Rien n’est encore décidé et l’idée est en cours de discussion au sein du Commandement des forces alliées (SACEUR) : après 2014, il serait en effet que l’Otan maintienne en Afghanistan une force de 10.000 à 20.000 hommes, avec des forces spéciales et des moyens aériens, afin de continuer à soutenir les forces de sécurité afghanes. C’est du moins ce qu’a révélé le général Gérard Van Caelenberge, le nouveau chef de la Défense belge.
L’après 2014 en Afghanistan a par ailleurs fait l’objet d’un rapport, publié par la Fondation Carnegie pour la paix et établi par le chercheur français Gilles Darronsoro, fin connaisseur de la région et très critique au sujet de la stratégie mise en oeuvre par l’Otan pour réduire l’insurrection afghane.
Ainsi, le document est pour le moins pessimiste quant à l’avenir de ce pays car il y est estimé que “le régime afghan va très certainement s’effondrer dans quelques années” et la situation pourrait être, à certains égards, pire que celle qui prévalait avant 2001.
Selon Gilles Darronsoro, le retrait de l’ISAF “se traduira automatiquement par une avancée des taliban, particulièrement dans l’est et le sud du pays”, qui sont actuellement les secteurs où l’insurrection est encore la plus active.
“Au mieux, le gouvernement afghan pourra garantir la sécurité des villes et de quelques régions qui lui sont favorables. Mais il perdra le contrôle des zones rurales pachtounes et des provinces frontalières avec le Pakistan, sans perspective de regagner du terrain” ajoute encore le chercheur, qui estime que les forces de sécurité afghanes n’auront ni les compétences et ni les moyens pour reprendre l’avantage.
Aussi, le régime afghan, annonce le rapport, aura à faire face à une triple crise, d’abord sur le plan économique, avec une baisse substantielle des aides financières internationales, ensuite au niveau politique, avec une élection présidentielle programmée incertaine (et s’ajoute le risque de fraudes…) et enfin dans le domaine sécuritaire.
Cependant, le chercheur français propose des solutions pour éviter le scénario d’un retour des taliban au pouvoir. La première à appliquer immédiatement est de renforcer la sécurité dans l’est de l’Afghanistan ainsi que dans la province de Kaboul, afin de ralentir les progrès des insurgés et de les “encourager à prendre au sérieux les négociations”. A ce sujet, le rapport estime qu’avoir mis le réseau Haqqani sur la liste des organisations terroristes est contre-productif. C’était aussi l’argument de ceux qui s’était opposés à cette démarche au sein de l’administration Obama.
En outre, Gilles Darronsoro préconise de mettre un terme aux frappes ciblées contre les taliban et de se concentrer davantage sur les groupes jihadistes internationaux. Seulement, le réseau Haqqani, dont le chercheur a regretté le classement parmi les groupes terroristes, aurait l’ambition d’exporter le “jihad”… Enfin, selon le rapport, les Etats-Unis doivent trouver une nouvelle approche dans sa politique à l”égard de l’Afghanistan, du Pakistan et de l’Inde.
Un plan controversé visant à une partition de l’Afghanistan
L’Afghanistan pourrait être découpé en huit « royaumes » différents – et certains d’entre eux pourraient être gouvernés par les Taliban – selon un plan controversé en cours de discussion à Londres et à Washington (et ce n’est pas la première fois que le CFR envisage une partition comme nous l’avions vu en novembre 2010 avec cet article intitulé « La guerre d’Obama en Afghanistan », ndlr).
Sous le nom de « Plan C », le projet radical pour l’avenir de l’Afghanistan énonce des réformes de nature à reléguer le président Hamid Karzai au rôle de figurant.
Conçu par le député conservateur et collaborateur du Foreign Office Tobias Ellwood, il pose en avertissement que le pays fera face à un avenir sombre quand il sera livré à lui-même. M. Ellwood soutient qu’un Etat « régionalisé » avec un nouveau Premier ministre puissant pourra faire face à la faible gouvernance, aux disputes tribales et à la corruption dont beaucoup craignent qu’elles plongent l’Afghanistan dans le chaos quand l’ International Security Assistance Force (ISAF) se retirera en 2014.
Des sources haut placées au gouvernement ont confirmé que le Plan C – Trouver une solution politique en Afghanistan a été présenté au ministre des Affaires étrangères William Hague, et a été discuté avec des officiels de la Maison Blanche. M. Ellwood, un ancien capitaine dans les Royal Green Jackets a aussi discuté ce plan avec des officiels du gouvernement pakistanais à Londres.
Mais des experts ont critiqué cette tentative « d’imposer » un système démocratique à l’Afghanistan, et souligné que les leaders de la coalition devraient se concentrer sue la stratégie du retrait militaire qui leur permettra d’évacuer leurs forces à l’échéance butoir de 2014.
Wazhma Frogh, directrice de l’ Afghanistan’s Research Institute for Women, Peace and Security, a déclaré : « Quel est ce député britannique qui siège à Londres et décide pour l’Afghanistan ? C’est à nous, le peuple de ce pays, de décider si nous voulons nous scinder en Etats ou nous disparaître en tant que nation. Je suis surprise de voir un député d’un pays démocratique concevoir l’avenir et donner des solutions pour un pays dans lequel il n’aura pas à vivre et où ses enfants n’auront pas non plus à vivre. »
M. Ellwood, qui travaille maintenant comme collaborateur parlementaire du ministre délégué du Foreign Office David Lidington, a soutenu qu’un règlement politique – même en incluant les Taliban – était nécessaire pour garantir la stabilité à long terme de l’Afghanistan.
« L’ISAF peut être confiante dans le fait que la révision de sa stratégie sécuritaire fonctionne finalement, mais la menace insurgée ne sera pas supprimée par le seul recours à la force, » explique-t-il dans un rapport lu par The Independent on Sunday. « Les Taliban ne participeront pas à un dialogue significatif s’il n’y a pas de stratégie politique faisable à laquelle ils peuvent participer… Une solution alternative [offre] une structure politique moins centralisée qui reflète mieux la composition ethnique du pays, les pôles économiques déjà existants et les intérêts régionaux des Taliban qui pourraient alors être intéressés à un règlement politique. »
Le plan divise l’Afghanistan en huit zones, basées sur les « pôles économiques » de Kaboul, Kandahar, Herat, Mazar-i-Sharif, Kunduz, Jalalabad, Khost et Bamyan. Les zones seraient administrées par un conseil représentant les divers groupes ethniques et supervisé par un ou plusieurs pays étrangers. M. Ellwood soutient aussi que la création d’un poste de Premier ministre, avec beaucoup des pouvoirs « disproportionnés » détenues actuellement par le président participeraient à apaiser les inquiétudes sur l’homme qui a dirigé le pays pendant près de huit années.
Mais Thomas Ruttig, co-directeur de l’ Afghanistan Analysts Network, déclare : « Scinder les pays en régions de ce genre aura pour résultat de renforcer le poids de ceux que nous avons déjà commencé à appeler ‘hommes d’influence, les power brokers locaux (ou régionaux) et ce qu’on appelait avant les ‘seigneurs de la guerre’ et dont l’incurie du pouvoir entre 1992 et 1996 avait été la première causes de l’ascension des Taliban. »
Source : opex360.com, Mecanoblog,
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