dimanche, 11 août 2024
La modernité libérale se dévore elle-même
La modernité libérale se dévore elle-même
par Andrea Zhok
Source : Andrea Zhok & https://www.ariannaeditrice.it/articoli/la-modernita-liberale-divora-se-stessa
La synthèse extrême de cette époque, qu'il s'agisse des Jeux olympiques sexuellement ambigus, des affrontements ethniques au Royaume-Uni, des massacres quotidiens de Palestiniens par la "seule démocratie du Moyen-Orient", de la censure sociale, etc. peut, à mon avis, être articulée en deux étapes fondamentales.
1) La modernité libérale commence par détruire systématiquement tous les fondements, toutes les distinctions essentielles, tous les principes directeurs, toutes les traditions, toutes les coutumes, et ce au nom de la liberté et de sa propre "supériorité des lumières". De la culture libérale (post-Lumières, libéraliste/néolibérale, relativiste, individualiste, "progressiste")
"Là où elle est arrivée au pouvoir, [...] elle a détruit toutes les conditions de vie féodales, patriarcales et idylliques. Elle a déchiré sans pitié les liens pittoresques qui, dans la société féodale, liaient l'homme à ses supérieurs naturels, et n'a laissé d'autre lien entre l'homme et l'homme que l'intérêt nu, l'impitoyable "paiement comptant". Elle a noyé dans l'eau glacée du calcul égoïste les saintes secousses de l'exaltation religieuse, de l'enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité petite-bourgeoise. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d'échange ; et à la place des innombrables franchises laborieusement acquises et brevetées, elle a placé la seule liberté d'un commerce sans scrupules. En un mot, à l'exploitation voilée d'illusions religieuses et politiques, elle a substitué l'exploitation ouverte, sans prétention, directe et sèche" (Marx, Manifeste, section I).
L'attitude de Marx oscillait de manière caractéristique entre la conscience de la dynamique destructrice et la fascination face au pouvoir révolutionnaire. Lorsque Marx a écrit ces lignes, cette ambivalence était bien compréhensible, car une grande partie de l'ancien monde méritait d'être enterrée et l'incendie socioculturel en cours épargnait l'effort d'enterrement.
Mais comme c'est le cas pour les incendies réels, une fois qu'ils ont atteint une certaine masse critique, ils s'enflamment d'eux-mêmes et ne peuvent plus être contenus et régulés (Marx a imaginé le communisme comme un moyen de contenir et de réguler l'incendie allumé par la modernité libérale, d'en faire un four utile à l'humanité, mais il a largement sous-estimé à quel point l'humanité elle-même, toute idée substantielle d'elle, était ainsi en train d'être incinérée).
2) Ensuite, quand après des années, des décennies ou des siècles, le chaos commence à dominer, quand toute catégorie s'est dissoute dans un relativisme que l'on croit génial, quand la désorientation, la prévarication et le sentiment d'injustice s'imposent avec elle, quand tout ordre est compromis, toute direction inintelligible, quand la liberté s'est transformée en arbitraire, les règles en exceptions, l'essence en accident, quand tout cela est devenu peu à peu une seconde nature et une forma mentis généralisée, alors s'ouvre une nouvelle ère de coercition, de sanction, de surveillance et de contrôle, de violence du pouvoir constitué, à l'égal des moments les plus sombres de l'Ancien Régime, mais à la différence de celui-ci, portée non par le poids d'une tradition, mais par l'insoutenable légèreté de l'arbitraire.
L'arbitraire des lobbies bigarrés, des multinationales anonymes ou des oligarques lointains.
L'irrationalité des parcours décisionnels, leur illogisme, leur contradiction interne, leur opportunisme flexible les rendent difficilement saisissables (et ceux qui tentent de les rationaliser sont facilement accusés de "conspirationnisme").
Dans ce contexte, les identités personnelles et collectives se délitent, laissant place, génération après génération, à des états de plus en plus dissociés, irrésolus, à la fois fragiles et agressifs.
Le conflit systématiquement alimenté par le choc de croyances désorganisées, de fragments motivationnels sauvages, la réduction du fondement ontologique au caprice psychologique, la divergence des attentes mutuelles, crée le terrain où se développe l'acceptation de la répression, de la surveillance, des jugements sommaires, voire de la violence hâtive.
La modernité libérale se dévore, et nous sommes tiraillés entre un bol alimentaire et un résidu de vie entre les dents.
18:37 Publié dans Actualité, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : modernité, modernité libérale, philosophie, andrea zhok | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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