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dimanche, 16 novembre 2025

UE : Construction d'une centrale de renseignement – une transformation silencieuse mais cruciale

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UE : Construction d'une centrale de renseignement – une transformation silencieuse mais cruciale

Elena Fritz

Source:  https://t.me/global_affairs_byelena 

À Bruxelles, une structure est en train de se mettre en place (https://www.ft.com/content/b8a3aee3-222b-4b4f-a1e2-e7a819ac0dd2), qui sera beaucoup plus pertinente pour l’avenir sécuritaire de l’Europe que ce que l'on trouve sous de nombreux gros titres politiques. La Commission européenne, sous la direction d’Ursula von der Leyen, établit une fonction centrale de renseignement et d’analyse, qui doit centraliser les informations provenant de tous les États membres.

Le processus est discret – mais ses impacts sont énormes.

Pourquoi cette étape intervient maintenant

Les années passées ont montré à l’UE à quel point le continent est dépendant en matières de sécurité. Trois développements ont été particulièrement déterminants:

- En 2025, la France a temporairement perdu plus de 40% de ses informations relatives aux situations factuelles lorsque les États-Unis ont réduit leurs données de renseignement.

- La Pologne a tenté en vain de rétablir ses anciens canaux de renseignement vers Londres.

- Plusieurs services n’étaient guère capables d’évaluer les mouvements de troupes russes sans bénéficier de données américaines. La conclusion que l'on a tiré à Bruxelles est dès lors la suivante:

Sans base d’informations propre, l’Europe ne peut pas suivre une ligne de sécurité indépendante.

Ce que l’UE construit concrètement

Le nouveau système comprend:

- un centre de situation et d’analyse central,

- du personnel issu d’anciens services nationaux (DGSE, BND, AIVD),

- une connexion avec le programme satellitaire IRIS² (5,7 milliards d’euros),

- une liaison avec des structures communes d’armement et de crise,

- un nouveau « Collège de sécurité de l’UE » pour la formation de ses propres experts en sécurité. Cela crée pour la première fois une architecture européenne composée de satellites, capacités d’analyse et base industrielle – une étape préliminaire vers une véritable compétence européenne en matière de sécurité.

Le point central : Bruxelles définit désormais la situation

Le changement le plus important est moins technique que politique.

Une situation commune implique:

- une définition commune des menaces,

- une priorisation plus cohérente en politique extérieure,

- moins d’interprétations nationales.

Celui qui définit la menace fixe le cadre dans lequel la politique se développe.

Ainsi, une part essentielle de la souveraineté étatique se déplace silencieusement vers le niveau européen.

Ce que cela signifie pour l’Allemagne

L’Allemagne conserve ses propres services.

Mais la signification de leurs analyses évolue:

- les informations sont transmises à Bruxelles,

- l’évaluation s’y fait,

- les priorités se forment de plus en plus à un niveau supranational.

L’Allemagne devient ainsi le porteur de l’infrastructure, mais l’agenda stratégique se construit au-dessus de l’État-nation.

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Résistance interne

La réforme est controversée à Bruxelles même:

- Le SEAE voit son propre centre de situation (INTCEN) comme affaibli.

- Plusieurs États hésitent à transmettre leurs données.

- D’autres mettent en garde contre des mécanismes de contrôle flous.

Pourtant, la Commission poursuit ce processus – les structures fonctionnelles développent souvent une dynamique propre.

Conclusion

L’Europe façonne silencieusement le cœur de son architecture de sécurité. La nouvelle fonction de renseignement n’est pas un projet marginal, mais une pierre angulaire d’un changement plus large :

- des images de situation cohérentes,

- des cadres d’interprétation communs,

- une influence croissante de l’UE dans les questions de politique extérieure,

- une transition progressive de domaines de souveraineté.

Il s’agit du passage silencieux d’une union purement administrative à un acteur de plus en plus stratégique.

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