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samedi, 23 mai 2009

Entretien avec Sanchez Pascual, traducteur espagnol d'Ernst Jünger

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Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1990

 

Entrevue avec Sánchez Pascual

 

 

«Jünger entrera dans l'histoire comme «L'Insubornable»

 

Andrés Sánchez Pascual est suffisamment connu  que pour en tracer ici le profil. Professeur de philosophie à l'Université de Barcelone, ses traductions (surtout celles de Nietzsche, et maintenant celles de Jünger) lui confèrent un critère de premier niveau à l'heure de comprendre la culture allemande. Personne mieux que lui, par conséquent, ne pourra nous parler de l'un de ses représentants les plus illustres: l'auteur de »Tempêtes d'acier».

 

PUNTO Y COMA.- Il n'est pas fréquent qu'un traducteur atteigne la notoriété publique. Cependant, les versions en castillan que vous avez faites de l'œuvre de Nietzsche vous ont acquis l'admiration générale. Quelle a été votre attitude face à l'œuvre nietzschéenne?

 

SANCHEZ PASCUAL.- L'expérience, une expérience très précoce dans ma vie m'a convaincu qu'il n'est pas possible de bien«lire» —Ce que j'appelle bien «lire»— un texte, et encore moins un texte philosophique, sans le «traduire» de quelque manière que ce soit, c'est-à-dire sans le réécrire. Voilà, je crois, le sens de ma profession en ce qui concerne les texte de Nietzsche.

 

PUNTO Y COMA.- Qu'a signifié pour vous le passage de Nietzsche à Jünger? Voyez-vous des ressemblances entre les deux auteurs?

 

SANCHEZ PASCUAL.- En réalité, ma «rencontre» avec Ernst JÜnger ne «suit» pas une étape «Nietzsche». Voilà de très nombreuses années que Jünger est l'un de mes auteurs de chevet. Quant au texte en lui-même, Nietzsche a beaucoup influencé Ernst Jünger, même les nuances de l'écriture. «Passer» de l'un à l'autre, c'est demeurer dans une atmosphère fort similaire.

 

PUNTO Y COMA.- Pour quelle facette d'Ernst Jünger éprouvez-vous le plus d'attirance?

 

SANCHEZ PASCUAL.- D'abord, l'auteur des Carnets, le mémorialiste. Ensuite, l'écrivain de livres de voyages.

 

PUNTO Y COMA.- Dans «Tempête d'acier» Jünger a soumis le texte a des révisions diverses et continuelles. Pourriez-vous nous dire si, dans d'autres œuvres fortemennt liées à l'esprit du temps où elles furent écrites, comme par exemple «Le travailleur», l'auteur a introduit des modifications?

 

SANCHEZ PASCUAL.- Les auteurs ont coutume d'adopter l'une de ces deux attitudes envers leurs textes: ou bien ils considèrent qu'ils sont terminés et déjà loin de leurs vies —et donc intouchables—, ou bien ils les réécrivent continuellement. Ernst Jünger ressemble plus aux seconds. Il lui est arrivé de retoucher ses textes afin de les rendre hermétiques pour la mode du temps. C'est ce qui est arrivé avec «Tempête d'acier» et à ce sujet, je crois en avoir assez dit dans la note préléminaire à la récente traduction espagnole de cette œuvre. Dans d'autres cas —par exemple, «Le travailleur»—, il préfère laisser le texte tel quel, en tant que témoignage historique. De toute façon, Jünger a ajouté un appendice très important à l'édition du livre «Le travailleur» dans ses Œuvres Complètes. Mais, comme je dis, il n'a pas touché au texte du livre.

 

PUNTO Y COMA.- Aujourd'hui Jünger est un auteur qui jouit d'un grand prestige. Pensez-vous qu'il pourrait devenir à la mode? Quel rôle attribuez-vous à Jünger au sein de la culture européenne contemporaine?

 

SANCHEZ PASCUAL.- D'après moi, Ernst Jünger n'est pas précisément un auteur à la mode; mais peut-être, un auteur anti-mode. On pourrait composer un gros volume rien qu'avec les insultes lancées à Ernst Jünger par les Allemands eux-mêmes. Son prestige, oui, est immense. Et il le restera. Je pense qu'il restera au sein de la culture européenne, comme «L'Auteur impossible à suborner».

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