mercredi, 26 juillet 2023
Espagne : élections 2023. Pourquoi la droite n'a-t-elle pas gagné ?
Espagne: élections 2023. Pourquoi la droite n'a-t-elle pas gagné?
Enric Ravello Barber
Source: https://euro-sinergias.blogspot.com/2023/07/espana-elecciones-2023-por-que-no-ha.html
La nuit des élections locales et régionales en Espagne a donné de bons résultats à la droite, en particulier au PP, ainsi qu'à VOX, qui partait de bas et dont le saut qualitatif était évident.
Les médias européens ont parlé d'un avant-goût de ce qui se passerait lors des prochaines élections générales, et la droite a commencé à se réjouir des résultats. L'apparition de Pedro Sánchez à la télévision a soudainement coupé court à toute célébration, le président du gouvernement et secrétaire général du PSOE, un parti qui a été clairement battu dans cette élection - pires encore étaient les résultats de son partenaire gouvernemental PODEMOS - a annoncé la dissolution immédiate des Cortes et la convocation d'élections générales pour la date la plus proche que le calendrier permettait : le 23 juillet.
Cette date était très inhabituelle en Espagne, où un week-end à la fin du mois de juillet correspond aux vacances d'été et où les habitants des grandes villes ont tendance à quitter leur lieu de résidence habituel.
Sánchez, égocentrique machiavélique - avec la charge négative et positive du terme - et joueur d'échecs froid, a résolu plusieurs problèmes à la fois :
Il a évité les critiques internes à son parti pour les mauvais résultats.
Il a profité de la mauvaise situation de PODEMOS pour forcer son inclusion dans SUMAR, un nouveau parti de gauche beaucoup plus docile envers le PSOE, et aussi pour agglutiner le vote de gauche au sein du PSOE.
Et surtout, il a forcé la mise en place des pactes régionaux PP-VOX peu de temps avant les élections. Il a ainsi obtenu l'image qu'il souhaitait pour la campagne : "Le PP et VOX sont une seule et même meute", et a appelé à la mobilisation pour mettre un terme à leur ascension.
Résultats des élections générales du 23 juillet 2023, statistiques, données et graphiques
Feijóo, qui ne manque pas de vision stratégique, autorisait les pactes régionaux entre le PP et VOX avec toutefois une certaine réticence, mais en sachant qu'il n'y avait pas d'alternative. Logiquement, la relation PP-VOX s'en est trouvée érodée.
Les sondages indiquaient toujours une majorité absolue pour le PP-VOX, le seul doute, qui subsistait, était de savoir quel serait le poids de VOX au Congrès et donc s'il exigerait ou non de faire partie du gouvernement.
Dans ce contexte, VOX a présenté son programme électoral, un parti qui parle de moins en moins d'immigration et qui encourage avec insistance l'immigration hispano-américaine, en basant son programme - comme il est logique - sur ce qui est son point fondateur et essentiel : la recentralisation de l'Espagne. Les mesures qu'il propose sont d'une ampleur considérable : recentralisation de l'éducation, c'est-à-dire suppression des compétences des gouvernements basque et catalan en matière d'éducation, suppression de l'Erzaintza (police basque) et des Mossos (police catalane) pour redéployer la police espagnole. Ces mesures sont totalement déconnectées de la réalité, irréalisables et pourraient susciter une réaction des Catalans et des Basques d'une ampleur difficilement prévisible.
Quelques jours plus tard, Feijóo a déclaré que VOX était un partenaire inconfortable, provoquant des tensions inutiles; en même temps, il a demandé au PSOE de le laisser gouverner si le PP était le parti engrangeant le plus de voix, afin d'éviter de devoir dépendre de VOX.
Les sondages continuent de donner la victoire à la droite - il est encore difficile de parler d'un ensemble PP-VOX - mais la gauche progresse.
Le jour de l'élection, les résultats montrent une situation à laquelle peu s'attendaient. Le PP et VOX n'ont pas la majorité absolue. Le PP est devenu le parti ayant récolté le plus de voix en Espagne et a obtenu 136 députés ; VOX a chuté de 3 % et a perdu 19 des 52 députés qu'il avait.
Le plus dramatique pour le PP est que, étant le parti le plus doté en voix, il n'avait personne avec qui négocier. Pourquoi ? Parce que les deux partis possibles: JxC (centre catalan) et PNV (centre-droit basque) ne le feraient jamais tant que le PP serait en contact avec VOX et son objectif de vider les régions autonomes de leur contenu et de supprimer le système éducatif basque et catalan. Le PP était bloqué.
Et maintenant ?
La situation est compliquée et il n'y a pas d'issue facile à court terme.
Feijóo (PP), le candidat du parti disposant du plus grand nombre de voix - sachant que VOX doit voter pour lui sans condition - a appelé le PNV à négocier, la réponse des Basques a été catégorique: ils refusent toute négociation. Il est vraiment frappant que Feijóo puisse penser que le PNV va soutenir un candidat allié à quelqu'un qui a l'intention de détruire l'autonomie basque.
Après le refus du PNV, il fait appel à "quelques députés" du PSOE pour qu'ils votent en faveur de son investiture. Curieusement, VOX se dit prêt à soutenir cette option, c'est-à-dire à joindre ses voix à celles des "transfuges" du PSOE, parti qu'il a accusé d'être tout simplement criminel et complice de la branche politique de l'ETA.
Sánchez a plus de possibilités de pactes, mais il a besoin du vote indispensable d'au moins trois députés de JxC, le parti dirigé par Puigdemont depuis son exil à Bruxelles. Il est difficile de prévoir ce que Puigdemont - normalement très éloigné de la sagesse politique - pourrait demander. Mais il est encore plus difficile de savoir si tous ses députés le suivront - car ils sont beaucoup plus "pragmatiques", pour ne pas dire plus. Accepteront-ils de donner leur voix à Sánchez?
Nous suivrons de près les négociations et les sondages qui seront publiés sur l'évolution du vote. Le site Electomanía - qui a été assez précis dans ses prévisions - publie le premier aujourd'hui, annonçant une hausse du PSOE - qui dépasserait le PP - et de SUMAR, et une baisse du PP et de VOX.
Comprendre et assumer le pays que l'on veut gouverner est la première condition pour pouvoir le faire.
18:03 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : espagne, europe, affaires européennes, politique, politique internationale | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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