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mardi, 26 août 2008

Pour un populisme offensif!

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Pour un populisme offensif!

Le terme “populisme” désigne tous les mouvements politico-sociaux qui dérangent et qui ne sont pas assimilables à la gauche classique, au nationalisme traditionnel ou à une forme ou une autre de néo-fascisme ou de néo-nazisme. Le “populisme” est un mouvement politique qui s'adresse directement au peuple, qui est animé par des hommes et des femmes qui sont eux aussi directement issus du peuple, qui, avant de passer à l'action politique, n'appartenaient à aucun réseau "traditionnel”, à aucun parti en place. Le populisme, c'est la spontanéité populaire, c'est la réaction directe du peuple, de la population, surtout dans les grandes villes où, justement, les attaches avec les réseaux partisans conventionnels se sont relâchées et où cette population, venue généralement des quatre coins du pays, ne se reconnaît plus dans les agences politiques de l'établissement.

Le peuple, c'est avant toute chose, les hommes et les femmes qui doivent travailler chaque jour pour gagner leur vie, c'est l'ensemble de ceux qui ne sont pas sûrs du lendemain, que guette le spectre du chômage, ce sont aussi ceux qui n'ont pas la garantie de l'emploi et qui sombrent parfois dans ce chômage désormais omniprésent et dans ses humiliations: faire interminablement la file à la CAPAC pour ne demander rien que son droit le plus strict à des apparatchiks grossiers, subir la scandaleuse tracasserie du pointage, quémander un emploi auprès de fonctionnaires qui se fichent de votre destin et de votre misère comme un poisson d'une pomme. En latin, travailler se dit laborare, ce qui veut également dire souffrir. Le populisme est donc l'idéologie de ceux qui travaillent donc qui souffrent.

Car, chacun le sait, travailler sans souci du lendemain n'est plus une évidence aujourd'hui. Depuis plus de vingt ans, l'incompétence et l'insouciance des partis en place, des coalitions rouges-romaines ou bleues-romaines, a plongé le pays dans une basse conjoncture aux effets négatifs devenus permanents. L'ensemble de la population est appauvri sur fond d'une dette publique colossale, qui fait que chacun d'entre nous, du nourrisson au centenaire et immigrés compris, est endetté pour un million de francs! Cette situation malsaine, la plus malsaine d'Europe en ce qui concerne l'endettement public, fait que le chômage frappe les jeunes, qui ne fondent plus de famille, qui n'ont plus d'enfants, qui vivent dans la précarité et l'instabilité financière, qui sont exclus des circuits du travail, qui alimentent les effectifs de la “nouvelle pauvreté”. Notre pays perd sa population tout simplement parce que les générations ne se renouvellent plus, le mal-vivre ne permettant pas de voir la vie en rose, de cultiver la sérénité qu'il faut avoir pour élever des enfants. Dans une vingtaine ou une trentaine d'années, notre pays sera un gigantesque hospice, financé par une poignée de personnes qui travailleront encore.

L'établissement nous dit: «Mais ce sont les immigrés qui payeront nos pensions...». Ce discours est malhonnête. D'abord pour les immigrés eux-mêmes qui songent tout naturellement aux leurs d'abord, à éduquer leurs propres enfants, et non pas à financer les pensions d'une population qui leur est étrangère et à qui ils reprocheront d'avoir élu de mauvais bergers. Enfin, les immigrés, même ceux qui sont les mieux payés, touchent des bas salaires et ne paient pas suffisamment d'impôts pour financer une aussi gigantesque machine. Ensuite, précarisés eux-mêmes dans un pays qui leur a promis monts et merveilles et ne leur a donné que le chômage, les immigrés font aussi de moins en moins d'enfants. Donc ceux sur qui nos lamentables escrocs comptent pour payer nos pensions, n'existeront tout simplement pas, parce qu'on n'aura pas eu le cœur de les engendrer! Il y a ensuite tout lieu de croire que les flux migratoires vont s'inverser: ne trouvant plus d'emplois stables chez nous, les allocations se faisant de plus en plus congrues, étant de plus en plus bouffées par l'inflation, les jeunes immigrés vigoureux et courageux iront chercher un destin ailleurs, dans des pays où la conjoncture est haute.

Le bilan de tout cela, c'est que personne n'a été intégré: ni les autochtones ni les immigrés. La source de notre malaise, c'est effectivement que les recettes de l'établissement ne permettent plus aucune forme d'intégration sociale. On le constate aisément: les statistiques et les travaux d'observation des grands instituts européens, comme l'OCDE, parlent sans arrêt d'une désagrégation de la société, démontrent que les immigrés sont les premières victimes du chômage donc qu'ils ne sont nullement intégrés et risquent de rester inintégrables, vu le manque de moyens. Tel est donc le langage que nous tient l'OCDE, qui constate la faillite de toutes les formes d'intégration sociale pour les autochtones comme pour les immigrés; mais au lieu de prendre cette misère à bras le corps, de chercher des solutions réalisables, de fixer des projets clairs, satisfaisants pour tous, l'établissement esquive les vrais problèmes et camoufle ses carences derrière un formidable battage publicitaire et médiatique où l'on ne parle plus que d'intégration et où l'on promet le purgatoire et l'enfer à tous ceux qui oseraient douter de l'opportunité de ce miroir aux alouettes.

Personne ne peut être hostile à la notion d'intégration et nous ne le sommes pas a priori, car nous aimerions que chaque concitoyen, que chaque étranger qui est notre hôte, ait son boulot, son atelier, puisse travailler selon son cœur et ses aptitudes. Animés comme tous les populistes par une volonté sincère de donner à chacun son dû, nous sommes tout simplement hostiles aux prometteurs de beaux jours, aux charlatans et aux menteurs: cette intégration tous azimuts n'est malheureusement plus possible et le sera encore moins demain. Nos enfants ne sont déjà plus pleinement intégrés à la société dans laquelle ils vivent et les enfants des immigrés risquent bien de connaître un sort pire, même s'ils ont réussi de brillantes études, comme certains sont en train de le faire.

Pour reprendre un vieux slogan socialiste, les “damnés de la terre” sont revenus à l'avant-plan. Et ces “damnés de la terre”, c'est nous! Cette position peu enviable postule d'organiser la résistance et de s'opposer rationnellement et efficacement à tous ceux qui jouissent de privilèges indûs dans notre société, qui bénéficient de pensions exagérément élevées, qui ne subissent pas le principe du cumul des époux et/ou des cohabitants dans la fiscalisation des pensions, qui bénéficient de clauses de stabilité d'emploi dont les salariés ne bénéficient plus et dont les indépendants ne peuvent que rêver, qui ont obtenu des emplois dans la fonction publique en dépit de l'inutilité de ces postes. La priorité doit être redonnée en matières d'emploi et de lois sociales à tous ceux qui travaillent dans la précarité, qui doivent lutter âprement, chaque jour que Dieu fait, pour vivre, qu'ils soient indépendants ou salariés.

Car se déclarer “populiste”, c'est marquer une volonté d'aller au réel et de ne pas vouloir transformer le monde d'après une idéologie toute faite, d'après des planifications qui ne masquent que très mal les intentions idéologiques de leurs auteurs. En effet, le peuple est un tout complexe, composé de personnalités et d'individus très différents les uns des autres. Développer un discours ou une action populistes ne signifie pas une volonté de mettre au pas ces innombrables différences entre les personnes, mais constater que celles-ci ne peuvent plus déployer leurs originalités, exercer leurs compétences, si le pays est mal gouverné, si l'endettement jugule toutes les initiatives intelligentes. Aussi différentes que soient les personnes qui composent notre peuple, elles partagent une sorte de destin, de fatalité: elles vivent non seulement sur un même espace géographique mais aussi sous un seul régime politique qui finit par les exclure du marché du travail, par leur confisquer leur liberté de créer, par les ligoter dans leur élan par une fiscalité qui sert avant tout à nourrir les suppôts fonctionnarisés du régime ou à payer les intérêts pharamineux de la dette. La démocratie, qu'il ne s'agit pas de nier ici, a prévu l'alternance: si un gouvernement ou une coalition ne donne pas satisfaction, il faut mettre les meilleurs challengeurs au pouvoir, s'ils sont choisis par le peuple. En rendant nulle et non avenue la séparation des trois pouvoirs, en nommant les magistrats en dépit de l'indépendance que devrait avoir le pouvoir judiciaire, en rendant la séparation entre le législatif et l'exécutif illusoire à cause du poids des partis et des chefs de parti, le régime a perdu sa légitimité démocratique: le recours au peuple, à ces innombrables différences qu'il recèle, devient donc une nécessité. Il faut inventer de nouveaux mécanismes de pouvoir ou en réexhumer dans nos traditions politiques.

Le régime se défend, bien évidemment. Il veut conserver la non-démocratie qui le maintient au pouvoir et empêcher tout recours au peuple réel.

- D'où des trains de lois qui décrèteront “raciste” toute question relative au bien-fondé, à l'utilité ou à l'efficacité de l'immigration (répétons-le: nous sommes hostiles au mécanisme économique qui consiste à recourir à l'immigration, nous déplorons la non-intégration de masses immigrées et juvéniles désœuvrées, nous déplorons la petite criminalité qui en découle en en rendant prioritairement responsable le pouvoir et non pas les délinquants, nous refusons toute démarche qui serait a priori hostile à des personnes en vertu de leurs appartenance à une race ou à une religion autres que celles de la majorité de la population).

- D'où les tentatives de juguler l'action des syndicats qui débordent leur encadrement dévoué d'une façon ou d'une autre au pouvoir, notamment aux partis socialistes.

- D'où la suppression subtile de la liberté de la presse par un contrôle systématique des rubriques “courrier des lecteurs”.

- D'où l'augmentation scandaleuse des tarifs postaux pour les éditeurs de revues indépendantes, qui pourraient préparer des équipes à reprendre les affaires en mains (c'est là une manière de ruiner les audacieux qui osent faire usage de leur droit à la parole).

- D'où la déconstruction systématique de l'enseignement, de façon à raréfier l'esprit critique dans les nouvelles générations: l'enseignement gratuit de qualité avait été un des plus beaux acquis démocratiques de ce siècle; le pouvoir est en train de le démonter pour faire de nos enfants un vulgaire troupeau de moutons de Panurge, taillable et manipulable à souhait. C'est la raison pour laquelle les populistes doivent défendre les enseignants et l'enseignement.

Le populisme peut recevoir une interprétation de gauche ou une interprétation de droite. Il est de gauche quand il prend appui sur des injustices sociales flagrantes, quand il vient d'une base ouvrière lésée, quand il prend racine dans des comités de quartiers. Il est de droite quand il veut dépasser les divisions naturelles de la société en mythifiant l'unité de destin des personnes et en évoquant ainsi l'unité mythique de la Nation, quand il se range derrière la bannière d'un chef politique charismatique ou d'une élite de notabilités traditionnelles. Mais les frontières entre populisme de gauche et populisme de droite sont floues et poreuses. Le peuple dans sa plénitude et dans ses différences transcende le clivage d'une gauche ou d'une droite: le peuple est un, il n'y a pas deux demi-peuples.

Le populisme, répétons-le, n'est pas une idéologie pré-fabriquée que l'on plaquerait sur une réalité mouvante et rétive. Le populisme, c'est le recours à la réalité quotidienne.

Dans notre contexte, celui des dix-neuf communes de la Région de Bruxelles-Capitale, la réalité quotidienne ne fonctionne plus correctement parce qu'une immigration incontrôlée, avec beaucoup de clandestins, ne parvient pas à s'intégrer, parce qu'un urbanisme délirant chasse les hommes de chair et de sang pour faire place aux bureaux et aux administrations eurocratiques, parce que la convivialité disparaît. L'immigration n'aurait pas posé beaucoup de problèmes si nos dirigeants avaient respecté scrupuleusement les clauses des accords belgo-marocains, prévoyant des contrats de travail pour cinq ans seulement, sans regroupement familial, dans cinq secteurs précis de l'industrie. Pacta sunt servanda, les traités (pactes et accords) doivent être respectés, dit l'adage latin. Quand les Belges se plaignent de l'immigration, c'est ce que leur répondent les autorités marocaines: si vous aviez respecté nos accords à la lettre, l'immigration n'aurait pas posé de problèmes, vous n'avez donc qu'à vous en prendre à vous-mêmes. Les débordements d'une jeunesse immigrée déboussolée, la non-intégration, le taux de chômage des immigrés sont des effets pervers de la négligence de nos gouvernants et non pas des immigrés ou des autochtones qui seraient brusquement devenus des “racistes”. L'afflux d'immigrés et d'eurocrates, couplé à un urbanisme spéculateur et axé sur la seule construction de bureaux, fait augmenter considérablement le coût du logement à Bruxelles, l'espace se raréfie pour les familles et les enfants, la population de souche doit migrer vers les campagnes ou les communes périphériques du Brabant flamand ou wallon, ce qui fait disparaître la convivialité et monter la tension entre les plus démunis qui restent dans leur ville natale et les nouveaux arrivants qui ne comprennent pas pourquoi ils sont mal reçus.

Chômage, dette, urbanisme spéculateur, disparition de la convivialité ambiante, nécessité de respecter les traités signés pour réguler harmonieusement les flux migratoires: ce sont là autant de problèmes auxquels il s'agit désormais de donner une forme politique, non idéologique, réalitaire et populiste. En forgeant cette forme politique, nous donnerons de la substance à la protestation populaire contre les déraillements de l'établissement et des partis au pouvoir depuis des décennies et des décennies.

Les objectifs d'un nouveau populisme à Bruxelles:

- répondre aux problèmes de la vie quotidienne;

- opposer aux partis établis une logique du bon sens;

- libérer les énergies du peuple réel qui ont été brimées pendant trop longtemps.

Robert STEUCKERS.

(texte de 1999). 

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