Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 14 avril 2014

Balzac et les fondements de la société

Maison de Balzac.png

Balzac et les fondements de la société
 
par Gérard Baudin
 
Ex: http://anti-mythes.blogspot.com

 
Il n’y a de solide et de durable que ce qui est naturel, et la chose la plus naturelle en politique est la famille. La Famille doit être le point de départ de toutes les Institutions. Un effet universel démontre une cause universelle ; et ce que vous avez signalé de toutes parts vient du Principe social même, qui est sans force parce qu’il a pris le Libre-Arbitre pour base, et que le Libre-Arbitre est père de l’Individualisme. Faire dépendre le bonheur de la sécurité, de l’intelligence, de la capacité de tous, n’est pas aussi sage que de faire dépendre le bonheur de la sécurité, de l’intelligence des institutions et de la capacité d’un seul. On trouve plus facilement la sagesse chez un homme que chez toute une nation. Les peuples ont un coeur et n’ont pas d’yeux, ils sentent et ne voient pas. Les gouvernements doivent voir et ne jamais se déterminer par les sentiments. Il y a donc une évidente contradiction entre les premiers mouvements des masses et l’action du pouvoir qui doit en déterminer la force et l’unité. Rencontrer un grand prince est un effet du hasard, pour garder votre langage ; mais se fier à une assemblée quelconque, fût-elle composée d’honnêtes gens, est une folie.
Honoré de Balzac

Ce texte est emprunté à un dialogue du Curé de village, roman de Balzac daté de 1839, où l’intrigue n’est qu’un prétexte à la présentation d’idées chères à l’auteur. L’analyse des dégâts économiques et sociaux causés par le libéralisme, une hostilité au règne de l’Argent qui va jusqu’au dégoût ont attiré à Balzac la sympathie de penseurs marxistes comme Lukacs, Wurmser ou Barbéris. Déjà Friedrich Engels, admirateur de sa “dialectique révolutionnaire”, voyait en Balzac un théoricien de la lutte des classes, qui a parfaitement décrit et condamné le pouvoir avilissant de l’argent. Victor Hugo n’avait-il pas dit : « À son insu, qu’il le veuille ou non, qu’il y consente ou non, l’auteur de cette oeuvre immense et étrange est de la forte race des écrivains révolutionnaires. Balzac va droit au but. Il saisit corps à corps la Société moderne. »

On en est arrivé au point que la critique moderne passe souvent sous silence la partie positive de la pensée du romancier, pensée royaliste et catholique, pour ne voir qu’une critique de l’Argent qui, coupée de ses origines, passe pour révolutionnaire.

Balzac commence par affirmer que la famille est la cellule de base de la société et que c’est un fait naturel. Nous sommes déjà loin de l’individualisme du Contrat social. Il voit, à l’origine de la thèse libérale, le Libre-Arbitre, la pensée autonome, indépendante de toute structure sociale et de toute discipline intellectuelle extérieure à l’individu. Il découle de cette thèse libérale que chacun possède un droit égal de participer à la direction de la Cité.

L’Ordre naturel

Balzac va réfuter cette conséquence de l’individualisme antisocial. « On trouve plus facilement la sagesse chez un homme que chez toute une nation. » De cette proposition découle une critique de la démocratie : on ne peut se fier ni au peuple en général ni à ses représentants. L’opinion publique est une réaction épidermique des masses à laquelle Balzac oppose la décision prise en toute connaissance de cause (« les gouvernements doivent voir et ne jamais se déterminer par les sentiments ») par un gouvernement indépendant.

Le texte se termine par une critique du régime d’assemblée. On trouve parfois un grand prince mais jamais une bonne assemblée, « fût-elle composée d’honnêtes gens ». On pense à l’assemblée élue en 1871 sans combinaisons électorales, la plus honnête et la plus représentative que la France ait jamais eue, et qui ne sut que montrer l’impuissance inhérente à cette institution. Balzac aurait apprécié à sa juste valeur le mirage des “bonnes élections”.

L’Or ou le Sang

Il faut étudier dans Balzac les bouleversements sociaux liés à la Révolution, en particulier les conséquences de la vente des biens nationaux. Citons La Rabouilleuse, Une ténébreuse affaire. Plus connu encore, le Père Grandet « eut pour un morceau de pain, légalement, sinon légitimement, les plus beaux vignobles de l’arrondissement ».

Dans le Bal de Sceaux, un des romans les plus importants pour comprendre ses idées politiques, nous avons une approbation sans réserve de la sagesse politique de Louis XVIII, ni libéral, ni ultra, sachant, si nécessaire, mettre un frein aux ambitions exagérées de ses protégés.

Il déclare dans l’avant-propos de La Comédie humaine : « J’écris à la lueur de deux vérités éternelles, la religion et la monarchie, deux nécessités que les événements contemporains proclament et vers lesquels tout écrivain de bon sens doit essayer de ramener notre pays. » Ainsi, loin d’être révolutionnaire, la peinture balzacienne de la société annonce les fortes analyses de Charles Maurras dans L’Avenir de l’Intelligence : le pouvoir bienfaisant de la famille, de l’hérédité ou la grossière dictature des richesses, l’Or ou le Sang.

Gérard Baudin
L’Action Française 2000 n° 2740 – du 17 janvier au 6 février 2008

Les commentaires sont fermés.