samedi, 31 décembre 2016
Sous les Sabots des poneys sauvages
Sous les Sabots des poneys sauvages
Jean-Pierre Brun
Ex: http://synthesenationale.hautetfort.com
& EuroLibertés cliquez ici
En ce mercredi 29 décembre nous apprenons l’ultime cavalcade du dernier des « Hussards », Michel Déon. Comme le furent les trois mousquetaires de Dumas, ils auraient été prétendument quatre. Mais que vient faire ce « prétendument » dans notre propos ?
Pour des raisons qui nous restent obscures, Bernard Frank avait cru bon de rassembler sous un même étendard Nimier, Blondin et Laurent avant de leur adjoindre un certain Déon. Cette affectation collective à un régiment de tradition devait sans doute énormément au fameux « Hussard Bleu » que l’ami Roger avait troussé en son temps au travers d’un roman on ne peut plus « non conformiste ».
Mais voilà, elle ne reçut jamais pour autant l’aval des intéressés. Certes, un solide dénominateur commun pouvait conforter les tenants d’une mathématique idéologique, mais c’était méconnaître les individualismes trop bien trempés des solistes de ce quatuor improbable.
Il fallut attendre les derniers mois de l’Algérie française pour que le tocsin national les rassemblât autour de Philippe Héduy et du toujours discret Roland Laudenbach, sous la bannière de la revue L’Esprit Public.
Pour le coup, nos francs-tireurs, ayant endossé l’uniforme régimentaire auquel ils devaient indûment une partie de leur réputation, se lancèrent à corps perdu dans la bataille, taillant des croupières aux piétons de l’armée gaullienne.
Alors que d’Artagnan Nimier, Porthos Blondin, Athos Laurent frappaient d’estoc leurs adversaires, Aramis Déon pratiquait une escrime plus subtile qui n’en touchait pas moins au cœur ses cibles préférées. N’est-ce pas lui qui dans ses Poneys sauvages dévoila les turpitudes élyséennes de l’affaire Si Salah ?
Qui se souvient de son perfide Supplément aux voyages de Gulliver et ce saisissant Mégalonose qui estomaqua les critiques littéraires et autres chroniqueurs politiques de l’époque ?
En guise d’adieu à notre frère dans la Résistance, je me contenterai de citer un extrait de cette œuvre qui, hélas !, n’a rien perdu de son actualité : «… Je suis dans l’opposition et je refuse la civilisation inhumaine de mon pays. Si des policiers entraient à cette heure dans ma maison et me voyaient utiliser des lampes à huiles, ils me tortureraient pour me faire avouer un complot contre l’État […] Les lampes à huile et la marine à voile sont des crimes contre le progrès, des atteintes à l’esprit nouveau. Peut-être auriez-vous été condamné seulement aux travaux forcés si l’on s’était aperçu que vous ne vous sépariez pas de la boîte noire qui diffuse à longueur de journée de la musique obsessionnelle et le discours de Mégalonose, parce que la possession de ces boîtes que nous appelons “orteffs” est obligatoire et que tout citoyen conscient et respectueux des lois de son pays doit en avoir une à côté de lui, jour et nuit, prêt à toute éventualité, c’est-à-dire à obéir aux ordres de Mégalonose qui parle deux fois par jour en période de calme et jusqu’à vingt fois en période de guerre… »
Va en paix Michel !, mais là-haut, avec l’aide de ton Saint Patron qui est aussi celui des parachutistes, fais en sorte que tu ne sois pas le dernier des hussards et que, dans un élan invincible, une charge de tes cadets reprenne hardiment et consolide méthodiquement nos positions perdues.
12:31 Publié dans Littérature | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, lettres, lettres françaises, littérature française, michel déon, hommage, poneys sauvages | | del.icio.us | | Digg | Facebook