Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

vendredi, 03 juin 2022

Remarques sur la prolétarisation des millionnaires aux USA et ailleurs

0C8E6222-3B6A-4741-B75F-E95439D40B62.jpeg

Remarques sur la prolétarisation des millionnaires aux USA et ailleurs

Nicolas Bonnal

Poignez vilain, il vous oindra.

Zerohedge.com reprend Bloomberg qui pleurniche sur le sort des millionnaires. On peut ainsi gagner 250.000 dollars (autant en euros, bientôt le double) et ne plus joindre les deux bouts. 250.000 dollars c’est un million et demi de francs tout de même (rappel à ceux qui n’ont pas la mémoire du poisson rouge). Il fut un temps où gagner cent mille francs par mois vous faisait considérer comme riche et vivre une vie de footballeur : aujourd’hui cela permet à peine de joindre les deux bouts. Le coût de la vie et du logement, les impôts, l’éducation, les frais médicaux, tout désintègre le niveau de vie.

Tyler Durden donc le 3 juin dernier : « 36 % des Américains qui gagnent 250.000 $ vivent d'un chèque de paie à l'autre… Plus d'un tiers des Américains qui gagnent au moins 250.000 dollars par an disent qu'ils vivent d'un chèque de paie à l'autre, ce que Bloomberg suggère de souligner à quel point l'inflation "prend une plus grande part dans les budgets des Américains à toutes les extrémités de l'éventail des salaires". » Certes les boomers, les inévitables boomers, qui ont pu ou su acheter leur immobilier à temps s’en sortent mieux que les milléniaux, même s’ils commencent à toussoter eux aussi.

Après on invoque l’idiotie des gens, en se foutant du monde et du lectorat économique et financier, ce qui est typique de Bloomberg et de cette presse économique et financière qui s’est toujours adressée à des cadres-ilotes:

« Une autre interprétation est que les Américains gagnent au moins 250.000 $ - ce qui les place dans les 5% des mieux rémunérés du pays - ont une culture financière épouvantable. »

Mais voyons les data :

« Selon une enquête réalisée par Pymnts.com et LendingClub, quelque 36 % des ménages qui gagnent au moins 250.000 $ - près de 4 fois le salaire médian américain - consacrent la quasi-totalité de leurs revenus aux dépenses du ménage. Les ménages à revenu élevé sont également plus susceptibles d'effectuer des dépenses par carte de crédit, bien qu'ils soient également plus susceptibles d'être en mesure de rembourser intégralement leur solde. »

L’immobilier a augmenté de 30 ou 50% :

« Les dépenses de logement, qui occupent généralement une grande partie du budget des personnes les plus riches, ont grimpé en flèche pendant la pandémie. Par exemple, dans le comté d'Orange, en Californie, une maison de premier plan a coûté 1,7 million de dollars en avril, contre 1,2 million de dollars en février 2020, sur la base des données de Zillow Group Inc. Une hypothèque sur cette maison, en supposant un acompte de 20 %, coûterait environ 100.000 $ par année. C'est 40 % d'un revenu annuel avant impôt de 250.000 $. »

Ces hauts revenus souffrent moins que le reste bien entendu :

« Les hauts revenus, même ceux qui ont du mal à payer les factures, sont bien sûr bien mieux lotis que le reste de la nation, qui fait face à une flambée des prix pour tout, de la nourriture au gaz et à l’électricité (Bloomberg). »

Tout le monde vit à crédit alors (c’est nouveau ça en Amérique, Bloomberg ?) :

« Outre les hauts revenus, 61,3% de tous les consommateurs interrogés ont déclaré vivre d'un chèque de paie à l'autre, en hausse de 9% par rapport à l'année précédente, alors que les emprunts à la consommation aux États-Unis ont grimpé en flèche. En mars, les soldes des cartes de crédit ont atteint leur plus haut niveau jamais enregistré, et le crédit non renouvelable a également bondi. »

La retraite s’éloigne alors dans le temps comme en France (avec l’assentiment extatique des boomers) :

« Pendant ce temps, 25% des Américains retardent leur retraite en raison de l'inflation, selon une nouvelle enquête de BMO. Le report des plans de retraite est principalement dû à une épargne perturbée par la hausse des prix, selon l'enquête. Trente-six pour cent des répondants au sondage ont réduit leur épargne et 21 % mettent moins de côté pour leur retraite afin de faire face à la croissance des coûts, selon le sondage. »

iminlfusaage.jpg

Les crétins comme on sait pensent que l’inflation va ralentir alors que l’on multiplie les sanctions contre la Russie et que l’on met en place pénuries et Reset :

« Nous n'avons pas vu ce niveau d'inflation depuis très longtemps, et c'est très intimidant", a déclaré Paul Dilda, responsable de la stratégie des consommateurs chez BMO Harris Bank, qui a ajouté que de nombreuses personnes à la retraite ou proches de la retraite ne l'ont pas fait compte tenu de la flambée des dépenses. »

Les jeunes sont là pour déguster :

« L'inflation a le plus touché les jeunes Américains - avec plus de 60% des personnes âgées de 18 à 34 ans déclarant qu'elles ont dû réduire leurs cotisations d'épargne afin de compenser la hausse des coûts. »

La solution ? Moins vivre bien entendu :

« Que font les gens pour lutter contre l'inflation ? Les Américains mangent moins au restaurant, font plus attention au magasin, conduisent moins et annulent ou dépensent moins en vacances. »

Et le texte de conclure qu’il faut enseigner la culture économique et financière : c’est ce qu’on fait depuis deux siècles (Thoreau en parle dans son premier et long chapitre de Walden), avec les résultats que l’on sait, prophétisés par Thoreau : quiet desperation.

Les études à trente ou quarante mille euros par an n’aident pas les parents non plus et j’ai des amis chauffeurs de taxi dans mon bled qui travaillent toutes les nuits pour payer les études de droit de leurs filles (l’aînée veut devenir juge féministe).  Bref le cauchemar économiste voulu de A à Z par Macron-Biden-Davos est mis en place, accepté par des populations hébétées qui feront ce qu’il faut pour (sans rire) faire plier la Russie. L’inflation prodigieuse masquée par l’arrivée de l’euro et les instituts économiques et financiers est vieille de deux bonnes décennies. Faites le calcul pour rire. Le plouc moyen a perdu 56.000 euros depuis vingt-cinq ans, vient-on d’apprendre, en fait beaucoup plus.

Quelques données personnelles: j’ai un copain italien millionnaire à Monaco qui m’a dit avant la mise en place du Reset (pardon, avant l’épidémie) qu’il ne se considérait plus comme riche, mais comme faisant partie de la classe moyenne supérieure. Aujourd’hui un riche à Monaco (pour six millions d’euros vous avez un 100 m2), vit comme un petit-bourgeois alors que jadis –revoyez vos Guitry -  il avait un hôtel particulier (trente ou cinquante millions maintenant), un butler et un chauffeur. Pour vivre comme un milliardaire en anciens francs il faut être un milliardaire en euros, c’est-à-dire être un oligarque du vaccin, de la bourse ou de la surveillance informatique capitaliste (lisez le livre de Shoshana Zuzoff).

canva-photo-editor-8.png

Tout ceci pour dire que le cauchemar dystopique prévu par Dick dans ses visions ou par les films de SF est mis en place et qu’il frappe de plus en plus de monde. La solution ? Voter Macron ou Mélenchon aux législatives comme vont le faire 80% de nos Français; revoter Biden et raser la Russie.

Et surtout ne vous étonnez de rien : Nietzsche explique dans la Volonté de puissance que chez le petit peuple l’appétit vient en mangeant (§154) ; ils le lui coupent donc cet appétit. Et la liquidation du « useless eater » de nos « élites hostiles » se passera comme à la parade.

Sources :

https://www.zerohedge.com/political/36-americans-making-2...

https://www.amazon.fr/DANS-GUEULE-BETE-LAPOCALYPSE-MONDIA...

https://www.amazon.fr/Philip-Kindred-Dick-grand-reset-ebo...

https://www.tf1.fr/tmc/quotidien-avec-yann-barthes/videos...

https://www.amazon.fr/THOREAU-WALDEN-CRISE-MODERNE-LOGEME...

https://www.amazon.fr/L%C3%A2ge-capitalisme-surveillance-...

https://www.dedefensa.org/article/benjamin-griveaux-et-le...

http://www.thule-italia.net/sitofrancese/Libri/Nietzsche....

 

19:22 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, inflation, états-unis | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

La fonction sociale de l'utopie

954px-2010_Utopien_arche04.jpg

La fonction sociale de l'utopie

Par Israel Lira

Source: https://grupominerva.com.ar/2022/06/israel_lira-funcion_social_de_la_utopia/

Dina Picotti (2016), en prenant Ricœur (1984) comme référence, réaffirme le fait que l'imaginaire social se manifeste, c'est-à-dire s'exprime à travers deux fonctions essentielles et spécifiques, l'une étant l'idéologie et l'autre l'utopie. On nous dit aussi que ces deux catégories se sont développées à leur tour avec une diversité de nuances, qui développent généralement une variété d'autres significations qui, selon l'approche, ont servi à justifier ou à dénigrer, à construire ou à détruire, à légitimer ou à déformer, etc. En d'autres termes, l'approche selon laquelle elles ont été cultivées a été un facteur déterminant dans le fait que ces récits sociaux ont eu un résultat positif ou négatif dans l'histoire humaine. Mais nous ne pouvons pas éluder le fait que, sans préjudice de ces conséquences bénignes ou pernicieuses, ce sont justement ces productions sociales qui ont eu un effet positif ou négatif sur l'histoire humaine; ces productions sociales sont celles qui ont déterminé de manière décisive, un avant et un après, elles ont été un élément perturbateur du développement social, et, pour cette raison, elles ont été cruciales dans notre manière de nous situer dans l'histoire, et nous ajouterions dans notre manière d'interpréter et de comprendre notre place dans l'histoire.

En ce qui concerne l'idéologie, nous dirons qu'il existe deux formes de sa manifestation sur le terrain gnoséologique: l'idéologie comme fausse conscience, et l'idéologie comme vraie conscience. Cette dernière tente de contribuer fidèlement à l'amélioration de la réalité qu'elle vient à représenter; donc, l'idéologie étant un système de jugements de valeur et de déclarations d'objectifs (Bunge, 2013), elle utilisera une variété d'outils méthodologiques pour mieux structurer ce système. Alors que l'idéologie, en tant que fausse conscience, tend à déformer la réalité pour l'adapter à ses principes; c'est là le sens péjoratif de l'idéologie que nous connaissons tous. Eh bien, il était nécessaire de revoir brièvement la conceptualisation de l'idéologie, étant donné que l'utopie nous est montrée dans sa relation à l'idéologie de manière contrastée, dans le sens suivant :

"...la fonction de l'"utopie" est de projeter l'imagination hors du réel, dans un dehors qui est aussi un "nul part" sans temps (une uchronie). Sa fonction se révèle ainsi complémentaire de celle de l'idéologie: si cette dernière préserve et conserve la réalité, l'utopie la remet en question. C'est un exercice d'imagination que de penser à une autre manière d'être socialement, que l'histoire des utopies a revendiqué dans tous les domaines de la vie en société : d'autres modes d'existence de la famille, de l'économie, de la politique, de la religion, etc., produisant aussi des projets opposés les uns aux autres car l'ordre a beaucoup de contraires. L'utopie est donc la réponse la plus radicale à la fonction intégratrice de l'idéologie. Si la fonction centrale de l'idéologie est la légitimation de l'autorité, l'utopie remet en question une manière d'exercer le pouvoir ; en prétendant être une eschatologie réalisée de ce que le christianisme place à la fin de l'histoire" (Picotti, 2016 : 40).

Nonobstant ce qui précède, il convient d'apporter quelques précisions à la référence susmentionnée de Dina Picotti, dans le sens où, si l'une des facettes de l'idéologie (par exemple les idéologies sociopolitiques telles que le libéralisme, le socialisme marxiste et le fascisme) est, comme elle l'est effectivement, la production et la légitimation des relations de pouvoir, c'est aussi l'idéologie qui sert à remettre en question un pouvoir établi. Si l'idéologie, en ce sens, remet aussi en question un ordre des choses et signifie aussi imaginer d'autres manières d'être social, qu'est-ce qui la différencie de l'utopie ? Où s'arrête l'idéologie et où commence l'utopie ? À cet égard, nous considérons que lorsque l'idéologique dépasse ses limites, c'est-à-dire les limites de ce qui est réel, de ce qui est faisable, de ce qui est possible, nous pouvons avoir deux scénarios possibles : (i) nous entrons dans le domaine de l'idéologie en tant que fausse conscience ; ou (ii) nous entrons dans l'espace de l'utopie.

4be5b58a4ef414052baaec952fde79c5.jpg

L'utopie est présente dans l'humanité depuis que l'on recense des œuvres écrites, notamment avec La République, dont le Socrate platonicien a servi de base à l'Utopie de Thomas More (1516), à qui l'on attribue la création du néologisme.

Si dans l'idéologie nous avons des visions réalistes du changement social, l'utopie exprime la panacée ultra-romantique de l'épanouissement humain maximal. Et le mot même d'utopie, " ... renvoie à un aspect fondamental de l'essence humaine, le domaine de la création imaginative, qui transcende toujours la réalité et lui permet de s'orienter, de se projeter et d'atteindre d'autres possibilités, comme ouvertes par son esprit à tout ce qui est, comme l'affirmait déjà Aristote " (Picotti, 2016 : 38).

Le continent américain n'est pas étranger aux utopies ; au contraire, ce sont les utopies qui ont toujours guidé les processus historiques d'émancipation et de libération nationale, par exemple l'idéal de la Patria Grande, "...le principe de l'unité du continent est l'un des leitmotivs du discours utopique latino-américain" (Aínsa, F. 2010).

Cependant, tout comme il existe des utopies sociopolitiques (la paix mondiale entre les nations pour les pacifistes ou l'empire universel pour les autoritaires), des utopies économiques (l'abolition des classes sociales pour les socialistes marxistes ou le libre marché pour les libéraux et les libertaires) et des utopies religieuses (le règne social du Christ pour les catholiques ou l'unification du christianisme mondial pour les millénaristes), il existe également des utopies scientifiques, l'une de ces dernières (la conquête de l'espace) étant celle qui a donné une grande impulsion à l'ère de l'exploration du Cosmos.

Au vu de ce qui précède, nous considérons que la fonction sociale de l'utopie est clairement exposée. L'utopie sert à établir une direction idéale en tant que récit imaginatif susceptible de s'incarner dans un temps indéterminé, ou comme le dirait Fernando Birri (1986) :

"Elle est à l'horizon. Je m'approche de deux pas, elle s'éloigne de deux pas. Je fais dix pas et l'horizon se déplace dix pas plus loin dans cette direction. J'ai beau marcher, je ne l'atteindrai jamais. À quoi sert Utopia ? A ça: à marcher.

416380feaabaca9903568938e94777e2.jpg

19:08 Publié dans Définitions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : définition, utopie, israel lira, philosophie, idéologie | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Soros et la fermeture hermétique de la "société ouverte"

george-soros.jpg

Soros et la fermeture hermétique de la "société ouverte"

par Carlo Primerano

Source : Ricognizione & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/soros-la-chiusura-ermetica-della-societa-aperta

Lorsque nous évaluons les bouleversements qui se produisent dans notre société et qui sont devenus soudainement si évidents, nous nous retrouvons souvent à en tenir quelques noms pour responsables, toujours les mêmes. Bien que cela ne satisfasse pas entièrement notre désir de compréhension et se prête au risque de simplifier à l'excès la réalité, il ne fait aucun doute que l'action visible par laquelle les individus exercent leur pouvoir est le miroir à travers lequel nous pouvons tenter d'identifier les lieux où nous mènent les forces mystérieuses qui guident le cours des événements.

Roberto Pecchioli, dans son dernier ouvrage George Soros and the Open Society (Arianna editrice, 256 pages, euro 18.90), nous présente l'un de ces hommes, l'un des oligarques les plus puissants et les plus controversés de la planète, capable d'influencer les politiques de pays importants, dont l'Italie, grâce aux énormes ressources financières qu'il a investies.

Pecchioli documente méticuleusement tout ce que l'on associe généralement à la figure de l'oligarque hongrois: les spéculations financières au détriment des nations, le soutien apporté aux mouvements populaires massifs d'aujourd'hui, celui qui a contribué à la libéralisation des drogues douces, l'ingérence dans les changements de gouvernement de certains États, la similitude de ses programmes avec ceux de l'agenda 2030, et plus encore.

imrpgsages.png

La richesse des données et des informations fournies par ce livre peut donc être d'une aide considérable pour ceux qui souhaitent commencer à comprendre ce qui se cache derrière les événements les plus marquants de ces dernières années et les choix politiques de certains gouvernements. Par exemple, face à l'incrédulité de ceux qui ne voient pas que le phénomène de la soi-disant immigration n'est pas principalement dû à la fuite de ceux qui fuient la guerre dans leur pays d'origine, mais qu'il s'agit d'un mouvement organisé de réorganisation du monde sur de nouvelles bases culturelles, sociales et économiques, nous pourrons montrer les sommes considérables allouées dans les budgets des Fondations Open Society à des activités de soutien aux immigrants et au financement d'ONG sillonnant la Méditerranée.

L'immigration n'est qu'un des aspects dont s'occupe Soros et que Pecchioli analyse en détail dans son article. Le financier d'origine hongroise est présent avec ses contributions financières et sa "pensée" dans toutes les questions principales mises à l'ordre du jour pour la réalisation du nouvel homme prochain, disons, du trans-homme: le changement climatique, l'économie verte, la théorie du genre, les droits à la protection de la soi-disant "santé reproductive" et, bien sûr, les pandémies et la gouvernance qui y est associée. Grâce à la peur suscitée, la transition, explique Pecchioli, "de l'ordre naturel (et culturel) à l'ordre numérique" a été accélérée, "quoi qu'il en coûte en termes de liberté et de modification radicale de la vie, c'est-à-dire des changements anthropologiques irréversibles".

Toutes ces questions sont liées dans une relation de synergie qui est parfaitement fonctionnelle au travail de démantèlement des ganglions fondamentaux de la société telle que nous l'avons connue jusqu'à présent, et l'un des mérites du livre dont nous parlons est précisément de mettre en lumière sa cohérence "philosophique" substantielle.

La nouvelle société planifiée est décrite par Roberto Pecchioli comme "un monde liquide, dépourvu d'histoire et de caractère, dans lequel les individus ne vivent que pour eux-mêmes, sans appartenance, complètement étrangers à tout afflatus spirituel". Mais derrière la construction de ce monde un postulat idéologique, une idée anoblissante se cache-t-il ?

Pecchioli, en racontant la vie et l'éducation du jeune Soros, explique que toutes ses actions, les spéculations financières contre la lire et la livre sterling, l'énorme financement d'associations en faveur de l'avortement, l'encouragement aux changements de régime, ou au moins, dans les pays les plus résistants, à l'instigation de changements d'esprit progressifs, ont toutes été réalisées pour promouvoir la soi-disant société ouverte dont le principal théoricien était le philosophe autrichien Karl Popper, généralement considéré de manière irréfléchie comme un véritable défenseur de la liberté et de la démocratie.

soros-obama-puppet.jpg

Selon Popper, que cite Pecchioli, "la société ouverte est ouverte à autant d'idées et d'idéaux différents, et peut-être contradictoires, que possible. Mais, sous peine de s'auto-dissoudre, elle n'est pas "ouverte" à tout le monde: la société ouverte est fermée aux intolérants (...) la société ouverte est fondée sur la sauvegarde des libertés de ses membres, à travers des institutions capables de se corriger, ouvertes à la critique rationnelle et aux propositions de réforme". Si nécessaire, la société ouverte doit être défendue contre ce que l'on appelle "l'esprit de groupe perdu du tribalisme".

Nous ne nous étendrons pas ici sur les mérites de la théorie de Popper elle-même, qui contient en elle-même des apories et des contradictions que Pecchioli signale bien. Des contradictions évidentes ressortent de la comparaison entre l'idée de liberté et de démocratie, dans les mots défendus par Soros, et ses actions politiques concrètes.

Par exemple, on peut croire que les spéculations financières menées au détriment de pays comme l'Italie, l'Angleterre, la France, le Japon, pour ne citer que les principaux, ont été faites au nom de la "lutte acharnée contre les Etats-nations, bastions de la société fermée à démolir". Que ce combat est mené pour défendre le principe de subsidiarité et la conviction que "les décisions sont prises au niveau le plus bas possible". Cependant, note Pecchioli, comment concilier cela avec le désir de "déléguer tout le pouvoir à des organismes mondiaux, c'est-à-dire de centraliser les pouvoirs de décision, ce qui, dans une perspective poppérienne, revient à reproposer la société fermée sous un autre nom".

A travers des arguments précis, avec également des références culturelles à des penseurs qu'après avoir lu nous ressentons la curiosité d'approfondir, Pecchioli montre que la société ouverte conçue par Soros est en tout point semblable à la société liquide décrite par Zygmunt Bauman, dans laquelle "la seule constante est le changement et la seule certitude est l'incertitude. (...) La société ouverte est un monde liquide, dépourvu d'histoire ou de caractère, dans lequel les individus ne vivent que pour eux-mêmes, sans appartenance, complètement éloignés de tout afflatus spirituel".

En conclusion, nous pouvons dire que le livre de Roberto Pecchioli est un outil précieux pour la compréhension des événements qui se déroulent dans notre conjoncture historique, un ouvrage écrit avec soin qui rapporte les faits de manière objective, voire prudente dans certains passages. Nous ne sommes pas certains que cela suffira pour éviter l'accusation de complot de la part de ceux qui ne veulent pas entendre, comme on sait que les pires sourds le font.

La volonté d'impuissance

impuissance-apprise-comment-induire-la-résignation-ressources-plurielles.jpg

La volonté d'impuissance

par Pier Paolo Dal Monte

Source : Frontiere & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-volonta-d-impotenza

Les pays qui font partie du soi-disant "monde libre" (ceux qui exportent la démocratie, pour être précis) ont récemment été le théâtre d'une expérience sociale d'une ampleur sans précédent. L'avènement de la soi-disant "pandémie" a fourni l'excuse parfaite pour développer et mettre en œuvre des restrictions aux libertés personnelles et sociales, qui, jusqu'à récemment, étaient considérées comme allant de soi et inscrites dans les différents systèmes constitutionnels. Parallèlement, la technologie étant neutre (rions...), on a développé des dispositifs de contrôle qui ont le potentiel de constituer, à toutes fins utiles, une prison virtuelle pour les citoyens, dont les avertissements se sont manifestés dans l'état d'exception permanent qui a été instauré au cours des deux dernières années.

Cette situation ne semble pas pouvoir être modifiée par les instruments politiques dont disposent les démocraties parlementaires. Étant donné le caractère autoritaire incontestable que le système a pris, on entend de plus en plus souvent des comparaisons de ces types de despotisme technocratique avec d'autres régimes du passé, c'est-à-dire avec ce que l'on a appelé de manière un peu simpliste les "totalitarismes".

C'est l'héritage de cette sotte herméneutique, consistant en un raisonnement comparatif, selon lequel, tout phénomène pour lequel il n'existe pas de description immédiate, doit nécessairement être ramené dans un cadre lexical connu et, par conséquent, comparé à quelque chose de connu ou, comme dans ce cas, identifié ou, en ce qui concerne les phénomènes historiques, à quelque chose qui s'est déjà produit.

Comme nous l'avons écrit dans un article précédent, l'histoire ne connaît pas de retour en arrière et, par conséquent, toute comparaison prend l'apparence d'une herméneutique fausse (bien que commode) qui met tout dans le même sac. Ce dernier point peut, sans aucun doute, être réconfortant, étant donné qu'elle analyse ces phénomènes par une sorte d'"absolutisme magique" qui les voit isolés de leur contexte, c'est-à-dire comme une excroissance de l'histoire, déterminée avant tout par l'avènement du Mal dans les affaires humaines, une possession diabolique dont ont été victimes certaines communautés ou nations qui ont poursuivi le "Mal absolu", mais elle reste, fondamentalement, une sorte d'esprit de clocher herméneutique dicté, plus que toute autre chose, par l'attitude insensée qui postule que le "cours normal de l'histoire" est celui d'un "progrès" continu, non seulement matériel mais, surtout, sociopolitique et culturel (en bonne substance un signifiant vide de sens) et, par conséquent, le mystère de ces iniquités ne peut s'expliquer que par la présence de quelque influence maligne sur le cours de l'histoire.

Si c'est une opération plutôt superficielle de mettre dans le même sac des phénomènes politiques, pourtant jadis marqués par de grandes différences, et de les placer sous un dénominateur commun, le soi-disant "totalitarisme" qui, en réalité, est une fausse synecdoque, d'autant plus que l'assimilation de ces régimes au nôtre est une opération plutôt scabreuse.

Il est donc plutôt stupide (ou une véritable opération de Maskirovka) de décrire le régime actuel comme un "nouveau nazisme", comme un "fascisme sanitaire" et avec toutes les nombreuses variations sur le thème, de montrer les symboles de l'époque (croix gammées, etc.) pour stigmatiser le despotisme du présent, allant même jusqu'à invoquer un "nouveau Nuremberg" (signifiant, bien sûr, le procès, pas les références à Hitler) pour punir les coupables ; comme si la simple juxtaposition verbale ou l'affichage d'emblèmes typiques et tapageurs suffisait à rendre compte du phénomène actuel.

5b896da7e870a.jpg

Il est donc bon d'essayer de mettre un peu d'ordre dans ce fatras.

Ce que nous vivons actuellement peut être défini comme une "techno-dictature" qui a commencé à se manifester grâce à "l'état d'urgence pandémique", qui s'est rapidement transformé en état d'exception, en vertu duquel la structure juridique de l'État, la division des pouvoirs et l'attribution des pouvoirs ont été dépouillées, c'est-à-dire que les structures ont été vidées, tout en les maintenant formellement.

Le terme "techno-dictature" (un néologisme plutôt cacophonique, à vrai dire) vise à définir brièvement les modalités de ce type de despotisme sans précédent ; sans précédent parce qu'il ne se manifeste pas par l'usage de la force, mais par des dispositifs de contrôle électroniques, beaucoup plus efficaces et omniprésents, qui permettent de contrôler toutes les activités de la vie quotidienne des citoyens (des transactions aux déplacements).

De ce point de vue, aucune comparaison ne peut être trouvée dans l'histoire (sauf, en embryon, dans l'activité florissante des écoutes téléphoniques et environnementales de la STASI et du KGB) car, de nos jours, la violence et la coercition physique qui caractérisaient les régimes d'antan ne sont plus nécessaires (sauf dans une très faible mesure) : les chemises noires, la Gestapo, les camps de concentration, les vuelos de la muerte, la torture (même si nous pensons que, le cas échéant, ces pratiques ne seraient pas dédaignées, comme nous l'enseignent les disciples de Stefan Bandera, défendus à satiété par les champions des droits de l'homme), également parce que les appareils policiers des dictatures technocratiques modernes sont bien moins développés que ceux des régimes du siècle dernier.

cybersurveillance_hard_11.jpg

Une autre différence fondamentale est reconnaissable dans le fait que les régimes du passé étaient des dictatures ouvertes, c'est-à-dire qu'ils ne cachaient pas leur nature, alors que celui d'aujourd'hui est subreptice, car il se dissimule sous l'apparence formelle de la "démocratie représentative" (et rions, rions,...). Cette dernière, cependant, a été complètement vidée de tout aspect substantiel (ce processus n'a pas commencé aujourd'hui, mais aujourd'hui il a été achevé), en ce sens que la représentativité est complètement éteinte, les constitutions méprisées et les lois, inappliquées (ou appliquées avec un arbitraire extrême).

Toutefois, la différence la plus frappante ne concerne pas les modes de gouvernement, c'est-à-dire les moyens, mais les fins immanentes, c'est-à-dire ce qui détermine en définitive sa forme, ses caractéristiques et sa mythopoïèse.

Cette caractéristique, partagée par toutes les dictatures du siècle dernier (mais pas la nôtre), est ce que l'on pourrait définir comme la "volonté de puissance", dont sont issues les différentes "mythologies totalitaires".

Le fascisme, par exemple, a fait mine de s'inspirer du mythe de la Rome impériale et de sa grandeur. Le nazisme a inventé la fable de la race aryenne, la race supérieure originaire de la légendaire Thulé, la "demeure arctique des Vedas" : un mythe de pacotille qui a néanmoins gagné la foi, même des hiérarques du régime, qui ont dépensé d'énormes ressources pour tenter de prouver sa véracité.

Le bolchevisme, pour sa part, et dans une perspective quelque peu différente, recourait à la mystique de la frontière, de l'homme conquérant la nature hostile et la transformant en un instrument docile entre ses mains.

imvlzaages.jpg

zazoubrine_vladimir-le_tchekiste.jpg

Nous pouvons trouver une image efficace de ce mythe dans un discours prononcé par Vladimir Zazubrin (Zazoubrine/photo)) au congrès des écrivains soviétiques en 1926 :

"Que la fragile poitrine de la Sibérie soit revêtue de l'armure en béton des villes, équipée du système défensif en pierre des cheminées, encerclée par une ceinture ferroviaire. Laissez la taïga tomber et brûler, laissez les steppes être piétinées. Ainsi soit-il ; et il en sera inévitablement ainsi. Ce n'est qu'avec du ciment et du fer que se forgera l'union fraternelle de tous les peuples, la fraternité de fer de l'humanité".

Pf1EMbZTK7-p.jpg

Michail Pokrowski (photo), éminent historien de la révolution, a prophétisé que le temps viendrait où :

"la science et la technologie atteindront une perfection presque inimaginable, de sorte que la nature se transformera en cire malléable entre les mains de l'homme qui la moulera à sa guise".

Le communisme était "la puissance des Soviets plus l'électrification", les grands travaux ouvraient la voie.

En bref, bien que déclinée selon des mythologies différentes, la volonté de puissance était le véritable point commun des régimes du 20e siècle: la création de l'homme collectif était poursuivie comme l'incarnation de la puissance de la méga-machine sociale, qui devait se manifester à la fois dans la domination de la nature et dans la domination des autres nations (le Lebensraum). Tout était animé par une véritable pulsion constructiviste qui se manifestait dans le gigantisme des ouvrages: ponts, barrages, bâtiments imposants, poldérisation, canalisation des rivières.

Bien entendu, le secteur dans lequel, plus que dans tout autre, la volonté de puissance s'est manifestée est celui de la guerre ; ainsi, la course aux armements, qui est le moyen le plus efficace de manifester la puissance de la nation, combinée à la volonté de conquête et aux ambitions impériales, c'est-à-dire au Lebensraum, a décliné de différentes manières.

90854227fdf05b08e3dc929bcff6087f.jpg

Inconvenante? Certainement, au point de conduire au conflit le plus sanglant de l'histoire de l'humanité, car le pouvoir peut détruire comme il peut construire. Cependant, la volonté de puissance, même si elle peut conduire à des conséquences tout à fait aberrantes, comme dans les cas cités, est ce qui distingue l'homo faber, dont la caractéristique est de manipuler et, donc, de dominer, la "matière première" fournie par le monde naturel, tout comme il dominait le feu fourni par Prométhée, qui peut forger aussi bien qu'incendier.

Nous pensons donc que c'est cette caractéristique qui constitue la différence axiale qui distingue les régimes du passé de ceux du présent.

Pour la première fois dans l'histoire, nous sommes confrontés à un régime fondé sur ce que l'on pourrait appeler une "volonté d'impuissance": sa mythologie n'est pas inspirée par des images grandioses, elle n'est pas animée par une aspiration à l'expansion, mais par une compulsion à l'anéantissement, à une diminutio anthropologique et sociale qui postule l'indignité de l'homme, comme si elle aspirait à une seconde expulsion du paradis terrestre (qui n'est d'ailleurs pas aussi paradisiaque que le premier). C'est l'idéologie terminale d'un long processus d'abstraction du monde, d'ablation de sa tangibilité, qui a commencé avec l'imposition des "qualités premières" et s'est poursuivi avec la reductio ad signum induite par le primat de la valeur d'échange, de la notation, qui a pris la place de la matière et du temps de la vie, et a donné naissance à un monstre qui, comme Chronos, a dévoré ses propres enfants.

"L'homme est désuet" et devient donc rapidement pléonastique.

Cette inessentialité ontologique détermine son destin: n'étant pas, il ne doit même pas avoir, il ne doit pas consommer la matière du monde, ni prétendre avoir sa propre place sur terre. Comme tout produit jetable, il peut être utile, tout au plus, pour récupérer la matière dont est faite sa vie, celle qui l'entoure et constitue son monde, afin de l'alimenter dans la forge de la valeur et de la transformer en un signe sur un quelconque livre de comptes (accumulation par expropriation).

Le même mythe du progrès qui, pendant des siècles, a été la boussole qui a guidé la voie de la modernité, semble s'être perdu dans le brouillard de ce vestige de l'histoire.

Dans l'après-guerre, les regrettées "trente glorieuses", l'humanité a été éblouie par le visage grandiose du progrès: le "pouvoir sur l'atome" et donc sur la structure même de la matière ; la conquête de l'espace ; l'apparente libération des limites imposées par la nature, grâce à des instruments toujours plus puissants. Cette idée de progrès illimité a capté l'imagination collective de l'époque et semblait destinée à transformer l'homme en une sorte de demi-dieu presque omnipotent.

2ff217312fc01964e7d5b4179ff373e1.jpg

Au fil du temps, la plupart de ces fantasmes se sont brisés contre les récifs de l'histoire, car l'apparente spontanéité du mouvement du progrès était en réalité déterminée par des motifs contingents, principalement l'ambition de suprématie technologique (et donc symbolique) des grandes puissances de l'époque. Une fois cette période terminée, le progrès a commencé à prendre d'autres chemins, comme pour montrer que, loin d'être le guide de l'histoire, c'est en réalité cette dernière (et le Zeitgeist immanent) qui en détermine la forme.

Une brochure intitulée "Les limites du développement" fut un jour publiée, le terme "écologie" fit son apparition, tout comme le concept d'"environnement" en tant qu'habitat. L'homme n'était plus considéré comme l'élève préféré de Prométhée, mais devenait une espèce parmi d'autres qui habitent la planète Terre.

Le pétrole devient une ressource rare (les crises des années 1970) et s'ouvre une longue période où l'austérité devient l'horizon des gouvernements occidentaux. Soudain, quelqu'un s'est rendu compte que le "baby boom" avait rendu la planète trop peuplée et que l'espèce humaine était trop gourmande et vorace, et qu'elle détruisait "l'environnement".  C'est ainsi que la culpabilité puritaine a commencé dans l'"anglosphère" et s'est répandue dans le monde comme une pandémie.

La volonté de puissance, qui avait orienté le progrès dans une certaine direction (le triomphe de la méga-machine), s'est arrêtée, et le progrès s'est retrouvé incertain de la route à prendre, comme un voyageur en terre inconnue.

Un désir d'impuissance a commencé à faire son chemin, qui s'est manifesté par une envie de "dématérialisation" (la fin de l'homo faber), accompagnée par la prolifération de systèmes de contrôle social de plus en plus envahissants, c'est-à-dire les appareils électroniques qui, aujourd'hui, déterminent tous les aspects de la vie et qui ont permis de créer un nouvel univers de catégories de marchandises. Lorsque l'argent s'est enfin libéré de toute entrave matérielle (1971), le profit s'est lui aussi progressivement libéré de la matière et s'est finalement orienté vers les marchandises financières et informatiques.

vege-Fotodemlia.jpg

Cependant, le mythe du progrès ne pouvait pas être abrogé tout court, car cela aurait entraîné la disparition de toute sotériologie résiduelle, puisque l'image d'un univers composé exclusivement de matière en proie à la décomposition entropique sans espoir d'en devenir le "maître et possesseur" ne pouvait en fournir.

Si tout un système historique est fondé sur le mythe du progrès et que celui-ci prend la forme d'un pouvoir matériel, il est difficile d'imposer un changement de cette ampleur à l'imagination collective et d'éviter ses réactions. À une époque où la pax Americana et l'américanisation du monde qui s'en est suivie (improprement appelée "mondialisation") ont conduit à la "fin de l'histoire", rendant inutiles les vagues revendications de pouvoir (du moins, de la part de toutes les entités autres que les États-Unis), il était nécessaire d'élaborer un nouveau mythe millénaire pour remplacer les précédents.

Ainsi, la pensée hétéroclite de ce vestige de la modernité a emballé une poignée de mythes misérables pour ressusciter le progrès sous une autre forme: il n'était plus mû par la volonté de puissance, mais par un méli-mélo mal défini d'illusions nouvellement créées, dont le trait commun n'était plus la domination du monde ou la libération de l'homme de toute corvée, mais la libération des entraves anthropologiques et naturelles qui avaient, en quelque sorte, caractérisé l'existence humaine jusqu'à présent. Ce fatras s'est manifesté sous des formes très différentes (comme c'est le cas de la diversification des produits en fonction de diverses niches de marché): cela va du déni de la sexualité biologique, avec le délire de la multiplication des " genres ", au puritanisme culturel, qui veut écarter l'histoire, l'art et la littérature parce qu'ils ne sont pas alignés sur les hallucinations de la respectabilité sociale.

La langue elle-même est soumise à une censure de plus en plus atroce et est ainsi inhibée et décolorée à tel point que la communication est presque impossible. L'expression verbale fait désormais appel, presque exclusivement, à des signifiants vides.

Ainsi, un nouveau mythe a fait son entrée, aussi insipide et mesquin que tout ce que produit cette époque stérile, un mythe tiré, in fine, des divagations calvinistes (eh, l'esprit du capitalisme...), à savoir celui de l'indignité de l'homme, coupable de ne pas avoir su préserver l'environnement (c'est-à-dire l'habitat) qui lui a été "confié", et qu'il faut donc mettre sous contrôle, afin qu'il cesse de perturber la création.

algorithme-intelligence-artificielle-avatar-numerique-disparition-des-emplois-robots-cols-blancs-programme-informatique-numerisation-digitalisation-deshumanisation-robotique.jpg

La volonté d'impuissance est la mystique de la fin des temps, de la fin de l'histoire, dans laquelle le loup ne paîtra pas avec l'agneau mais l'homme pourra se fondre dans la machine à laquelle il a donné naissance: l'homme algorithmique, purgé de la volonté et de tout but et donc de l'imprévisibilité humaine, libre du mal comme du bien, oublieux d'avoir été nourri par l'arbre de la connaissance. Il s'agit d'une véritable "dictature du nihilisme", l'après-moi le déluge d'une civilisation qui ne veut plus avoir de buts, d'énergie ou de motifs pour continuer sur sa lancée et qui fait donc tout pour s'empêcher d'aller plus loin.

Notes :

[1] (le livre éponyme de Hannah Arendt est en grande partie responsable de cette simplification)

[2] Par exemple, les présidents des régions ont été autorisés à fermer les "frontières" (inexistantes) des régions.

[3] B. G. Tilak, La maison arctique dans les Védas, TILAK BROS Gaikwar Wada, Poona, 1903

[4] F. R. Shtil'mark., L'évolution des concepts sur la préservation de la nature dans la littérature soviétique, Journal of the History of Biology, 1992, 431

[5] Cité dans : J. R. McNeill, Quelque chose de nouveau sous le soleil, Einaudi, Turin, 2000, p.423

[6) L'Amu Darya a été détourné pour construire des ouvrages d'irrigation pour les cultures de coton de l'Asie centrale soviétique, ce qui a entraîné l'assèchement de la mer d'Aral.

arton87-e253d.jpg

[7] D. H. Meadows, D. L. Meadows, J. Randers, et William W. Behrens III, The Limits to Growth. New York : Universe Books. 1972

[8) Avant le milieu des années 1980, en effet, le grand public ne parlait pas de la "bourse" et les économistes étaient considérés comme des techniciens comptables non habilités à exprimer quelque épistémè que ce soit.

[9] Bien sûr, personne n'est touché par l'idée que, pour le capitalisme, l'environnement n'a jamais été conçu que comme une base pour la multiplication des moyens d'échange.

[10) Hermann Rauschning a qualifié le nazisme de "dictature du nihilisme", mais la volonté de dominer, aussi perverse soit-elle, n'a rien de nihiliste.