Le foutoir continue et s'amplifie même, au Brésil, où la présidente élue, Dilma Rousseff est sous le coup d'une destitution pour un motif mineur : débits budgétaires reportés d'une année sur l'autre, pour pouvoir annoncer un déficit inférieur. Un processus utilisé régulièrement par tous les partis au pouvoir. Les députés ont voté à une large majorité la demande de destitution. Ces parlementaires « golpistes » qui se sont prononcés pour la destitution sont aussi clairs qu'un élu des Haut-de-Seine ! Beaucoup ont gamellé auprès de Petrobras, machine à sous généreuse, d'autres sont poursuivis pour crimes et corruption…Au total, 60 % des 594 membres du Congrès du Brésil font face à des accusations graves comme corruption, fraude électorale, déforestation illégale, enlèvements et homicides. Quant à leur chef de file, le président de la chambre des députés Eduardo Cunha, il est lui-même mis en accusation par le Tribunal Suprême. Cette même Cour l'a écarté de ses fonctions pour avoir tenté d’entraver l’enquête sur les faits de corruption dont il est accusé ! C'est l'arroseur arrosé. Adversaire de Dilma Rousseff, il est l’homme qui avait déclenché « l'impeachment », en acceptant, en décembre, une demande de destitution de la présidente, une prérogative du chef du perchoir. Il a été remplacé par son vice-président Waldir Maranhao. Celui-ci a provoqué un retentissant coup de théâtre en annulant le vote de l'assemblée plénière des députés qui avaient approuvé le 17 avril la procédure de destitution de Dilma Rousseff.
Mais, nouveau coup de théatre, quelques heures plus tard, le président du Sénat Renan Calheiros a ordonné dans l'après-midi la poursuite de la procédure, ignorant la décision "intempestive" de suspension prise quelques heures plus tôt par le président par Waldir Mananhao le président intérim du Congrès des députés...lui-même revenu sur sa décision à la suite de pressions puissantes et multiples ! Quant on parle de foutoir, c'est un terme encore bien faible… Le sénat va donc, dès aujourd'hui "destituer" la présidente.
Le coup d'état « non violent » a donc repris pour destituer une présidente démocratiquement élu, et installer un des politiciens les plus corrompus – qui, d’une façon qui ne doit rien au hasard – se trouvent être préféré par l'establishment politique étasunien, bafouant ainsi la démocratie et les 54 millions de personnes qui ont réélu la première femme présidente du Brésil, il y a seulement 18 mois. La personne que les oligarques brésiliens et leurs organes de presse tentent d'installer en tant que président : le vice-président Michael Temer est l’incarnation de la contamination par la corruption au service des oligarques. Il est profondément impopulaire.
Deux faces d’un même pays s’affrontent par partis interposés, le Brésil des riches et celui des pauvres. Il s'agit bien de manœuvres de renversement illégal d'un pouvoir élu démocratiquement. Il est mené par l'opposition de droite : la droite politique qui veut échapper aux condamnations judiciaires et revenir aux affaires ; et la droite judiciaire qui utilise les enquêtes et leur médiatisation de façon partisane et en violant au passage les libertés publiques. Que des millions de personnes appuient ce coup d'État dans la rue n'y change rien. D'autres l'avaient fait avant eux il y a 50 ans, lorsqu'un coup d'Etat militaire avait été acclamé par des millions de Brésiliens, la presse, et la majorité de la classe politique. La dictature a duré 21 ans. Et certains en rêvent de nouveau.
La bourgeoisie brésilienne ne se satisfait pas de sa condition de classe dominante. Elle exige des conditions qui lui permettent d'exploiter sans entrave la force de travail dont elle dispose : les plus pauvres, les sans-terres. Et les classes moyennes sont exaspérées non pas parce que leur niveau de vie se dégrade mais parce qu'elles voient les plus démunis gagner un peu plus de droits ! Cette pseudo élite ne reconnaît le principe de majorité que lorsqu’il répond à ses intérêts. Les banksters tout comme la bourse jouent à fond la destitution de la présidente de gauche (quelle horreur !). BNP-Paribas pense d'ailleurs qu'il est "temps de redevenir positif sur les perspectives économiques du Brésil...à condition que le vice-président Michel Temer "réussisse à réunir une équipe solid et à obtenir le soutien d'une partie du congrès pour prendre des mesures certes impopulaires mais au combien nécéssaire". Même des banques françaises jouent contre la présidente élue. Insupportable ingérence.
Voilà la conspiration qui veut foutre en l'air Dilma Rousseff. Certes le Parti des Travailleur a trahi sa promesse d'être un parti "propre", "éthique". Il s'est fondu dans le système, en partie pour mener des politiques d'inclusion que rejetait l'écrasante majorité de la classe politique (qu'il lui a fallu acheter), en partie parce que des politiciens du PT ont profité de l'exercice du pouvoir pour s'enrichir personnellement. Certes Dilma gouverne peu et mal. Sous la pression de la crise économique résultant de la chute des prix des matières premières dont le Brésil est un grand pourvoyeur mondial, elle a dû renoncé à mener des politiques sociales et de croissance. Mais ce ne sont pas des raisons valides pour faire démettre une présidente élue démocratiquement.
L'objectif des « golpistes » est de s'attaquer à la souveraineté populaire, exprimée par le vote et de la mettre sous la tutelle de la magistrature dont les membres, non élus et protégés de tout contrôle social, sont engagés dans un programme de changements rétrogrades qui ne sont pas exprimés. Contre la gauche – qu'ils vomissent – tout leur est bon, y compris un putsch militaire.
Mais derrière ces basses manoeuvres - que l'on retrouve aussi au Vénézuela - on devine les sales pattes des officines secrètes – CIA entre autres - qui magouillent sournoisement pour imposer la politique de Washington. A travers le Brésil, ce qui est visé, c'est l'alliance économique des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Car quelle meilleure façon de contrecarrer les actions réussies de cette alliance qui ose se dresser face à « l'Empire » que de placer au Brésil un gouvernant oligarchique à la botte des intérêts étasuniens ?
Bonne ambiance pour les J.O. !
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