mardi, 06 février 2018
Lévi-Strauss et l'imperméabilité des cultures
Lévi-Strauss et l'imperméabilité des cultures
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Claude Lévi-Strauss, "dernier géant de la pensée française", mort la semaine dernière, toute la presse, et la Nation entière, ont rendu un hommage justifié. Mais sous les brassées de fleurs, sont apparues (sur Internet, évidemment) quelques disgracieuses mauvaises herbes : en l'occurence, d'étranges phrases sur l'Islam dans "Tristes tropiques", phrases pouvant passer pour islamophobes.
Ecrites aujourd'hui, ces phrases le désigneraient aussitôt à la vindicte. Alors? Quelle mouche a piqué Lévi-Strauss en 1955 ? Est-ce parce qu'il a rédigé son livre-culte, de son aveu même, en état de "fureur", le considérant comme un livre mineur? Ces phrases sont-elles à replacer dans le contexte général d'une aversion de l'ethnologue à l'égard de toutes les religions monothéistes? Et à propos, pourquoi donc l'observateur pionnier des cultures dites "primitives" a-t-il accepté, avec gourmandise, les honneurs surannés de l'Académie ? Pour le dire crûment : le progressiste a-t-il viré réac? Questions naïves, que nous avons souhaité poser naïvement.
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samedi, 19 juin 2010
Minorités et peuples autochtones
Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1996
Minorités et peuples autochtones
N. Rouland, S. Pierre-Caps et J. Poumarède sont les auteurs d'un remarquable Droit des minorités et des peuples autochtones aux PUF. Citons un passage de l'introduction: «Aujourd'hui, les droits de l'Homme font figure de nouvel universalisme: certains droits se retrouvent en tout homme, ce qui fonde partout l'obligation des Etats à les respecter et permettre leur épanouissement. Cette auto-limitation de la puissance souveraine caractériserait particulièrement les Etats de droit. Nourrie par la tradition française, cette aspiration se heurte à plusieurs obstacles. Tout d'abord le constat d'une autre universalité: celle du mal que l'homme peut infliger à ses semblables. Longtemps on voulut tout expliquer par la démesure de l'Occident et les méfaits du colonialisme. Mais en notre siècle, nous savons depuis les génocides du Cambodge et du Rwanda que l'horreur (au Rwanda, on crucifia des enfants) est possible partout, en dépit des religions et philosophies basées sur l'amour du prochain (le Rwanda est majoritairement chrétien) et la compassion (le Cambodge est bouddhiste). Ensuite, cette idéologie universaliste n'est pas universelle. Passe encore que dictatures et régimes autoritaires invoquent la différence “culturelle” pour tenir à distance les droits de leurs peuples: cette fausse monnaie intellectuelle pèse peu de poids. Mais il y a plus sérieux. Comme l'écrit C. Lévi-Strauss: “Les grandes déclarations des droits de l'homme ont, elles aussi, cette force et cette faiblesse d'annoncer un idéal trop souvent oublieux du fait que l'homme ne réalise pas sa nature dans une humanité abstraite, mais dans des cultures traditionnelles où les changements les plus révolutionnaires laissent subsister des pans entiers et s'expliquent eux-mêmes en fonction d'une situation strictement définie dans le temps et l'espace”. L'unité de l'homme, en laquelle croira volontiers tout anthropologue, s'il est fidèle à la qualification de sa discipline (anthropologie signifie discours sur l'Homme dans sa généralité), ne peut apparaître qu'au prix d'une navigation difficile entre deux écueils. Celui de l'uniformité: reconnaître que tous les hommes sont égaux ne postule pas qu'ils soient partout identiques; l'assimilation peut provoquer les fermetures identitaires qu'elle cherche à éviter (nous verrons que l'Etat-nation est une matrice de minorités). Celui de l'hétérogénéité: l'autonomie reconnue aux spécificités culturelles ne peut-être que relative, surtout dans un monde vibrant des flux migratoires. Exacerbée, elle conduit aux conflits, et réintroduit l'inégalité et l'oppression sous le masque du droit à la différence. Le monde n'est pas devenu le village global cher à Mac Luhan. A sa place apparaît un archipel planétaire: qui veut y naviguer doit en suivre les détroits. Le présent ouvrage convie à ce voyage».
Pierre MONTHÉLIE.
N. ROULAND, S. PIERRÉ-CAPS, J. POUMAREDE, Droit des minorités et des peuples autochtones, PUF, 1996, 584 p., 198 FF.
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