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samedi, 24 mai 2008

La crise de lla citoyenneté n'est pas une fatalité...

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Chers amis,
Voici un exemple de “dissertation” ou de “composition” demandée à une élève du secondaire. Le sujet nous interpelle directement. Voici une manière de répondre sans trahir nos idées fondamentales, en les exprimant dans un langage “classique”. Seule la conclusion contient quelques “illusions” conventionnelles pour ne pas effrayer certains ressortissants de la caste enseignante, à l’estomac si délicat, de nos jours... Nous vous  prions de nous en excuser, mais  vous savez très bien comment il faut penser. Qu’elle vous  serve de modèle pour vos propres enfants ou petits-enfants !
 

La crise de la citoyenneté n’est pas une fatalité

La citoyenneté est une qualité comme l’indique le suffixe “té”. Elle est la qualité de l’homme qui est citoyen, qui, par définition, est membre actif, participant, d’une Cité qui fonctionne selon des règles, des rituels, soit des élections, des débats sur le forum, l’agora ou l’arène parlementaire. Ces règles, rituels, modes électoraux sont le fruit d’une histoire particulière propre à la Cité même du citoyen et non pas d’une autre Cité, peuplée de citoyens habitués à d’autres règles ou d’autres rituels. L’histoire antique, surtout l’histoire grecque, source de la pensée occidentale, nous montre bien ce qu’est une pluralité de Cités différentes, et souvent antagonistes, au sein d’un même écoumène, grec/hellénique en l’occurrence. Rome nous  a enseigné une  plus grande unité et une plus grande cohérence impériale mais, dans la pratique, elle laissait subsister les “civitates” (singulier: “civitas”) locales  et acceptait la pluralité ineffaçable des rituels particuliers, jaillis de sols différents. La religion fondamentale  de la Vieille Rome est une religion de la terre, des lieux (loci), de la nature (la déesse Pomona, le dieu Sylvaticus). La Grèce et Rome nous lèguent donc l’idée d’un citoyen actif, participant, ancré dans une histoire particulière précise, qu’il maîtrise, dont l’horizon lui est familier. Plus tard, le niveau de la Cité a été transcendé par celui, plus vaste, de l’Etat (national).

L’Etat national classique, né des suites de la révolution française, est un horizon déjà moins saisissable par le citoyen, dont les limites sont les limites de l’intelligence humaine, qui est incapable de connaître tous les paramètres de l’univers. L’Etat est plus vaste que la Cité grecque ou que la Civitas inclue dans l’Empire romain, plus vaste que la province médiévale ou d’ancien régime. Mais l’horizon de l’Etat reste accessible au citoyen doté d’un minimum de culture, ayant subi un temps de scolarité minimal. La globalisation à l’œuvre depuis quelques décennies ne veut avoir que les seules limites du monde comme horizon. Elle veut donc dépasser les limites traditionnelles de la Cité ou de l’Etat. Et impose à l’homme, au citoyen, un élargissement peut-être trop rapide. L’homme moyen, le citoyen de base, celui qui est censé ne pas ignorer les lois, ne peut pas passer aisément de l’horizon restreint et connu de  la Cité, à celui, planétaire et inconnu, du globe.

La crise de la citoyenneté que nous observons aujourd’hui vient de cet élargissement démesuré de l’horizon politique. Le citoyen est désorienté. Ne connait pas les mœurs, les rituels, les règles qui  président à la vie des autres, de ceux qui sont censés devenir ses con-citoyens dans le village global. Il en vient à les haïr. Il rejette ce qu’il ne connaît pas, ce qui lui semble étranger. Il sent, au fond de son cœur que ses traditions, léguées par la lignée de ses ancêtres, va se retrouver submergée sous un flot de traditions, de coutumes étrangères, dont il ne connaît pas les tenants et aboutissants. Si ses dirigeants chantent les vertus d’un globalisme à venir, il perdra confiance, tournera le dos à la politique et même à la notion cardinale de représentation (parlementaire), ne comprendra plus leur discours, haïra leurs discours : ainsi le citoyen autochtone d’Europe occidentale en viendra  à haïr son concitoyen musulman,  car il refusera d’adopter des mœurs musulmanes, à haïr la caste dirigeante de son pays qui veut lui imposer le voisinage de ces mœurs et coutumes musulmanes. Et le musulman immigré en viendra à haïr l’autochtone, dont il refusera d’adopter les mœurs qu’il jugera dépravées. La crise de la citoyenneté est ce téléscopage de différences, sur fond de perte de repères sûrs, avérés, ataviques. L’augmentation du refus de  se rendre  aux urnes, comme en France par exemple, est un indice patent de  cette crise actuelle.

Le globalisme et l’effacement des repères sont-ils une fatalité, l’humanité, faite de toutes ses différences, est-elle condamnée pour les siècles des siècles à errer dans cette sorte de no-man’s-land où il n’y a plus vraiment de limites visibles et où il n’y a pas encore d’universalité réellement établie?

On peut ne pas le penser. Pour une raison simple, pour une raison ontologique. Aristote nous enseignait, à l’époque des Cités grecques, certes, mais aussi à l’époque où le premier Etat universel cherchait à prendre forme, celui d’Alexandre le Grand, que l’homme était avant toute chose un “animal politique”, un “zoon politikon”, donc un être imbriqué dans une “Polis”, terme grec désignant la “Cité”. Or toute “polis” est par définition limitée. L’homme, de par sa constitution ontologique, est contraint de manœuvrer dans les limites que lui ont assigné son temps et son lieu, l’histoire de son peuple et le site géographique qu’il occupe. Par conséquence, la crise, moment passager, déchirure parfois cruelle, mais toujours transitoire, n’est pas une fatalité.

L’homme retournera donc à son propre, à des limites acceptables, gérables par son intelligence limitée, gérables dans le cadre de sa vie à la durée, elle aussi, limitée. Mais à la différence des conflictualités qui ont déchiré l’humanité jadis, le message d’universalité qui court d’Alexandre le Grand à l’Empire romain, et de cet Empire romain à l’écoumène médiéval européen sous le signe chrétien, conduira peut-être à une juxtaposition plus pacifique des différences humaines. Rien n’est écrit. L’avenir est ouvert. Les fatalités, que l’on croit être inéluctables, sont finalement dépassables, si on est doté d’une volonté et d’une clarté d’esprit suffisamment fortes.

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