jeudi, 04 mars 2021
Un Dix-Huit Brumaire et un Coup d'Etat légal en Italie
Un Dix-Huit Brumaire et un Coup d'Etat légal en Italie
Wernerius von Lothringen
Lorsque le Président de la République italienne s'adressa aux partis politiques italiens le 3 février 2021, dans le but de former un gouvernement à majorité parlementaire assurée, faisant appel à Mario Draghi comme Président désigné du Conseil des Ministres, il ne savait pas encore qu'il aurait enclenché un processus de recomposition institutionnelle, conduisant à un Coup d'Etat légal.
En effet pour le Chef de l'Etat , la République c'était le Parlement et non pas le pays réel, c'était la fiction de la représentation politique et non pas l'opinion .Le cap de la boussole historique était la Constitution républicaine et non pas le peuple , la légalité et non pas sa présomption.
La droite eut beau de faire appel désespérément aux élections,pour mettre en accord légalité et légitimité,représentation et volonté populaire.
La décision du Président de la République affirma légalement le contraire. Légalement mais pas légitimement.
Le Président avait-il prévu que l'interférence continue de la légalité et de la légitimité, aurait favorisé la transformation de la fonction du Président du Conseil désigné, en figure consulaire ? L'investiture de ce garant de la dernière chance de la politique italienne était bien et sans nuance celle du Sénat de Rome dans les temps sombres de la république romaine, lorsque tombait l'épée de Damoclès sur la sécurité et la perspective de conflit aux portes: "Caveant Consules ne Respublica détrimenti capiat!". Or le Rubicon avait été franchi et dans le ballet des vas et vient des consultations ils ne manquaient que les toges immaculées des sénateurs!
Dans l'arène affolée des nouveaux convertis à la catéchèse du Salut et à son César, le rôle du procureur des moeurs anciennes , le rôle de Cicéron, était assuré par un femme, Giorgia Meloni, dans la fonction catilinaire de dissidente et de tribun du peuple.
Elle y assurait la voix de l'opposition et de la démocratie, en solitaire , dans un Parlement devenu soudainement docile et servile, mais globalement épaté et hostile .
Une voix patriote, anti-unanimiste et de droite qui sera insultée, invectivée et humiliée par un professeur universitaire de gauche, assurant la profondeur de la haine de classe, dans une institution d'enseignement supérieur, publique, laïque et pluraliste. Cette institution comme les assemblée d'étudiants et la rue en révolte,étaient aux mains, depuis 68, d'une contestation endémique, devenue post-coloniale.
La situation politique grave, d'émergence, anti-politique et insurrectionnelle de l'Italie était semblable à celle d'Espagne, de France ou du Danemark. Guerrilla urbaine, caillassages, incendies, pillages, vols de masse . Une situation avortée, grâce à Dieu d'un révolution improbable.
Il manquait le parti révolutionnaire, les révolutionnaires de profession, la volonté d'en finir avec le système et faisait défaut, en particulier, l'Homme providentiel. Manquait également la haine instinctive du peuple et la résurgence des sentiments et des préjugés des "larges masses" contre l'Etat.
En fait la défense de l'Etat était assurée par des mesures de police et guère par l'armée, car les problèmes qui étaient posés étaient ceux de la classe politique et pas du pouvoir institutionnel, de la liberté et de la tyrannie .
Les Black- Blocs n'étaient pas l'expression du peuple de souche ,mais de fauteurs de désordre et de chaos, immigrés et déracinées, inintégrables et dangereux. Ils n'avaient rien d'autre à proposer que de la destruction, de la négation et du nihilisme.
La grande nouveauté, c'était, en revanche, la variété de la protestation et l'hétérogénéité de la représentation politique, verbeuse et fragmentée.
Le paradigme du changement n'était plus l'espoir mais le retour à la légalité trahie. C'est pourquoi César et le Chef de l'Etat incarnaient l'avenir du pays et celui du menu peuple.
Le Thermidor de Draghi n"était pas encore là et Lucien Bonaparte ou Sieyès, ne tissaient nullement les ficelles de l'intrigue, derrière le calme apparent de Draghi-Napoléon.
Les petits Bolchéviks de la Ligue et les infimes Menchéviques libéraux-démocrates de feu le Mouvement 5 Etoiles ne pouvaient préfigurer une insurrection ni une alternative à César, car les réformes du Conte-Kerenski ne pouvaient aller plus loin que les plans de Soros-Bill Gates ou Klaus Schwab de Davos, dans la réinitialisation de l'économie, finalement verte et universelle.
Une économie qui devait correspondre aux prêches de Greta Thunberg et des coalitions sexiste LGBT, transgenres, islamo-gauchistes, des groupes progressifs Rock et des mouvements Stormy Six, Komintern, Univers Zéro et post-coloniaux divers.
Une solution inédite en somme , national-globaliste, qui avait intégré le souverainisme anti-européiste antérieur, rélégant Mattéo Renzi à un rôle de comédien, mode Trotski, condamné à une répétition de sa ''Révolution permanente" et promu à une fuite en avant sans fin, destinée à s'éteindre à Mexico, par la main violente d'un vrai démocrate.
Le parti fantôme de Zingaretti, qui pensait à exister, après la "guerre ( partisane) de tous contre tous" retarda le Dix-Huit Brumaire de Draghi dans l'attente de l'élection césariste du premier Consul à substitut du Président Mattarella.
D'ici là, quelles seraient les "Ides de Mars " et qui en sera le Brutus ?
Les tendances, les trois forces et leurs issues
Au delà de l'actualité immédiate, en quoi le "Dix Huit Brumaire" et le "Coup d'Etat parlementaire" de Mattarella -Draghi ont ils débouchés? Quelles tendances coexistent-elles au sein de la formule politique italienne , susceptible de constituer un modèle inédit ? Et, in fine, qui et quelle force politique s'imposeront ils?
On peut, grosso modo, identifier dans le "Gouvernement d'urgence" de Draghi trois grandes forces et trois grandes issues possibles:
- Une formule euro-césariste à la de Gaulle, très longtemps renvoyée, à caractère national-globaliste (réformes+management + démocratie restreinte+ unanimisme décisionnel + ''protagonisme européiste'')
-Une modernisation anti-bureaucratique à l'italienne (modèle de Gènes, décentralisation régionale et recentralisation nationale essentielle)
- Un status-quo amélioré (assistentialisme + destruction créatrice + subordination bruxelloise et globaliste)
La première comporterait un appui de la droite européiste et de la Ligue, en faveur du travail et d'une ré-industrialisation technologique d'avenir, surtout au Nord du pays .
La deuxième, un rééquilibrage entre Régions et Etat et une accalmie des classes moyennes sur-taxées.
La troisième une subordination accrue à l'Union Européenne, désagrégée et sans projet, faisant de l'Italie un pays intermédiaire entre les zones développées et le Tiiers et Quart-monde; en compagnie de l'Espagne socialiste et de la France déclassée, au sein d'une Union européenne au Leadership solitaire et aggravé de l'Allemagne et des pays du Nord de l'Union.
Le Dix-Huit Brumaire du Premier Consul tranchera entre ces tendances et fera là un toilettage de l'esprit, influençant les coups d'Etats post-modernes.
Bruxelles le 2 mars 2021.
00:20 Publié dans Actualité, Affaires européennes, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mario draghi, italie, europe, affaires européennes, politique internationale | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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