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jeudi, 17 octobre 2024

Réorientation stratégique: la Turquie en route vers les BRICS

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Réorientation stratégique: la Turquie en route vers les BRICS

Source: https://www.pi-news.net/2024/10/strategische-neuausrichtu...

Erdogan veut être admis dans le groupe des pays BRICS. La Turquie serait le premier pays de l'OTAN à rejoindre cette association de pays émergents dominée par la Russie et la Chine.

Par Elena Fritz

La Turquie a officiellement déposé sa demande d'adhésion aux BRICS, une démarche qui revêt une importance à la fois géopolitique et économique. La décision du président Erdogan de choisir l'alliance des pays émergents (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) comme partenaire potentiel va bien au-delà de la simple politique économique. C'est un refus clair de la domination unilatérale des alliances occidentales comme l'OTAN et l'UE, qui tentent depuis des décennies d'enfermer la Turquie dans un corset de contraintes géopolitiques et économiques. Les BRICS offrent à la Turquie une nouvelle perspective - un ordre mondial multipolaire dans lequel la souveraineté des États est respectée.

Un partenaire insatisfait: la Turquie et l'Occident

Les relations de la Turquie avec l'Occident sont depuis longtemps marquées par des tensions. Membre de l'OTAN depuis 1952, la Turquie, partenaire stratégique de premier plan, a assuré de nombreux intérêts occidentaux dans la région. Néanmoins, Ankara est de plus en plus frustrée par les directives unilatérales des Etats-Unis et de l'alliance occidentale. Les relations avec l'UE s'avèrent tout aussi problématiques. Malgré des décennies de négociations et un accord d'association, l'adhésion à l'Union européenne s'est éloignée pour la Turquie - surtout en raison des réserves culturelles et politiques au sein de l'UE, qui n'accepterait qu'à contrecœur un pays musulman de plus de 85 millions d'habitants comme partenaire à part entière.

Le blocage de l'UE a en outre attisé la frustration du côté turc. Ces dernières années, Erdogan a clairement fait savoir qu'Ankara en avait assez d'être traitée comme une quémandeuse. L'attitude de l'UE, qui refuse d'intégrer pleinement la Turquie malgré son immense importance économique et sécuritaire, a progressivement réorienté le regard d'Ankara vers l'Est. Le tournant stratégique est devenu évident au plus tard en 2019, lorsque la Turquie a acquis le système de défense antimissile russe S-400 - une décision qui a entraîné des sanctions occidentales.

Les BRICS, un coup de pouce stratégique

L'adhésion au groupe des BRICS représente pour la Turquie une véritable alternative à l'OTAN et à l'UE. Alors que les alliances occidentales se révèlent de plus en plus être des puissances hégémoniques qui subordonnent les intérêts nationaux à leurs propres objectifs géopolitiques, les BRICS proposent un modèle basé sur la souveraineté, le respect et l'indépendance économique. Les pays BRICS ne poursuivent pas un agenda doctrinaire, mais recherchent un ordre mondial multipolaire dans lequel des puissances régionales comme la Turquie peuvent suivre leur propre voie.

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Pour Erdogan, l'adhésion aux BRICS est l'occasion d'élargir considérablement la marge de manœuvre de son pays. Les relations économiques avec les pays BRICS se sont déjà renforcées: les importations en provenance de ces pays dépassent celles de l'UE depuis début 2024. Ankara a compris qu'elle pouvait développer non seulement de nouvelles opportunités commerciales, mais aussi des investissements et des partenariats stratégiques avec les économies émergentes des BRICS. L'accès à la « nouvelle banque de développement » (NDB) dirigée par les BRICS offrirait en outre à la Turquie de nouvelles sources de financement, sans les contraintes politiques qu'imposent souvent les institutions occidentales comme le FMI.

La Turquie voit un immense potentiel dans le secteur de l'énergie en particulier. En tant que plaque tournante centrale du gaz entre la Russie, l'Asie centrale et l'Europe, la Turquie pourrait jouer un rôle clé. Aujourd'hui déjà, le « Turkish Stream », un gazoduc important pour le transport du gaz vers l'Europe, passe par le territoire turc. Avec les BRICS, Ankara pourrait renforcer sa position de carrefour énergétique tout en s'affranchissant de la dépendance occidentale en matière de politique énergétique.

Un signe à l'Occident : les frontières de l'OTAN et de l'UE

L'influence occidentale sur la Turquie a atteint ses limites. La Turquie reconnaît que l'OTAN et l'UE n'offrent pas de garanties de souveraineté nationale, mais sont des instruments de l'hégémonie anglo-saxonne. Au sein de l'OTAN, la Turquie a rempli son rôle d'allié fidèle, mais le prix à payer a été élevé : les décisions militaires indépendantes ont été sanctionnées et les intérêts géopolitiques spécifiques ont dû être mis de côté. Il en va de même au sein de l'UE, où la Turquie a toujours été traitée comme un outsider malgré son importance économique et sa position géostratégique. Cette politique de blocage des institutions occidentales a poussé Ankara à se tourner vers de nouvelles options.

L'éventuelle adhésion de la Turquie aux BRICS n'est donc pas seulement une manœuvre tactique. Elle montre qu'Ankara est prête à s'engager sur la voie de l'ordre mondial multipolaire - un ordre mondial qui n'est pas dominé par les Etats-Unis et l'UE, mais par des puissances émergentes qui défendent leur souveraineté nationale. Pour la Turquie, les BRICS offrent l'espace qu'elle n'a jamais obtenu en Occident.

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Les BRICS comme contrepoids à l'hégémonie occidentale

Le groupe BRICS offre bien plus que de simples avantages économiques. Il constitue un contrepoids stratégique à l'hégémonie anglo-saxonne, qui étend de plus en plus sa domination au détriment de la souveraineté des petits Etats. Les Etats-Unis en particulier, qui souhaitent conserver leur pouvoir grâce à l'OTAN et à la domination du dollar, ne sont pas enthousiastes à l'idée d'un ordre mondial multipolaire. Mais pour des pays comme la Turquie, qui en ont assez de la tutelle, les BRICS représentent une véritable alternative - une union basée non pas sur des prétentions hégémoniques, mais sur le respect et le progrès commun.

Erdogan a reconnu ce changement. L'adhésion aux BRICS est plus qu'un simple projet économique ou géopolitique. C'est un engagement clair en faveur d'un monde où la souveraineté et l'indépendance nationales sont primordiales. Un monde dans lequel des Etats comme la Turquie ne sont pas contraints de choisir entre l'Est et l'Ouest, mais peuvent suivre leur propre voie.

Conclusion : la Turquie sur la voie d'une nouvelle ère

La possible adhésion de la Turquie aux BRICS marque le début d'une nouvelle ère pour Ankara. Les BRICS offrent à la Turquie la possibilité de se libérer des entraves des institutions occidentales et de faire partie d'un ordre mondial multipolaire fondé sur le respect et la souveraineté. Alors que l'Occident continue d'essayer de préserver son hégémonie, la Turquie a compris que l'avenir est dans un monde où il n'y a plus de blocs de pouvoir dominants, mais une multitude d'acteurs égaux. L'adhésion de la Turquie aux BRICS n'est pas seulement une nécessité économique, mais un pas vers un ordre international plus juste, dans lequel les intérêts nationaux ne sont pas dictés de l'extérieur.

 

19:46 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, turquie, brics | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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