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mardi, 25 juillet 2023

Le désastre irakien (vu de Londres) vingt ans plus tard

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Le désastre irakien (vu de Londres) vingt ans plus tard

Une Irakienne parle à contrecœur de son pays, lors de la rare évocation des malheurs qui l'ont frappé et le frappent encore, elle s'exprime avec pudeur et tristesse, se demande "pourquoi tous ces morts ? à qui a servi l'invasion ?".

par Lorenzo Ferrara

Source: https://www.barbadillo.it/110405-il-disastro-iraq-visto-da-londra-ventanni-dopo/

Alham est une vieille dame irakienne dont je tonds périodiquement la pelouse. Elle parle avec réticence de son pays, lors des rares mentions des malheurs qui l'ont frappé et le frappent encore, elle s'exprime avec pudeur et tristesse, se demande "pourquoi tous ces morts ? à qui a servi l'invasion?... A personne", conclut-elle amèrement. Il est impossible de la blâmer.

En effet, dans le Times du 18 mars 2023, Catherine Philp, depuis Bagdad, titre : "20 ans après, les cicatrices de la guerre d'Irak ne sont pas encore refermées". Dans le texte: "L'invasion est considérée comme une folie qui a entamé la capacité et la crédibilité de l'Occident à intervenir". Ahmad se souvient clairement du mélange d'excitation et de terreur qu'il a ressenti lorsque les Américains ont commencé à bombarder sa ville. Nous n'étions que des enfants, mais nous étions heureux de savoir que nous allions nous débarrasser de Saddam. Ahmad et ses frères se sont cachés sous les meubles lorsque les bombardements "choc et stupeur" ont commencé, s'émerveillant du "feu rouge qui apparaissait dans le ciel" lorsque les missiles atteignaient leurs cibles dans la matinée du 20 mars 2003. Trois mois plus tard, son père est mort, tué par erreur lorsque des soldats américains nerveux ont ouvert le feu à un poste de contrôle à Sadr City... L'année suivante, leur maison a été détruite par un char américain lors de combats avec l'Armée du Mahdi...

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Vingt ans plus tard, l'invasion de l'Irak est largement reconnue comme un échec, un acte de folie arrogante fondé sur de fausses informations qui sonnerait le glas de l'idée d'une intervention occidentale comme force du bien... et de l'Irak lui-même, pour lequel l'invasion a déclenché des événements qui allaient tuer des centaines de ses propres citoyens, forçant des millions d'entre eux à fuir à l'étranger. C'était en 2007 et Bagdad se balkanisait rapidement, les gangs sunnites et les milices chiites terrorisant les rues, tuant et chassant ceux de la secte opposée... Des dizaines de civils étaient retrouvés morts chaque jour, pour la plupart des sunnites tués par des escadrons de la mort chiites affiliés à des ministres du gouvernement, leurs corps mutilés étant jetés sur la voie publique. Les morgues de Bagdad se sont remplies si rapidement que des projections de diapositives des morts ont été organisées pour permettre aux familles d'identifier leurs proches plutôt que d'avoir à fouiller dans des piles de cadavres (...)". Je pense que c'est suffisant comme citation.

Pour parrainer et encourager l'intervention aux côtés des Etats-Unis, un homme, Tony Blair, qui aurait signé une sorte de pacte de sang avec George W. Bush, a échappé de justesse à la condamnation.

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En détail : le 7 juillet 2016 est paru Iraq Inquiry, ou plutôt : douze volumes qui mettent noir sur blanc ce que tout le monde sait désormais, à savoir que l'invasion de l'Irak par le Royaume-Uni et les États-Unis en 2003 était non seulement illégitime, mais aussi inutile. Avec de graves répercussions sur la population civile durement touchée par le conflit, mais aussi sur la sécurité mondiale, car le terrorisme international a également proliféré à partir de ce pays. Après sept ans de travail, Sir John Chilcot (nommé par l'ancien Premier ministre Gordon Brown qui avait souhaité une commission d'enquête en 2009) écrit dans le rapport publié le 6 juillet dernier en pointant clairement du doigt la décision ignoble de Tony Blair, alors Premier ministre, de soutenir l'ancien président américain George W. Bush dans l'attaque contre l'Irak.

Sur BBC news en juillet 2016, on peut lire le résumé suivant: "Le Royaume-Uni est entré en guerre avant que toutes les options pacifiques n'aient été explorées et l'action militaire "n'était pas un dernier recours", affirme le rapport Chilcot.

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L'invasion en 2003 était basée sur des "renseignements et des évaluations erronés" qui n'ont pas été remis en question. La menace que représentaient les armes de destruction massive irakiennes a été "présentée avec une certitude injustifiée". L'ancien Premier ministre Tony Blair affirme que la décision d'agir a été prise "en toute bonne foi" et qu'il assume "l'entière responsabilité des erreurs commises". Les familles des Britanniques tués lors de la guerre en Irak affirment que le conflit a été un "fiasco" et n'excluent pas une action en justice. David Cameron affirme que "ces leçons doivent servir à quelque chose"... Tandis que Jeremy Corbyn affirme que la guerre était "un acte d'agression militaire lancé sous un faux prétexte".

Quelle est la réponse de l'homme lui-même au rapport Chilcot?  "Je me sens profondément et sincèrement attristé, d'une manière qu'aucun mot ne peut exprimer correctement, pour ceux qui ont perdu des êtres chers en Irak, qu'il s'agisse de nos forces armées, des forces armées d'autres nations ou des Irakiens".

"Les évaluations des services de renseignement effectuées au moment de l'entrée en guerre se sont révélées erronées, les conséquences se sont avérées plus hostiles, plus longues et plus sanglantes que nous ne l'avions jamais imaginé... et une nation dont nous voulions libérer le peuple du mal de Saddam est devenue, au contraire, la victime du terrorisme sectaire. Pour tout cela, j'exprime la plus grande tristesse, le plus grand regret et les plus grandes excuses". Et encore, "il n'y a pas eu de mensonges, le Parlement et le Cabinet n'ont pas été trompés, il n'y a pas eu d'engagement secret en faveur de la guerre, les renseignements n'ont pas été falsifiés et la décision a été prise en toute bonne foi". Tony Blair s'est excusé pour les erreurs commises, mais pas pour la décision d'entrer en guerre.

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Vittorio Sabadin a écrit le 5 janvier 2022 dans La Stampa: "L'ancien premier ministre britannique Tony Blair a fait graver un mémo déclarant la guerre en Irak "illégale". L'ancien Premier ministre britannique Tony Blair s'est vu décerner le titre de Sir par la reine Élisabeth, mais ses sujets ne sont pas d'accord : les mensonges qu'il a proférés en 2003 pour déclencher la guerre contre l'Irak sont impardonnables et il est responsable de la mort de dizaines de soldats britanniques. La pétition visant à le déchoir de son titre de chevalier a presque atteint les 700.000 signatures et, pour aggraver sa situation, on a découvert que Blair avait ordonné de brûler une note dans laquelle la plus haute autorité juridique du gouvernement déclarait que la guerre en Irak était illégale.

C'est l'ancien ministre de la défense de Blair, Geoff Hoon, qui a révélé l'existence de cette note et l'ordre de la détruire. Il est revenu sur cette affaire dans ses mémoires "See How They Run", dont quelques bonnes pages ont été publiées par le Daily Mail... Dans la Grande-Bretagne moderne, apparemment, un acte de transgression aussi manifeste n'empêche pas l'octroi d'une reconnaissance au plus haut niveau...

La Reine a attendu 14 ans avant d'accorder à Blair le titre de chevalier, un honneur accordé à tous les premiers ministres peu après la fin de leur mandat. On ne sait pas ce qui l'a poussée à changer d'avis, mais il s'agit sans aucun doute d'une décision malheureuse...".

Que l'infâme chapitre irakien est à nouveau rouvert pour Tony Blair ?

Il est bien connu que les Britanniques considèrent la guerre comme un outil dont ils peuvent tirer profit. L'Afghanistan, leur vieille proie jamais apprivoisée, l'enseigne (le jeune officier Winston Churchill raconte dans ses mémoires qu'il a brûlé des villages et tué des rebelles "hostiles" et qu'il a écrit à sa mère, qu'il n'a rien fait de honteux). Le reste est bien connu.

Je suis retournée attanger le jardin de l'Irakienne Alham et j'ai "osé" lui demander si elle retournerait un jour à Bagdad. "Non. Nous n'avons plus de maison, ils l'ont détruite". J'ai évité de lui demander qui l'avait fait.

 

18:36 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, irak, tony blair, royaume-uni | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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