dimanche, 08 mars 2009
Dans les coulisses de la crise, la nouvelle guerre du pétrole
Dans les coulisses de la Crise, la nouvelle guerre du pétrole
Par Maxime Lion
Altermedia France
L’organisation des Pays exportateurs de Pétrole (Opep) pourrait procéder à une nouvelle baisse de sa production, en mars, lors de sa prochaine réunion à Vienne. C’est en tout cas ce qu’a affirmé samedi à Alger le ministre algérien de l’Énergie et des mines Chakib Khelil. Raisons invoquées : le possible maintien à la baisse des cours du brut. Ceci alors même que l’Agence internationale de l’Énergie abaissait vendredi ses prévisions de demande mondiale pétrolière, tablant désormais sur une contraction en 2009 comme en 2008. L’occasion de faire le point sur un marché fondamental de l’économie moderne où le politique n’est jamais loin.
Une véritable guerre « discrète » fait aujourd’hui rage sur le marché du Pétrole. Du côté des offreurs, l’Organisation des Pays Producteurs de Pétrole, qui représente 40 % de la production mondiale et qui bénéficie du soutien de la Russie, se veut le syndicats de défense des pays producteur : il rêve d’un baril de pétrole à 60 $ afin de rentabiliser l’ensemble des exploitations des ses membres, et d’assurer de confortables profits pour les plus compétitifs d’entre eux, comme l’Arabie Saoudite. La demande, quant à elle, s’organise pour l’essentiel autour des pôles occidentaux et asiatiques. Cependant, les États-Unis, premier consommateur au monde d’hydrocarbure et inventeurs de toute la filière économique du pétrole, donne le la : le prix du pétrole est actuellement gouverné par le niveau des stocks américains de pétrole. Depuis l’été dernier, il oriente les courts toujours dans le même sens, la baisse.
Si la baisse des courts s’explique avant tout par une cause objective - la chute de la demande de pétrole attestée par la litanie des rapports mensuels de l’Agence Internationale de l’Énergie annonçant une régression de la consommation de brut de 0,6 % en 2009 - elle devrait être compensée en grande partie par le diminution de la production de l’OPEP, suivie par celle opérée par la Russie. L’objectif est de relancer le baril à la hausse pour atteindre un objectif de court terme de 45 $ la baril. Or, peine perdue : alors que les consignes ont été relativement suivies par les pays membres de l’organisation, la production se maintient, voire augmente légèrement. Qui sont les coupables, augmentant leur production contre toute logique économique ? La réponse : des pays à la fois producteur et consommateur qui ont plus à perdre dans les surcoûts d’un pétrole en hausse que dans les pertes de leur propre puits… et en tout premier lieu les États-Unis, suivis de la Chine et du Brésil.
La baisse des courts du pétrole semble ainsi être devenu un objectif majeur de la politique américaine. Certains y ont vu un motif essentiel de la volonté de l’oncle Sam de freiner les ardeurs israéliennes quant à une campagne de raids aériens sur l’Iran, craignant les conséquences d’un conflit prolongé au Moyen Orient sur les courts de l’or noir. Qu’est-ce qui pousse les Américains à maintenir à grand frais les courts du pétrole à des courts les plus bas possibles, quitte à hypothéquer l’avenir de leur propre industrie pétrolière ?
La réponse est simple : le choix de la surchauffe de la planche à billet comme moyen de venir à bout de la crise, voire de la dépression économique. Le nouveau président O’Bama a promis d’injecter 850 milliards de dollars dans l’économie américaine sous forme d’infrastructures et de réduction d’impôts. D’où vient l’argent ? De bons du trésor dont la valeur repose dans la crédulité des étrangers dans la puissance de l’Oncle Sam. Si ces derniers ne suffisent pas, la planche à billet fera le reste. Or ce schéma ne fonctionne que tant que la confiance en la monnaie est maintenue par une inflation quasi nulle, garantissant, du moins à court terme, son pouvoir d’achat. Or le facteur principal de la chute de l’inflation aux Etats-unis, au point qu’elle devienne une véritable déflation, est justement la chute des courts des hydrocarbures. Une forte augmentation des courts de pétrole, ou choc exogène, suite à une crise géopolitique, aurait pour conséquence de relancer dramatiquement l’inflation et ainsi de transformer les injections massives de liquidités dans l’économie en empoisonnement du système financier mondial. A la crise - se matérialisant par la chute des valeurs des actifs, actions et immobiliers, c’est-à-dire une destruction de richesse - s’ajouterait l’effondrement du dollar, ce qui finirait de laminer le revenu des actifs… Il s’agit du pire scénario des économistes, l’hyper-inflation, qui se caractérise par une défiance générale pour la monnaie papier dite fiduciaire. Cette dernière revient à sa valeur intrinsèque, c’est-à-dire quasi-nulle, celle d’un petit papier imprimé en quadrichromie… Ceci signifierait l’arrêt de mort du dollar, et donc la fin de l’empire américain car il n’y a pas d’Empire sans impôt impérial.
Les liens entre le Politique et l’Économique ne sont jamais aussi forts qu’en tant que crise, et l’Histoire n’est jamais loin. Si la crise a aujourd’hui surtout le goût amer des licenciements et du marasme, marquant la fin d’un modèle économique, elle est aussi l’annonce de changements profonds, du mutations insoupçonnées. A nous de les décryptées afin de fêter la fin de ce « monde vétuste et sans joie… »
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