jeudi, 22 novembre 2018
Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe
Afghanistan. Guerre américaine ou paix russe
par Jean-Paul Baquiast
Ex: http://www.europesolidaire.eu
L'on se souvient qu'en 1979 les troupes soviétiques, dans le cadre des accords de défense mutuelle qui liaient l'URSS à l'État afghan, ont répondu à l'appel du parti communiste au pouvoir, menacé par une rébellion armée.
Cette intervention a entraîné une forte résistance des rebelles, armés par les Etats-Unis, qui conduira après une longue guerre au retrait des forces soviétiques en 1989. En 1996, un gouvernement nationaliste islamique, dit des taliban avait pris le pouvoir. Il en a été chassé par une coalition internationale conduite par les Etats-Unis.
En 2004, le pays est devenu une république islamique de type présidentiel. Elle est encore très largement contrôlé par Washington, qui y a établi des bases militaires importantes. Mais l'opposition nationaliste islamique demeure partout présente. Elle dispose de moyens militaires non négligeable, vraisemblablement fournis par l'Iran. Elle aussi continue à revendiquer l'appellation de taliban. La présence militaire des Etats-Unis y est rendue de plus en plus difficile.
Cependant, ceux-ci n'entendent pas abandonner leur actuelle position dominante dans l'Afghanistan urbaine. Pour eux, l'Afghanistan dispose d'un intérêt stratégique essentiel, dans la perspective de la lutte qu'ils entendent encore mener contre la Russie. Géographiquement, elle dispose de frontières communes avec le Pakistan, le Tadjikistan et des autres Etats d'Asie centrale voisins de la Russie.
De plus elle possède des ressources naturelles considérables, encore mal exploitées. Pour Washington, s'y établir avec des implantations militaires durables permet à la fois de continuer à menacer la Russie actuelle et d'espérer pouvoir bénéficier à terme des perspectives économiques du pays.
Malheureusement pour eux, l'opposition que l'on continue d'imputer aux seuls taliban, se fait de plus en plus forte et impossible à contenir. On se souviendra que l'armée américaine avait lancé il y a quelques années contre eux une bombe classique présentée comme aussi puissante que la bombe Hiroshima, sans autres effets que tuer des civils.
L'élément nouveau que doit désormais prendre en compte Washington est le retour de la Russie. Mais celle-ci le fait non militairement mais diplomatiquement, avec un succès croissant. Moscou affirme qu'il ne cherche pas à substituer en Afghanistan l'influence russe à celle des Etats-Unis. Il dit vouloir seulement vouloir intervenir pour qu'une présence américaine reste compatible avec une influence russe pacifique, dans le cadre d'un complet accord tant du gouvernement de Kaboul que des taliban.
Conférence de Moscou
A cette fin, la Russie avait organisé avait organisé à Moscou une conférence de paix le 9 novembre, à laquelle ont participé notamment la Chine, l'Iran, le Pakistan, le Tadjikistan, l'Ouzbékistan et le Turkménistan. Une délégation de cinq membres, conduite par Sher Mohammad Abbas Stanakzaï, chef du conseil politique des taliban au Qatar, s'était rendu dans la capitale russe.Le gouvernement afghan, sous la pression américaine, n'y a pas été présent. Mais il a envoyé à Moscou des membres du Haut Conseil pour la paix, un organisme afghan chargé de superviser les efforts en vue de parvenir à un règlement politique du conflit. Bien évidemment, Washington avait refusé l'invitation.
La conférence de Moscou a été présentée par les Occidentaux comme un échec. Il est évident qu'il n'en est pas ressorti un accord pour une cessation immédiate des hostilités. Mais Moscou a fait admettre que tour accord de paix devrait dorénavant résulter d'une démarche commune américano-russe en ce sens. On peut penser que Donald Trump se ralliera à cette perspective, si du moins il peut l'imposer au Pentagone. Il s'était fait officieusement représenté à Kaboul par un envoyé spécial, Zalmay Khalilzad 1) diplomate américain connaissant bien l''Afghanistan où il semble avoir des intérêts personnels. Il y a retrouvé Zamir Kabulov, diplomate russe exerçant les fonctions d'envoyé spécial en Afghanistan, qu'il connaît lui-même très bien. 2)
Or pour Moscou et sans doute aussi pour les taliban et même le gouvernement de Kaboul la conférence du 9 novembre a été un succès. On lira ici sa déclaration. 3)
Reste à savoir quelle sera la réaction de Donald Trump. Se résignera-t-il à admettre une présence diplomatique américaine et russe conjointe en Afghanistan, ou cédera-t-il aux pressions du lobby militaro-industriel américain pour poursuivre la guerre. On peut penser qu'il choisira la première solution, au vu de l'hostilité grandissante des électeurs américains à l poursuite d'une guerre dont ils voient les coûts grandissants, y compris en termes de pertes humains, pour des avantages qui leur paraissent de plus en plus lointains.
Macron devrait en tous cas se rapprocher de la position de Moscou, s'il entendait comme il le dit voir la France continuer à jouer un certain rôle au Moyen Orient et en Asie centrale.
1) https://en.wikipedia.org/wiki/Zalmay_Khalilzad,
2) https://en.wikipedia.org/wiki/Zamir_Kabulov
3) https://actualite-news.com/fr/international/asie/6901-la-...
00:24 Publié dans Actualité, Géopolitique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : asie, affaires asiatiques, politique internationale, géopolitique, afghanistan, états-unis, russie | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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