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mercredi, 04 février 2015

À propos de « Nouveaux cathares pour Monségur » de Saint-Loup

À propos de « Nouveaux cathares pour Monségur » de Saint-Loup

par Rüdiger NON CONFORME

Ex: http://cerclenonconforme.hautetfort.com

nvxcath2956457755.jpgJ’ai comme l’impression qu’on ne lit plus beaucoup Saint-Loup (nom de plume de Marc Augier) aujourd’hui, ce que je ne peux que déplorer. Aussi, si ces quelques considérations sur l’un de ses ouvrages phares pouvaient donner à d’aucuns l’envie de se plonger dans l’œuvre de ce grand écrivain, j’en serais ravi.

 

Grand écrivain, oui, c’est indéniable. Et même si l’homme était avant tout un écrivain de combat aux idées bien trempées, il mérite d’être (re)découvert tant son talent peut séduire au-delà du lecteur typique de notre mouvance. Comme le savent ses lecteurs, Saint-Loup mettait énormément de lui-même dans ses livres et mêlait à ses convictions des thèmes chers qui avaient beaucoup compté dans son parcours personnel : la noblesse de comportement devant la vie, le dépassement de soi par le sport (ou la guerre) ou encore la joie de la camaraderie telle qu’on la pratiquait dans les Auberges de Jeunesse avant la Seconde Guerre mondiale.

 

Nouveaux cathares pour Monségur, premier volume du cycle des « Patries charnelles », entraîne le lecteur dans l’Occitanie de la fin des années 1930 à la fin des années 1960 et prend comme fil directeur le combat identitaire occitan. L’Occitanie étant l’une de ces nombreuses patries charnelles constituant l’Europe voulue par Saint-Loup, une Europe fédérale respectueuse de toutes ses identités régionales. Ce combat « régionaliste » est ainsi illustré dans ce roman datant de 1968 par une galerie de personnages bien différents dont les opinions (tant politiques que religieuses), les choix devant l’histoire de leur temps, les évolutions et les divergences apportent l’essentiel de la matière ici développée.

 

L’ombre de la croisade contre les Albigeois plane sur le récit et, pour bien des protagonistes de l’histoire, c’est la déclaration de guerre faite à l’Occitanie par la France du Nord au XIIIe siècle. En effet, pour Roger Barbaïra, héros du livre, « la France n’est pas la terre de mes pères », c’est « une patrie qui n’a d’autres contours qu’idéologiques ». Partant de ce postulat que la France écrase l’Occitanie depuis le Moyen Âge et que celle-ci se doit d’être libérée, Roger Barbaïra et sa bande de compagnons issue des Auberges de Jeunesse  vont tout faire pour lutter contre cette domination vue comme étrangère. Et c’est là que la plume de Saint-Loup s’exprime, à mon sens, le mieux. Quelle stratégie adopter à l’aube de la Seconde Guerre mondiale pour ces jeunes gens bien différents, tant dans la personnalité que dans les opinions politiques, mais unis par le combat identitaire ? Certains choisiront Vichy, d’autres le maquis communiste; Barbaïra choisira la S.S. Ils en viendront à s’entretuer ou à s’entraider, dépassés par les événements de la grande guerre civile européenne. Le combat continuera ensuite après la guerre, pour ceux qui y auront survécu et qui seront restés fidèles, avec d’autres moyens.

 

Comme dans beaucoup de livres de Saint-Loup, on retrouve l’idée de la dureté de l’engagement. Celui qui s’engage pour une cause fait face à de multiples difficultés et la guerre vécue par les différents acteurs de cette fresque occitane en sera la meilleure illustration : combattre ou s’engager au sens large, ce n’est pas aller dans le sens de la facilité, bien au contraire. Les péripéties de ceux qui auront choisi le mauvais camp et qui deviendront des « maudits » illustrent cela à merveille : ils seront traqués, torturés et tués par ceux qui prétendaient combattre pour la « paix », la « dignité » et les « droits de l’homme » et qui sont toujours adulés et loués de nos jours puisque, dans le monde moderne, il y a des persistances qui ont la vie dure.

 

sl380539376.jpgAu-delà de la question identitaire, Nouveaux cathares pour Monségur est un voyage en Occitanie, dans ses châteaux, ses montagnes, ses légendes. C’est l’occasion aussi pour Saint-Loup de traiter de religion et en particulier du catharisme. Cette foi est ainsi celle de ce mystique personnage qu’est Auda Isarn (dont le nom a été repris par une célèbre maison d’édition). Membre de la bande d’amis de Roger Barbaïra, sa beauté froide la rend désirable à bien des hommes qui s’opposeront pour l’avoir mais une telle femme, dotée d’une telle foi, peut-elle réellement appartenir à un homme et lui dévouer sa vie? Auda Isarn fait partie de ces femmes un peu mystérieuses voire insaisissables que l’on retrouve dans l’œuvre de l’auteur, telle la fameuse Morigane de Plus de pardons pour les Bretons, et est résolument le personnage le plus énigmatique de l’histoire.

 

Saint-Loup profite de son récit pour y fondre différents éléments ésotériques. C’est ainsi la rencontre entre Otto Rahn, l’auteur de Croisade contre le Graal et de La cour de Lucifer, d’une part et Roger Barbaïra et ses amis d’autre part qui donnera à ces derniers le goût du combat pour leur identité. C’est encore Otto Rahn qui mettra Barbaïra sur la piste des « vérités éternelles » par sa recherche du Graal dans les grottes proches de Monségur. Ce Graal, sous la plume de Saint-Loup, n’est plus la coupe qui recueillit le sang du Christ mais les tables de lois des Aryens « en écriture païenne enchevêtrée » dont la redécouverte changerait la face du monde moderne, ce qui explique les recherches menées par Rahn, en mission spéciale en 1938, puis par une section de l’Ahnenerbe à laquelle Barbaïra prêtera main forte durant la guerre avant de s’engager dans la Waffen S.S. Cet engagement s’explique par le fait que Barbaïra veut donner à l’Occitanie une place digne de ce nom dans l’Europe nouvelle et c’est seulement par le sang versé à la guerre qu’elle l’aura selon lui. De plus, il n’est plus, à l’aube de son départ sur le front de l’Est, qu’un simple combattant régionaliste. Il sait que ce combat fait partie d’un mouvement plus vaste, d’une conception totale du monde, d’une Weltanschauung où l’élément spirituel se mêle à l’élément biologique.

 

Qui sont ces nouveaux cathares évoqués par le titre du livre ? Vous le découvrirez avec cet ouvrage passionnant et extrêmement bien écrit, doté d’une interprétation très personnelle de l’histoire de l’Occitanie. Nouveaux cathares pour Monségur recèle de multiples richesses qui en font un très grand roman et un ouvrage absolument indispensable pour qui veut comprendre ou découvrir Saint-Loup.

 

Rüdiger Non Conforme

 

• Saint-Loup, Nouveaux cathares pour Monségur, Presses de la Cité, 1968; réédition Avalon, 1986.

 

• D’abord mis en ligne sur Cercle non conforme, le 17 novembre 2014.


Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

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lundi, 24 octobre 2011

Pierre Vial présente "Nouveaux Cathares pour Montségur" de Saint-Loup


Pierre Vial présente "Nouveaux Cathares pour Montségur" de Saint-Loup

samedi, 25 décembre 2010

Hommage à Saint-Loup

Hommage à Saint-Loup

Pierre VIAL

Ex: http://tpprovence.wordpress.com/

Il y a vingt ans aujourd’hui disparaissait Saint-Loup. En la mémoire de ce héros, nous publions un texte de Pierre Vial, L’Homme du Grand Midi, paru dans Rencontres avec Saint-Loup, publié par l’association des Amis de Saint-Loup. C’est du même ouvrage que sont extraits les illustrations de Marienne.

L’Homme du Grand Midi

europe-saint-loup.jpgJ’ai découvert Saint-Loup en décembre 1961. J’avais dix-huit ans et me trouvais en résidence non souhaitée, aux frais de la Ve République, pour incompatibilité d’humeur avec la politique qui était alors menée dans une Algérie qui n’avait plus que quelques mois à être française. On était à quelques jours du solstice d’hiver – mais je ne savais pas encore, à l’époque, ce qu’était un solstice d’hiver, et ce que cela pouvait signifier. Depuis j’ai appris à lire certains signes.

Lorsqu’on se retrouve en prison, pour avoir servi une cause déjà presque perdue, le désespoir guette. Saint-Loup m’en a préservé, en me faisant découvrir une autre dimension, proprement cosmique, à l’aventure dans laquelle je m’étais lancé. à corps et à cœur perdus, avec mes camarades du mouvement Jeune Nation. Brave petit militant nationaliste, croisé de la croix celtique, j’ai découvert avec Saint-Loup, et grâce à lui, que le combat, le vrai et éternel combat avait d’autres enjeux, et une toute autre ampleur, que l’avenir de quelques malheureux départements français au sud de la Méditerranée. En poète – car il était d’abord et avant tout un poète, c’est-à-dire un éveilleur – Saint-­Loup m’a entraîné sur la longue route qui mène au Grand Midi de Zarathoustra. Bref, il a fait de moi un païen, c’est-à-dire quelqu’un qui sait que le seul véritable enjeu, depuis deux mille ans, est de savoir si l’on appartient, mentalement, aux peuples de la forêt ou à cette tribu de gardiens de chèvres qui, dans son désert, s’est autoproclamée élue d’un dieu bizarre – « un méchant dieu », comme disait 1’’ami Gripari.

J’ai donc à l’égard de Saint-Loup la plus belle et la plus lourde des dettes – celle que l’on doit à qui nous a amené à dépouiller le vieil homme, à bénéficier de cette seconde naissance qu’est toute authentique initiation, au vrai et profond sens du terme. Oui, je fais partie de ceux qui ont découvert le signe éternel de toute vie, la roue, toujours tournante, du Soleil Invaincu.

Chaque livre de Saint-Loup est, à sa façon. un guide spirituel. Mais certains de ses ouvrages ont éveillé en moi un écho particulier. Je voudrais en évoquer plus particulièrement deux – sachant que bien d’autres seront célébrés par mes camarades.

Au temps où il s’appelait Marc Augier, Saint-Loup publia un petit livre, aujourd’hui très recherché, Les Skieurs de la Nuit. Le sous-titre précisait : Un raid de ski-camping en Laponie finlandaise. C’est le récit d’une aventure, vécue au solstice d’hiver 1938, qui entraîna deux Français au-delà du Cercle polaire. Le but ? « Il fallait,se souvient Marc Augier, dégager le sens de l’amour que je dois porter à telle ou telle conception de vie, déterminer le lieu où se situent les véritables richesses. »

Le titre du premier chapitre est, en soi, un manifeste : « Conseil aux campeurs pour la conquête du Graal. » Tout Saint-Loup est déjà là. En fondant en 1935, avec ses amis de la SFIO et du Syndicat national des instituteurs, les Auberges laïques de la Jeunesse, il avait en effet en tête bien autre chose que ce que nous appelons aujourd’hui « les loisirs » – terme dérisoire et même nauséabond, depuis qu’il a été pollué par Trigano.

Marc Augier s’en explique, en interpellant la bêtise bourgeoise : « Vous qui avez souri, souvent avec bienveillance, au spectacle de ces jeunes cohortes s’éloignant de la ville, sac au dos, solidement chaussées, sommairement vêtues et qui donnaient à partir de 1930 un visage absolument inédit aux routes françaises, pensiez-vous que ce spectacle était non pas le produit d’une fantaisie passagère, mais bel et bien un de ces faits en apparence tout à fait secondaires qui vont modifier toute une civilisation ? La chose est vraiment indiscutable. Ce départ spontané vers les grands espaces, plaines, mers, montagnes, ce recours au moyen de transport élémentaire comme la marche à pied, cet exode de la cité, c’est la grande réaction du XXe siècle contre les formes d’habitat et de vie perfectionnées devenues à la longue intolérables parce que privées de joies, d’émotions, de richesses naturelles. J’en puise la certitude en moi-même. À la veille de la guerre, dans les rues de New York ou de Paris, il m’arrivait soudain d’étouffer, d’avoir en l’espace d’une seconde la conscience aiguë de ma pauvreté sensorielle entre ces murs uniformément laids de la construction moderne, et particulièrement lorsqu’au volant de ma voiture j’étais prisonnier, immobilisé pendant de longues minutes, enserré par d’autres machines inhumaines qui distillaient dans l’air leurs poisons silencieux. Il m’arrivait de penser et de dire tout haut : « Il faut que ça change… cette vie ne peut pas durer » ».

Conquérir le Graal, donc. En partant à ski, sac au dos, pour mettre ses pas dans des traces millénaires. Car, rappelle Marc Augier, « au cours des migrations des peuples indo-européens vers les terres arctiques, le ski fut avant tout un instrument de voyage ». Et il ajoute : « En chaussant les skis de fond au nom d’un idéal nettement réactionnaire, j’ai cherché à laisser derrière moi, dans la neige, des traces nettes menant vers les hauts lieux où toute joie est solidement gagnée par ceux qui s’y aventurent ». En choisissant de monter, loin, vers le Nord, au temps béni du solstice d’hiver, Marc Augier fait un choix initiatique.

« L’homme retrouve à ces latitudes, à cette époque de l’année, des conditions de vie aussi voisines que possible des époques primitives. Comme nous sommes quelques-uns à savoir que l’homme occidental a tout perdu en se mettant de plus en plus à l’abri du combat élémentaire, seule garantie certaine pour la survivance de l’espèce, nous avons retiré une joie profonde de cette confrontation [...]. Les inspirés ont raison. La lumière vient du Nord… [...] Quand je me tourne vers le Nord, je sens, comme l’aiguille aimantée qui se fixe sur tel point et non tel autre point de l’espace, se rassembler les meilleures et les plus nobles forces qui sont en moi ».

Dans le grand Nord, Marc Augier rencontre des hommes qui n’ont pas encore été pollués par la civilisation des marchands, des banquiers et des professeurs de morale.

Les Lapons nomades baignent dans le chant du monde, vivent sans état d’âme un panthéisme tranquille, car ils sont : « en contact étroit avec tout un complexe de forces naturelles qui nous échappent complètement, soit que nos sens aient perdu leur acuité soit que notre esprit se soit engagé dans le domaine des valeurs fallacieuses. Toute la gamme des croyances lapones (nous disons aujourd’hui « superstitions » avec un orgueil que le spectacle de notre propre civilisation ne paraît pas justifier) révèle une richesse de sentiments, une sûreté dans le choix des valeurs du bien et du mal et, en définitive, une connaissance de Dieu et de l’homme qui me paraissent admirables. Ces valeurs religieuses sont infiniment plus vivantes et, partant, plus efficaces que les nôtres, parce qu’incluses dans la nature, tout à fait à portée des sens, s’exprimant au moyen d’un jeu de dangers, de châtiments et de récompenses fort précis, et riches de tout ce paganisme poétique et populaire auquel le christianisme n’a que trop faiblement emprunté, avant de se réfugier dans les pures abstractions de l’âme ».

Le Lapon manifeste une attitude respectueuse à l’égard des génies bienfaisants, les Uldra, qui vivent sous terre, et des génies malfaisants, les Stalo, qui vivent au fond des lacs. Il s’agit d’être en accord avec l’harmonie du monde :

« passant du monde invisible à l’univers matériel, le Lapon porte un respect et un amour tout particuliers aux bêtes. Il sait parfaitement qu’autrefois toutes les bêtes étaient douées de la parole et aussi les fleurs, les arbres de la taïga et les blocs erratiques… C’est pourquoi l’homme doit être bon pour les animaux, soigneux pour les arbres, respectueux des pierres sur lesquelles il pose le pied. »

C’est par les longues marches et les nuits sous la tente, le contact avec l’air, l’eau, la terre, le feu que Marc Augier a découvert cette grande santé qui a pour nom paganisme. On comprend quelle cohérence a marqué sa trajectoire, des Auberges de Jeunesse à l’armée européenne levée, au nom de Sparte, contre les apôtres du cosmopolitisme.

Après avoir traversé, en 1945,  le crépuscule des dieux. Marc Augier a choisi de vivre pour témoigner. Ainsi est né Saint-Loup, auteur prolifique, dont les livres ont joué, pour la génération à laquelle j’appartiens, un rôle décisif. Car en lisant Saint-Loup, bien des jeunes, dans les années 60, ont entendu un appel. Appel des cimes. Appel des sentiers sinuant au cœur des forêts. Appel des sources. Appel de ce Soleil Invaincu qui, malgré tous les inquisiteurs, a été, est et sera le signe de ralliement des garçons et des filles de notre peuple en lutte pour le seul droit qu’ils reconnaissent – celui du sol et du sang.

Cet enseignement, infiniment plus précieux, plus enrichissant, plus tonique que tous ceux dispensés dans les tristes et grises universités, Saint-Loup l’a placé au cœur de la plupart de ses livres. Mais avec une force toute particulière dans La Peau de l’Aurochs.

Ce livre est un roman initiatique, dans la grande tradition arthurienne : Saint-Loup est membre de ce compagnonnage qui, depuis des siècles, veille sur le Graal. Il conte l’histoire d’une communauté montagnarde, enracinée au pays d’Aoste, qui entre en résistance lorsque les prétoriens de César – un César dont les armées sont mécanisées – veulent lui imposer leur loi, la Loi unique dont rêvent tous les totalitarismes, de Moïse à George Bush. Les Valdotains, murés dans leur réduit montagnard, sont contraints, pour survivre, de retrouver les vieux principes élémentaires : se battre, se procurer de la nourriture, procréer. Face au froid, à la faim, à la nuit, à la solitude, réfugiés dans une grotte, protégés par le feu qu’il ne faut jamais laisser mourir, revenus à l’âge de pierre, ils retrouvent la grande santé : leur curé fait faire à sa religion le chemin inverse de celui qu’elle a effectué en deux millénaires et, revenant aux sources païennes, il redécouvre, du coup, les secrets de l’harmonie entre l’homme et la terre, entre le sang et le sol. En célébrant, sur un dolmen, le sacrifice rituel du bouquetin – animal sacré car sa chair a permis la survie de la communauté, il est symbole des forces de la terre maternelle et du ciel père, unis par et dans la montagne –, le curé retrouve spontanément les gestes et les mots qui calment le cœur des hommes, en paix avec eux-mêmes car unis au cosmos, intégrés – réintégrés – dans la grande roue de l’Éternel Retour.

De son côté, l’instituteur apprend aux enfants de nouvelles et drues générations qui ils sont, car la conscience de son identité est le plus précieux des biens : « Nos ancêtres les Salasses qui étaient de race celtique habitaient déjà les vallées du pays d’Aoste. » et le médecin retrouve la vertu des simples, les vieux secrets des femmes sages, des sourcières : la tisane des violettes contre les refroidissements, la graisse de marmotte fondue contre la pneumonie, la graisse de vipère pour faciliter la délivrance des femmes… Quant au paysan, il va s’agenouiller chaque soir sur ses terres ensemencées, aux approches du solstice d’hiver, et prie pour le retour de la la lumière.

Ainsi, fidèle à ses racines, la communauté montagnarde survit dans un isolement total, pendant plusieurs générations, en ne comptant que sur ses propres forces – et sur l’aide des anciens dieux. Jusqu’au jour où, César vaincu, la société marchande impose partout son « nouvel ordre mondial ». Et détruit, au nom de la morale et des Droits de l’homme, l’identité, maintenue jusqu’alors à grands périls, du Pays d’Aoste. Seul, un groupe de montagnards, fidèle à sa terre, choisit de gagner les hautes altitudes, pour retrouver le droit de vivre debout, dans un dépouillement spartiate, loin d’une « civilisation » frelatée qui pourrit tout ce qu’elle touche car y règne la loi du fric.

Avec La Peau de l’Aurochs, qui annonce son cycle romanesque des patries charnelles, Saint-Loup a fait œuvre de grand inspiré. Aux garçons et filles qui, fascinés par l’appel du paganisme, s’interrogent sur le meilleur guide pour découvrir l’éternelle âme païenne, il faut remettre comme un viatique, ce testament spirituel.

Aujourd’hui, Saint-Loup est parti vers le soleil.

Au revoir camarade. Du paradis des guerriers, où tu festoies aux côtés des porteurs d’épée de nos combats millénaires, adresse-nous, de tes bras dressés vers l’astre de vie, un fraternel salut. Nous en avons besoin pour continuer encore un peu la route. Avant de te rejoindre. Quand les dieux voudront.

Pierre Vial

Source : Club Acacias.