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mercredi, 24 décembre 2014

La neutralité suédoise pendant la seconde guerre mondiale

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Erich Körner-Lakatos :

La neutralité suédoise pendant la seconde guerre mondiale

La Suède exportait du minerai de fer et importait du charbon

Le 5 février 1940, le conseil de guerre suprême des Alliés décide d’envoyer trois à quatre divisions à hauteur du port de Narvik. D’une part, leur intention est d’apporter une aide aux Finlandais menacés par les Soviétiques et, d’autre part, d’occuper les mines de fer suédoises, et c’est vraisemblablement là que réside la raison principale de cette manœuvre car cela aurait privé l’ennemi allemand de ses approvisionnements en un minerai stratégique de la plus haute importance. La Norvège et la Suède étaient deux puissances neutres mais prendre ce statut en considération n’entrait pas dans les intentions des Alliés occidentaux.

Dans le texte anglais du 6 avril, relatif à l’occupation programmée des zones de minerais de fer dans le nord de la Suède, on lit clairement que « si l’occasion se présente, le commandement envisage de faire entrer nos troupes en Suède et d’occuper les mines de fer de Gällivare… ». Il ne s’agissait donc pas de franchir la frontière suédoise sur une profondeur réduite car ces mines se trouvent à une centaine de kilomètres à l’intérieur du pays.

Ce qui rend l’opération problématique, c’est que les voies de chemin de fer ont été minées par les forces suédoises en dix-sept endroits. Le Reich, pour sa part, envisage lui aussi une occupation partielle : en décembre 1939, la Kriegsmarine élabore un plan pour l’occupation du sud de la Suède, la région de Scanie, afin que l’Allemagne puisse contrôler la totalité de la Mer Baltique. Cependant, le corps expéditionnaire britannique embarque le 7 avril et, le jour suivant, les Anglais commencent à miner la zone de trois miles devant Narvik. Les forces allemandes réagissent alors à la vitesse de l’éclair : l’Action Weserübung (« exercice sur la Weser ») est amorcée dès le 8 avril en soirée et réduit à néant les projets des Alliés. L’édition vespérale du 9 avril 1940 de la « Neue Zürcher Zeitung » suisse informe ses lecteurs sur les événements du jour en titrant « La contre-attaque allemande ».

Kung_Gustav_V_1935.jpgAvant de signer le « Traité de transit » du 8 juillet 1940 a été précédé en Suède d’un crise politique interne. Les sociaux-démocrates sont contre cet accord qui sera finalement signé avec l’Allemagne tandis que les partis conservateurs y sont favorables (voir annexe). Il a fallu que le chef de l’Etat, le Roi Gustave V (photo)  -qui officiellement porte le titre de « Roi des Suédois, des Goths et des Vandales »- menace d’abdiquer pour que le premier ministre Per Albin Hansson réussisse à convaincre les sociaux-démocrates d’accepter les clauses du traité.

Quand la fortune des armes abandonne les Allemands au cours de la seconde guerre mondiale, les Suédois se mettront à battre froid leurs voisins allemands du Sud. Le 29 juillet 1943, Stockholm renonce au Traité de transit. Peu de temps avant la fin des hostilités sur les fronts européens, les sociaux-démocrates, à leur tour, influencent la politique du premier ministre Hansson qui, sous leur pression, menace de faire donner l’armée suédoise si les unités allemandes présentes au Danemark et en Norvège transforment ces deux territoires nationaux scandinaves un théâtre d’opérations militaires. Le courage guerrier des Suédois ne s’est donc affirmé que contre un adversaire potentiel déjà presque totalement liquidé par les Alliés occidentaux et par les Soviétiques, alors qu’à peine plus tard, ces mêmes suédois sociaux-démocrates tombent à genoux devant les menaces soviétiques dans la question du droit d’asile. En janvier 1946, en effet, les socialistes suédois livrent aux bourreaux staliniens de nombreux Baltes qui s’étaient réfugiés en Suède.

Comment se sont déroulés les relations économiques entre la Suède et le Reich pendant la seconde guerre mondiale ? L’Allemagne a un besoin impératif du minerai de fer suédois, réputé de très haute qualité. Le transport de ce minerai s’effectue pour partie par la Mer Baltique et pour une autre partie par le port norvégien de Narvik, où deux millions de tonnes de minerai de fer avaient été expédiées par voie maritime en Allemagne entre septembre 1939 et mars 1940.

La Suède, elle, avait un besoin permanent de charbon allemand. L’Angleterre et la Pologne (qui, en 1937, livrait 40% du charbon consommé en Suède) ne fournissaient plus ce charbon. C’est pourquoi les Suédois ont été contraints d’importer quatre millions de tonnes de charbon et 1,7 million de tonnes de coke en provenance des mines allemandes en 1941.

A la fin de l’année 1941, les Suédois réclament aux Allemands la livraison de 110 canons (de type Howitzer) avec 300.000 munitions ad hoc. Vu l’énorme besoin en armes qu’exigeait le front soviétique, le Reich n’a pu faire face à cette exigence suédoise que très lentement : en mars 1943, seulement 40 howitzers et 80.000 munitions sont livrés effectivement à l’armée suédoise. Par la suite, la Suède a reçu chaque mois quatre de ces pièces d’artillerie.

A partir d’août 1943, les premières failles dans la livraison du minerai de fer suédois surviennent, surtout parce que les ports allemands de la Mer du Nord sont pilonnés systématiquement par les aviations anglo-saxonnes et que le débarquement des minerais prend plus de temps. Mais il y a une autre cause à ce ralentissement qui réside en Suède : la voie de chemin de fer transportant le minerai vers Narvik a été sur-sollicitée et a réclamé réparations et remises en état, interrompant ainsi provisoirement le transport du fer vers la côte norvégienne.

Les Suédois se montrent aussi de plus en plus récalcitrants parce que les mesures visant à protéger le pays contre tout blocus portent leurs fruits : les Suédois disposent désormais de réserves de charbon et de coke pour près de six mois et ont commencé aussi à solliciter les immenses réserves de bois dont dispose naturellement le pays. Ensuite, autre facteur, les stocks de pétrole sont bien fournis et largement suffisants, tandis que l’on mobilise également les produits substitutifs comme les carburants tirés du schiste argileux et de la tourbe.

Malgré tout la Suède livre encore de janvier à mai 1944 près de deux millions de tonnes de minerai de fer au Reich. Après les échanges sont quasiment réduits à néant car le transport du charbon vers le Nord s’est avéré de plus en plus difficile. Les deux partenaires avaient prévu des négociations en décembre 1944, qui devaient régler les échanges économiques à partir de janvier 1945. Les Suédois n’y participeront pas car la situation n’était plus claire.

Erick Körner-Lakatos.

(article paru dans « zur Zeit », Vienne, n°50/2014 ; http://www.zurzeit.at ).

Le Traité du transit: de la Norvège à la Carélie soviétique

Le « Trait du transit », signé avec l’Allemagne en juillet 1940 permettait d’acheminer à travers le territoire suédois des éléments de la Wehrmacht (au maximum un train par jour dans les deux sens). Le Parlement suédois, dominé par les sociaux-démocrates, accepte le 25 juin 1941, trois jours après l’entrée des troupes allemandes (hongroises, finlandaises et roumaines) en Union Soviétique, que passe par le territoire suédois une division entière de la Wehrmacht (la 163ème DI), qui venait d’Oslo et se rendaient en Finlande. Jusqu’à la moitié de l’été 1943, les chemins de fer suédois ont ainsi transporté 2,14 millions de fantassins allemands et 100.000 wagons de marchandises destinées aux armées du Reich entre la Norvège et la Finlande et retour. 300 élèves officiers suédois serviront dans la Waffen-SS et 30 volontaires suédois sortiront de l’école d’aspirants officiers de cette organisation située à Bad Tölz en Bavière.

O_G_Thornell.jpgPourquoi une telle situation a-t-elle été possible ? Le chef de l’armée suédoise, le Général Olof Thörnell (photo) croit en une victoire allemande sur les Soviétiques, au plus tard à l’été 1942. Thörnell et le Parti Conservateur ne pourront toutefois pas faire interdire le parti communiste suédois, malgré leurs demandes réitérées. Dans l’armée suédoise pourtant, les conscrits réputés communistes, les syndicalistes les plus engagés et certains sociaux-démocrates de gauche ont été isolés dans des « compagnies de travail » spéciales pour les empêcher, en cas de conflit, de déserter et de rejoindre les rangs de l’armée soviétique. Cependant, cette politique était risquée : lors des élections pour la deuxième chambre du Parlement suédois en septembre 1944, le parti communiste a obtenu un score non négligeable, beaucoup plus important qu’habituellement : 10,3%, ce qui leur a permis de quintupler leurs sièges, de trois à quinze.

EKL.

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