lundi, 10 mars 2025
Trump, les néocons et l'inversion du projet interventionniste mondialiste
Trump, les néocons et l'inversion du projet interventionniste mondialiste
Donald Trump est en train de revenir sur la politique interventionniste néoconservatrice, estime Frank-Christian Hansel dans son commentaire pour LIBRE. Le président américain offre ainsi à l'Europe une chance d'autonomie en matière de politique de sécurité.
par Frank-Christian Hansel
Source: https://www.freilich-magazin.com/welt/trump-die-neocons-u...
Depuis des années, Donald Trump est présenté par les politiciens mainstream et les médias européens comme un danger pour l'Occident. Sa critique de l'OTAN, son aspiration à une solution diplomatique en Ukraine et son rejet des projets mondialistes sont interprétés comme les preuves d'une volonté de détruire les valeurs de la communauté occidentale. Mais cette présentation méconnaît le véritable cœur de son programme politique, dans l'intérêt également du contribuable américain. Trump ne démantèle pas l'Occident, mais fait marche arrière sur un projet d'intervention néoconservateur qui a impliqué les États-Unis et l'Europe dans diverses guerres. Son objectif n'est pas l'isolationnisme, mais une réorientation pragmatique de la politique américaine, qui offre également à l'Europe une chance historique d'accéder à la souveraineté.
Les néocons et leur projet géopolitique
Le mouvement néoconservateur a marqué la politique étrangère américaine depuis les années 1990. Leur objectif était l'hégémonie incontestée des Etats-Unis, imposée par des interventions militaires ciblées et des changements de régime. La doctrine Wolfowitz de 1992 a fixé l'objectif stratégique d'étouffer dans l'œuf toute concurrence géopolitique. Le Project for the New American Century (PNAC) a exigé une politique d'intervention agressive, qui s'est exprimée dans les guerres en Irak, en Afghanistan et en Libye. L'Ukraine, en particulier, a joué un rôle décisif dans ce processus. Depuis 2014, elle a été systématiquement intégrée dans la sphère d'influence occidentale, le renversement du Maïdan a été activement soutenu, comme le prouvent des documents désormais publiés par l'autorité patronnée par Musk, et le pays a été positionné comme tampon géopolitique contre la Russie. Cette stratégie est l'expression du récit initial, celui du « Heartland » de Halford Mackinder, qui considère le contrôle de l'Europe de l'Est comme la clé de la domination mondiale.
Cette politique d'expansion permanente et de démonstration de force militaire n'a toutefois pas apporté la stabilité, mais la déstabilisation à long terme - et était d'ailleurs tout sauf « basée sur des règles » ! Les conséquences des guerres au Proche-Orient et de la politique de confrontation avec la Russie ont été considérables pour l'Europe: mouvements migratoires, bouleversements économiques et dépendance militaire croissante vis-à-vis des États-Unis.
Trump comme contre-modèle : « America First » au lieu de l'interventionnisme mondial
Dès le début, Trump s'est opposé à cette orientation. Durant son mandat, il a empêché une nouvelle intervention militaire à grande échelle, a retiré les troupes américaines des zones de conflit et a privilégié les négociations plutôt que l'escalade. Sa critique de l'OTAN a souvent été présentée comme une intention malavisée d'affaiblir l'alliance occidentale, alors qu'elle visait à libérer l'Europe de sa dépendance vis-à-vis des États-Unis en matière de politique de sécurité. Son approche était claire: les États-Unis devraient se concentrer sur leurs intérêts nationaux au lieu de mener d'interminables guerres par procuration pour un ordre mondial qui sert avant tout les néocons.
Sa divergence sur la question ukrainienne était et reste particulièrement frappante. Contrairement à l'establishment de la politique étrangère, qui considérait le conflit comme une opportunité géopolitique, Trump a voulu rechercher une solution diplomatique dès 2019. Il a reconnu que la guerre ne pouvait pas prendre fin par des sanctions ou des livraisons d'armes, mais par des négociations qui tiendraient également compte des intérêts de sécurité russes. Cela signifiait toutefois un défi direct à la stratégie néoconservatrice.
La guerre en Ukraine, un test pour les intérêts géopolitiques
Dans ce contexte, la guerre d'Ukraine n'est pas simplement une escalade géopolitique spontanée, mais le résultat d'une stratégie néocon de longue date. Dès 2008, le projet d'élargir l'OTAN à la Géorgie et à l'Ukraine a provoqué des tensions de grande ampleur avec la Russie. Le renversement de Maïdan en 2014 n'était pas seulement un événement interne à l'Ukraine, mais le produit de l'influence occidentale, que la Russie a perçu comme une menace existentielle. La guerre à partir de 2022 - sans que cela puisse être lu comme une justification - était alors la conséquence logique d'un conflit par procuration qui s'était construit au fil des années. Trump reconnaît ce contexte et veut mettre fin à la guerre, non pas par sympathie pour Poutine, mais parce qu'il considère l'escalade comme une impasse stratégique.
C'est justement là que le conflit central entre Trump et l'establishment transatlantique/atlantiste apparaît. Ceux qui ont œuvré depuis des décennies à une confrontation militaire avec la Russie voient Trump comme une menace pour leur ordre géopolitique. Sa diplomatie est stigmatisée comme une trahison, ses efforts de paix sont considérés comme une faiblesse.
Ce n'est pas pour rien qu'il insiste sur le fait que cette guerre n'aurait jamais dû être déclenchée et qu'elle n'aurait pas eu lieu sous son égide. Il ne s'agit pas de valeurs, mais d'intérêts économiques et stratégiques solides. Le complexe militaro-industriel profite d'un conflit durable, et l'Europe, en tant que vassal géopolitique, est manœuvrée dans une situation qui sape sa souveraineté.
La position allemande : prisonnière du récit transatlantique ?
Dans ce débat, l'Allemagne en particulier révèle une désorientation stratégique. L'élite politique à Berlin, en particulier les transatlantiques d'inspiration ouest-allemande, représentés de Merz à Gabriel, continue finalement - qu'ils en soient conscients ou non - à s'accrocher aux concepts de l'ère néocon et à interpréter les bouleversements géopolitiques actuels non pas comme une opportunité de réorientation, mais comme une menace. Au lieu de considérer le cours de Trump comme une possibilité d'émancipation de l'Europe, la politique étrangère allemande s'accroche à une fidélité à une alliance dépassée et à une obéissance aveugle à Washington.
C'est pourquoi l'administration Trump, avec des figures comme Vivek Ramaswamy et Elon Musk, cherche logiquement à dialoguer avec les forces d'opposition aux formations politiques partisanes de l'euro-mondialisme en Europe, notamment avec des mouvements souverainistes comme l'AfD ou avec des personnalités comme Victor Orban. Alors que la politique allemande en place reste ancrée dans le vieux mode de la pensée transatlantique, l'AfD reconnaît la nécessité d'un véritable changement d'époque: s'éloigner de la dépendance militaire et de la gestion géopolitique étrangère pour s'orienter vers une politique européenne autonome en matière de sécurité et d'économie.
La chance géopolitique pour l'Europe: émancipation ou vassalité?
C'est pourtant là que réside la chance. Trump ne détruit pas l'Occident, mais donne à l'Europe la possibilité de s'affranchir de la tutelle des Etats-Unis en matière de politique de sécurité. Si les États-Unis se retirent de leur rôle de puissance protectrice mondiale, cela ne signifie pas l'effondrement de l'Occident, mais la nécessité d'une véritable ré-appropriation européenne. L'Europe pourrait développer une politique de sécurité autonome au lieu de continuer à se soumettre inconditionnellement à la doctrine américaine.
Cette émancipation aurait plusieurs avantages :
- Une plus grande autonomie stratégique: l'Europe pourrait développer sa propre politique de défense sans dépendre en permanence de l'approbation de Washington.
- Un rôle de médiateur diplomatique: une Europe indépendante pourrait servir d'intermédiaire entre les Etats-Unis, la Russie et la Chine, au lieu de se laisser entraîner unilatéralement dans des confrontations géopolitiques.
- Les intérêts économiques avant l'idéologie: l'Europe pourrait mener une politique économique pragmatique qui ne soit pas minée par des sanctions et des guerres commerciales avec de grands acteurs comme la Chine et la Russie.
Au lieu de cela, de nombreux gouvernements européens entendent demeurer dans un état de vassalité, où toute initiative stratégique personnelle est étouffée dans l'œuf. C'est particulièrement visible dans la question ukrainienne: alors que Washington négocie une éventuelle fin de la guerre, les élites européennes continuent d'exiger une escalade à tout prix. Cette myopie pourrait s'avérer fatale si les Etats-Unis entament effectivement un retrait et si l'Europe est confrontée aux conséquences de sa propre dépendance.
Conclusion : Trump comme correctif de l'ordre mondial
Trump ne met pas fin à l'Occident - il donne à l'Europe l'occasion de développer enfin sa propre identité géopolitique. Les années à venir montreront si l'Europe reconnaît les signes du temps ou si elle continue à s'enfermer dans d'anciennes structures de dépendance. Il en va de même pour l'Allemagne, quelle que soit la personne qui la gouvernera à l'avenir.
19:00 Publié dans Actualité, Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, europe, affaires européennes, donald trump, états-unis, otan, atlantisme, politique internationale | |
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