part sur l'idée de la force anonyme des capitaux, qui s'exprime par exemple à travers les mécanismes d'endettement international, et d'autre part sur l'idée de la force industrielle et militaire, justifiée comme le gendarme nécessaire pour « faire respecter les contrats » et « faire payer les dettes ».
Le paradoxe de la situation réside dans le fait que l'Occident se présente au reste du monde, mais aussi en son sein, sous une forme qui ne peut être qualifiée que de MENTALEMENT DISSOCIÉE.
D'une part, il se présente comme le défenseur des faibles, des opprimés, comme le gardien mondial des droits de l'homme, comme le protecteur sévère des libertés, comme l'incarnation d'une justice aux prétentions universelles.
Et d'autre part, il adopte constamment des doubles standards scandaleux (« ce sont peut-être des fils de pute, mais ce sont nos fils de pute »), rompt les promesses faites (voir l'avancée de l'OTAN vers l'est), fomente des changements de régime (liste interminable), ment internationalement sans pudeur et sans jamais s'excuser (la fiole de Powell), utilise la diplomatie pour faire baisser la garde de l'adversaire et ensuite le frapper (négociations de Trump avec l'Iran), exerce également en interne toutes les formes de surveillance et de répression qu'il juge utiles (mais toujours « pour une bonne cause »), etc. etc.
Ce qui est à la fois terrible et déstabilisant, c'est que nous avons tellement intériorisé cette forme de « double pensée » que nous pouvons continuer à tenir un discours public délirant selon lequel, pour permettre aux femmes iraniennes de se promener tranquillement les cheveux au vent, il est raisonnable de bombarder leurs villes. Ou bien il est sensé, et on ne perçoit aucun double standard, de justifier qu'un pays rempli de bombes atomiques clandestines en bombarde préventivement un autre pour éviter que, tôt ou tard, ce dernier en possède également.
Le véritable grand problème que l'Occident paiera dans les décennies à venir est que toute la grande tradition culturelle occidentale, son rationalisme, son universalisme, son appel à la justice, à la loi, etc. s'est révélée, à l'épreuve de l'histoire, être purement et simplement du vent, des masques, de la verbosité, tous incapables de construire une civilisation où l'on peut se fier à la parole.
De l'extérieur de cette tradition même, on ne peut que parvenir à une conclusion simple: toutes nos belles paroles de garçons bien élevés, nos appels à la rigueur scientifique, à la vérité, à la raison, à la justice universelle, ne valent finalement pas l'air chaud avec lequel elles sont prononcées. Ce ne sont que des couvertures pour l'exercice de la Force (l'« Ideenkleid » marxiste).
Nous avons beau nous efforcer de dire que cela n'a pas toujours été ainsi, que ce n'est pas nécessairement ainsi, notre perte de crédibilité vis-à-vis du reste du monde est colossale et difficilement récupérable (elle ne pourrait l'être que si ces appels à la raison et à la justice démontraient qu'ils ont les rênes du pouvoir dans les démocraties libérales occidentales, mais nous sommes à des années-lumière de cette perspective).
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L'Iran est la clé de l'équilibre multipolaire au Moyen-Orient
L'Iran est la clé de l'équilibre multipolaire au Moyen-Orient
par Stefano Vernole
Source : Strategic Culture & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/l-iran-e-la-chiav...
Comme signalé il y a quelques semaines, la D.I.A. américaine avait pris l'Iran pour cible. En résumé, les raisons en étaient les suivantes: l'Iran possède une capacité de représailles directes et pas seulement par procuration via l'Axe de la Résistance au Moyen-Orient ; l'Iran développe d'importantes capacités en matière de missiles et de drones ; l'Iran a des ambitions nucléaires, même s'il est encore loin de pouvoir développer une bombe atomique. Sur ce dernier point, Donald Trump (idole des "altermondialistes malins") a sèchement contredit le chef des services secrets américains, Tulsi Gabbard, en déclarant : « Je me fiche de ce qu'elle a dit. Je pense qu'ils étaient très près d'en avoir une ».
En réalité, dans le rapport de l'agence de renseignement de Washington, ce sont les motivations géopolitiques qui semblaient prévaloir. La coopération de l'Iran avec la Russie, la Chine et la Corée du Nord méritait, du point de vue américain, un durcissement des sanctions économiques, étant donné que la mise en service du corridor ferroviaire entre Téhéran et Pékin permettait de transporter le pétrole en 15 jours au lieu de 40 et de contourner le détroit de Malacca, qui risquait d'être fermé en cas de conflit pour Taïwan.
Ce n'est pas un hasard si les analystes militaires chinois ont immédiatement porté leur attention sur l'agression d'Israël contre l'Iran et en ont tiré des conclusions peu encourageantes: une profonde infiltration des services secrets sionistes dans la chaîne de commandement iranienne suivie de lourdes pertes militaires (celles subies par les Houthis au Yémen ne sont même pas comparables) ; une défense antiaérienne iranienne inefficace ; un manque de vigilance et de préparation dû à une certaine indolence des dirigeants iraniens ; l'échec de la politique de dissuasion iranienne ; crise totale de la tentative de réforme économique lancée par Raisi, puis brisée à la fois par la mort de l'ancien président iranien (difficile aujourd'hui de penser à un accident) et par l'instabilité régionale provoquée par Israël avec la chute d'Assad, l'attaque contre le Liban et le génocide des Palestiniens [1].
Bien sûr, la Chine, la Russie, la Turquie et les pays du golfe Persique, en premier lieu l'Arabie saoudite, ont sévèrement condamné l'attaque militaire israélienne et souhaiteraient sauver le gouvernement de Téhéran du « changement de régime » évoqué par Londres, Washington et Tel-Aviv. La Grande-Bretagne a mis ses bases militaires à la disposition de l'armée de l'air israélienne, transformant ainsi le territoire britannique en une zone de préparation directe pour les opérations contre l'Iran, fournissant à Tel-Aviv non seulement des bases aériennes, mais aussi ses services de renseignement. Elon Musk a activé le système satellitaire Starlink au-dessus de l'Iran, conférant à la coalition occidentale un avantage crucial en matière de communication et de navigation des données, tandis que le porte-avions américain Nimitz, en provenance de la mer de Chine méridionale, se dirige vers le golfe Persique. L'Occident dans son ensemble, avec le communiqué du G7, a fourni une légitimation formelle et « morale » au renversement du gouvernement iranien actuel.
La modalité de l'agression militaire israélienne est identique, tant sur le plan technique (lancement de drones à l'intérieur du pays) que politique (alors que l'Iran était en pourparlers avec les États-Unis), à celle de l'attaque ukrainienne contre les sites nucléaires et les bases russes il y a quelques semaines: la main est manifestement la même.
Pour la Russie, dont l'accord de partenariat stratégique avec l'Iran a été approuvé par Vladimir Poutine lui-même le 21 avril dernier, mais par Téhéran il y a seulement quelques jours, une défaite des ayatollahs serait un désastre géopolitique bien plus grave que la chute d'Assad en Syrie. L'Iran joue un rôle essentiel dans l'équilibre des pouvoirs au Moyen-Orient et est un allié indispensable dans la résistance à la domination mondiale occidentale; en particulier, l'équilibre stratégique dans la mer Caspienne serait rompu et les intérêts de Moscou dans le secteur énergétique seraient menacés au profit des États-Unis qui veulent exporter leur gaz naturel liquéfié.
De plus, un effondrement de l'Iran signifierait: l'effondrement du système d'alliances régionales de Moscou; la domination totale de l'Occident dans la région; l'isolement de la Russie et de ses principaux partenaires. La perte de l'Iran, membre des BRICS, deviendrait une catastrophe géopolitique pour le multipolarisme et confirmerait la capacité de l'Occident à résoudre par la force toutes ses contradictions géopolitiques. La vision à long terme esquissée par Brzezinski dans les années 1990 et par les néoconservateurs américains après le 11 septembre 2001 se réaliserait alors presque définitivement.
De son côté, Benjamin Netanyahu écarterait tout risque d'être remis en cause pour ses crimes évidents, devenant le symbole de la victoire atlantiste au Moyen-Orient.
La Chine, qui a également conclu un accord de partenariat stratégique avec l'Iran et qui dépend fortement du pétrole iranien (environ 90% du pétrole transitant par le détroit d'Ormuz est destiné à Pékin), ne peut se permettre de perdre un partenaire indispensable à ses ambitions géopolitiques.
Que peut-il se passer maintenant ? Si la tentative de médiation diplomatique des pays d'Eurasie et des États voisins échoue, comme cela semble désormais évident, l'escalade devient inévitable.
Les États-Unis, la Grande-Bretagne et Israël, avec le plein consentement de leurs vassaux européens, recherchent des acteurs locaux capables de remplacer Khamenei et de conduire l'Iran vers une rupture avec Moscou et Pékin. Si les dirigeants actuels de Téhéran perçoivent le danger d'un renversement qui pourrait se produire si les États-Unis entrent directement en scène avec leurs forces armées, ils n'auront d'autre solution que d'augmenter le prix du conflit en dépassant toutes les « lignes rouges ». Mobiliser l'Axe de la Résistance, fermer le détroit d'Ormuz au passage des navires (avec le consentement de Pékin, désormais résigné à une guerre totale dans la région) et changer l'inertie de la bataille par une intervention terrestre depuis le Liban, la Syrie et l'Irak, sont les seules cartes dont elle dispose, compte tenu de la domination totale du ciel par Israël.
Plusieurs inconnues subsistent. Certes, la Chine n'interviendrait pas directement (tout comme la Russie engagée en Ukraine), mais elle pourrait aider l'Iran en lui fournissant du matériel militaire et en poussant le Pakistan à entrer en scène (le ministre pakistanais de la Défense a non seulement manifesté sa solidarité immédiate avec Téhéran, mais s'est également déclaré prêt à attaquer Israël en cas d'intervention militaire américaine contre l'Iran). Islamabad, seule puissance nucléaire islamique, apporterait une aide indispensable et pourrait également inciter l'Égypte et la Turquie (dont les dirigeants restent dans le collimateur de Tel-Aviv et le seront de toute façon dans un avenir pas trop lointain) à intensifier leur pression contre Israël. Reste à savoir si cet effet domino complexe n'impliquerait pas également d'autres acteurs mondiaux, à commencer par l'Inde, en quête de revanche après l'échec subi dans la bataille aérienne qui a suivi la crise du Cachemire.
La Troisième Guerre mondiale, évoquée ces dernières heures par Steve Bannon et Tucker Carlson, est-elle peut-être plus proche que nous ne l'imaginons ?
NOTE:
[1] Wang Shichun, "L'Iran sera-t-il la deuxième Syrie d'Assad?", guancha.cn, 14 juin 2025. L'analyste militaire chinois souligne également un conflit interne à l'appareil iranien entre la position du Guide suprême Khamenei, la ligne médiane de Pezeshkian qui attribue une grande partie de la corruption du pays aux Gardiens de la révolution et celle des libéraux qui souhaiteraient privatiser totalement l'économie.
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Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran
Téhéran ne cède pas, Israël mise sur les États-Unis: premier bilan de la guerre entre Israël et l'Iran
Andrea Muratore
Après plus d'une semaine, la guerre entre Israël et l'Iran présente des scénarios stratégiques de toute première importance qui sont encore en cours de consolidation, mais dont l'analyse permet de se frayer un chemin à travers un flot de propagande extrêmement visqueux et de comprendre comment le conflit le plus problématique de l'histoire récente du Moyen-Orient pourrait évoluer et façonner la région.
Récit contre réalité, la guerre d'Israël contre l'Iran
Comme toute guerre, celle entre Tel-Aviv et Téhéran est faite de récits autant que de faits. Des récits qui s'avèrent souvent fallacieux à l'épreuve des faits concrets et qui doivent être présentés comme tels. Nous le constatons dans l'attitude des acteurs sur le terrain, directement ou indirectement impliqués dans la guerre, qui a fortement changé au cours des journées où ce conflit s'est développé.
La première tendance, double, est la prémisse nécessaire à tout le reste. Nous constatons en effet que la justification israélienne d'une guerre préventive visant à empêcher Téhéran d'accéder rapidement à une forme de dissuasion nucléaire s'est avérée insuffisante pour expliquer la réelle volonté de Tel Aviv d'entrer en guerre, justifiée en réalité par la tentative d'affaiblir et de saper les fondements du régime iranien.
Après le bombardement de Be'er Sheva jeudi, le ministre de la Défense de Benjamin Netanyahu, Israel Katz, l'a clairement indiqué en désignant l'ayatollah Ali Khamenei comme une cible militaire légitime. Au cours de ces mêmes jours, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), Rafael Mariano Grossi, a rejeté l'hypothèse selon laquelle, malgré les critiques de l'organe de Vienne pour avoir violé ses obligations en matière de prolifération, l'Iran accélérerait réellement la possibilité de se doter de la bombe par excellence.
Le régime ne s'effondre pas
Deuxièmement, nous constatons que malgré les coups très durs subis et l'éclaircissement continu des rangs supérieurs des forces armées, l'appareil du pouvoir iranien ne s'est pas effondré. L'architecture dite "baroque", qui pose la structure fondée sur le rôle du Guide suprême et des Gardiens de la révolution sur le gouvernement proprement dit et sur les forces armées traditionnelles, s'est révélée plus souple que prévu.
En particulier, le discours de Netanyahu, repris par de nombreux représentants des camps libéral et conservateur en Europe et aux États-Unis, selon lequel la libération de l'Iran du système de pouvoir actuel serait le résultat des raids de Tel-Aviv, ne s'est pas concrétisé. Indépendamment du jugement global sur le système de la République islamique et sur le Guide suprême, on constate qu'un régime en difficulté sur de nombreux fronts, de l'économie en crise aux questions sociales pressantes, n'a à ce jour aucune alternative crédible dans la société iranienne, que l'idée d'exporter un système démocratique à coups de bombes, une vieille tentation qui refait surface, semble pour le moins fallacieuse et que la ligne de réponse à Israël sur le terrain n'a pas provoqué de protestations ou de soulèvements.
Khamenei refuse la reddition, le système iranien ne s'effondre pas
À cet égard, le discours prononcé jeudi par Khamenei, dans lequel il a rejeté toute hypothèse de « reddition » du pays, comme l'avait demandé le président américain Donald Trump, a eu une importance politique considérable, dictant une ligne de conduite et mettant au défi les éventuels opposants de se manifester: aucun conflit ne semble avoir émergé dans l'architecture pourtant difficilement pénétrable du régime iranien.
Tout bien considéré, l'Iran subit les durs coups de l'offensive aérienne et balistique israélienne et tente de riposter avec une dissuasion balistique bien plus réduite, mais qui ne semble pas inexistante, loin de là. À ce jour, en substance, l'attaque de Tel-Aviv n'a pas encore provoqué le démantèlement total du nucléaire, n'a pas, jusqu'à présent, comme le confirme également le Jerusalem Post, ouvert de fissures irréparables dans le régime et n'a pas, troisième point de la confrontation entre le récit et la réalité, convaincu les États-Unis d'entrer en guerre pour porter un coup décisif à Téhéran, en évitant toute solution diplomatique.
Le dilemme américain et l'heure de la diplomatie
Trump a été sollicité de toutes parts: plusieurs faucons du Parti républicain, menés par les sénateurs Ted Cruz et Lindsey Graham, poussent à s'engager aux côtés d'Israël, et le général Michael Erik Kurilla, à la tête du Commandement central (Centcom) chargé des opérations au Moyen-Orient, semble partager cet avis.
Dans le même temps, on note la froide réticence de l'aile proche du vice-président J. D. Vance et des figures politiques, commentateurs et faiseurs d'opinion proches du monde "Maga", comme le présentateur Tucker Carlson. Mais jeudi, The Donald a déclaré vouloir donner une nouvelle place à la diplomatie, ouvrant une fenêtre de deux semaines pour d'éventuelles rencontres diplomatiques avec les dirigeants de Téhéran.
La « résurrection » de Shamakhani
À ce sujet, certaines informations intéressantes méritent d'être soulignées: tout d'abord, après que Trump ait ouvert cette fenêtre, l'Iran a annoncé que l'amiral Ali Shamakhani, haut conseiller de Khamenei et figure centrale de la diplomatie atomique avec Washington, était vivant et se remettait des blessures subies le 13 juin lors des attaques israéliennes qui ont déclenché la guerre. À propos de récits: Shamakhani avait été déclaré mort sur la base des communiqués militaires israéliens qui annonçaient son élimination.
Tel Aviv pensait avoir tué l'habile négociateur qui, jusqu'à il y a un mois, présentait des demandes pour le moins modérées dans ses discussions avec Washington: ouverture à l'abandon de l'uranium hautement enrichi, négociations directes et continues avec les États-Unis, politique permanente visant la désescalade. La nouvelle de la survie de Shamakhani ouvre la possibilité de recréer l'axe avec le ministre des Affaires étrangères Abbas Araghchi au nom de la désescalade. Hier, les premières discussions ont eu lieu à Genève avec les diplomates de l'E3, la France, l'Allemagne et le Royaume-Uni.
À propos de changement de discours: l'Europe, qui n'est pas intervenue dans les négociations entamées en avril par les États-Unis et l'Iran et qui, au début de la guerre, avait largement épousé le discours israélien et les raids, adopte désormais une approche plus inquiète, ouverte aux négociations et au cessez-le-feu. La volonté prématurée de venir en aide au (présumé) vainqueur a atteint son apogée lors du G7, lorsque le chancelier Friedrich Merz a déclaré qu'Israël « faisait le sale boulot pour nous tous ». La situation s'est avérée, comme dirait Giulio Andreotti, « un peu plus complexe ». Et le discours, éternel fléau de la politique internationale, a cédé la place au pragmatisme et à un plus grand réalisme. Ce qui, dans les affaires internationales, devrait toujours être bienvenu.
10:28 Publié dans Actualité, Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, moyen-orient, iran, israël, politique internationale, géopolitique, actualité, moyen-orient, iran, israël, politique internationale, géopolitique | |
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lundi, 23 juin 2025
Réflexions sur la souveraineté, la main gauche et les machines de guerre
Réflexions sur la souveraineté, la main gauche et les machines de guerre
Juan Gabriel Caro Riviera
La souveraineté a deux facettes : l'une chaotique et guerrière, l'autre ordonnée et législative. De Mitra-Varuna à Romulus-Numa, l'histoire montre comment les sociétés oscillent entre l'élan dionysiaque de la conquête et la stabilité apollinienne de la loi. En explorant les mythes indo-européens et l'oeuvre de penseurs tels que Dumézil, Evola et Deleuze, Juan G. C. Riviera enquête sur les « machines de guerre » qui défient l'État et propose une relecture de la tradition pour faire face à la stagnation moderne.
Dans son ouvrage sur Mitra-Varuna, Georges Dumézil établit que la souveraineté a deux facettes : l'une anarchique, l'autre législative. Les dieux indo-européens vont toujours par paires et représentent les deux facettes de la souveraineté: Mitra-Varuna, Odin-Týr, Mars-Jupiter, etc. D'un côté, nous avons le dieu guerrier, chef des batailles, des armes, des voyages et de la mort, et de l'autre, le dieu des lois, des contrats, du nomos et des limites.
Les premiers sont les dieux dont la fonction est le conflit et autour desquels s'organisent les ligues masculines conquérantes (Mannerbünde) qui, par le biais de rituels statiques, de l'usage de drogues et d'activités militaires, se constituent en bandes armées qui établissent leur domination sur un temps et un lieu déterminés. Lorsque ces bandes anarchiques parachèvent leurs conquêtes, des pactes sont établis qui norment la terre, délimitent l'espace et segmentent le monde pour l'organiser. Cette deuxième étape est dominée par les dieux dont la souveraineté s'exprime à travers le nomos, la loi, et qui établissent une certaine tradition basée sur les coutumes et la morale particulières des habitants d'un lieu.
Selon Dumézil, ce schéma se retrouve chez les hindous et la division entre les ghandarvas et les brahmanes ou chez les Romains dans leur division entre Lupercalia et Flamins. Dans la tradition hindoue, les ghandarvas sont des guerriers sans loi qui mangent de la viande, consomment des drogues et font des choses que les brahmanes ont l'interdiction de faire en raison des lois strictes imposées à leur caste. Il en allait de même pour les Lupercales romaines, qui étaient en quelque sorte une représentation anarchique de la fondation de Rome et qui ont progressivement perdu leur place jusqu'à être réduites à une fête et à un culte de la fertilité.
Dans le cas de Rome, la différence entre les Lupercales et les Flamines est établie dans l'histoire de la fondation de la ville par le duo Romulus-Numa. Romulus est le fils d'une louve, un chef guerrier qui rassemble autour de lui des bandits, des voleurs et des criminels pour établir les limites de Rome. Romulus tue son frère, enlève des femmes sabines pour obtenir des épouses pour ses hommes et mène toutes sortes d'expéditions militaires pour piller la région environnante. Après la mort de Romulus, Numa prend sa place, étant tout le contraire du premier. Contrairement à Romulus, Numa rédige des lois, organise l'espace de la ville, distribue des terres, enseigne le culte des dieux, établit le calendrier et fixe les directives de la vie civique. Romulus est représenté comme un jeune homme, tandis que Numa est représenté comme un vieil homme.
Dans ces exemples mythiques et historiques, nous pouvons trouver les deux fonctions de la souveraineté: l'une basée sur la partie maudite, la transgression et l'ouverture (Georges Bataille) et l'autre basée sur l'état d'exception, l'ordre et la fermeture (Carl Schmitt). La première est ce que nous pourrions appeler la voie dionysiaque et la seconde, une forme apollinienne. Ces deux aspects de la souveraineté sont complémentaires et ne peuvent être considérés comme opposés l'un à l'autre. En fait, on pourrait dire qu'ils se produisent en grande partie en parallèle, et que chaque société oscille entre les deux pôles. Toute société passe par une période de fermeture, de hiérarchie, de tension et d'ordre, mais aussi par une période d'ouverture, de déstructuration, de relâchement et de désordre.
On pourrait dire que les dieux et les chefs militaires, réunis autour des ligues masculines (Mannerbünde), sont les représentants de la Main gauche, tandis que les dieux législatifs et contractuels sont les représentants de la Main droite. Ce qui est interdit aux adeptes de la Main droite est permis aux adeptes de la Main gauche. La seule façon de rétablir un monde traditionnel, à une époque où tous les éléments qui ont rendu possible la Main droite ont disparu, est précisément d'aborder les fondements de la Main gauche et d'éveiller nos facultés dionysiaques atrophiées par la civilisation contemporaine.
Ces réflexions ont sans aucun doute inspiré de nombreux grands chercheurs et penseurs du 20ème siècle, tels que Julius Evola et Mircea Eliade, qui ont tenté de reconstruire les rituels chamaniques des anciennes ligues masculines indo-européennes avec leurs cultes du loup, leurs guerriers vêtus de peaux d'animaux qui se transformaient en ceux-ci et l'utilisation de masses guerrières et de techniques de guerre inspirées par le comportement de ces différentes espèces d'animaux. Le mythe de Zalmoxis, étudié par Eliade, montre que les anciens Romains, les Daces et les Mongols se considéraient comme les descendants des loups. Zalmoxis, le Hercule dace, était aussi un représentant de ces rites chamaniques.
En ce sens, les Mannerbünde et leurs défenseurs (Evola, Blüher, Wikander, Höfler, Eliade et autres) voulaient revenir à la religion originelle des Indo-Européens, qui était basée sur un culte dont les principales caractéristiques sont la vénération des morts, les festivals sacrificiels orgiaques, le lien avec les organisations martiales et une attitude positive envers les forces obscures et démoniaques de la vie, où ses adeptes utilisaient une masse et combattaient au corps à corps avec des animaux sauvages. Les Ghandarvas hindous, les Maruts iraniens, les centaures grecs et les Berserkers nordiques sont des exemples de ces confréries masculines.
On peut certainement affirmer ce qui suit: tandis que dans la tradition du Sud (l'hindoue, la grecque, la romaine, etc.), le culte des dieux législateurs a fini par prédominer, dans la tradition du Nord, le culte des dieux anarchiques tels qu'Odin a perduré beaucoup plus longtemps et les confréries masculines ont joué un rôle important jusqu'à une période historique avancée. Cependant, on peut dire que la Voie de la Main Gauche ne s'est jamais totalement établie dans les sociétés du Sud, mais le fait que des cultes tels que ceux de Dionysos et de Shiva aient toujours refait surface en est la preuve a contrario. Il en va de même pour d'autres traditions.
Il est intéressant de noter que des auteurs postmodernes tels que Deleuze et Guattari, dans Mille Plateaux, consacrent un chapitre entier à l'analyse de Mitra-Varuna par Dumézil, intitulé « Traité de nomadologie : la machine de guerre ». Deleuze et Guattari soutiennent que les dieux indo-européens tels que Mitra et Varuna ne contrôlent pas leurs propres machines de guerre (leurs guerriers), mais ont tendance à conclure des pactes avec des guerriers indépendants et indomptables, tels qu'Indra, qui ont leurs propres lois et règles. Les guerriers sont indépendants des pactes et des rites promus par les dieux anarchiques et législatifs et établissent des relations avec ces derniers pour différentes raisons. Le guerrier Indra peut libérer des individus asservis par des dettes et établir ses propres lois selon ses idées.
La machine de guerre est extérieure à l'État et aux lois les plus strictes de la civilisation. Alors que le Dieu législateur ordonne et organise le monde pour attribuer à chaque personne sa place, la machine de guerre est nomade et en mouvement constant. Deleuze et Guattari considèrent que la science de l'État est la science de l'immobilité, du lourd, du macro, tandis que la science de la machine de guerre est la science du mouvement, du pouvoir et des forces agissantes. Ici, Deleuze et Guattari s'inspirent largement des idées de Nietzsche et considèrent les conquêtes mongoles, l'expansion de l'islam et les constructeurs de cathédrales gothiques comme différentes incarnations de cette « science mineure » nomade basée sur la force et le mouvement.
En ce sens, l'anthropologie anarchique de Pierre Clastres et la nomadologie de Deleuze-Guattari constituent une analyse intéressante des ligues masculines et des machines de guerre politiques. Les ligues masculines ne sont pas nécessairement identifiées à l'État, même si dans certains cas, les rois ou les empereurs sont issus de ligues masculines. Dans certains cas, ces ligues masculines deviennent la garde qui protège le roi de ses ennemis, mais elles peuvent aussi être les principales instigatrices de guerres civiles. Lorsque les machines de guerre sont interdites et persécutées par l'État, elles peuvent finir par devenir des gangs criminels, voire terroristes, qui attaquent les formations ordonnées par l'État.
De ce point de vue, nous pouvons dire que notre objectif actuel doit être de faire revivre les machines de guerre comme moyen de détruire le monde moderne, en unissant le prémoderne et le postmoderne, l'archaïque et le futur. Promouvoir la figure du héros tragique, qui affronte son destin, est le seul moyen de mettre fin à la stagnation actuelle.
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dimanche, 22 juin 2025
La guerre à distance
La guerre à distance
par Daniele Perra
Source : Daniele Perra & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-guerra-a-dista...
On peut déjà distinguer au moins deux phases dans cette actuelle « guerre à distance ».
1) L'hyper-exaltation israélienne du premier jour suite au lancement de l'opération « Rising Lion », avec Netanyahu qui, dès le deuxième jour, annonce la domination totale du ciel au-dessus de Téhéran.
2) La réaction iranienne, alors que l'exaltation israélienne s'estompe, puis le traditionnel jeu de la « carte victimaire » de la part de Netanyahu lui-même pour forcer l'intervention directe (sur le plan logistique, c'est déjà un fait accompli) des États-Unis contre l'Iran. Il est également curieux, à cet égard, que le gouvernement israélien lui-même soit passé de la position consistant à dire « ne publiez pas de photos et de vidéos de l'impact des missiles iraniens » (afin de ne pas nuire au moral de la population) à celle consistant à dire « publiez tout » (stratégie suivie, bien sûr, par nos médias); curieuse également la confrontation musclée entre Ben Gvir (celui qui veut le nettoyage ethnique à Gaza) et le chef du Mossad. Ben Gvir se plaint probablement parce que la guerre contre l'Iran détourne des ressources de son plan d'extermination (plus de 250 millions de dollars par jour, et considérons que rien que pendant la dernière année de l'administration Biden, Israël a reçu 20 milliards de dollars des États-Unis, alors que traditionnellement, cette aide s'est toujours élevée à environ 5 à 6 milliards par an, dons privés compris; et rappelons également qu'Israël est le seul État qui n'a pas à rendre de comptes à Washington sur la manière dont il investit l'argent reçu).
Quoi qu'il en soit, tout dépenser d'un seul coup est une tradition bien établie dans la doctrine militaire israélienne, parfois couronnée de succès (1967), parfois non (2006). Et même dans ce cas, les résultats sur le terrain sont assez décevants (à l'exception de l'assassinat de hauts responsables des Pasdaran et de scientifiques iraniens, à condition que le meurtre de civils puisse être considéré comme un succès militaire). Le programme nucléaire iranien n'est que partiellement affecté et les capacités de riposte de Téhéran sont presque intactes.
Si le conflit devait se prolonger, la position de Tel-Aviv pourrait être encore plus compromise. Si les États-Unis interviennent directement, il faudra évaluer la manière dont ils le feront. Les doutes de Trump sont en effet liés au risque de ne pas obtenir une victoire réelle exploitable sur le plan de la propagande interne aux États-Unis et à l'Occident en général. La Russie et la Chine ne permettront guère un « changement de régime » déjà très difficile, et les États-Unis pourraient risquer une « victoire à la Pyrrhus » inutile avec une action qui aurait presque exclusivement une valeur symbolique (les Iraniens sont probablement déjà en train d'évacuer et de démanteler les cibles éventuelles).
Ainsi, sans la certitude d'un changement de régime, les États-Unis n'agiront pas, ou le feront de manière partielle.
En conclusion, et en ce qui concerne la Chine, il est curieux que l'attaque israélienne ait eu lieu quelques jours avant l'inauguration de la ligne ferroviaire Pékin-Téhéran, branche fondamentale de la Nouvelle Route de la Soie: signe indéniable que (malgré les déclarations officielles), ce « nouveau » conflit a des raisons bien plus vastes qu'on ne pourrait le penser.
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Contenir la Russie ou remodeler le système? - Rééquilibrer les forces ou "pivoter hors d'Europe"?
Contenir la Russie ou remodeler le système?
Rééquilibrer les forces ou "pivoter hors d'Europe"?
Irnerio Seminatore
Source: https://www.ieri.be/fr/publications/wp/2025/juin/contenir-la-russie-ou-remodeler-le-systeme
Table des matières
- Les leçons de fond sur les causalités du conflit, les intérêts en jeu et l'ambivalence des négociations
- Moments de rupture et réorganisation de l'ordre mondial
- Pivoter hors d'Europe, plutôt que rééquilibrer les forces
- "Pivot coopératif russe vers l'Est" ou "Pivot hégémonique mondial USA - Chine"
- Conflit ukrainien, cessez le feu et négociations de paix
- La Russie et les vérités faussées de l'Occident et ses conséquences
* * *
Les leçons de fond sur les causalités du conflit, les intérêts en jeu et l'ambivalence des négociations
Des leçons de fond sont à tirer du conflit russo-ukrainien, pour mieux comprendre les divergences stratégiques euro-américaines et pour redéfinir la politique étrangère de l'Union à l'approche du sommet de l'Otan du 24 et 25 juin prochain à la Haye. Elles concernent tout à la fois les enjeux, les intérêts et les stratégies.
Pour ce qui est des causalités fondamentales du conflit, la première et plus importante repose sur le statut et la position géopolitique de l'Ukraine, couloir incontournable de l'Europe vers l'Asie et enjeu de la stratégie eurasienne de l'Amérique
L'importance du facteur géographique n'avait pas échappé à Zbigniew Brzezinski qui, dans Le Grand Échiquier de 1997 avait identifié les trois leviers qui permettraient aux États-Unis de conserver le premier rôle dans les affaires mondiales au 21ème siècle: contenir la poussée de la Chine, poursuivre la division des Européens et couper la Russie post-soviétique de l’Ukraine. Celle -ci, située entre l’Union européenne à l’ouest et la Russie à l’est, a été souvent qualifiée d’État tampon. Or, il s'agit d'une définition qui remonte au Congrès de Vienne (1815) et qui implique une sorte de neutralisation et principalement d'une vocation de l'Etat tampon à ne rejoindre aucune alliance militaire ou organisation d’intégration économique afin d’éviter les conflits entre les puissances majeures du système. Cependant la succession des événements de la post guerre-froide prouve que cette mesure n'a pas eu de succès. Si la Russie a cherché à maintenir l’Ukraine dans son orbite, les États-Unis, de leur côté, ont voulu voir l’Ukraine comme un levier essentiel pour affaiblir la Russie.
Moments de rupture et réorganisation de l'ordre mondial
En effet sur le plan historique une succession de ruptures ont caractérisé le processus de réorganisation de l'ordre mondial, après la dislocation de L’Union soviétique (26 décembre 1991).
En voici les quelques références essentielles :
- 1999, fin du conflit du Kosovo opposant Serbes et Kosovars suite à l’intervention de l’OTAN sans mandat de l'ONU ;
- 2001, attentat terroriste aux Tours Jumelles du World Trade Center de New York ;
- 2003 conflit d’Irak par l’invasion américaine contre Saddam Hussein.
Pivoter hors d'Europe, plutôt que rééquilibrer les forces
À l’instar de l’antagonisme américano-soviétique de jadis et contrairement au conflit en cours entre la Russie et l'Ukraine, la compétition entre l'est et l'ouest s'est déplacée vers l'antagonisme entre Washington et Pékin pour l’hégémonie mondiale et a désormais un objet beaucoup plus important que le conflit ukrainien, se situant à un autre niveau stratégique.
L’actuelle connivence dans le "deal" américano-russe ne s’explique pas par une quelconque crainte que Moscou puisse dominer l’Europe ou menacer les pays baltes. Plutôt que de contenir Moscou, l’intérêt des États-Unis aujourd’hui serait de pivoter hors de l’Europe, en direction de l’Asie orientale, d’entraîner la Russie dans une coalition de rééquilibrage face à la Chine et de ne pas se laisser embourber dans une guerre en Europe de l’Est, en précipitant le rapprochement sino-russe. Pour le « réaliste » John Mearsheimer, la perspective d’intégrer l’Ukraine au sein de l’OTAN constituait et constitue encore une menace pour la Russie. Les Russes ne prétendaient pas que l’Ukraine était une menace en soi. C’est l’Ukraine au sein de l’OTAN qui concrétise cette menace. Par conséquent les Etats-Unis doivent désormais se détourner du continent européen pour mieux se consacrer à l’Asie. C'est là la contrainte de la politique du "Pivot” !
"Pivot coopératif russe vers l'Est" ou "Pivot hégémonique mondial USA - Chine"
Le terme “pivot vers l’Est” est réapparu dans le discours russe, lors du Forum économique international de Saint-Pétersbourg, en 2013. À cette occasion, Vladimir Poutine a évoqué la possibilité de développer les relations économiques avec les marchés de l’Asie-Pacifique, suivant en partie le modèle des États-Unis. Cependant, Poutine a immédiatement souligné une différence majeure: la Russie souhaitait coopérer avec la Chine et non rivaliser avec elle, contrairement à l’approche américaine. L’intérêt de la Russie pour l’Asie s’explique par la montée en puissance de la Chine, perçue comme une contre-force planétaire aux États-Unis. C’est pourquoi Moscou a cherché à établir une coopération avec Pékin, plutôt qu’une concurrence. Une autre différence notable entre le pivot asiatique américain et le pivot vers l’Est russe réside dans le rôle jusqu’alors limité de la Russie dans l’ensemble de la région Asie-Pacifique.
La politique des grandes puissances se caractérise cependant toujours par une implacable compétition sécuritaire puisque chaque État cherche non seulement à gagner en influence relative, mais aussi à éviter que la balance des pouvoirs ne penche en sa défaveur. Cet objectif, dit de l'équilibrage, peut être mis en œuvre soit par un accroissement de sa puissance, soit par une alliance avec d’autres États pareillement menacés. Dans un monde réaliste, le pouvoir d’un pays s’apprécie essentiellement à l’aune de ses capacités militaires, lesquelles dépendent d’une économie avancée et d’une population nombreuse. En conséquence, face aux multiples tentatives de mettre un terme au conflit ukrainien, les difficultés dans la définition des missions aux délégations des deux parties, chargées du déroulement des pourparlers de paix, repose sur le concept de stabilité et, en conséquence sur le statut des puissances régionales affectées par le règlement obtenu. Le dilemme concernant l'issue du conflit ukrainien (paix de compromis, ou paix dictée), porte sur des perspectives de sécurité totalement éloignées, soit en termes de système, soit en termes de sous-système.
A titre d'exemple, l'objectif qui fut proposé par Kissinger, le retour négocié à un "status quo”, passant par la reconnaissance d’une Ukraine neutre, ne devait pas être opposé à l’analyse qui avait été celle de Zbigniew Brzeziński dans Le Grand Échiquier. Reprenant les catégories forgées par Halford Mackinder, pour qui l’hégémonie mondiale dépendait de la prédominance exercée sur le Heartland qu’est l’Eurasie, Brzeziński voyait dans l’État ukrainien un important « pivot géopolitique », dont l’indépendance était de nature à contenir les ambitions impériales russes, à l'intérieur d'une bipolarité affichée. Dans l'actuelle formulation, l'objectif stratégique du "Pivot Asiatique" américain cache à la fois le moteur essentiel de la stratégie de l'Indo-Pacifique (APAC-2011), visant le sous-système asiatique et pas seulement la Chine et, au même temps une rivalité étendue au système international tout entier. A l'intérieur de ce cadre le "Pivot vers l'Est" de la Russie fait apparaître une véritable dépendance stratégique de la Russie vis-à-vis de la Chine et des Européens vis-à-vis de la Russie.
En effet, dans le concept de "Pivot Américain" il s'agit de remodeler la centralité de l'ordre politique et la hiérarchie de puissance, bref le point de gravité du système, d'où tout dépend. Or, si "la stratégie du containment", en son pur concept, consiste à limiter l'influence politique, à isoler par des sanctions économiques et à s'opposer à l'expansion géopolitique et militaire d'un acteur étatique dans une région ou dans un sous-système, le remodelage du système est une politique planétaire et de long terme qui consiste à rivaliser pour déstabiliser, en s'opposant à toute forme de "status quo" et visant l'hégémonie impériale et universelle. La première implique l'exercice d'une liberté d'action et donc "une politique de bascule" entre système et sous-système (Ukraine, Taiwan, Tibet, Xinjiang..), qui inverse la politique de rapprochement de Nixon, la deuxième un bouleversement structurel et général des rapports mondiaux de forces et la montée en puissance d'un nouvel acteur universel.
Conflit ukrainien, cessez le feu et négociations de paix
Face aux risques d'une aggravation du conflit et après trois ans d’affrontement, les parties aux prises, ainsi que la communauté européenne et internationale, ont entamé des rencontres diplomatiques, visant à régler les différends existants, en leurs causes, évolutions et perspectives. Compte tenu des différentes perceptions des dangers et de tournants défavorables à l'Ukraine dans le développement des opérations terrestres et donc dans les rapports réels des forces, un bilan lucide de la situation politique et militaire demeure le préalable à l'évaluation des perspectives de sécurité auxquelles s'inspirent les deux parties et qui divergent profondément. Ainsi une vue d'ensemble doit être portée sur les aspects capacitaires des acteurs impliqués dans le conflit, directement ou indirectement, mais aussi sur leurs intentions et objectifs, déclarés ou latents.
Nous commencerons par la Fédération de Russie dont l'action historique et le récit politique la désignent comme l'acteur principal des résolutions de pacification et de stabilisation recherchées. Les objectifs du Kremlin sont restés inchangées depuis le début des opérations militaires et peuvent se résumer en trois points:
- faire libérer par Kiev les quatre Oblasts de l'Ukraine considérés comme russophones, qui sont Donetsk, Louhansk, Kherson et Zaporijjia (libération qui a été un facteur déclencheur du conflit).
- s'engager au retrait de la candidature de l'Ukraine à devenir membre de l'Otan, assorti d'une réassurance de l'éventuel traité de paix par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.
- obtenir un changement de régime politique, appelé "dénazification" au sens des accords de Potsdam sur l'Allemagne (de juillet 1945, et signifiant à l'époque une légitimité démocratique et nouvelle pour l’Allemagne vaincue). Ces accords prévoyaient notamment la dénazification, la démilitarisation, la décartellisation et la décentralisation.
La Russie et les vérités faussées de l'Occident et ses conséquences
Les principaux obstacles à un processus de paix demeurent, selon de multiples observateurs, les Occidentaux et principalement la Grand Bretagne et la France, en raison de vérités faussées et du refus de comprendre l'adversaire. A la lumière de celles-là et au cœur des préoccupations de l'adversaire, le projet russe de protéger la population russe de l'Ukraine, facteur déclenchant du conflit, apparaît parfaitement légitime.
De cette incompréhension découlent une série de conséquences et donc la conception de l'importance du territoire à reconquérir (la Crimée et les quatre Oblasts du Donbass) et de l'aide occidentale accordée à l'Ukraine pour cette reconquête improbable. Il s'agit d'une aide qui prolonge la guerre sans donner un avantage sur le terrain à l'Ukraine, car cette victoire appartient à la Russie. Ils en dérivent deux répercussions importantes ; la construction d'un narratif illusoire qui consiste à faire davantage confiance à la représentation de la guerre qu'à la réalité du terrain et, quant au but de guerre, à faire croire en une paix de compromis et non de capitulation.
Cet artifice pousse Zelenski, à la légitimité discutée, à pratiquer une guerre d'éclat sur les arrières du front, sans influence sur la ligne des combats, (attaques d'aérodromes russes, contre le pont de Kersch..). Ce choix fait cliver le régime en place vers un régime terroriste, avec lequel il apparaît dès lors difficile de négocier. Le but de ce narratif est au fond de fausser la perspective, cependant que des rapports américains sur l'état du conflit, contredisent radicalement le narratif des Européens, qui demandent à être parties prenantes du conflit sans en avoir les moyens.
Dans cette ligne de conduite et dans cette approche équivoque, il est nécessaire de distinguer également, au plan diplomatique, l'échange de mémorandums entre les parties aux prises pour amorcer un "cessez le feu", qui n'a pas de sens sans un "traité de paix” ; traité qui confère une convergence d'intentions et de sincérité à l'ensemble du processus. Or, à propos du conflit, si les Etats-Unis tâchent de le terminer et de s'en dégager au plus vite et si la Russie apparaît toujours prête à négocier, les Européens font tout pour empêcher la négociation, car le seul souci de la diplomatie de l'UE a été d'alimenter l'affrontement armé (J. Borrel) ou de le "décoloniser" (Kaja Kallas, Haute représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité).
Pour celle-ci le concept de stabilité coïncide avec celui d'élimination de la Russie ou son découpage politique et territorial, bref une amputation eurasienne. Or, malgré le fait que l'armée ukrainienne n'a jamais eu le dessus dans le conflit, même dans la contre-offensive de 2023, l'objectif de l'UE demeure celui selon lequel "l'Ukraine doit gagner !", objectif, pour lequel un vaste plan de réarmement de l'Europe est entamé. En ce sens la diplomatie européenne n'a pas avancé depuis Angela Merkel et l’Ukraine est restée un conflit non résolu et donc gelé, à la marge, inessentiel au continent. Or, dans la "disputatio imperii" entre l'est et l’ouest, l’issue du conflit, au lieu de prendre la forme d’un projet de coopération et de développement Europe-Russie, figure comme une pomme de discorde et comme un gage d'instabilité permanente, gangrénant les relations entre Moscou et Paris, Paris et Berlin et l'Europe et l'Amérique.
La divergence de prospective est évidente et elle apparaît au grand jour au Sommet du G7 au Canada du 17 juin dernier, où l'absence d'unité des Occidentaux reproduit des formules vides, du style: "le G7 s'est consacré à l'aide accordée à Kiev et "a de nouveau apporté son soutien à l'Ukraine, mais sans durcir le ton face à la Russie", En effet, "le club des grandes démocraties industrialisées n'a cette fois pas publié de déclaration commune dénonçant 'l'agression russe'", "contrairement aux années précédentes quand Joe Biden était à la tête des États-Unis". Et, le dirigeant ukrainien, Volodymyr Zelenski, qui s'est rendu au Canada "pour plaider sa cause", sans grand succès, fait de l'Ukraine la "grande perdante d'un G7, dominé par la guerre au Moyen-Orient". N'ayant pas eu la "possibilité de s'entretenir avec le président américain", il "repart tout de même avec une nouvelle aide militaire de 1,27 milliard d'euros, notamment pour des drones et des véhicules blindés", preuve que, dans l'Europe multilatéraliste, les problèmes de la conscience historique peuvent avoir toujours des revers financiers.
Bruxelles, le 18 Juin 2025
16:41 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : géopolitique, actualité, europe, affaires européennes, états-unis, russie | |
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L’Iran: l’un des principaux socles de nos origines indo-européennes
L’Iran: l’un des principaux socles de nos origines indo-européennes
Pierre Emile Blairon
« Regardons-nous en face. Nous sommes des Hyperboréens – nous n’ignorons pas à quel point nous vivons à l’écart. « Ni par terre, ni par mer, tu ne trouveras le chemin qui mène chez les Hyperboréens » : voilà ce que Pindare savait déjà de nous. Par-delà le nord, la glace, la mort – notre vie, notre bonheur… Nous avons découvert le bonheur, nous connaissons le chemin, nous avons trouvé la voie pour sortir de millénaires entiers de labyrinthe. Qui l’a trouvé, à part nous ? »
C’est ce qu’écrivait Nietzsche dans L’antéchrist en 1896.
Qui sont donc ces « Hyperboréens » qui seraient nous-mêmes et dont très peu de personnes ont entendu parler ? Eh bien, il s’agit de nos plus lointains ancêtres, le peuple-source dont nous sommes issus [1], dont la grande ethnie indo-européenne est issue [2], une ethnie dont nos ennemis ne veulent considérer que l’aspect linguistique et qui est composée à l’origine des peuples grecs, italiques, albanais, indo-iraniens, celtiques, germaniques, nordiques, slaves, arméniens, qui sont nos frères et nos cousins.
Julius Evola écrivait, dans l’entre-deux-guerres, à propos de nos ancêtres : « Cette hérédité des origines, cet héritage qui nous vient du fond des âges est un héritage de lumière »
Parmi ces peuples européens, l’une des principales composantes est constituée par les Indo-Iraniens qui étaient autrefois appelés Perses et qui sont venus de la Russie méridionale et du Caucase vers la fin du IIe millénaire avant notre ère.
L’Iran « a donné naissance il y a 2500 ans au premier empire à vocation universelle en s'emparant de la prestigieuse Babylone : en 539 av. J.-C., Cyrus II le Grand, roi des Perses et des Mèdes, fonde le premier empire à vocation universelle de l'Histoire humaine. Depuis lors, les plateaux iraniens ont abrité des civilisations du plus extrême raffinement, qui n'ont rien à envier à l'Occident comme à l'Orient.
À la différence de leurs voisins, les Iraniens ne souffrent d'aucune frustration à l'égard de l'Occident. Ils n'ont de « revanche » à prendre sur personne, sinon sur les trublions cupides qui ont tenté depuis la Seconde Guerre mondiale de s'approprier leurs réserves pétrolières […] Dans l'Antiquité domine le mazdéisme (de Mazda, Dieu, dans la langue perse), aussi appelé zoroastrisme parce que fondé par le prophète Zarathoustra (ou Zoroastre) au VIIe siècle avant J.C. Il prospère sous les Achéménides (les héritiers de Cyrus) et va survivre jusqu'à l'approche de l'An Mil avant de s'effacer presque complètement face à la poussée de l'islam.
Cependant, l’islam ne réussira pas à brider la culture persane qui « s'épanouit sous le règne d'Abbas I er comme en témoignent les beaux monuments d'Ispahan, les tapis, les céramiques et les délicieuses miniatures de cette époque. » (André Larané, 2500 ans d'Histoire de la Perse à l'Iran, Hérodote.net [3]
L’Iran est un grand pays, par son histoire, ses paysages, ses peuples, sa culture, son courage, mais aussi par sa superficie: 1.648.000 km2, soit plus de trois fois celle de la France.
Nous avons montré que les Iraniens ne sont pas des Sémites, comme on pourrait le croire parce qu’ils sont musulmans. A l’origine, ils n’étaient pas musulmans, tout comme les Gaulois n’étaient pas chrétiens.
La société traditionnelle iranienne, malgré l’intense propagande occidentale qui veut la faire passer pour une société aux mœurs obscurantistes, est à nouveau tournée vers son ancienne religion zoroastrienne (oui, encore une référence à Nietzsche : Zarathoustra) ainsi que nous l’explique cette jeune femme [4].
Une autre vidéo est encore plus explicite: elle nous montre la jeunesse de Téhéran lors de la dernière fête païenne, mazdéiste, du printemps (Norooz [5]). Vous voyez beaucoup de jeunes filles voilées et de mollahs barbus ? Non ! La vidéo d’origine iranienne est accompagnée de ce commentaire : « Hier soir, c'était Chaharshanbe-Soori (fête du mercredi) que les Iraniens festoient et font la fête alors qu'ils disaient adieu à la dernière semaine de l'année avant l'arrivée de NOROOZ (le nouveau jour et l'arrivée du printemps). Voici à quoi ressemblaient les rues de Téhéran... C'est merveilleux de voir notre peuple célébrer malgré les difficultés économiques.
La jeune génération sait ce qu'elle veut, et la tyrannie de la religion n'en fait PAS partie. »
Les mensonges de l'Occident et de Nétanyahu ainsi que la bêtise et l'ignorance crasse de nos politiciens (voir, par exemple, les dernières positions de Marine Le Pen sur le sujet) nous conduisent tout droit à une guerre mondiale.
Le « régime des Mollahs », qui touche à sa fin, n’aura constitué qu’une parenthèse dans la grande et splendide histoire de l’Iran, toponyme qui signifie « royaume des Aryens », et une parenthèse encore plus insignifiante dans l’histoire fabuleuse de nos origines, notre cycle qui s’achève ayant débuté il y a plus de 60.000 ans.
Cette fin de cycle voit s’opposer deux grandes factions [6] qui vont s’affronter dans une guerre impitoyable : les Traditionalistes contre les Globalistes [7], la vérité contre le mensonge, la dignité des cultures anciennes contre l’abjection de notre monde en décomposition.
Si un conflit majeur devait survenir, ma place de cœur serait auprès de ces frères et de ces cousins que je ne connais pas, cette intuition lointaine, venue « du fond des âges », me le murmure, cet héritage des origines me le rappelle, le sort de cette jeunesse iranienne encore insouciante me l’impose.
Notes:
[1] Les Hyperboréens étaient le peuple-source qui habitait l’Hyperborée à une époque relativement ancienne, il y a 64800 ans, selon la tradition indoue ; ce continent serait désormais enfoui sous les glaces ; le concept et la spiritualité qui se rattachent à l’Hyperborée se nomment : la Tradition primordiale, et ses partisans, les primordialistes. Voir l’article sur ce site : Qu’est-ce que la Tradition primordiale ? du 4 mai 2022.
[2] C’est le mathématicien indien Bal Gangadhar Tilak (1856-1920) qui a, le premier, ouvert l’ère des recherches indo-européennes contemporaines ; lui ont succédé, pour les principaux noms connus, dans l’ordre chronologique : Ananda Coomaraswamy, René Guénon, Julius Evola, Mircea Eliade, Alain Danielou, Jean Phaure, Paul-Georges Sansonetti ; les professeurs Georges Dumézil et Jean Haudry, linguistes et historiens des religions, ont plus particulièrement traité des langues et de l’organisation des sociétés indo-européennes.
[3] Voir la vidéo « De la Perse à l’Iran, 2500 ans d’histoire » https://www.youtube.com/watch?v=_uVPt7GLNH0
[4] https://www.facebook.com/reel/4177251819176792
[5] https://www.facebook.com/IranFocusedForum/videos/15201020...
[6] Voir mon article du 17 octobre 2024 : La guerre des deux mondes
[7] Voir mon article du 22 février 2024 : Traditionalistes contre globalistes : le grand chambardement planétaire
15:54 Publié dans Actualité, Traditions | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : iran, actualité, tradition | |
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Les mémoires d’un jeune péquenot
Les mémoires d’un jeune péquenot
par Georges Feltin-Tracol
Je « n’ai encore rien accompli d’exceptionnel dans la vie », annonce J.D. Vance en préambule de son autobiographie publiée à 32 ans et parue en 2016 sous le titre de Hillbilly Elegy. En français, il s’intitulait à l’origine Hillbilly Élégie. Les éditions Globe viennent de le rééditer sous un titre spécieux, celui d’Une famille américaine. De la grande pauvreté aux ors de la Maison Blanche (2025, 306 p., 23 €). Il s’ouvre sur une préface inutile de Christine Ockrent. Au moment de sa rédaction, homme d’affaire et juriste de formation, J.D. Vance souhaitait à travers son parcours montrer à ses compatriotes la réalité crue des Hillbillies, ces «gars des collines».
Transposé en français par « plouc » ou « péquenot », Hillbilly désigne l’habitant des Appalaches. On connaît surtout les Montagnes Rocheuses situées à l’Ouest de l’Amérique du Nord. Or, dans l’arrière-pays de la côte Est s’étend en diagonale sur près de 2500 km de l’Alabama jusqu’en Gaspésie au Québec une vaste chaîne de montagnes. D’environ 200 à 300 km de large, ce relief complexe aux altitudes peu élevées correspond à un Massif Central très étiré avec de multiples vallées encaissées longtemps exploitées pour leur richesse houillère, d’où, par extension, l’essor d’une puissante industrie métallurgique.
Né en 1984 dans l’Ohio, J.D. Vance grandit dans une famille dysfonctionnelle. « Le chaos appelle le chaos. L’instabilité provoque l’instabilité, prévient-il. Bienvenue dans la vie de famille des Hillbillies. » Son père quitte très vite sa mère qui sombre bientôt dans diverses formes de dépendance dont la toxicomanie et des liaisons extraconjugales tumultueuses, fréquentes et éphémères. Ce sont ses grands-parents maternels – Papaw et Mamaw – qui l’élèvent avec sa sœur aînée, Lindsay. Ils passent tous deux leur enfance, puis leur adolescence dans un milieu misérable où les voisins survivent en allocataires des aides sociales gouvernementales quand ils ne sombrent pas dans la délinquance et la drogue. Par ce livre, l’auteur pointe « une culture qui encourage de plus en plus le déclassement au lieu de lutter contre ».
Plus que le Texan, le Hillbilly souffre d’une mauvaise réputation. Originaire d’un vrai « Quart-Monde » intérieur, il s’exprime avec un accent caractéristique. Sa rusticité se confond vite avec une frustration instinctive. Les plus cinéphiles retrouveront ces clichés dans le film de John Boorman, Délivrance (1972). Quatre amis, hommes d’affaires à Atlanta, décident de passer une fin de semaine ludique et sportive à descendre une rivière des Appalaches. Deux bouseux rustres et violents les agressent. Le groupe recourt alors à l’auto-défense la plus viscérale.
J.D. Vance ne fait aucune référence à ce film qui puise dans des stéréotypes considérés comme racistes pour d’autres ethnies. L’auteur l’avoue volontiers : « Je suis blanc, mais pas comme les WASP, white anglo-saxon protestants, du Nord-Est. Au contraire, je me reconnais dans les millions de Blancs d’origine irlando-écossaise de la classe ouvrière américaine qui n’ont pas de diplômes universitaires ». Il ajoute ensuite qu’avec leur état d’esprit réfractaire et leurs traditions bien ancrées, « les Irlando-Écossais sont l’un des sous-groupes les plus identifiables de la population américaine ». Il ne précise pas que le peuplement des Appalaches résulte de l’installation héroïque de petits colons chassés de leurs lopins de terre par de grands propriétaires - planteurs. Il s’y développe au fil des générations une réticence certaine envers toute forme d’autorité officielle…
Crise économique ou pas, « c’est dans ces montagnes, observe J.D. Vance, que le sort des Blancs de la classe ouvrière semble le plus rude ». Les difficultés du quotidien n’empêchent nullement le maintien d’un sens aigu de l’honneur. « Nous, les Hillbillies, sommes les gens les plus durs à cuire de la planète. Si quelqu’un insulte notre mère, nous sortons la tronçonneuse. » L’allusion à cet appareil n’est pas qu’une métaphore, mais le rappel d’un fait réel ignoré de la police locale…
Outre le cadre sécurisant de ses grands-parents, J.D. Vance sait aussi saisir quelques occasions propices. Sur le conseil d’une cousine, il s’engage dans les Marines et est envoyé en Irak. Il y exerce une fonction de conseiller auprès des équipes de presse. Au sein de cette unité d’élite, il apprend la discipline, les efforts sportifs et le régime alimentaire… Il dépeint un corps d’arme soucieux de ses recrues qui les materne dans tous les actes de la vie courante tels l’achat d’un véhicule. Les Marines disposent d’un établissement de crédit réputé : la Navy Federal qui leur propose des crédits au taux imbattable.
Son contrat d’engagement de quatre ans terminé, J.D. Vance s’inscrit à l’université de l’Ohio avant de poser sa candidature à Yale dans le Connecticut. Une loi aux États-Unis permet aux anciens soldats de suivre des études supérieures sans contracter des prêts bancaires onéreux. Par ailleurs, il apprend vite que « les universités les plus coûteuses sont paradoxalement les plus économiques pour les étudiants d’origine modeste ». Ancien combattant et plus âgé que ses condisciples, l’auteur perçoit sa présence à Yale comme « une anomalie ».
Son admission dans l’une des plus prestigieuses universités lui ouvre bien des portes. « À Yale, la fac de droit est le Hollywood des nerds. » Le nerd est un intello peu sociable passionné de techniques informatiques et numériques. Il rencontre dans ces lieux « la fille brillantissime d’immigrants indiens », Usha Chilukuri, sa future épouse et mère de leurs trois enfants. Elle ne sait pas qu’elle deviendra la première femme de vice-président d’origine indienne et de confession hindouiste. On reste surpris que le système médiatique d’occupation mentale hexagonal décrive encore J.D. Vance en national-populiste suprémaciste blanc… Ce choix matrimonial irrite en revanche quelques milieux nationalistes - séparatistes blancs. Une certaine droite radicale soupçonneuse se méfie de l’administration Trump II avec ce vice-président marié à une Asiatique ou un secrétaire au Trésor, Scott Bessent, homosexuel assumé et ancien employé de George Soros. En outre, à Yale agit la puissante fraternité secrète Skull and Bones (« Crâne et Os »). Vance en fait-il partie ? Aucun commentaire de sa part sur ce point ! Il ne s’épanche jamais non plus sur les raisons de la rédaction de ce livre.
Contrairement à sa famille démocrate même si en 1984 son Papaw vota pour la première et unique fois en faveur de la réélection du président républicain Ronald Reagan, J.D. Vance se déclare conservateur. Il signale que son « héros en politique » n’est autre que « le gouverneur de l’Indiana, Mitch Daniels » (photo) de 2005 à 2013, un conservateur classique post-reaganien.
Le chapitre 11 est le plus politique. Lu aujourd’hui avec le recul, il surprend, car s’y trouve la dénonciation de la thèse qu’Obama ne serait pas né aux États-Unis, thèse soutenue avec ardeur par Donald Trump. « Un tiers de notre communauté met en doute la nationalité du président. […] Il s’agit d’une profonde défiance à l’encontre des institutions de notre pays, qui gagne le cœur de la société. » On comprend mieux son anti-trumpisme virulent des années 2016 – 2018.
En conservateur alors libéral et individualiste, J.D. Vance critique « une tendance forte, chez les Blancs de la classe ouvrière, [qui] consiste à accuser la société ou le gouvernement de tous les maux, et elle ne cesse de s’étendre. C’est là que le discours des conservateurs actuels (dont je fais partie) passe à côté des vrais défis auxquels font face leurs principaux électeurs. Au lieu d’encourager l’engagement, les conservateurs exaltent de plus en plus la forme de détachement même qui a sapé l’ambition de beaucoup de mes pairs. […] La droite le répète de plus en plus : ce n’est pas votre faute si vous êtes des ratés, c’est celle du gouvernement ».
Quand J.D. Vance sort son autobiographie, a-t-il déjà en tête d’entrer en politique ? Peut-être pas. Le succès de son livre (quatre millions d’exemplaires vendus) l’incite à se présenter en 2022 au poste de sénateur fédéral dans l’Ohio. Il remporte l’élection et siège au Sénat de 2023 à 2025 grâce à l’appui, parfois sarcastique, de Donald Trump. Son ralliement au mouvement MAGA parachève un processus commencé à la présidentielle de 1964 avec le républicain Goldwater et poursuivi avec la « Majorité silencieuse » de Richard Nixon, la « révolution libérale – conservatrice » de Reagan, le développement des milices anti-gouvernementales contre Clinton dans la décennie 1990, la candidature à la vice-présidence en 2008 de Sarah Palin et le Tea Party contre Obama. Une autre révolution, populaire et nationale-conservatrice, est sûrement en cours. J.D. Vance en est dès à présent l’emblème.
Il ne fait guère de doute qu’il sera candidat aux primaires en 2028 sauf si survient un contretemps inattendu qu’il mentionne dans le livre. Tout en se moquant des affirmations de certains sites complotistes avançant que « Barack Obama instaurerait la loi martiale avant la fin de son mandat dans le but de faire un troisième mandat », J.D. Vance émet sans le savoir une hypothèse qui pourrait au final convenir à Donald Trump lui-même avant 2029.
GF-T
- « Vigie d’un monde en ébullition », n° 161, mise en ligne le 18 juin 2025 sur Radio Méridien Zéro.
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samedi, 21 juin 2025
Freud contre Wilson et le traité de Versailles
Freud contre Wilson et le traité de Versailles
Nicolas Bonnal
C’est un grand moment de l’histoire de la pensée antimoderne. Freud, qui est souvent plus conservateur qu’on ne croit, se déchaîne contre le traité de Versailles, la disparition des empires centraux et l’abominable Wilson, qui voulait faire du monde un lieu sûr pour la démocratie occidentale ; et comme on sait cette démocratie préfère anéantir le monde que ne pas l’avoir fait TOTALEMENT à son image.
L’universitaire et psychanalyste Mark Stafford écrit dans un texte hélas trop bref qu’il est indispensable de relire et méditer :
« Je m’apprête à découvrir à quoi ressemble vraiment un porc-épic. »
Remarque attribuée à Freud avant son départ pour les États-Unis sur le vapeur George Washington en 1909 (ce même paquebot qu’empruntera le président américain Woodrow Wilson, dix ans plus tard, pour, selon lui, garantir la paix à l’Europe et apporter une « assurance à 99% contre toute guerre future »)… »
Freud est en fait un antiaméricain primaire (et quel grand esprit, y compris américain, alors ne l’était pas ?) :
« …l’idée d’une civilisation « américaine » avait déjà produit une influence sur Freud via l’analyse par George Beard de la neurasthénie – la « maladie américaine 3 ». Si le livre de George Beard n’est jamais mentionné dans l’ouvrage Le président Thomas Woodrow Wilson. Portrait psychologique (objet de cet article), l’influence de la thèse de Beard d’une « faiblesse » imputable à la culture américaine n’a jamais été absente de la pensée de Freud. »
La psychanalyse deviendrait alors une peste apportée pour de bonnes (et non de mauvaises, comme on croyait encore) raisons :
« La remarque apocryphe de Freud – « Ne réalisent-ils pas que nous leur apportons la peste ? » – se comprend si l’on tient compte, en arrière-plan, de l’acceptation par Freud du diagnostic de Beard sur les Américains – leur propension au surmenage et leur création d’un culte moderne de la vitesse, de l’efficacité et de la mécanisation les ayant conduits in fine à l’impuissance psychique. »
Freud se débarrassa dans un livre maudit de la troublante, catastrophique et dramatique personnalité de Wilson ; Stafford ajoute :
« L’ouvrage Le président Thomas Woodrow Wilson - Portrait psychologique concentrait à la fois la colère de Freud et les caractéristiques névrotiques que favorisait, selon lui, la culture américaine. Cependant, lorsque l’ouvrage parut en 1967, il embarrassa les freudiens américains… »
… et nos historiens européens, toujours plus médiocres, qui justifièrent ce traité monstrueux (voyez nos textes sur Keynes, Le Bon ou Bainville) ; Freud vécut ce traité comme une catastrophe et écrivit dans son livre publié avec Bullitt :
« Cet étrange ouvrage était une réponse à deux échecs, l’un infligé par les analystes américains et leurs adeptes supposés, l’autre relatif au sujet lui-même, Woodrow Wilson. Lorsque Freud rencontra William Bullitt, dont il suivait la compagne, Louise Bryant, en analyse, il saisit l’opportunité pour exprimer sa propre thèse de la catastrophe qu’avait provoquée le traité de Versailles en Europe. »
Le vieux sage dénonce le redoutable (et increvable comme on sait, depuis 1815) condominium franco-britannique :
« L’amertume de Freud au sujet du refus de la France et de la Grande-Bretagne de mettre de côté leurs ambitions impérialistes et de mettre en œuvre un traité de paix équitable le conduisit à une collaboration avec un écrivain quasiment profane en matière de psychanalyse, amoindrissant ainsi considérablement l’intérêt analytique du texte. »
Stafford ajoute sur ce thème (le duo infernal se muant en trio) :
« Freud présente Wilson comme un cas exemplaire d’« échec », et considère comme une conséquence de l’effet du surmoi sur la transmission son incapacité à déjouer les actions de Lloyd George et de Georges Clemenceau visant à humilier les empires centraux, et donc semer les germes d’une guerre future. »
Le point de vue du sage était définitif. Stafford :
« Si nous trouvons chez Freud relativement peu de références à la montée du totalitarisme, c’est en partie dû, selon moi, à ses recherches acharnées des raisons de l’échec du traité de Versailles. Freud conclut qu’avec ce document, l’arrêt de mort de la civilisation européenne avait été signé. »
La guerre prochaine était prête :
« La catastrophe était inévitable et la facilité avec laquelle de petits groupes fanatiques pourraient tirer parti de cette faiblesse était plus qu’évidente, à tel point que Freud lui-même a pu sous-estimer la rapidité avec laquelle le libéralisme du 19ème siècle pourrait s’effondrer… »
Celui qui l’avait compris c’était Veblen (voyez notre texte). Le Bon regrettait qu’on eût laissé une Allemagne surpuissante et haineuse à la fois (et avec de bonnes raisons de l’être) ; Bainville aussi. Mais qui les écouta ? Le monde des démocrates est celui du narcissisme psychique, pour parler comme Freud ; il n’a que faire de la protestation violente de la réalité…
Stafford décrit la volonté US de détruire la vieille Europe, celle de Zweig ou de Freud :
« La vision d’une catastrophe européenne résultant de l’action du président Wilson s’est conjuguée avec la « suspicion » de longue date de Freud au sujet de la forme et de l’intérêt de la culture américaine. L’Amérique, qui de longue date souhaitait rester à l’écart de l’Europe et avait tenté, par sa politique isolationniste et sa destinée évidente, de dissimuler sa dette symbolique à l’égard de la civilisation européenne, avait remis en jeu, par l’entremise du président Woodrow Wilson, le meurtre de son père « symbolique ».
Et de citer Karl Kraus, cet autre rebelle juif du monde moderne américanisé :
« En outre, Freud, dans cet ouvrage, proposait une analyse de la société américaine comme productrice d’une « faiblesse » pathologique. Selon lui, le modèle social sur lequel se fondait l’Amérique n’était pas acceptable, et il n’y avait lieu ni de l’adopter, ni de s’y adapter. Les écrits de Freud ont parfois les accents de Karl Kraus, l’un de ses contempteurs, lorsqu’il cherche à décrire « l’Américain ».
L’establishment anglo-américain créa (avec les Français, cocus de cette alliance contre nature depuis deux siècles) Hitler et les conditions de la guerre future. Nous l’avons expliqué ailleurs. C’est pourquoi la lecture de Freud devient aussi importante.
Sources :
La pathologie de la norme : la troublante analyse de Woodrow Wilson par Freud - Mark Stafford
https://shs.cairn.info/revue-essaim-2013-2-page-19?lang=f...
https://lesakerfrancophone.fr/todd-et-freud-au-chevet-des...
https://lesakerfrancophone.fr/le-narcissisme-occidental-f...
https://lesakerfrancophone.fr/comment-les-anglo-saxons-cr...
https://lesakerfrancophone.fr/comment-lestablishment-angl...
https://les4verites.com/1920-jacques-bainville-explique-h...
https://www.amazon.fr/HITLER-VERSAILLES-PETITS-ESSAIS-HIS...
https://tuvntana.wordpress.com/wp-content/uploads/2015/06...
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RAND analyse l'expérience de l'Ukraine et recherche les vulnérabilités de la Russie
RAND analyse l'expérience de l'Ukraine et recherche les vulnérabilités de la Russie
Leonid Savin
La société américaine RAND Corporation continue de publier régulièrement des rapports sur l'opération militaire spéciale de la Russie, qui peuvent être intéressants en termes d'évaluation du conflit armé, des perspectives de son achèvement, ainsi que des intentions futures à l'égard de la Russie.
Dans cet article, nous examinerons trois études. La première, intitulée « Conséquences de la guerre entre la Russie et l'Ukraine et évolution du conflit », présente les principales conclusions suivantes :
« Le principal effet géostratégique de la guerre entre la Russie et l'Ukraine a été d'affaiblir les relations entre l'Europe et la Russie et, dans une moindre mesure, entre l'Europe et la Chine, tout en offrant l'occasion de renforcer les relations entre les États-Unis et leurs alliés européens. Si ces effets se maintiennent, ils retarderont l'objectif de la Russie et de la Chine de créer un monde multipolaire où l'influence occidentale serait réduite. Au-delà du sang et des trésors qu'un tel retard entraînerait, le coût stratégique pour le Kremlin sera plus important.
– La Russie et la Chine sont désormais davantage incitées à saper l'alliance transatlantique. Bien que la Russie semble toujours disposée à reprendre ses relations commerciales d'avant-guerre avec l'Europe, les décisions de l'Europe de rechercher des alternatives à long terme aux importations d'énergie russe et d'imposer des sanctions radicales ne seront pas faciles à inverser. Pékin, pour sa part, semble de plus en plus intéressé par des opérations diplomatiques et d'information visant à affaiblir l'alliance transatlantique.
- Les États-Unis et leurs alliés doivent s'adapter pour se préparer à de futurs conflits prolongés à grande échelle et préserver la dissuasion étendue. Les adversaires des États-Unis ont pris note des difficultés liées au maintien du soutien à l'Ukraine et pourraient à nouveau remettre en question la capacité et la volonté des États-Unis de mener une guerre prolongée. Si les adversaires estiment que leurs systèmes industriels et politiques sont mieux adaptés à un conflit prolongé que ceux des États-Unis, et s'ils considèrent que leurs intérêts peuvent encore être satisfaits à un coût acceptable, il pourrait en résulter un affaiblissement de la dissuasion élargie des États-Unis.
- La communauté de défense américaine pourrait négliger les implications de la guerre en Ukraine pour les contingences futures au-delà de la région indo-pacifique, y compris en Europe. Les États-Unis tirent les leçons des opérations en Ukraine et les appliquent à la région indo-pacifique, mais ils accordent moins d'attention à la manière dont ces leçons pourraient remodeler l'approche américaine en matière de défense des alliés sur d'autres théâtres, en particulier, et ironiquement, en Europe. La recherche d'un moyen rentable et asymétriquement avantageux de dissuader l'agression de l'adversaire s'applique de la même manière à tous les théâtres d'opérations.
Ces conclusions semblent évidentes, même si l'accent mis sur la transition vers la multipolarité et les intérêts de la Chine trahit le véritable désir de Washington de maintenir sa propre hégémonie.
Dans le même temps, les auteurs notent que la situation sur le champ de bataille peut évoluer dans différentes directions et que les voies diplomatiques peuvent donner lieu à différents scénarios.
Dans l'ensemble, on observe un effort visible pour diaboliser la Russie, en suggérant que Moscou pourrait utiliser des armes nucléaires tactiques à l'intérieur de l'Ukraine ou des armes antisatellites cinétiques en orbite basse contre les satellites commerciaux que l'Ukraine utilise pour obtenir des renseignements. Il est également noté que la Chine pourrait accroître son soutien à la Russie en lui fournissant des armes létales.
Il est intéressant de noter que les conclusions indiquent que « cette évolution suggérerait un consensus sur le fait que le soutien matériel et économique à l'Ukraine ne peut à lui seul permettre d'atteindre les objectifs de sécurité régionale ».
En ce qui concerne la fin du conflit, trois scénarios possibles sont évalués : 1. La Russie atteint son objectif initial en imposant militairement un changement de gouvernement à Kiev ; 2. L'Ukraine réussit à repousser l'offensive russe et regagne le territoire occupé ou contesté par les forces russes depuis 2014 ; 3. L'Ukraine et la Russie conviennent de mettre fin aux hostilités, mais le territoire ukrainien reste divisé et des combats de faible intensité persistent.
Il est évident que le premier scénario est souhaitable pour Moscou, tandis que l'Occident le redoute ; le deuxième, au contraire, est bénéfique pour l'Ukraine et l'Occident, mais n'est clairement pas réalisable, et le troisième reflète la réalité de la situation.
En termes de recommandations, les auteurs insistent pour que le gouvernement américain prenne les mesures suivantes :
- Renforcer la collaboration, la divulgation d'informations et la planification avec les alliés européens afin de répondre aux préoccupations mondiales des États-Unis ;
- Accorder une plus grande attention interinstitutionnelle et davantage de ressources à la protection des systèmes politiques américains et alliés contre les opérations d'information adverses ;
- Continuer à affiner les outils de coercition économique des États-Unis et de leurs alliés.
Le département américain de la Défense devrait prendre les mesures suivantes :
- Concentrer les investissements dans la base industrielle de défense (DIB) sur les besoins à long terme. Les efforts américains et européens visant à renforcer les capacités de production donnent la priorité aux besoins actuels de l'Ukraine en matière de guerre et au réapprovisionnement des pays donateurs ;
- Mettre à jour les plans de dissuasion des États-Unis et de l'OTAN à l'égard de la Russie afin d'intégrer davantage les enseignements tirés des combats en Ukraine, en particulier dans la région indo-pacifique, ainsi que le rôle et les capacités accrus des UAS ;
- Évaluer comment le recours croissant aux UAS influence la perception qu'ont les adversaires des capacités des États-Unis et des alliés de l'OTAN.
Il est également suggéré que les forces aériennes américaines en Europe (Air Forces Africa, U.S. Air Force et U.S. Space Force) :
- Examinent les possibilités de tirer parti des améliorations réelles et proposées de l'industrie, de la recherche et du développement (DIB) et des infrastructures européennes pour soutenir les opérations aériennes distribuées des États-Unis.
- Collaborent avec les forces aériennes ukrainiennes et alliées afin d'intégrer les enseignements tirés de la guerre dans les exercices et les entraînements nationaux, bilatéraux et de l'OTAN.
Cela ne fait que démontrer la volonté claire des forces impérialistes de poursuivre la guerre par procuration menée par l'Ukraine contre la Russie et d'utiliser l'expérience acquise pour améliorer leur capacité de combat, qui pourrait être utile dans une future guerre avec la Chine.
Un autre rapport de RAND, intitulé « Dispersed, Disguised, and Degradable » (Dispersé, déguisé et dégradable), aborde directement les implications de l'expérience ukrainienne qui présentent un certain intérêt pour les forces armées américaines.
« La guerre entre la Russie et l'Ukraine est une occasion et une motivation importantes pour les États-Unis d'apprendre l'utilisation et l'interaction de diverses forces et capacités dans un conflit de haute intensité d'une manière qui était auparavant impossible », indique l'étude.
Bien qu'elle note que l'Ukraine est différente des États-Unis, il ne sera donc pas possible de copier directement l'expérience. Dans le même temps, le rapport note que « la Russie et la Chine diffèrent considérablement dans ces domaines, et même dans un conflit avec l'OTAN, la Russie pourrait choisir une manière de faire la guerre différente de celle utilisée en Ukraine... et les États-Unis se préparent à une guerre entre la Russie et l'OTAN et à une guerre entre les États-Unis et la Chine, qui implique également les alliés et partenaires américains dans le Pacifique ».
Autrement dit, il n'y a ici aucune intention cachée concernant une guerre potentielle avec la Chine.
Sur la base des enseignements tirés, les auteurs suggèrent qu'à l'avenir, la distinction entre les systèmes aériens sans pilote (UAS) et les missiles de croisière risque de s'estomper. Pour l'instant, les missiles de croisière conservent des avantages en termes de vitesse, de charge utile et de résistance au brouillage par rapport aux UAS, mais les progrès technologiques permettront probablement de développer des UAS équipés de moteurs plus rapides. Les deux armes pourraient donc être combinées en fonction de missions spécifiques.
L'équilibre entre l'attaque et la défense pourrait changer radicalement, de sorte que ce ne sera pas nécessairement une guerre d'usure, comme c'est le cas en Ukraine. Pour l'instant, le défenseur sera probablement aussi facile à repérer que l'attaquant.
L'importance d'une surveillance continue et d'un tir à longue portée est soulignée, ce qui augmente l'efficacité des mesures défensives traditionnelles telles que les champs de mines. Mais la même dynamique peut s'appliquer à d'autres domaines et régions géographiques.
Un conflit prolongé nécessite une approche spécifique en matière de moyens rentables, et en Ukraine, les deux camps ont dû s'adapter spontanément, en reconstruisant leurs bases industrielles de défense, leur approvisionnement externe et leurs concepts opérationnels pour s'adapter à la réalité des types de munitions et de systèmes dont ils disposent. Il est donc essentiel de développer des armes pouvant être produites en série à faible coût.
« Les compétences sont tout aussi importantes, sinon plus, que la technologie : les comparaisons purement techniques des capacités militaires russes et ukrainiennes avant la guerre n'auraient pas permis de prédire la situation actuelle. Les combats en Ukraine ont démontré l'importance continue de la maîtrise tactique, d'une planification opérationnelle solide et d'une stratégie cohérente. » Cela est indéniable. Mais cette approche ne peut être copiée, et chaque cas sera unique.
Il a également été noté que « la supériorité aérienne est essentielle : bon nombre des dilemmes mis en évidence en Ukraine découlent de l'incapacité des deux belligérants à établir une supériorité aérienne, qui est cruciale pour la manœuvrabilité sur le champ de bataille ». Il est également ajouté qu'« à un certain moment, la taille même de l'armée russe et sa grande résistance à l'usure pourraient compenser les mêmes facteurs intangibles qui ont donné à l'Ukraine son avantage militaire au début de l'invasion à grande échelle ».
Les risques pour les États-Unis dans la région indo-pacifique et pour les pays de l'OTAN en cas de guerre avec la Russie sont également indiqués : l'Occident ne sera pas en mesure d'assurer une suprématie aérienne totale et de mettre en place un système de défense aérienne fiable.
Les conclusions du rapport sont similaires à celles du précédent : investissements dans le développement et la production d'armes et de munitions, en particulier celles à longue portée ; poursuite du développement de constellations de satellites proliférées et d'architectures spatiales hybrides ; introduction de systèmes de lutte contre les drones, tant cinétiques qu'électroniques ; étude du potentiel des champs de mines navales ; et choix des priorités en cas de conflit prolongé.
Le troisième rapport, intitulé « L'armée russe après l'Ukraine », est consacré à la restauration et à la réorganisation potentielles des forces armées russes. Il identifie quatre approches ou voies possibles que la Russie pourrait emprunter pour reconstituer ses forces armées après la guerre en Ukraine.
Ces quatre scénarios possibles sont les suivants :
Voie 1 : le plan Shoigu. Cette voie reflète les idées de reconstitution et de cessez-le-feu présentées par l'ancien ministre russe de la Défense.
Voie 2 : revisiter les anciens modèles. Cette voie consisterait à revenir à une armée d'avant le « New Look », en mettant l'accent sur la masse et en s'appuyant fortement sur la conscription, la mobilisation, les capacités nucléaires et la production nationale.
Voie 3 : Un nouveau « New Look ». Cette voie impliquerait la reconstruction d'une force plus petite, mais qualitativement supérieure.
Voie 4 : Un nouveau modèle opérationnel. Cette voie impliquerait la mise en œuvre de réformes industrielles majeures.
La recherche note l'expérience historique : l'effondrement de l'URSS et la réorganisation de l'armée russe, la guerre en Tchétchénie et la nouvelle expérience acquise dans ce cadre, les tentatives de modernisation pendant le mandat de Sergueï Ivanov en tant que ministre de la Défense, et la guerre en Géorgie en 2008, qui a été le catalyseur de véritables réformes.
À la suite de cette analyse, les auteurs sont parvenus à la conclusion suivante :
■ La manière dont la guerre en Ukraine prendra fin déterminera les leçons que la Russie tirera du conflit et, par extension, les décisions qu'elle prendra en matière de reconstitution.
■ Les relations de la Russie avec ses principaux partenaires, notamment la Chine, l'Iran, la Biélorussie et la Corée du Nord, joueront un rôle particulièrement influent dans le processus de reconstitution.
■ La décision de la Russie de restructurer l'économie du pays en vue de la guerre a créé des dépendances au sein de la base industrielle de défense qui seront difficiles à inverser.
■ Bien que les alliés des États-Unis suivent de près les efforts de reconstitution de la Russie, ils se concentrent davantage sur la rapidité de la reconstitution que sur la nature de l'armée russe reconstituée.
Et, en conclusion finale : « Une armée russe partiellement reconstituée continuera de représenter une menace importante pour les intérêts américains et occidentaux sur le théâtre européen. »
Il était difficile d'imaginer une autre conclusion à la fin de cette étude. Nous le savons depuis l'époque de la Russie impériale : une Russie forte est redoutée. Et c'était peut-être la raison principale du coup d'État en Ukraine en 2014 et du début de la guerre par procuration menée par l'Occident collectif.
Pour nous, Russes, les derniers rapports de la RAND devraient nous rappeler les véritables intentions de nos anciens partenaires et nous inciter à opérer les changements nécessaires tant dans le domaine militaire que dans la société elle-même.
16:33 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : rand corporation, russie, ukraine, chine, actualité | |
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Etats-Unis et Israël: pourrissement cérébral - Entretien avec Alexandre Douguine
Etats-Unis et Israël: pourrissement cérébral
Entretien avec Alexandre Douguine
Propos recueillis par Tatiana Ladaïeva
Tatiana Ladaïeva : Malheureusement, l'escalade au Proche-Orient se poursuit, et le titre de notre émission reflète plus que jamais la situation dans le monde. Commençons par le plus important : le Moyen-Orient. Cela fait déjà quatre jours que les frappes se poursuivent entre Israël et l'Iran. À l'heure actuelle, on rapporte que la défense aérienne iranienne a abattu plusieurs mini-drones au-dessus du nord-est de l'Iran, et qu'une frappe israélienne a endommagé un hôpital dans l'ouest du pays. Il y a des victimes. Il y a quelques minutes à peine, le président iranien a déclaré que les partisans de la production d'armes nucléaires à Téhéran n'avaient pas leur place dans la politique de la république. Faisons un bilan intermédiaire : quels sont les scénarios possibles pour résoudre ou non ce conflit ? Discutons de ce sujet.
Alexandre Douguine : Oui, je pense que c'est actuellement l'événement le plus important, et il s'agit en effet d'une véritable escalade. Tout d'abord, je tiens à exprimer ma profonde solidarité et ma tristesse face aux pertes subies par l'Iran. Les attaques israéliennes ont détruit le commandement militaire iranien. De nombreux civils ont péri: des physiciens, des scientifiques, des militaires, des chefs militaires ainsi que leurs familles. Nous n'avons pas vraiment insisté là-dessus, mais ils ont tout simplement été anéantis, avec leurs enfants et leurs femmes. Selon les données disponibles ce matin, plus de 70 personnes, dont des femmes et des enfants, ont été victimes de dommages collatéraux. Or, l'Iran est notre allié, notre ami. Dès le début de l'opération militaire spéciale, il nous a soutenus, tout comme la Corée du Nord. C'est donc un coup très dur pour nous. Ce n'est pas que nous soyons directement impliqués dans cette guerre, mais la sympathie de notre peuple – et, je pense, de l'humanité tout entière – est du côté de l'Iran.
Même en Occident, à en juger par les réseaux sociaux (où il y a plus de liberté que dans les médias mensongers), les gens soutiennent l'Iran. Nous considérons les actions d'Israël au Moyen-Orient – à Gaza, au Liban, en Iran, en Syrie – comme monstrueuses. C'est une manière sanguinaire, cruelle et misanthrope de frapper tout le monde sans distinction, de détruire les dirigeants d'États souverains sans aucune raison. Israël, qui possède l'arme nucléaire, a décidé que l'Iran ne devait pas en avoir et a lancé des frappes préventives, détruisant le commandement militaire d'un pays souverain, frappant des installations nucléaires et tuant des centaines de civils. Cela ne rentre dans aucun cadre, ce ne sont pas des lignes rouges, ce n'est pas la norme, ce n'est pas éthique.
Actualité du jour : Trump, qui avait d'abord soutenu Israël, a été confronté à une vague de franche hostilité de la part de ses propres partisans MAGA. Tout Internet, du moins les réseaux sociaux libres, regorge de demandes visant à mettre fin à l'aide apportée à Israël. « Ce n'est pas ma guerre » est le slogan le plus populaire. Trump, qui venait de promettre d'aider Israël, a changé instantanément de position : il est désormais en faveur de la paix, exige la suspension des hostilités, se souvient comment il aurait mis fin aux conflits entre l'Égypte et l'Éthiopie, l'Inde et le Pakistan, la Serbie et le Kosovo — tout ce qui peut servir à atténuer l'impression qu'il soutient pleinement Israël. Car aujourd'hui, tout le monde déteste Israël. Être son partisan n'est pas considéré comme éthique.
Avant, on pouvait avoir des opinions différentes, mais après Gaza et l'attaque contre l'Iran, c'est trop. L'attaque n'a pas été pas provoquée: depuis 15 ans, on nous répète que l'Iran est sur le point de fabriquer une bombe nucléaire, mais rien ne se passe. Pourquoi y croire maintenant? Il n'y a aucune donnée factuelle. Et Trump dit que Netanyahu lui a demandé l'autorisation d'assassiner l'ayatollah, le chef spirituel de l'Iran, et qu'il a refusé. Vous imaginez ? Des terroristes sévissent à l'échelle mondiale, demandant l'autorisation d'éliminer le chef spirituel, comme au Moyen Âge. Seul Trump, dans sa « miséricorde », l'a interdit. Ce n'est pas une escalade, c'est un cauchemar.
Toutes les notions de droit international s'effondrent. Israël est un État dont le peuple a tant souffert au 20ème siècle. Mais aujourd'hui, toute la légitimité, toute la compassion envers les victimes du régime hitlérien – et les victimes ne sont pas seulement les Juifs, mais aussi les Tsiganes, les Slaves et d'autres peuples – sont balayées par les actions du régime sioniste. Les Juifs du monde entier protestent contre Israël. Les rabbins, les politiciens, les analystes disent : « À bas Israël ». Les actions de Netanyahu sont un crachat au visage du peuple juif, elles renversent le sens de leur sacrifice historique.
Tatiana Ladaïeva : Peut-on préciser s'il y a une possibilité de comprendre ce que Netanyahu veut obtenir en s'opposant à l'Iran, à d'autres pays ? Le conflit dans la bande de Gaza dure depuis 23 ans, oui, c'est compréhensible, l'histoire y est longue. Les tensions avec l'Iran durent également depuis plusieurs années, mais la question est la suivante: si personne ne le soutient, ni Trump, qui tente aujourd'hui de prendre ses distances et cherche des solutions, ni, semble-t-il, son propre peuple, qu'est-ce qui le motive ? Je peux supposer qu'il a peur pour lui-même, qu'il ne veut pas perdre le pouvoir, c'est évident. Mais quand même, que cherche-t-il à obtenir ?
Alexandre Douguine : Pour comprendre ce que Netanyahu cherche à obtenir, nous devons abandonner notre vision habituelle de la politique comme une lutte pour des intérêts, des ressources ou pour l'approbation de la société. C'est une illusion née d'une lecture simpliste et superficielle de la réalité. La politique mondiale est mue par d'autres forces : des idées et des convictions profondes. L'État d'Israël n'a pas été créé simplement comme un projet national, mais comme l'incarnation d'un objectif religieux : la venue du Messie.
Pour les Juifs, c'est la pierre angulaire de leur foi. Cependant, les sionistes, apparus il y a plus d'un siècle, ont proposé une idée controversée : si le Messie, le sauveur qu'ils attendent – sans reconnaître le Christ et le christianisme – tarde à venir, alors il faut prendre sa mission en main.
Le judaïsme orthodoxe interdit catégoriquement le retour en Terre promise et la création d'un État avant la venue du Messie. C'est un principe talmudique, une interdiction absolue. Mais les sionistes ont déclaré : « Nous n'attendrons pas. Nous deviendrons nous-mêmes le Messie ». Ils ont décidé de construire le Grand Israël, ont proclamé Jérusalem capitale et se sont attribué le rôle de messie. C'est là l'essence du sionisme dans sa dimension religieuse. Ben-Gvir, considéré comme un extrémiste, ne fait que donner voix à cette logique: le sionisme n'attend pas l'intervention divine, mais agit ici et maintenant, se substituant au Messie.
Les Juifs sont désormais divisés. Certains ont adopté le sionisme, affirmant: «Nous prenons notre destin en main et faisons ce que le Messie aurait dû faire». D'autres objectent: «Non, il faut attendre. Nous sommes le peuple de l'attente, et la précipitation est une arrogance qui empêche sa venue». J'ai vu des images incroyables: des rabbins à Londres, vêtus de habits hassidiques, brandissant des drapeaux iraniens, appelant à la destruction d'Israël. Ils voient en lui un faux royaume, un simulacre, un précurseur de l'Antéchrist qui éloigne le véritable Messie.
Une telle vision du monde dépasse le cadre d'une politique rationnelle. Israël aspire à régner sur le monde en s'attribuant le rôle du Messie. L'analyse habituelle — intérêts, stratégies, erreurs de calcul — est ici impuissante. Tout s'explique par la métaphysique. Oui, les Juifs ont beaucoup souffert, mais cela ne justifie pas la logique vétérotestamentaire de l'«œil pour œil», selon laquelle un seul coup doit être suivi d'une destruction totale. Les peuples chrétiens, après avoir enduré des souffrances, ont prié pour leurs ennemis, ils ne se sont pas vengés.
L'escalade au Moyen-Orient prend une ampleur eschatologique. Pour les chiites d'Iran, l'Occident et Israël sont l'incarnation du Dajjal, leur Antéchrist. Ils se battent, mais respectent les règles, ne franchissent pas les lignes rouges. Cependant, après avoir perdu à Gaza, au Liban et en Syrie, ils sont obligés de se défendre. Pendant ce temps, les protestants américains et les sionistes chrétiens, l'entourage de Trump, attendent l'invasion du «roi Gog», c'est-à-dire la Russie. Ils nous poussent à soutenir l'Iran pour déclencher une vaste guerre. La Russie condamne Israël, soutient l'Iran, mais le conflit s'étend. Israël affirme avoir détruit un tiers des installations de missiles iraniens, tandis que le Hamas estime que Gaza restera en dehors du conflit. L'ampleur du conflit ne fait pourtant que croître.
En réalité, ils se défendent et, d'ailleurs, ont retiré leurs troupes de Syrie. Cela s'est produit après qu'Abu Mohammad al-Jolani, que beaucoup accusent de travailler pour les intérêts d'Israël, ait mené sa terrible campagne contre Damas, sans parvenir à renverser l'homme politique très raisonnable et modéré qu'est Bachar al-Assad. Les Iraniens se sont comportés de manière étonnamment réservée, malgré leur bellicisme interne, ne franchissant jamais certaines limites. Au contraire, ils ont même discuté avec les Américains de la possibilité de compromis sur l'accord nucléaire. Mais, sans attendre la prochaine réunion, Israël a tout fait capoter par cette terrible frappe — et la guerre a commencé.
Passons maintenant au Pakistan : il fait des déclarations menaçantes, affirmant que si Israël utilise la bombe nucléaire – et tout le monde sait parfaitement qu'Israël en possède –, le Pakistan ripostera par une frappe nucléaire. Ce qui a pu être évité dans le conflit entre deux puissances nucléaires, le Pakistan et l'Inde, redevient une perspective tout à fait réelle. Nous vivons un moment critique. Les explications du comportement des principaux acteurs de cette incroyable escalade ne rentrent plus dans le cadre habituel.
En Occident, on parle de plus en plus souvent d'une troisième guerre mondiale : des publications et des hashtags tels que « #WW3 » apparaissent. De plus en plus de gens comprennent que la situation est allée si loin que les anciennes approches et les explications classiques ne fonctionnent plus du tout. L'ancien ordre mondial s'est effondré, il n'en reste plus rien. Les institutions internationales sont paralysées, leur autorité est réduite à néant.
Les positions politiques changent quotidiennement, ce qui nous oblige à créer une nouvelle carte politologique, ou plus précisément géopolitique. Nous devons prendre en compte ce qui était auparavant ignoré ou sous-estimé: la composante religieuse et les scénarios eschatologiques. Car c'est précisément au Moyen-Orient que convergent aujourd'hui les conceptions les plus diverses sur la fin du monde. Ces idées sont largement répandues tant parmi les protestants américains que dans les cercles du sionisme chrétien. Beaucoup de ses adeptes, y compris dans l'entourage proche de Trump, élaborent leur propre vision de ce qui se passe ou devrait se passer dans cette région. Ils attendent l'invasion du « roi Gog », le « roi du nord », autrement dit la Russie, qu'ils identifient au Gog biblique. Leur calcul est simple: nous soutiendrons l'Iran et entrerons en guerre avec Israël, ce qui leur donnera un prétexte pour déclencher un conflit à grande échelle contre nous. Il s'agit en fait d'une provocation visant à entraîner la Russie dans une escalade.
Il convient de rappeler que Netanyahu a mené des négociations avec Poutine, puis avec Trump. La Russie, quant à elle, adopte une position claire dans ce conflit: elle soutient l'Iran et condamne les actions d'Israël.
Pour ceux qui ne suivent pas l'actualité, je précise que l'armée israélienne a récemment annoncé avoir détruit un tiers des installations de missiles iraniens. Dans le même temps, dans la bande de Gaza, les représentants du Hamas affirment que l'escalade entre l'Iran et Israël ne les affectera pas directement. Cependant, il est évident que l'ampleur du conflit ne fera que s'intensifier.
Tatyana Ladaïeva : Et à propos de Trump : il y a littéralement huit minutes, il a déclaré qu'Israël et l'Iran devaient mener leur conflit jusqu'au bout pour parvenir à un accord. Mais, Alexandre Douguine, lorsque tout a commencé, beaucoup affirmaient qu'Israël agissait sur ordre direct de Trump. Ils disaient que c'était lui qui ne voulait aucun accord avec l'Iran et qui avait presque poussé Israël à agir ainsi. Trump ne devrait-il pas maintenant prendre l'initiative et asseoir Israël et l'Iran à la table des négociations afin de trouver une issue à cette situation ?
Alexandre Douguine : Je pense que le rôle de Trump dans ce conflit est très paradoxal. Il n'est guère l'initiateur de ce qui se passe, car les actions d'Israël sous la direction de Netanyahu suivent la ligne du sionisme religieux d'extrême droite. Trump se retrouve plutôt dans la position d'un otage impliqué dans des guerres qu'il n'a pas déclenchées. Il cherche à jouer le rôle de pacificateur, mais reste néanmoins partie prenante au conflit. À mon avis, il est acculé comme un lièvre: ses déclarations ressemblent davantage à des crises de nerfs qu'à une stratégie mûrement réfléchie. Sa position change quotidiennement: il tente de satisfaire des forces contradictoires, mais ce n'est pas sa volonté propre, c'est une réaction à la pression des circonstances.
En parlant de la guerre au Proche-Orient entre Israël et l'Iran, on ne peut ignorer la position des autres États islamiques. Israël fait preuve d'une prudence et d'une persévérance remarquables — à Gaza et en Irak, il y parvient avec brio. Une question légitime se pose : qui contrôle réellement la situation ? L'Amérique, qui utilise Israël comme un instrument de sa politique, ou Israël lui-même, qui manipule l'Amérique et la communauté internationale dans son propre intérêt ? Si auparavant de telles réflexions étaient considérées comme du conspirationnisme, aujourd'hui la question se pose inévitablement.
Remarquez avec quelle habileté Israël, depuis son invasion terrestre de Gaza, vient à bout de ses adversaires, en s'occupant de chacun d'entre eux individuellement. Après les actions scandaleuses du Hamas, qui ont dépassé toutes les limites imaginables, Israël a répondu par la même monnaie. Son opération contre le Hamas, condamnée par les pays islamiques, a néanmoins contraint les forces régionales à s'abstenir de toute intervention directe.
Après s'être occupé de Gaza – certes pas complètement, mais en recourant à des bombardements intensifs rappelant les pages sombres de la Seconde Guerre mondiale –, Israël s'est tourné vers le Liban et le Hezbollah. Après avoir détruit le leadership de ce dernier, y compris ses fondateurs, il a envahi le territoire d'un État souverain, bombardant sans ménagement des villes pacifiques. La seule véritable résistance est venue des Houthis yéménites, qui ont fait preuve d'un courage exceptionnel, tandis que les autres États se sont contentés de protester et d'observer la situation.
Aujourd'hui, Israël a frappé l'Iran, un pays qui le dépasse largement à tous égards. L'objectif principal du régime sioniste est clair: empêcher la consolidation des États islamiques en tenant à l'écart les Turcs, les Saoudiens et les pays du Golfe Persique. Israël élimine méthodiquement ses adversaires les uns après les autres, tandis que le monde islamique semble être en transe, fasciné par cette volonté de domination rusée, calculatrice, presque satanique. Ce petit État agressif et fanatique s'en prend aux régimes islamiques, qui se contentent d'observer, invoquant leurs divergences internes ou leurs intérêts économiques. Où est donc cette oumma islamique dont on parle tant ? Dans les épreuves réelles, elle fait preuve de passivité et de désunion. Israël a l'intelligence, la volonté et la détermination fanatique de prendre la place du Messie, tandis que les musulmans semblent absorbés par le commerce du pétrole et les appels au droit international.
Nous pouvons maintenant revenir à Trump — tous ces sujets sont inextricablement liés.
Tatyana Ladaïeva : Oui, tout est vraiment lié. Permettez-moi de résumer les commentaires qui nous sont activement envoyés. Beaucoup se demandent pourquoi ceux qui sont mécontents de Netanyahu et de la politique d'Israël ne résolvent pas leurs problèmes eux-mêmes, sans entraîner les pays voisins dans le conflit. Nous avons déjà abordé cette question. Certains craignent que le silence des autres États ne conduise à une situation où « on est venu me chercher, et personne n'était là pour me défendre ». D'autres voient dans ce qui se passe une motivation économique liée aux intérêts des États-Unis. Ils disent notamment que l'objectif est de faire grimper les prix du pétrole, ce qui profite à l'industrie pétrolière américaine et peut-être à Trump. Nos auditeurs ont différentes hypothèses, mais il semble que nous ayons abordé cette question sous tous ses angles. En ce qui concerne les États-Unis, cela fait déjà trois jours, si je ne me trompe pas, que des manifestations contre le président Donald Trump et son administration ont lieu. Voyons ce qu'est la campagne nationale « No Kings » (« Pas de rois », si l'on traduit littéralement). Elle est directement liée à ce qui se passe aujourd'hui en Amérique.
Alexandre Douguine : En effet, la situation est extrêmement grave. Avant de parler de Trump, il faut aborder le conflit au Proche-Orient. Israël a avancé un argument auprès de l'opinion publique américaine qui n'a pas encore reçu toute l'attention qu'il mérite chez nous, mais qui fait l'objet de discussions partout aux États-Unis, en particulier dans le contexte des manifestations. Il ne s'agit pas seulement de l'opération « Peuple du Lion » contre l'Iran, mais aussi du « choix de Samson ». L'idée est qu'en cas de défaite, si le « Dôme de fer » ne tient pas, Israël est prêt à faire exploser des installations nucléaires dans le monde entier. Ils ont déjà montré comment leurs agents infiltrent même des pays aux régimes répressifs, comme l'Iran: des frappes chirurgicales ont été menées contre ce pays à partir de son propre territoire par des cellules dormantes. Comment cela est-il possible dans de telles conditions? C'est un mystère. Le «choix de Samson» est une image biblique: périr avec ses ennemis. Si Israël commence à perdre, il activera ses cellules à travers le monde et provoquera un apocalypse nucléaire. C'est une perspective sinistre, qui a déjà atteint les Américains et fait partie des discussions autour des manifestations « No Kings ».
Les manifestations « No Kings » (« Pas de rois ») sont une mobilisation des opposants à Trump dans le but de le renverser. Les démocrates, les migrants et les groupes extrémistes tels que l'Antifa appellent à la révolution. Il est curieux de constater qu'Antifa, qui déclare lutter contre le fascisme, reste silencieux lorsque le fascisme se manifeste, par exemple en Ukraine. Il ne s'active que pour renverser les dirigeants qui œuvrent pour le bien de leur peuple, les accusant de « fascisme ». Antifa est le noyau dur de « No Kings », construit sur le modèle des révolutions colorées de Soros. Au lieu du BLM, ce sont désormais les « bérets bruns » latino-américains, qui attisent le séparatisme au Texas et en Californie, et les anarchistes, qui considèrent tout pouvoir comme du fascisme, qui sont à l'avant-garde. Ces radicaux sont les plus agressifs : ils sont armés et provoquent la police. Les démocrates soutiennent ce mouvement. Dans le Minnesota, un partisan des démocrates a abattu la sénatrice S. Harb, son mari et le politicien Hoffman: c'est déjà du terrorisme politique. On parle de guerre civile. Dans le même temps, Trump est accusé d'autoritarisme, comme Poutine ou Orbán, ce qui fait de lui la cible de la révolution.
Les manifestations n'ont pas commencé de manière très intense, peut-être à cause des frappes israéliennes sur l'Iran, qui ont détourné l'attention. Mais Trump est acculé. Il n'a pas apporté la paix en Ukraine, il n'a pas cessé de soutenir le régime de Kiev, échouant ainsi dans la mission pour laquelle il avait été élu. Son soutien à Israël, surtout au début, a déçu ses partisans opposés à tout interventionnisme. Sa position active sur l'Iran s'est soldée par un échec. Échec en Ukraine, soutien aux mesures inhumaines d'Israël et révolte interne: les nuages s'amoncellent au-dessus de lui.
Le rôle d'Elon Musk, deuxième personnalité la plus influente de la politique américaine, est intéressant. Au début, il s'est rapproché de Trump, s'est excusé et a prévu une rencontre. Mais après les frappes contre l'Iran, Musk a changé de discours, voyant le soutien à Trump s'effondrer. Son idée d'un parti « Amérique » a attiré 87% des partisans déçus de Trump parmi ses millions d'abonnés. Dans ce contexte, Trump est poussé dans le rôle d'un fauteur de guerre, comme l'était Biden. Derrière lui se trouvent des personnalités telles que Lindsey Graham, inscrit sur la liste des terroristes par Rosfinmonitoring. Les démocrates, y compris Bernie Sanders, organisateur de « No Kings », condamnent soudainement la guerre et Israël, alors que leur parti l'a toujours soutenu. Ils poussent Trump à commettre des erreurs, puis les utilisent contre lui: c'est une tactique diabolique.
Il est difficile de sympathiser avec Trump: ses déclarations sont contradictoires, sa position change tous les jours. Mais il est le président d'un grand pays, pris en étau entre les protestations, les attentes de ses partisans et ses propres erreurs. Cela ressemble à une crise de nerfs. Il lui reste encore trois ans à gouverner, mais son autorité s'effrite et sa destitution a déjà commencé. Les transgenres, les féministes, les militants LGBT, des groupes interdits en Russie, participent aux manifestations.
Tatyana Ladaïeva : Pouvez-vous préciser ce que ces manifestants veulent obtenir ? Veulent-ils que Trump démissionne complètement, qu'il renonce à ses pouvoirs ? Ou s'agit-il peut-être d'une procédure de destitution ? Ou bien exigent-ils simplement que Trump modifie sa politique sur certaines questions clés ?
Alexandre Douguine : Je pense qu'ils sont incapables de réfléchir de manière sensée. Le fait est que sous le règne des démocrates, lorsque les écoles imposaient le changement de sexe, au moment où une personne était capable de participer à des manifestations, sa capacité de réflexion critique était déjà compromise. Une grande partie de la société américaine est dans un état d'hallucination, favorisé par la propagation des drogues et un phénomène connu sous le nom de « brain rot » (pourrissement cérébral), une culture de mèmes absurdes qui captive des millions d'utilisateurs. Plus le contenu est stupide, plus il devient populaire. Ce « brain rot » est l'état dans lequel se trouve une grande partie des Américains. Il est très facile de diriger cette masse, qui ne travaille nulle part, vit des allocations sociales et des drogues, vers des manifestations, même sans expliquer les objectifs. Il s'est avéré que George Soros finance les participants en leur distribuant de l'argent et des biscuits, comme dans les révolutions colorées classiques.
C'est un coup dur pour Trump: il a gagné, alors qu'il aurait dû perdre; il a proclamé les valeurs traditionnelles, ce qui est inacceptable pour ses adversaires. Maintenant, on tente de le renverser, de le discréditer, en montant tout le monde contre lui, des transgenres aux Latino-Américains. Mais cette masse en décomposition n'a pas de plan constructif, comme dans les autres révolutions colorées. Les démocrates et les mondialistes semblent pousser délibérément les États-Unis vers une guerre civile ou un conflit nucléaire, sans proposer aucune vision positive de l'avenir. L'agression, la violence, la dégénérescence, le sadisme, la perversion sont omniprésents, mais il n'y a pas d'image de l'avenir. Nous avons précipité les choses en discutant de la suppression du terme « escalade » : celle-ci ne fait que s'intensifier, et dans ce chaos naissent les scénarios les plus fous. La Russie doit rester un bastion de bon sens et continuer à avancer vers ses objectifs, mais c'est difficile, car nous faisons partie de ce monde et le « brain rot » nous touche aussi.
16:13 Publié dans Actualité, Entretiens | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, iran, israël, état-unis, donald trump, alexandre douguine | |
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L'Iran est certes une théocratie mais jusqu’à un certain point seulement... - Sur l’architecture institutionnelle de Téhéran
L'Iran est certes une théocratie mais jusqu’à un certain point seulement...
Sur l’architecture institutionnelle de Téhéran
par Giorgio Cataldo (*)
Source: https://www.barbadillo.it/122220-iran-teocrazia-ma-fino-a...
Les agences de presse ont diffusé la nouvelle selon laquelle le Guide suprême de l’Iran, Ali Khamenei, aurait transféré les pouvoirs exécutifs aux Pasdaran, c’est-à-dire au Corps des Gardes de la Révolution, le groupe militaire qui a joué un rôle décisif lors de la Révolution khomeyniste de 1979 et qui continue d’exercer des missions et fonctions pour la protection des principes de la Révolution (art. 150).
Si cela est confirmé, il s’agirait d’une décision d’urgence qui n’est pas formellement prévue par la Constitution iranienne, qui prévoit en réalité, dans ses procédures, des modalités différentes, tout aussi adaptées à la phase délicate que traverse la République.
Une première procédure consiste à confier la responsabilité des devoirs du Guide, en cas d’incapacité temporaire, à un Conseil provisoire composé du Président de la République, du Président de l’Organe Judiciaire et d’un des juristes du Conseil des Gardiens élu par le Conseil pour le Discernement de l’Intérêt Supérieur de l’État (art. 111). Il faut préciser que le Conseil des Gardiens (à ne pas confondre avec le Corps des Gardiens mentionné ci-dessus) joue un rôle similaire à celui d’un juge constitutionnel, en vérifiant la compatibilité des normes adoptées par l’Assemblée parlementaire avec la Constitution et les préceptes de l’Islam (art. 94) ; en revanche, le Conseil pour le Discernement de l’Intérêt Supérieur de l’État est une sorte de « super » juge constitutionnel, qui tranche, entre autres, les conflits d’interprétation entre le Conseil des Gardiens et l’Assemblée (art. 112).
Une seconde procédure concerne l’implication du Conseil suprême de sécurité nationale, créé pour garantir l’intérêt national et protéger la Révolution islamique, l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale (art. 176). Cet organe a été central lors de l’urgence du coronavirus, et sa particularité réside dans le fait que ses décisions ne nécessitent pas obligatoirement d’être publiées dans les sources officielles, la ratification par le Guide étant suffisante (et, peut-être, une communication informelle par moyens de télécommunication).
Une troisième procédure consiste en la proclamation de l’état de siège et la formation d’un gouvernement militaire, dont les décisions ont une validité provisoire, devant être converties par l’Assemblée (un peu comme notre décret-loi) (art. 79).
La situation concrète actuelle a semblé si atypique qu’elle aurait incité le Guide suprême à confier les pouvoirs exécutifs aux Pasdaran, en dérogation à la Constitution elle-même, si les informations dont nous disposons sont exactes.
Une occasion de comprendre la particularité de la « théocratie » islamique
L’ensemble du cadre esquissé, tant ce qui concerne les procédures prévues de façon abstraite que ce qui concerne la décision concrète, laquelle semble avoir été adoptée, est intéressant, entre autres, parce qu’il permet d’observer l’ordre iranien au-delà de la simple définition de « théocratie ».
Il est vrai que l’élément religieux constitue une constante dans le fonctionnement des organes cités, mais:
– les Pasdaran sont des militaires révolutionnaires, pas du tout des membres du clergé.
– le Conseil des Gardiens est composé de 6 juristes islamiques (Fuqaha) nommés par le Guide suprême et de 6 juristes laïcs nommés par l’Organe judiciaire sur proposition de l’Assemblée (qui elle-même est composée de laïcs et de clercs).
– le Conseil pour le Discernement de l’Intérêt Supérieur de l’État est composé de membres issus de divers horizons (juristes, militaires, clercs, politiciens, etc.), nommés par le Guide.
– le Conseil suprême de sécurité nationale est composé des hauts responsables des trois Pouvoirs de l’État, du commandant du quartier général des forces armées, du responsable de la planification économique et financière, de deux représentants choisis par le Guide, des ministres des Affaires étrangères, de l’Intérieur et des Services de renseignement, du Commandant général des forces armées et des Gardiens de la Révolution.
– le même Guide suprême, qui est un clerc de très grande influence, est élu par un Conseil d’experts, dont les membres sont eux aussi élus par le peuple parmi des représentants de diverses origines (juristes, militaires, clercs, politiciens, etc.) (art. 107) !
Le Guide suprême – l’unique à avoir été élu à cette fonction est actuellement Ali Khamenei, successeur de Ruhollah Khomeini, dont le mandat était à durée indéfinie – est reconnu comme un juriste-clerc expérimenté capable d’interpréter les préceptes de l’Islam.
Un ordre en attente d’une véritable théocratie
L’ensemble du système constitutionnel iranien pourrait même être qualifié de provisoire en l’absence d’une véritable théocratie. L’Iran est une nation chiite. Le chiisme est la seconde plus grande branche de l’Islam. La première est le sunnisme, qui est la plus répandue. Comme il est de notoriété, ces deux grandes traditions se divisent principalement sur la succession du Prophète Mahomet. Les chiites en tirent leur origine de la fille Fatima et du cousin et époux, Alī ibn ʾAbī Ṭālib, considéré comme le premier Imam (guide). Les sunnites, en revanche, rejettent cette interprétation et évoquent la femme de Mahomet, en considérant, pour simplifier, que toute personne pouvant proclamer être Imam mérite de l’être.
Cela a des répercussions sur le plan juridique-institutionnel du gouvernement de la communauté islamique. Le sunnisme confond la guidance religieuse avec la guidance séculière. Dans ce cas, le terme « théocratie » paraît tout à fait approprié. Le chiisme, en revanche, considère qu’une figure directement issue de la lignée d’Alī est nécessaire. Cependant, là réside le problème, d’une portée eschatologique extrême: le douzième Imam aurait disparu au 9ème siècle pour échapper aux persécutions du califat sunnite. Cela a privé toute légitimité aux gouvernances politiques ultérieures. Depuis des siècles, les chiites acceptent à contrecœur les autorités politiques en place. Pour l’Iran, cependant, Ruhollah Khomeini a élaboré la théorie du « jurisconsulte expérimenté »: il faut qu’une personne autorisée gouverne, capable d’interpréter les préceptes de l’Islam de la manière la plus cohérente possible (toutefois elle ne sera jamais parfaite), en attendant le retour de l’Imam. Sur cette base, la Révolution de ’79 (renversant le Shah de l’époque en Perse) a été menée, et c’est sur elle que repose le régime actuel.
Lectures recommandées :
- Cantaro – F. Losurdo, “Secolarizzazione” e “desecolarizzazione” negli ordinamenti giuridici islamici, in Dir. pubbl. comp. eur., 2/2014;
- De Grazia, Fonti del diritto e fattore religioso. Aspetti di diritto costituzionale comparato. Israele, Iran, Città del Vaticano, Napoli, 2013;
- Khomeini (1995-2000), Il governo islamico o l’autorità spirituale del giuriconsulto, trad. it. a cura di A. Cancian, Rimini, 2006;
- P.L. Petrillo, Iran, Bologna, 2008;
- A.R. Jalali, Alcune particolarità sulla forma di governo della Repubblica Islamica dell’Iran da Khomeini a Rouhani, in DPCE Online, 1/2015;
- (se si vuole), G. Cataldo e A.R. Jalali, La stabilità istituzionale come principio supremo dell’ordinamento iraniano nelle misure di contrasto al Coronavirus, in DPCE Online, 2/2020.
(*) Enseignant contractuel auprès des Institutions de droit public à l'Université de Salento.
13:17 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, iran, islam, chiisme | |
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vendredi, 20 juin 2025
Israël et monarchies du Golfe : l’accord qui a mis l’Iran dans le collimateur
Israël et monarchies du Golfe: l’accord qui a mis l’Iran dans le collimateur
Sergio Filacchioni
Source: https://www.ilprimatonazionale.it/approfondimenti/israele...
Rome, 16 juin – La guerre ouverte entre Téhéran et Tel Aviv, déclenchée par les bombardements israéliens des sites nucléaires et des centres névralgiques de la République islamique, n’est pas un conflit confessionnel ou idéologique. C’est le début d’une nouvelle phase géopolitique : la consolidation définitive entre Israël et les monarchies du Golfe pour la construction d’une alliance régionale visant à restructurer tout le Moyen-Orient selon des intérêts énergétiques, militaires et financiers.
Israël veut contrôler le Moyen-Orient (avec l’aide arabe)
En seulement trois jours, l’escalade a causé des centaines de victimes, des missiles sur Tel Aviv, des auto-bombes à Téhéran et des attaques chirurgicales contre des scientifiques et des cibles stratégiques. Les Israéliens déclarent ouvertement vouloir faire de l’Iran la “première ligne de front de guerre”, avec pour objectif final un changement de régime. Mais alors que les armes parlent, le récit se banalise : d’un côté Israël se pose comme “rempart de l’Occident”, de l’autre l’Iran se voit réduit à une caricature de “théocratie répressive”. En réalité, alors que les analystes et commentateurs occidentaux décrivent le conflit entre Israël et l’Iran comme un nouveau chapitre d’une lutte millénaire entre musulmans et sionistes, la réalité – beaucoup plus grave et structurée – échappe au radar de la narration dominante. Ceux qui voient la véritable image constatent autre chose : les anciens ennemis arabes du monde sunnite se sont progressivement transformés en alliés silencieux – mais cruciaux – d’Israël, prêts à partager intérêts, stratégies, infrastructures et renseignements.
Israël-Golf, l’alliance que personne ne veut voir
Après les Accords d’Abraham, la coopération entre Israël et les Émirats arabes unis, Bahreïn, Arabie saoudite et Qatar a pris une dimension sans précédent. Signés en septembre 2020 sous l’égide de l’administration Trump, ces accords ont marqué un tournant officiel dans la normalisation des relations entre Israël, les Émirats arabes unis et Bahreïn. Présentés officiellement comme une “paix”, ils ont en réalité jeté les bases d’une alliance géopolitique, économique et militaire anti-iranienne et anti-palestinienne. Plus qu’une réconciliation entre peuples, ces accords ont scellé la naissance d’un bloc sunnite-israélien légitimé par Washington et bénit par les chancelleries occidentales. Les gouvernements du Golfe ont non seulement tourné le dos à la cause palestinienne, mais ont aussi activement soutenu, financé et facilité la machine de guerre israélienne, même durant les mois les plus sanglants de la guerre à Gaza. Le commerce a explosé. Bahreïn a légalisé les importations en provenance des implantations illégales israéliennes en Cisjordanie. Des entreprises saoudiennes et émiraties exportent des biens et des matières premières vers Israël, tandis que les fonds souverains du Golfe investissent dans des banques et des sociétés impliquées dans la construction des implantations. Et lorsque le Yémen a bloqué les routes maritimes vers Tel Aviv, ce sont les Émirats et l’Arabie saoudite qui ont créé un corridor terrestre pour assurer l’approvisionnement en passant par la Jordanie et Israël.
Militaires, espions et drones : les vrais accords secrets signés
Mais c’est sur le plan militaire que la coopération devient encore plus profonde et inquiétante. Les Émirats Arabes Unis abritent des bureaux d’entreprises israéliennes liées à la défense, ont reconverti des jets civils en avions de transport militaire et participent à des exercices conjoints avec Israël et d’autres partenaires de l’OTAN. Le Qatar fournit des pièces détachées à l’armée israélienne et permet l’utilisation de son espace aérien pour le transport de troupes et d’armes. Bahreïn, déjà siège de la 5ème Flotte américaine, est devenu un centre opérationnel de renseignement conjoint contre l’Iran, accueillant des réunions entre officiers israéliens et hauts commandants arabes. En Arabie saoudite, des systèmes anti-drones israéliens dissimulés comme une technologie occidentale ont été découverts. Ce niveau de coopération dépasse largement la “normalisation”: c’est une co-responsabilité active dans une guerre d’anéantissement. Étrangement, les protestations pro-Palestine ne se tiennent jamais devant l’ambassade saoudienne. Pourtant, Riyad et les monarchies du Golfe sont des complices actifs du massacre : ils financent Tel Aviv, collaborent militairement, répriment la dissidence arabe. Mais pour certains récits woke, le génocide n’est qu’une question de Blancs contre des opprimés, seule l'OTAN et le réarmement sont coupables. On oublie la Syrie, l’Irak, la Libye et le Liban, sacrifiés sur le chemin d’une résurgence militante mais profondément hypocrite.
L’aspect économique d’un accord arabo-israélien
Ce n’est pas seulement une question d’armes. Le cœur de la fusion entre Israël et les monarchies sunnites est énergétique et financier. Le projet de pipeline Ashkelon-Arabie Saoudite, partie du corridor économique Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), passe aussi par les territoires occupés. Le Qatar et Bahreïn ont vendu des actifs énergétiques à des fonds liés aux implantations israéliennes. Israël est désormais un nœud stratégique et un partenaire des économies du Golfe. Derrière les masques diplomatiques, on construit un pôle visant à gérer les flux d’énergie, de logistique et de capitaux de l’Asie à l’Europe, en excluant l’Iran, la Syrie, le Hezbollah et la cause palestinienne. Une redéfinition du Moyen-Orient portée par Washington, rendue possible par la faiblesse européenne et par un activisme woke sélectif qui fait semblant de ne pas voir l’éléphant saoudien dans la pièce.
Démystifier le mythe du “choc des civilisations”
Il est évident pour quiconque n’a pas de yeux bandés que ce n’est pas une guerre entre musulmans et sionistes. Ce n’est pas un combat entre “démocratie” et “théocratie”. C’est la réalisation d’un ordre régional où Tel Aviv mène un bloc arabe sunnite basé sur la finance, l’industrie et la puissance militaire. Un bloc qui vise à éliminer toute résistance, toute autonomie chiite, toute aspiration anti-impérialiste. L’Iran, isolé et usé après la défaite en Syrie, ne lutte pas seulement pour sa survie. Qu’on le veuille ou non, il reste le dernier obstacle empêchant le Moyen-Orient de devenir une zone franche sous gestion israélo-arabe, sponsorisée par l’Occident, où il n’y a plus de place pour une souveraineté alternative. Paradoxalement, c’est aujourd’hui l’Iran qui se trouve dans la position de Saddam Hussein : seul contre tous, entouré de puissances hostiles, diplomatiquement isolé et – selon les plans de ses ennemis – voué à tomber pour ouvrir la voie à une nouvelle configuration régionale. C’est la tragique ironie récurrente du mythe du Moyen-Orient : Téhéran, qui en 2003 a profité de la chute du régime baasiste et de l’intervention américaine en Irak, est aujourd’hui la cible de cette même architecture impérialiste. Aujourd’hui, le “méchant” à abattre n’est plus Saddam, mais la République islamique, coupable de résister. La ligne de front qui l’assiège – Israël, monarchies du Golfe, États-Unis et une grande partie de l’Occident – est la même qui a partagé l'Irak, puis la Syrie, et qui aujourd’hui veut encercler l’Iran.
Le Moyen-Orient de demain est déjà là
Tandis que les médias mainstream se concentrent sur les bombes, le vrai séisme est diplomatique et économique : Israël n’est plus un avant-poste solitaire de l’Occident, mais le cœur opérationnel d’un nouvel ordre régional. Et les monarchies du Golfe, loin de dénoncer le “génocide” de Gaza ou la violation de la souveraineté iranienne, en sont les alliés et partenaires stratégiques. Le conflit en cours n’est pas un autre chapitre de la guerre sans fin entre Juifs et musulmans. C’est le début de quelque chose de beaucoup plus bouleversant : la naissance d’une alliance israélo-arabe qui réécrira les équilibres géopolitiques du 21ème siècle. Et dans cette nouvelle architecture du pouvoir, la Palestine est la victime, l’Iran la cible, et l’Europe – encore une fois – le spectateur sans armes.
Sergio Filacchioni
20:11 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : iraël, palestine, monde arabe, monde arabo-musulman, monarchie du golfe, accords d'abraham | |
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Waterloo: tout sauf une victoire britannique…
Waterloo: tout sauf une victoire britannique…
Jan Huijbrechts
Source: https://www.facebook.com/jan.huijbrechts.9
"Ça a été sacrément beau – le plus beau que vous ayez jamais vu de votre vie", aurait dit le commandant en chef britannique Wellington après la bataille de Waterloo, le 18 juin, il y a donc exactement 210 ans. "Par Dieu !", ajouta-t-il, – incarnant ainsi la modestie même – "je ne pense pas que cela aurait été le cas si je n’avais pas été là." Ce que lui-même et beaucoup d’historiens britanniques oublient, c’est que la victoire à Waterloo n’était pas une victoire britannique, mais surtout une victoire alliée...
L’histoire de Waterloo est en effet imprégnée depuis 200 ans d’ambivalence et de distorsions historiques. Souvent, on oublie par exemple que la butte escarpée surmontée du lion de bronze menaçant, pointant vers la France et dominant le champ de bataille, n’a pas été édifiée en l’honneur de Wellington ou même du maréchal prussien Blücher, qui lui vint en aide à un moment critique à Waterloo, mais en souvenir du fait que le prince d’Orange fut blessé en cet endroit, alors qu’il menait les troupes néerlandaises au combat…
La bataille de Waterloo mit fin définitivement aux ambitions sans limite de l’empereur français Napoléon Bonaparte. Après sa désastreuse campagne de Russie en hiver 1812-1813 et les défaites françaises qui suivirent sur tous les fronts, il fut contraint de démissionner le 11 avril 1814 et fut exilé sur l’île d’Elbe. Le Premier Empire français fut dissous et la monarchie des Bourbons rétablie, mais en février 1815, Napoléon s’échappa de son exil et retourna en France pour reprendre le pouvoir. Pour consolider ce pouvoir, il était cependant nécessaire de vaincre la force alliée commandée par Wellington, qui se trouvait à sa frontière nord.
Au début, les dieux semblaient favorables à Bonaparte. Le 16 juin, il infligea aux Prussiens une lourde défaite à Ligny, tandis que le même jour, un peu plus loin, à Quatre-Bras, la confrontation avec les Britanniques et les Néerlandais resta indécise. Le 18 juin, il décida de jouer sa dernière carte. Avec son armée, il prit un pari audacieux : battre les forces de Wellington et de Blücher séparément avant que la coalition ne puisse lancer une contre-offensive à pleine puissance. Pendant plus de dix heures, 180.000 hommes se battirent férocement sur ce terrain ondulé au sud de Bruxelles pour le sort de l’Europe...
Le Prince Guillaume d'Orange à la Bataille des Quatre-Bras, où meurt au combat le Duc Friedrich-Wilhelm de Brunswick.
L’armée de Wellington, comme dit, était une armée composées essentiellement d’alliés. Seuls 36% des troupes engagées pouvaient être qualifiées de britanniques (anglaises, irlandaises, galloises et écossaises). Le reste comprenait des hommes originaires de Prusse, du Hanovre, du Brunswick, de Saxe, des Pays-Bas et, non moins important, de Flandre et de Wallonie, qui faisaient alors partie intégrante du Royaume uni des Pays-Bas. Sur les 26 brigades d’infanterie dans l’armée de Wellington, forte de 70.000 hommes, seulement neuf étaient britanniques; sur les 12 brigades de cavalerie, seulement 7 étaient britanniques… La moitié des 29 batteries d’artillerie était hanovrienne ou néerlandaise. Et je ne parle même pas des 53.000 Prussiens qui finirent par faire basculer la bataille en faveur de Wellington, lorsqu’ils arrivèrent en dernier recours, après une marche forcée, sur le champ de bataille de Plancenoit.
L'infanterie de Nassau au combat à Waterloo.
Des décennies durant, les historiens ont fermé les yeux sur le fait que tous les trois points stratégiques de Wellington à Waterloo — le hameau de Papelotte, et les fermes de La Haye Sainte et de Hougoumont — étaient défendus par des troupes allemandes. Papelotte, à l’extrême gauche de Wellington, fut défendu par la brigade de Bernhard de Saxe-Weimar, composée d’Allemands du régiment d’Orange-Nassau et du 2e régiment de Nassau. La ferme centrale de La Haye Sainte fut défendue par un bataillon de la King's German Legion (ill. ci-dessous), un groupe d’environ 400 hommes venus du Hanovre et placés sous commandement britannique.
Le roi George III d’Angleterre était en effet, par ascendance, le prince-évêque électeur de Hanovre, avant que cette cité-État nord-allemande ne soit envahie par Napoléon en 1803. Ce bataillon, habilement commandé par le major Baring, réussit à ralentir l’avance française dans cette zone cruciale pendant plusieurs heures, se battant jusqu’à la dernière balle.
Le gouvernement britannique dépensa il y a quelques années plus d’un million d’euros pour restaurer et conserver Hougoumont, le troisième point stratégique de Wellington. C’était tout à fait justifié, car il était farouchement défendu par 600 hommes de la division des Foot Guards britanniques, mais on oublie trop souvent qu’en plus de ces Britanniques, une multitude de soldats allemands participèrent aux lourds combats défensifs autour de cette ferme, notamment un bataillon du 2e Nassau sous le commandement du major Busgen, plusieurs compagnies de chasseurs hanovriens, quelques compagnies légères du corps de Brunswick, et une partie de la brigade de la Landwehr hanovrienne sous le commandement du général britannique Halkett.
Malgré ces faits indiscutables, Wellington — en véritable chercheur de gloire —, suivi de près par de nombreux historiens, passa des années à induire délibérément le grand public en erreur sur divers aspects de la campagne, minimisant consciemment le rôle de ses alliés, ce qui fit que leurs efforts furent relégués au second plan. Même des mensonges flagrants furent longtemps tolérés.
Par exemple, les Britanniques avancèrent que les troupes néerlandaises s’étaient plusieurs fois comportées de manière lâche durant la bataille. La brigade du général Van Bijlandt aurait abandonné le combat, et les trois régiments de cavalerie lourde sous le général Trip auraient refusé de charger à un moment donné. La brigade Bijlandt se trouvait en première ligne face à plus de 50 canons de la Grande Batterie de Napoléon, qui bombardait sans relâche les lignes alliées en face. Wellington limita les pertes britanniques dans cette zone en déployant ses troupes derrière une longue crête, hors de vue, et en grande partie hors de portée des canons français. De plus, il ordonna à ses hommes — infanterie comme cavalerie — de se coucher à plat ventre pour se protéger du tir de l’ennemi. La brigade Bijlandt, majoritairement composée de recrues inexpérimentées, ne put suivre cet ordre ; elle subit de lourdes pertes. Il n’était donc pas surprenant que plusieurs recrues succombèrent, mais les hommes plus expérimentés du 7e bataillon de ligne, majoritairement flamands, parvinrent à maintenir la ligne malgré les attaques françaises très violentes…
L’incident avec la cavalerie de Trip était quant à lui dû à un manque de communication. Au plus fort de la bataille, Lord Uxbridge — l’un des favoris de Wellington — reçut soudain le commandement de la cavalerie, mais Trip n’en fut jamais informé. Quand l’enthousiaste Uxbridge arriva en criant et donna l’ordre de charger en anglais, cela aurait pu tout aussi bien se passer en chinois, car Trip ne parlait pas un traître mot d’anglais, et ses cavaliers restèrent immobiles, hésitants. Personne n’avait envie de suivre cet officier anglais, inconnu pour eux… Plus tard, ils se rattrapèrent en effectuant quelques charges remarquables, ce qui transforma immédiatement leur prétendue lâcheté en un simple bobard.
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La rigueur d'une politique de retenue : pourquoi la Chine n’interviendra pas
La rigueur d'une politique de retenue : pourquoi la Chine n’interviendra pas
Source: https://dissident.one/de-brutaliteit-van-terughoudendheid...
Une question qui m’est posée à plusieurs reprises – récemment en lien avec Gaza ou l’Iran – est la suivante : pourquoi la Chine n’intervient-elle pas ? Ou, si elle ne participe pas directement sur le plan militaire, pourquoi ne cesse-t-elle pas au moins le commerce avec Israël ou ne soutient-elle pas l’Iran avec en fournissant des armes pour son autodéfense ?
Honnêtement, je n’ai pas de réponses simples, écrit Arnaud Bertrand. Et je mentirais si je prétendais en avoir. La règle de base est: quiconque affirme avoir une compréhension de la pensée stratégique des dirigeants chinois est un hâbleur. Ces stratégistes chinois ne lâchent rien – littéralement personne en dehors de leur cercle intérieur ne sait ce qu’ils pensent. Donc, toute personne dans les médias occidentaux citant des sources anonymes prétendument proches des délibérations secrètes qui se tiennent à Pékin diffuse probablement des absurdités. Même des employés de haut rang de Xinhua, l’agence de presse officielle de la Chine et porte-voix du Parti communiste, n’ont pas un accès privilégié aux délibérations de la direction du parti. Il est totalement exclu que des journalistes occidentaux en aient.
Ce que nous pouvons toutefois savoir – et cela pourrait être découvert par quiconque fait un peu de recherche – c’est l’histoire de la Chine et ce que le pays a lui-même rendu public au sujet de sa politique étrangère. Quiconque s’y intéresse sérieusement trouvera des réponses étonnamment claires.
Historiquement, la Chine a été impliquée dans précisément cinq conflits armés internationaux depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale: la guerre de Corée (1950-1953), dans laquelle elle a combattu aux côtés de la Corée du Nord contre les États-Unis ; la guerre du Vietnam, où 300.000 soldats chinois ont soutenu le Nord-Vietnam ; la guerre de la frontière avec l’Inde en 1962, provoquée par des incursions indiennes dans des zones contestées comme l'Aksai Chin ; des conflits militaires avec l’Union soviétique à la fin des années 1960, par exemple lors de l’incident de l'Oussouri ; et la courte mais sanglante guerre contre le Vietnam en 1979, suite à l’invasion vietnamienne du Cambodge.
D’autres événements, comme la crise à Taïwan, l’invasion du Tibet en 1950-1951 ou les récents incidents frontaliers dans la vallée de Galwan avec l’Inde, sont considérés selon le droit international comme des différends internes ou locaux, et non comme des interventions militaires.
Le modèle est clair: la Chine n’intervient militairement que lorsque sa propre intégrité territoriale ou sa sécurité est menacée. Dans son histoire millénaire, elle n’a jamais mené d’intervention militaire en dehors de son environnement immédiat – surtout pas dans des conflits qui ne touchent pas directement à sa sécurité. Il est extrêmement improbable qu’un dirigeant chinois rompe ce schéma profondément ancré dans l’histoire.
Il est également intéressant de noter que deux des cinq guerres menées par la Chine l'ont été contre les États-Unis – et qu’elle a gagné dans les deux cas, malgré le fait qu’à l’époque, elle était encore l’un des pays les plus pauvres du monde. Un souvenir qui pourrait ne pas déplaire aux faucons chinois à Washington.
Cela nous amène aux principes. Au cœur de la politique étrangère chinoise se trouve un principe de stricte non-ingérence dans les affaires intérieures des autres États. Même lorsqu’il y a un agresseur évident, la Chine refuse toute ingérence, car cela violerait la souveraineté – même si moralement, elle prend le parti de la victime. Ce qui est souvent perçu comme un cynisme pragmatique dans la politique occidentale, est, dans la vision de la Chine, l’expression d’un principe cohérent : les principes s’appliquent, même quand cela ne leur profite pas.
La question qui se pose est dès lors la suivante: respectez-vous la souveraineté d’un pays uniquement si vous êtes d’accord avec sa politique? Ou même si vous n’êtes pas d’accord? La Chine tente la dernière option. Elle maintient sa souveraineté, même si cela est difficile – par exemple dans le cas d’Israël ou de l’Iran.
Ce comportement crée une paradoxe: en n’intervenant pas, la Chine facilite la tâche aux autres États pour le faire à leur tour. Pourtant, la Chine croit que les principes prévalent par la crédibilité et l’exemplarité – pas par la force ou la contrainte. Une intervention sélective ferait de la Chine une nouvelle puissance hégémonique qui violerait à volonté les règles.
La Chine veut projeter une image d’un ordre mondial dans lequel un État peut exercer son influence sans recourir à la puissance militaire. Le modèle occidental – selon la contre-image chinoise – repose sur la violence, l’hypocrisie et les doubles standards. L’alternative chinoise: respecter les principes, faire preuve de patience et de retenue. L’objectif est la crédibilité à long terme, pas le gain à court terme.
La Chine rejette également toute politique de blocs. Le président Xi Jinping a répété à plusieurs reprises la condamnation de la pensée qui régentait le monde pendant la Guerre froide, avec l'établissement de zones d’influence et de la confrontation. Une aide militaire à l’Iran ou à Gaza placerait immédiatement la Chine dans un bloc anti-américain – exactement selon la logique bipolaire qu’elle veut éviter. Cela minerait non seulement la quête chinoise d’un ordre mondial multipolaire, mais aussi sa crédibilité en tant que puissance non-hégémonique – surtout dans le Sud, où elle est vue comme une alternative à la domination occidentale.
Une parabole historique de 288 av. J.-C. illustre la pensée stratégique de la Chine: deux royaumes chinois rivaux, Qin et Qi, se sont tous deux proclamés détenteurs de l'impérialité chinoise. Cependant, l’État le plus bienveillant, Qi, a perdu son avantage moral à cause de cette démarche – et a finalement été détruit par Qin. La leçon à retenir: celui qui agit en tant que co-hégémon perd son statut spécial.
Le multilatéralisme est également un principe central de la politique étrangère chinoise. La Chine vise à une véritable organisation multilatérale soutenue par l’ONU. Elle n’interviendra pas unilatéralement, même si le système est bloqué. Quiconque ignore le système de l’ONU détruit toute autorité qu’il pourrait utiliser pour le défendre.
Stratégiquement, la Chine évite également l’expansion excessive, qui a jadis conduit l’Union soviétique à sa chute et affaibli les États-Unis aujourd’hui. Plutôt que de gaspiller des ressources dans des interventions lointaines, la Chine se concentre sur le développement national – un modèle réussi qu’elle souhaite préserver. Des aventures militaires au Moyen-Orient donneraient aussi aux États-Unis des munitions pour lutter contre la présence chinoise en Asie de l’Est et autour de Taïwan – ce qui nuirait à Pékin.
La réunification avec Taïwan, objectif stratégique supérieur de la Chine, exige une image de stabilité et de supériorité – pas celle d’un hégémon agressif. Quiconque s’engage militairement partout dans le monde perd cette image.
En résumé : que ce soit d’un point de vue historique, principiel ou stratégique, tout milite en faveur de la non-intervention de la Chine. Cela irait à l’encontre de son identité politique, compromettrait sa crédibilité et mettrait en danger ses objectifs stratégiques. Reste à voir si cette approche sera plus efficace à long terme que les démonstrations de puissance occidentales. Mais c’est une alternative réaliste à un système qui se termine trop souvent par la violence, l’intervention et l’hypocrisie.
Et aussi douloureux que cela soit de voir l’inaction face à des tragédies humaines comme celle de Gaza, la tentative de la Chine de modeler un rôle différent en tant que grande puissance mérite au moins du respect. Peut-être même de l’admiration – pour la cohérence radicale et le courage de résister à la spirale de la violence.
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La politique étrangère des États-Unis est-elle hors du contrôle de Trump ?
La politique étrangère des États-Unis est-elle hors du contrôle de Trump ?
par Davide Malacaria
Source: https://www.piccolenote.it/mondo/la-politica-estera-usa-e...
« Voici la réalité de ce qui est en jeu, de ce que nous affrontons aujourd’hui, car pendant que nous sommes ici, plus que jamais, nous sommes tout proches de l’annihilation nucléaire, tandis que les guerres de l’élite politique alimentent imprudemment la peur et la tension entre les puissances nucléaires. » C’est ainsi que Tulsi Gabbard s’est exprimée dans une vidéo inhabituelle, publiée sur YouTube après sa visite à Hiroshima, où elle appelle les peuples à faire entendre leur voix pour arrêter cette dérive.
Gabbard sait de quoi elle parle, puisqu’elle dirige le renseignement national américain et a accès aux informations les plus confidentielles des agences fédérales. Ce n’est pas une plaisanterie de mauvais goût, mais la réalité dramatique, qui s’est encore accentuée après l’attaque contre les bombardiers stratégiques russes la semaine dernière.
Cette attaque cache des arrière-plans inquiétants, au-delà des motifs évoqués que j'ai évoqués dans une note précédente, à savoir faire échouer le processus de paix d’Istanbul prévu pour le lendemain, et déclencher une réaction russe pour amorcer un conflit direct avec l’Occident.
Alastair Crooke en parle dans un article publié sur le site du Ron Paul Institute, où il décrit ces arrière-plans. La première, qui découle du fait que les Ukrainiens ne pouvaient pas mener une opération aussi sophistiquée en solitaire, est que c’est l’Amérique qui a coordonné l’opération, évidemment en collaboration avec la Grande-Bretagne (Londres dirige également l’Union européenne, en tirant les ficelles des marionnettes placées au sommet de l’UE et de l’Allemagne).
Le Silence des Ours
Ce contrôle extérieur de l’attaque est évident, mais Crooke explique que peut-être Trump a donné son feu vert en croyant à ce que lui ont rapporté ses conseillers, selon lesquels la Russie était proche de l’effondrement, et qu’en augmentant la pression — par des attaques stratégiques visant à dégrader le moral russe — Moscou serait contrainte de céder.
Dans ce cas, Trump aurait été victime du manque de réalisme de ses conseillers, perdus dans leurs rêveries et incapables de comprendre la véritable force économique et militaire de la Russie. Crooke ne le précise pas explicitement, mais en citant un tweet de Trump — « Des choses terribles, si ce n’était pas moi, des choses VRAIMENT TERRIBLES arriveraient à la Russie » — il est clair que, si cette approbation existait, elle aurait été limitée.
La seconde hypothèse plus crédible, selon Crooke, est que « peut-être ses conseillers, involontairement ou délibérément, ont ‘trompé’ Trump et son programme de normalisation des relations avec la Russie ». L’initiative d’attaquer les bombardiers russes aurait été prise à l’insu du président, et justifiée par la suite sous le prétexte que « la CIA a simplement agi en fonction d’une vieille directive présidentielle autorisant des attaques en profondeur à l’intérieur du territoire russe. »
Au-delà de nos considérations, selon Crooke, dans les deux cas, ce qui s’est passé signifie « une seule chose : que Trump n’a pas le contrôle. » Il l’éclaire davantage en expliquant qu’un objectif stratégique de l’attaque — qui a réussi et a prouvé qu’elle était « réalisable » — est que cela a « imposé à Trump la dure réalité de ne pas avoir le contrôle de la politique étrangère des États-Unis […]. Le Deep State collectif lui a fait comprendre cela. »
À ce propos, il cite le général Michael Flynn, qui explique : « L’État profond agit désormais en dehors du contrôle de la direction élue de notre nation… les hommes de l’État profond s’efforcent de provoquer la Russie pour ouvrir un affrontement à grande échelle avec l’Occident. »
L’alerte lancée par Gabbard, sous une forme si inhabituelle, semble confirmer les difficultés de Trump, qui aurait pu lui demander de prendre cette initiative surprenante.
Crooke explique aussi que l’attaque contre la Russie a exploité une vulnérabilité du Traité Salt-Start sur les armes nucléaires, en particulier l’article XII du traité START qui exige que les puissances signataires « exposent visiblement » tous les bombardiers lourds à l’intérieur de leur base aérienne. Ceci afin qu’ils puissent être surveillés par des satellites ennemis pour empêcher tout “premier coup” d’une des parties.
L’attaque contre les bombardiers russes fragilise donc un des piliers de l’accord sur la dissuasion nucléaire mutuelle, avec toutes les conséquences qui en découlent.
Selon Crooke, la Russie préparerait une réaction différente de celles qu’elle a déjà menées, qui s’est traduite par une intensification des attaques conventionnelles en Ukraine, mais cela pourrait ne pas être le cas.
Il est évident que Trump, lors de l’appel apaisant avec Poutine, lui aurait demandé d’être patient, de répondre de manière mesurée pour ne pas le mettre entre les mains de ses ennemis (des ennemis extérieurs pour le tsar, des ennemis intérieurs pour le président américain).
Et, en même temps, il lui aurait assuré qu’il ferait tout pour éviter de telles initiatives. Il est probable que Poutine ait accepté, conscient des marges de manœuvre limitées de son interlocuteur et de la nécessité de ne pas le livrer aux ennemis communs.
Mais Trump doit agir rapidement pour changer les choses s’il veut prendre le contrôle d’un système géré par d’autres. Un petit, mais non négligeable, signal vient du nouveau programme de financement de la Défense élaboré par le Secrétaire de ce ministère, Pete Hegseth, l’un des rares hommes fidèles à Trump dans son administration (lui aussi a dû lutter pour être confirmé par le Congrès, tout comme Tulsi Gabbard).
Ce plan, développé par Hegseth, fait l’objet d’un article dans Responsible Statecraft, dont le titre est évocateur : « Le Secrétaire à la Défense déclare la guerre au complexe militaro-industriel. » En expliquant les coupes dans la défense, Hegseth a déclaré que certaines grandes industries de l’armement pourraient faire faillite en un ou deux ans. Le texte prévoit également une réduction de l’aide directe à Kiev…
Lobbying : la guerre contre le complexe militaro-industriel
En réalité, il ne s’agit pas d’un affrontement direct avec une des composantes du Deep State, et il ne semble pas, du moins pour le moment, que l’Ukraine reste totalement sans aide made in USA, mais cela signale une inversion de tendance qui inquiète beaucoup ces cercles, car ils ne supportent aucune limitation.
Il reste que le texte doit être approuvé par le Congrès, où de nombreux membres ont plus ou moins ouvertement des liens avec l’industrie militaire. L’approbation sera très difficile, et il est probable que le plan subisse des modifications pour le rendre moins désagréable, voire même plus acceptable pour ceux qui profitent des guerres faites par les États-Unis ( déclarées ou non).
11:48 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, donald trump, états-unis, deep state, politique internationale | |
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jeudi, 19 juin 2025
La révolution du thorium en Chine : une technologie américaine oubliée qui devient une arme géopolitique
La révolution du thorium en Chine: une technologie américaine oubliée qui devient une arme géopolitique
Source: https://report24.news/chinas-thorium-revolution-vergessen...
La Chine pourrait-elle devenir une puissance mondiale en matière de politique énergétique grâce aux centrales à thorium qui sont actuellement en construction ? Le vent et le soleil sont dépassés ; à la place, la République populaire travaille à une fourniture d’énergie stable, abordable et durable pour l’avenir. Et l’Occident ? Il reste simplement spectateur.
Alors que l’Europe lutte dans le cadre de la transition énergétique, s’embourbe dans des réglementations, et que les États-Unis semblent coincés dans une impasse de stagnation politique et de lobbying, la véritable révolution se produit ailleurs: profondément dans le désert de Gobi, loin de l’attention occidentale. Là, s’opère un saut quantique technologique et géopolitique qui pourrait ébranler les fondements de l’ordre énergétique mondial.
La Chine a — presque à l’insu de l’opinion internationale — mis au point une technologie qui a été développée autrefois au cœur du programme nucléaire américain, puis abandonnée: le réacteur à sels de thorium. En octobre 2024, des scientifiques chinois ont réussi pour la première fois à faire fonctionner en continu un tel réacteur avec un nouveau combustible. Une étape décisive — non seulement pour la science, mais aussi pour l’agenda géopolitique de Pékin.
Une technologie oubliée, réactivée en Chine
L’ironie de l’histoire: le principe des réacteurs à sels fondus a déjà été testé avec succès dans les années 1960 au Oak Ridge National Laboratory dans le Tennessee. Mais le Pentagone a décidé de ne pas poursuivre ses expérimentations avec le thorium. La raison n’était pas technique, mais stratégique: les réacteurs à uranium sous pression produisaient du plutonium — la base des armes nucléaires. Le thorium, lui, est peu utile pour la destruction massive. Le projet a donc été abandonné — archivé, délaissé, oublié.
La Chine, en revanche, a fait preuve d’une patience stratégique. Dès 2011, la République populaire a commencé à développer ses propres technologies, en se basant sur la recherche américaine accessible au public. Pas de campagnes de relations publiques, pas de vitrines pour investisseurs. Au contraire, la construction, le développement et les tests se sont faits dans le silence du désert — avec une vision à long terme, presque étrangère à la mentalité occidentale qui ne privilégie que le court terme. En 2024, le premier réacteur a commencé sa pleine exploitation. Et une percée dans le rechargement en fonctionnement a rapidement suivi — une innovation technologique.
Le thorium : la clé de la souveraineté énergétique de la Chine
Autrefois phénomène marginal dans la recherche nucléaire, le thorium devient aujourd’hui une ressource géopolitique de premier plan. Ce combustible est trois à quatre fois plus abondant que l’uranium, disponible mondialement, et moins susceptible d’être utilisé pour la prolifération. Dans les réacteurs à sels fondus, il permet d’atteindre des températures élevées à pression atmosphérique — ce qui élimine pratiquement les risques d’explosions ou de catastrophes comme Fukushima. En cas de coupure de courant, il n’y a pas de perte de contrôle, mais une extinction automatique et passive en toute sécurité. Enfin, la méthode réduit significativement les déchets radioactifs, et peut même recycler les déchets issus des réacteurs à uranium.
En janvier 2025, Pékin a annoncé la découverte d’un gigantesque gisement de thorium dans la région de Bayan-Obo, en Mongolie intérieure. Selon des géologues chinois, ces réserves suffiraient à couvrir la consommation énergétique du pays pendant environ 60.000 ans, à consommation constante. La Chine détient donc non seulement la technologie des réacteurs, mais aussi la ressource en combustible — devenant ainsi un potentiel exportateur d’énergie de première importance.
Géopolitique de l’énergie: la nouvelle arme atomique, l’électricité
Alors que les États occidentaux misent sur l’éolien et le solaire dans leur hystérie climatique, la Chine construit une nouvelle réalité: un modèle énergétique nucléaire, déconnecté des éoliennes et panneaux solaires dépendants des conditions météorologiques. Déjà en Wuwei, un prototype de 10 MWe pour la production combinée d’électricité et d’hydrogène est en construction. La température du réacteur lui confère un avantage pour les procédés thermochimiques, rendant même l’hydrogène « vert » économiquement compétitif — un autre coup porté au récit énergétique occidental.
Simultanément, la Chine développe des navires à thorium. Sa vision est la suivante : des porte-conteneurs capables de fonctionner sans ravitaillement pendant des années — indépendants du prix du pétrole, des accès portuaires ou d’autres restrictions. Selon des rapports récents, la République aurait lancé des projets concrets pour construire de tels navires. Le contrôle du commerce maritime international pourrait ainsi intégrer une composante nucléaire.
L’Occident regarde et se tait
Les États-Unis détenaient autrefois la clé de cet avenir — et l’ont laissée tomber. Le réacteur à thorium opérationnel à Oak Ridge a été abandonné au profit de technologies militaires plus exploitables. Depuis lors, les stratégies énergétiques occidentales s’embrouillent dans des contradictions d'ordre réglementaire, dans du lobbying et des querelles idéologiques.
Aujourd’hui, il est presque tragico-comique de constater que la source d’énergie qui pourrait alimenter les centres de données pour l’intelligence artificielle avancée — avec ses besoins électriques gigantesques — provient d’une technologie américaine elle-même abandonnée par Washington. La Chine, elle, avance: IA, automatisation industrielle, ordinateurs quantiques — tout cela nécessite une énergie constante, dense, fiable. Et c’est là que Pékin agit.
Thorium : l’indépendance énergétique comme levier géopolitique
La question reste en suspens quant à savoir si le thorium deviendra réellement la principale source d’énergie dans les décennies à venir. Mais, dès maintenant, il offre à la Chine des options stratégiques qui dépassent la seule dimension technique. L’énergie n’est pas qu’un facteur économique — c’est une projection de puissance géopolitique. Qui fournit de l’électricité fiable et abordable, contrôle la production, le traitement des données, la numérisation — en bref : l’avenir.
L’Occident a longtemps cru que sa suprématie technologique était assurée pour toujours. Or, Pékin prouve que la vision à long terme, la stratégie et le savoir-faire technologique ne peuvent pas être éternellement compensés par des sanctions, barrières commerciales ou campagnes de relations publiques. La grande question demeure : l'Occident continuera-t-il à regarder la Chine faire prospérer une technologie née dans ses propres laboratoires — et à la transformer en fondement d’un nouvel ordre mondial, communiste ?
18:58 Publié dans Actualité, Economie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, thorium, chine, énergie | |
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Les voies de la guerre
Les voies de la guerre
Andrea Marcigliano
Source: https://electomagazine.it/le-vie-della-guerra/
Une guerre peut nous sembler lointaine. Etre un conflit entre pays situés à des milliers de kilomètres de chez nous. Avec des cultures et des mentalités différentes des nôtres. Des réalités étrangères donc. Qui ne nous concerneraient pas.
Et pourtant, ce n’est pas le cas. Ou plutôt, ce n’est plus le cas, du moins pas autant qu’auparavant, même si dans le monde d’hier les choses étaient peut-être différentes. Mais, bien sûr, aujourd’hui, la connexion entre les différents pays, les réseaux d’intérêts, les alliances sont tels que même le conflit le plus éloigné et le plus petit peut constituer une menace générale.
Ou mieux, représenter un épisode d’un affrontement plus vaste. Global.
Et ce qui se passe actuellement entre Israël et l’Iran, n’est pas peu de choses. En soi, même pris isolément, cela représente le conflit entre la puissance la mieux armée et organisée de la région du Moyen-Orient, Israël, d'une part, et la puissance la plus peuplée, forte de ses chiffres et dotée d’une technologie compétitive, l’Iran, d'autre part. Et il y aurait déjà de quoi s’inquiéter. De beaucoup s'inquiéter.
Cependant, ce qui inquiète vraiment, ce sont les liens, les réseaux de soutien qui se profilent derrière les deux protagonistes. Des réseaux vastes, qui s’étendent bien au-delà des frontières du Grand Moyen-Orient. Des réseaux mondiaux.
Israël bénéficie du soutien américain. Un soutien sans aucune exception. Et même si Netanyahu a agi de son propre chef, attaquant Téhéran sans presque en informer ses “amis”, Trump ne peut que le soutenir sans réserve. Bibi le savait bien, et il a agi en conséquence.
Au soutien américain, s’ajoute celui du Royaume-Uni, de la France, et, en substance, de toute l’Union européenne. Où certains peuvent s’opposer à l'une ou l’autre chose, condamner les positions de Netanyahu et l’accuser de crimes… mais ce ne sont que des déclarations de façade. La substance ne change pas. La Grande-Bretagne et l’UE soutiennent l’attaque d’Israël. Et cela, à Téhéran, ils le savent bien.
De l’autre côté, les amis de l’Iran. Qui ne sont pas les pays arabes, des poissons des mêmes eaux, qui déplorent la situation à voix haute, mais espèrent qu’Israël les libérera de la présence iranienne, qui leur est gênante. La Jordanie est plus explicite en ce domaine. Mais, en sous-main, ce sont surtout les pays arabes, en tête l’Arabie Saoudite, qui exercent l'influence la plus prépondérante.
Les vrais amis, ou plutôt les alliés des Iraniens, sont d’autres puissances. Le Pakistan, par exemple, qui s'est ouvertement déclaré comme tel. Qui envoie déjà des armements, peut-être même nucléaires, à Téhéran. Et se déclare prêt à intervenir avec son aviation.
Et derrière le Pakistan, il y a Pékin. Qui ne veut pas d’un changement de régime à Téhéran, qui soit provoqué par Israël et favorisé par Washington. Un changement de régime qui pourrait facilement nuire à l’économie chinoise. La Chine a besoin du gaz et du pétrole iraniens.
Ensuite, bien sûr, il y a la Russie. Moscou semble plus en retrait, surtout en raison de son engagement militaire en Ukraine, qui concentre ses ressources et son attention.
Cependant, le Kremlin est un allié étroit de Téhéran. Et il ne peut accepter un changement radical de direction, passant d’un gouvernement des ayatollahs à un autre, qui serait la “marionnette” d’Israël et des États-Unis. Que ce gouvernement soit géré par l’héritier du Shah ou soit sous la forme d'une quelconque république.
À l’heure actuelle, le front pro-iranien préférerait éviter la guerre. Cependant, Israël a lancé l'opération à tous points de vue. En mettant ses alliés, en premier lieu Washington, face à un fait accompli.
Il est difficile de trouver, maintenant, une solution diplomatique.
La seule lueur d’espoir est la forte réaction de Téhéran à l’attaque israélienne. Qui a montré la perméabilité des défenses de Jérusalem, et semé la panique dans un pays peu habitué à subir de telles répercussions.
Ce à quoi semble se rattacher une initiative conjointe Moscou-Washington. La proposition de Poutine de faire de lui un médiateur dans le conflit Téhéran-Jérusalem.
Une proposition qui semble avoir trouvé l’approbation de Trump.
Une hypothèse, cependant, qui reste à vérifier. Vu l’attitude peu disposée de Netanyahu. Et, parallèlement, le fait qu'Ali Khamenei s’est, en substance, arrogé le rôle de commandant en chef. En écartant le gouvernement trop conciliant de Pezechkian.
14:07 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, israël, iran, politique internationale | |
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Aux origines de la civilisation mégalithique européenne
Aux origines de la civilisation mégalithique européenne
par Andrea Anselmo
Bron: https://istitutoeneide.it/alle-origini-della-civilta-mega...
Avant les grandes civilisations historiques, avant les villes et les royaumes, l'Europe était le berceau d'une culture aussi ancienne qu'imposante: la culture mégalithique. Des côtes atlantiques de la Bretagne aux vallées alpines, du nord de l'Écosse à la Méditerranée, d'énormes structures en pierre — menhirs, dolmens, tombes collectives — témoignent de l'existence d'une société capable de pensée symbolique, de conception architecturale et d'organisation communautaire. Pourtant, malgré ces preuves, cette civilisation est longtemps restée occultée par des préjugés culturels, des mythes romantiques et des interprétations fantaisistes. Aujourd'hui, grâce à l'archéologie, nous pouvons lui redonner la place qu'elle mérite dans l'histoire profonde de l'Europe.
Les origines mystérieuses de la civilisation mégalithique européenne
Bien avant que l'Europe ne soit façonnée par l'Empire romain ou les royaumes médiévaux, le continent était déjà le théâtre d'une expression culturelle surprenante: la civilisation mégalithique. Des traces évidentes de cette période lointaine sont encore visibles aujourd'hui, sous la forme de monuments en pierre — dolmens, menhirs, tombes à chambre, alignements de rochers — disséminés sur de vastes zones allant de la péninsule ibérique à la Scandinavie.
Mais qui étaient réellement les artisans de ces imposantes architectures préhistoriques ? En l'absence de sources écrites, le mystère a donné lieu aux interprétations les plus diverses. Certaines lectures, fascinées par l'exotisme ou le sensationnalisme, cherchent les racines de ces constructions en dehors de l'Europe: elles invoquent des influences du Proche-Orient, d'Afrique du Nord, et, dans certains cas même, des théories évoquant les extraterrestres.
Pourtant, les preuves archéologiques sont claires: la culture mégalithique était une culture profondément européenne, née et développée au cœur du continent, capable d'exploits architecturaux et symboliques extraordinaires bien avant l'arrivée des grandes civilisations historiques.
Sur la base de sa datation, nous pouvons affirmer à propos du mégalithisme que « pour l'Europe, il s'agissait d'un phénomène autochtone, d'une originalité et d'une créativité européennes indépendantes des influences moyen-orientales, comme le dit C. Renfrew (1972) » [1], même si le mégalithisme européen présente certaines similitudes avec celui des autres continents.
Reconnaître le mégalithisme européen comme un phénomène autonome et enraciné dans le continent signifie remettre en question une vision encore répandue aujourd'hui: celle d'une Europe préhistorique arriérée, incapable de se développer par elle-même et constamment en attente d'influences extérieures pour évoluer. C'est une perspective qui tend à sous-estimer les capacités créatives et organisationnelles des anciennes populations européennes, les décrivant comme de simples figurants dans le grand théâtre des civilisations, toujours redevables au Proche-Orient ou à l'Afrique du Nord.
À cet égard, il convient d'approfondir et de préciser en détail le processus qui a conduit à la datation de l'architecture mégalithique.
« En 1967, le chimiste américain H.E. Suess a élaboré, à l'aide de la dendrochronologie, une courbe d'étalonnage des datations au radiocarbone, relative à la période comprise entre 4100 et 1500 avant J.-C. Et c'est précisément sur la base de ces découvertes que Colin Renfrew a montré que certains monuments mégalithiques européens, dont la construction avait souvent été interprétée comme une conséquence des contacts avec les cultures développées au Proche-Orient, étaient en réalité beaucoup plus anciens, démontrant ainsi qu'il fallait envisager un développement culturel largement autonome des communautés préhistoriques du continent européen. Il est ainsi apparu clairement que le phénomène du mégalithisme européen était antérieur à la construction des grandes pyramides égyptiennes sous la IVe dynastie» [2].
Cela ne signifie pas nier l'existence de structures monumentales similaires dans d'autres parties du monde, mais reconnaître que le mégalithisme européen a suivi un parcours de développement indépendant. Son histoire est loin d'être linéaire: elle est le fruit d'une stratification culturelle qui s'étend sur des millénaires. Depuis leur construction, à l'époque préhistorique, on passe aux relectures symboliques de l'Antiquité et du Moyen Âge — lorsque ces colosses de pierre étaient attribués à des géants ou à des esprits féériques — jusqu'à leur redécouverte moderne, grâce à l'archéologie et à l'historiographie contemporaine.
« Étudier et valoriser l'héritage de l'architecture mégalithique est une véritable aventure : fascinante et parfois culturellement dangereuse, mais en même temps positive pour tenter de retrouver une plénitude de sens probablement perdue. Fascinante parce qu'elle satisfait le désir, toujours vivant et actuel, de partir à la recherche des traces des temps anciens et de se laisser emporter par le mystère qui émane de tels monuments. Dangereuse parce que cette fascination nous conduit presque imperceptiblement à ne pas en voir l'essence réelle et à nous laisser entraîner par des superpositions interprétatives» [3].
Malgré les progrès de la recherche, certaines interprétations désormais dépassées persistent encore aujourd'hui, comme celle qui est dite « celtomane », qui attribuait les mégalithes à l'œuvre des druides celtiques. Cette théorie, née au cours des siècles pionniers de l'archéologie, a profondément influencé l'imaginaire collectif, alimentant l'idée d'autels sacrés et de rituels mystiques liés à des époques bien plus récentes que ne l'est, en fait, la réalité historique. Aujourd'hui, nous savons cependant que le mégalithisme trouve ses racines dans le Néolithique, entre 8000 et 3500 avant J.-C., et qu'il s'est prolongé jusqu'à l'âge du bronze dans certaines régions d'Europe.
Les datations confirment la grande variété et la profondeur chronologique du phénomène. La Bretagne abrite certaines des structures les plus anciennes, datant de 4794 avant J.-C., tandis que dans d'autres régions de France, le mégalithisme se poursuit jusqu'en 3000 avant J.-C. En Scandinavie et en Europe centrale, les grandes architectures en pierre apparaissent entre 3600 et 3000 avant J.-C.
Dans le nord de l'Écosse et dans la péninsule ibérique, on trouve des vestiges très anciens, datant d'environ 4300 avant J.-C. Les monuments mégalithiques des Pouilles et de Malte sont plus récents, tandis qu'en Sardaigne, on observe toutes les phases évolutives de cette culture. Dans les Alpes également, la présence de structures datant de 4500 à 500 avant J.-C. témoigne d'une longue et riche vitalité du mégalithisme.
Considérations finales
Aujourd'hui, ces pierres silencieuses continuent de veiller sur les landes, les promontoires et les îles d'Europe, comme les témoins muets d'une civilisation qui a laissé son empreinte sans avoir besoin de mots. Marcher parmi ces colosses, c'est effleurer une époque archaïque où le ciel et la terre dialoguaient à travers l'ordre des pierres.
Redécouvrir le mégalithisme n'est pas seulement un acte de connaissance historique, mais aussi une invitation à reconsidérer les racines profondes de notre continent — et à reconnaître que la mémoire la plus ancienne n'est pas toujours écrite dans les livres, mais gravée dans la matière du paysage.
Notes:
[1] Paolo Malagrinò. Monumenti Megalitici in Puglia, Schena Editore, Fasano di Brindisi, 1997, pag. 37.
[2] A. Gaspani, Le pietre degli Dei. Astronomia e antica architettura megalitica europea, fonte di Conla, Lodi, 2014. Pag. 201
[3] Paolo Malagrinò. Monumenti Megalitici in Puglia, Schena Editore, Fasano di Brindisi, 1997, pag. 13.
13:35 Publié dans archéologie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : archéologie, mégalithes | |
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