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samedi, 13 décembre 2025

Le C5, modèle MAGA de la multipolarité - Une alternative à la domination mondiale de l’ordre unipolaire

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Le C5, modèle MAGA de la multipolarité

Une alternative à la domination mondiale de l’ordre unipolaire

Alexandre Douguine

Alexandre Douguine commente la tentative de l’Amérique de construire un ordre multipolaire de grandes puissances en marge du G7 et du mondialisme.

L’idée du C5, ou « Core Five » (le Noyau des 5), en tant qu’alternative au G7, est un projet qui découle directement de l’approche politique et géopolitique du mouvement MAGA dans la politique mondiale. C’est du réalisme politique; c’est un rejet de la mondialisation; c’est la construction d’une nouvelle architecture internationale basée sur les véritables centres de souveraineté dans le monde contemporain.

780bfbab-654e-4e29-8d68-0e0bca2dc0aa_828x1280-1577884017.jpegLorsque, il y a un peu moins d’un an, j’ai publié mon livre La Révolution Trump (qui a déjà été traduit dans de nombreuses langues), je lui ai donné le sous-titre suivant: «Un nouvel ordre de grandes puissances». Mais qu’est-ce que «l’Ordre des Grandes Puissances»? C’est précisément la construction d’un système international dans lequel la souveraineté authentique n’appartiendra qu’aux civilisations-États qui possèdent leur propre idéologie, leur propre économie et leur propre géopolitique—des entités véritablement souveraines qui ont déjà prouvé leur viabilité.

C’est, si vous voulez, la version MAGA d’un monde multipolaire. C’est exactement ce dont parlait autrefois le secrétaire d’État américain Marco Rubio. Cela faisait partie des plans énoncés par plusieurs idéologues du mouvement MAGA comme, par exemple, Steve Bannon. C’était soutenu et étayé—de façon assez critique à l’égard de Trump lui-même—par John Mearsheimer, un excellent représentant du réalisme politique américain. Il s’agit d’une approche froide et dure du concept de souveraineté. La souveraineté ne devrait appartenir qu’aux grandes puissances: «Un nouvel ordre des grandes puissances». En d’autres termes, c’est la version américaine, trumpiste, d’un monde multipolaire, qui diffère assez nettement du modèle BRICS.

Première différence: le groupe BRICS n’inclut pas les États-Unis ni l’Occident; il est construit comme une alternative à eux. Cela est tout à fait logique, car jusqu’à Trump, l’Amérique fonctionnait comme le bastion de l’ordre mondialiste unipolaire. J’ai déjà dit qu’une place pour l’Amérique au sein de BRICS reste ouverte—en fait, en quelque sorte réservée—mais seulement pour une Amérique qui rompe avec la mondialisation.

Deuxième différence: Le groupe BRICS accepte des civilisations qui ne sont pas encore complètement formées. Le monde islamique, qui n’a pas encore atteint l’unité dans le développement d’une stratégie civilisationnelle commune; l’Amérique latine, qui stagne également sur le chemin de l’intégration; et le continent africain. Toutes ces civilisations sont représentées dans le groupe BRICS. En d’autres termes, le groupe BRICS est une multipolarité bienveillante « avec de la place pour croître ». Il inclut à la fois des civilisations-États déjà formées et celles qui doivent encore s’unir. C’est, pour ainsi dire, un «projet d’avenir».

Par conséquent, la différence entre «l’Ordre des Grandes Puissances» et le projet BRICS est que seules les civilisations-États existantes sont reconnues comme souveraines: les États-Unis, la Russie, la Chine et l’Inde. Le Japon y est aussi inclus—je pense que c'est pour équilibrer l'ensemble face à la Chine. Le Japon est en effet un pays puissant. S’il pouvait obtenir son indépendance vis-à-vis de l’Amérique, il pourrait très bien devenir un pôle souverain à part entière. Le C5 représente la version américaine de la multipolarité. Dans la dernière version publiée de la Stratégie de sécurité nationale des États-Unis, cette idée est clairement et directement exposée.

L’idée de créer le C5, le « Core Five » (le Noyau des 5), selon la vision des stratèges américains du mouvement MAGA (je souligne: il ne s'agit pas des néoconservateurs, pas des globalistes), signifie donner à cet «Ordre des Grandes Puissances» une sorte de statut de club. Pas encore les bases du droit international, mais un club—cette fois construit de manière totalement différente du G7, qui était rempli de divers nains occidentaux qui ne représentaient rien, comme le Canada.

Tant le G7 que le G20 étaient des clubs mondialistes dominés par l’agenda mondialiste. C’est pourquoi ils sont aujourd’hui complètement insignifiants. Et c’est précisément pour cela que la création d’un club multipolaire véritablement pertinent—le C5—est désormais à l’étude.

Mais comment la stratégie du mouvement MAGA l’envisage-t-elle? Très probablement, les États-Unis voient la création du C5 comme une alternative au groupe BRICS. Cependant, cela peut également être considéré comme un complément au groupe BRICS. Car qu’est-ce qui est fondamentalement important ici? L’absence de l’Europe, de la Grande-Bretagne, du Canada et de l’Australie.

C’est-à-dire l’absence de ces régimes qui, dans leurs derniers spasmes, s’attachent désespérément au projet mondialiste. C’est une géopolitique MAGA authentique, qui—à sa manière—reconnaît la multipolarité.

C’est pourquoi le C5 est une proposition très sérieuse. Bien sûr, elle peut être critiquée; on peut dire que le projet BRICS est meilleur. C’est ce que je pense aussi: le projet BRICS est meilleur à tous égards, sauf un: les États-Unis n’y sont pas. Et tant que les États-Unis et l’Occident n’y seront pas, personne à l’intérieur du groupe BRICS n’ose vraiment défier l'hégémonie mondiale de front. Mais ici, Trump et le mouvement MAGA font un pas en avant qui est intéressant: «Au lieu de se consolider contre nous, rejoignez-nous pour construire ensemble la multipolarité». C’est une question de grande importance et qui exige la plus haute attention. Voyons ce qui peut en sortir.

Nous vivons maintenant à un moment où Trump commence à revenir à sa stratégie MAGA d’origine, dont il s’était éloigné ces derniers mois, à une distance sidérale. Mais le moment du retour est venu. Il n’est pas fortuit qu’à ce moment précis, une proposition ait émergé pour envisager la création du club C5 (Core Five)—un développement extrêmement important, révélateur et extraordinairement intéressant.

L’essentiel est que cette proposition n'englobe pas l’Union européenne, les globalistes, ces Messieurs Soros et Schwab, le forum de Davos, l'inénarrable Macron… Ils sont tous jetés à la poubelle, avec Zelensky et le nazisme ukrainien. C’est vraiment un moment fascinant, où l’Amérique est contrainte de reconnaître la multipolarité, même si elle propose sa propre version de celle-ci.