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mardi, 23 mai 2023

Disparition de Jean Haudry

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Disparition de Jean Haudry

Armand Berger

Source: https://institut-iliade.com/disparition-de-jean-haudry/

Il va sans dire que Jean Haudry va beaucoup nous manquer. Travailleur infatigable, personne d’une humilité exemplaire, érudit aimable et bienveillant.

Le professeur Jean Haudry est décédé ce matin à 7 heures, à l’âge de 88 ans. Avec cette triste nouvelle, nous apprenons le départ d’un grand savant dont la carrière de chercheur était pleinement consacrée à l’étude de la linguistique et de la civilisation indo-européennes.

Le parcours de Jean Haudry a été exemplaire. Élève de l’École normale supérieure de la rue d’Ulm, il est reçu au concours de l’agrégation de grammaire en 1959. Il a enseigné successivement aux universités de Montpellier et de Paris comme assistant de latin et de linguistique, avant d’être nommé maître de conférences de sanskrit et de grammaire comparée à l’université de Lyon. Il a soutenu une thèse en 1977 et, cinq années plus tard, fondé un Institut d’études indo-européennes dans la même université. Par ailleurs, Jean Haudry a été élu directeur d’études de grammaire comparée des langues indo-européennes à la IVe section de l’École pratique des hautes études en 1976. Il est devenu professeur émérite en 1998. Parallèlement à son enseignement, Jean Haudry a exercé les fonctions de directeur d’UER dans l’ancienne université Lyon II et de doyen de la Faculté des Lettres et Civilisations de l’université Lyon III. La liste des publications de Jean Haudry est particulièrement abondante : elle comprend plus de cent cinquante titres, dont une dizaine de monographies, traduites pour certaines dans plusieurs langues. Par ailleurs, ses articles ont été publiés dans les revues les plus savantes de linguistique ou d’études indo-européennes : Bulletin de la société de linguistique de Paris, Journal Asiatique, The Journal of Indo-European Studies ou encore Revue des études latines.

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Jean Haudry a été l’élève de grands maîtres desquels il se réclamait. Pour le sanskrit, dont il deviendra un éminent spécialiste, il est redevable à Armand Minard et Louis Renou. Pour la linguistique, à André Martinet. Pour l’indo-européen, à Émile Benveniste. Pour le grec, à Michel Lejeune. Pour le latin, à Jacques Perret. Sa solide formation universitaire, acquise auprès de ces savants, l’a conduit à devenir un indianiste hors-pair. La publication en 1977 de sa thèse sur l’Emploi des cas en védique : introduction à l’étude des cas en indo-européen était déjà signe de recherches inédites et prometteuses. Toutefois, Jean Haudry s’est éloigné de la reconstruction phonétique et morphologique indo-européenne, bien que la morphologie soit abordée dans un ouvrage intitulé Préhistoire de la flexion nominale indo-européenne en 1982. Ses connaissances en linguistique indo-européenne lui ont permis de publier dans la collection « Que sais-je ? » des Presses Universitaires de France un volume sur L’Indo-européen en 1979 qui, en dépit de la difficulté du sujet, a connu un grand succès d’édition et fut réimprimé à plusieurs reprises. L’éditeur commande alors un second livre à Jean Haudry, portant cette fois-ci sur les Indo-Européens. Le sujet ne touchant pas à la linguistique, il fallait donc se documenter. La présentation de l’exposé doit beaucoup aux trois fonctions duméziliennes. Alors qu’il rédige l’ouvrage, Jean Haudry découvre la traduction française de L’origine polaire de la tradition védique de Bâl Gangâdhar Tilak, dans la traduction de Jean Rémy. Il trouve une idée similaire également chez Ernst Krause : le postulat d’un habitat circumpolaire à un stade précoce de la formation du peuple indo-européen.

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Commence alors une nouvelle phase de recherche, centrée sur la notion de « tradition indo-européenne », que Jean Haudry a développé à partir des années 1985-86. Jusqu’alors, les chercheurs qui s’efforçaient de reconstituer la culture des Indo-Européens le faisaient au moyen de la paléontologie linguistique. Toutefois, un certain nombre d’irrégularités ou d’archaïsmes ont été relevés, et ont posé problèmes. L’exemple bien connu de la crainte que l’aurore ne revienne pas, dans la tradition védique, constitue tout simplement une donnée héritée, transmise. Et ce n’est pas en Inde, évidemment, que cette tradition a pu naître. L’introduction de la notion de tradition a changé complètement les perspectives en matière d’études indo-européennes, comprenant désormais une dimension diachronique, et a permis d’intégrer des réalités beaucoup plus anciennes que celles avec lesquelles on opérait habituellement. Pour revenir à la chronologie, on situe les derniers Indo-Européens, c’est-à-dire les locuteurs de l’indo-européen commun, au quatrième millénaire, dans la steppe pontique. En tenant compte des données de la tradition, on peut en revanche identifier un héritage qui remonte au septième millénaire. Toutefois, une telle perspective ne permet pas de remonter indéfiniment à des états antérieurs. Ce que les linguistes appellent « Indo-Européens » appartiennent à la période reconstruite. L’existence d’une tradition indo-européenne dont ils sont les héritiers permet de dégager de nouvelles perspectives.

Cet apport considérable de Jean Haudry aux études indo-européennes, qui travaille dès lors en diachronie, l’a conduit à s’intéresser à la religion cosmique des Indo-Européens. Il publie sur le sujet une monographie en 1987, dans laquelle il développe une thèse des trois cieux indo-européens. Dans cet ouvrage dense et érudit, Jean Haudry est parvenu à montrer le souvenir précis d’une dimension circumpolaire dans la tradition indo-européenne en se fondant sur les cycles temporels. Cette dimension circumpolaire est une thèse intéressante, car elle est aujourd’hui confirmée par de récentes découvertes en paléogénétique qui ont permis de retrouver les traces d’un héritage génétique de chasseurs-cueilleurs septentrionaux chez les populations des steppes pontiques de la fin du Néolithique.

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Jean Haudry a également exploré la tradition indo-européenne en prenant en compte les nombreuses données de correspondances linguistiques qui sont à la base du formulaire. La reconstruction du formulaire indo-européen, fondée sur la concordance de séquences de formes superposables dans deux ou plusieurs littératures indo-européennes (dans les Védas, chez Homère, mais aussi dans l’Avesta voire dans l’ancienne poésie germanique), sous la forme de syntagmes nominaux composés d’un substantif et d’un adjectif épithète, permet d’approcher la tradition poétique indo-européenne ainsi que d’accorder de l’importance aux notions. C’est ainsi que Jean Haudry relève de nombreuses occurrences formant la triade pensée – parole – action, dont il tire un livre en 2009.

Jean Haudry s’est également intéressé à la présence du feu dans la tradition indo-européenne, en particulier dans un copieux ouvrage paru en 2016. La présence très ancienne du feu, attestée bien avant l’apparition des Indo-Européens – elle se trouve déjà en Europe plus de 300 000 ans avant notre ère – a été intégrée très tôt à la mythologie. Cette réalité ancestrale du feu constitue l’un des points essentiels de la première période de la tradition indo-européenne, celle des temps immémoriaux.

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Jusqu’aux derniers moments de sa vie, Jean Haudry a été un savant prolixe. Preuve en est la parution de deux ouvrages aux éditions Yoran Embanner. Le premier, publié l’an passé, est intitulé Sur les pas des Indo-Européens, et se présente sous la forme d’un recueil d’articles déjà parus ou inédits, précédé d’un bel entretien et complété par une bibliographie exhaustive de ses travaux académiques. Un autre livre a été publié il y a un mois : le Lexique de la tradition indo-européenne. Il s’agit sans aucun doute du grand œuvre de Jean Haudry, élaboré pendant au moins une décennie. La matière contenue dans cette somme montre l’étendue de l’érudition d’un savant qui connaissait aussi bien les langues védiques que la poésie vieil-anglaise, qui était à tu et à toi avec les dieux la Grèce ancienne et de l’Iran.

Il va sans dire que Jean Haudry va beaucoup nous manquer. Travailleur infatigable, personne d’une humilité exemplaire, érudit aimable et bienveillant. Autant de qualités rassemblées en un seul homme qui demeure, pour des générations de linguistes et d’historiens des religions, un véritable mentor dont la gloire est impérissable.

Armand Berger
Membre du Pôle Études de l’Institut Iliade

 

L'Inde quintuple ses importations en provenance de Russie et demande à Londres de restituer ce que les Britanniques lui ont volé

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L'Inde quintuple ses importations en provenance de Russie et demande à Londres de restituer ce que les Britanniques lui ont volé

Enrico Toselli

Source: https://electomagazine.it/lindia-quintuplica-le-importazi...

La Russie est devenue le deuxième fournisseur de marchandises de l'Inde, derrière la Chine. Au cours du premier trimestre de cette année, les exportations de Moscou vers New Delhi ont dépassé 15,5 milliards de dollars, soit près de cinq fois plus qu'au cours du premier trimestre de l'année dernière. Un signe clair du non alignement du reste du monde sur les sanctions imposées par Washington et adoptées par les majordomes européens.

Au contraire, face aux protestations de Borrell - le représentant de la politique étrangère européenne et le génie qui a considéré Giggino Di Maio comme le meilleur candidat pour gérer les relations entre l'Europe et les pays du Golfe - sur les achats excessifs de pétrole russe par l'Inde, le ministre des affaires étrangères de New Delhi a rétorqué en invitant Borrell à étudier les règles européennes avant de répandre des âneries.

Car les idiots eurocratiques ont créé les conditions, grâce aux sanctions, pour acheter du pétrole russe mais en le payant plus cher. "Le pétrole russe, lui a rappelé le ministre indien, est largement transformé dans des pays tiers et, de ce fait, n'est plus considéré comme russe. Une farce, en somme. Que tout le monde connaît, sauf Borrell. Dans la pratique, la Russie continue de vendre du pétrole qui est traité au-delà de la frontière et qui acquiert la "nationalité" du pays de traitement qui le revend, à des prix plus élevés, à l'Ouest.

L'Inde et la Chine obtiennent quant à elles du pétrole à des prix réduits pour rendre leurs économies plus compétitives.

Mais les Russes ont également utilisé un autre stratagème. Ils ont transféré des hommes et des entreprises dans les anciens pays soviétiques d'Asie centrale. Avec la possibilité de produire et de commercer tranquillement avec tous les pays du monde. Et de "réexporter" ensuite vers la Russie ce dont ils ont besoin.

C'est ainsi, entre autres, que l'on fait croître les économies des pays voisins, renforçant le front des "non-alignés", même si ce front se rapproche de plus en plus de Pékin.

Quant à l'Inde, sollicitée par tous dans l'espoir de lui attribuer une fonction anti-chinoise, elle continue à penser principalement à ses propres affaires, profitant de la cour rapprochée que lui font les Russes et les Atlantistes, voire les Chinois eux-mêmes. Et elle a renchéri. En demandant à Londres de restituer tout ce que les Britanniques ont volé pendant la période coloniale. Car il est curieux que les défenseurs atlantistes des droits et de la légalité oublient toutes les valeurs et les bons principes lorsqu'il s'agit de les respecter.

Alexandre Douguine: la logique de l'hégémonie

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La logique de l'hégémonie

Par Alexandre Douguine

Source: https://dzen.ru/media/dugin/the-logic-of-hegemony-646785d19d26e37d86c42fdb?fbclid=IwAR0DcUEBIF3_AWKtrvQahf8MxyoyKBAraNse_eGygkqaHOT9_IGJ8PHlZ5E&utm_referer=l.facebook.com

Il n'y a donc qu'une seule hégémonie. L'hégémonie est le capitalisme, la société capitaliste occidentale moderne. Mais le capitalisme ne se transforme pas immédiatement en hégémonie. Qu'est-ce qui le transforme en hégémonie ? La logique interne de l'hégémonie elle-même.

Le capitalisme entre dans la phase d'hégémonie à un certain moment, lorsque l'universel, qui est dans sa structure même, commence à prévaloir sur les questions nationales individuelles. Il n'y a qu'une seule hégémonie, elle est universelle et surgit dans toutes les sphères de la vie. Devenue explicite, elle commence à abolir les États-nations et à les soumettre complètement.

Ce que nous avons vu dans la mondialisation des années 1990, que Gramsci n'a pas pu voir, c'était un monde unipolaire qui commençait à se dessiner, et il y avait hégémonie. L'hégémonie n'est pas apparue immédiatement, elle a toujours été enfermée dans le capitalisme, dans son effort d'universalisation. Mais le capitalisme a atteint le stade mondialiste à une certaine période historique, lorsque la domination de l'Occident capitaliste sur toutes les autres alternatives est devenue explicite et s'est affirmée historiquement. C'est à ce moment-là que l'hégémonie est devenue elle-même.

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Par conséquent, les idées de Gramsci ont pris toute leur acuité précisément après l'effondrement de l'Union soviétique, qui a convaincu tout le monde que le concept d'hégémonie était le concept le plus efficace. En décrivant l'hégémonie, il décrivait le monde des années 1990: une ère d'hégémonie, un monde unipolaire où la démocratie politique libérale, l'économie capitaliste, les systèmes politiques du parlementarisme électoral, la culture techno-centrique, la liberté d'ouvrir des réseaux - tout cela a commencé à pénétrer dans toutes les sociétés.

Et que fait l'hégémonie ? Elle ouvre et brise les structures nationales. Kamala Harris arrive et détruit le partisan non encore dompté de la souveraineté. Pourquoi ? Parce que l'hégémonie ne peut être combattue de l'intérieur même de l'hégémonie. Parce que l'étape précédente - l'hégémonie représentée par le nationalisme, la souveraineté et l'État-nation - fait partie de la même hégémonie. Elle fait partie du passé, et l'hégémonie mondiale est l'avenir, vers lequel nous sommes attirés par toutes les forces.

L'hégémonie est une structure similaire à celles des pirates informatiques qui attaque l'ennemi en cherchant les points faibles de son système de défense et qui, une fois pénétré, le décompose déjà de l'intérieur. Par conséquent, un État-nation qui accepte partiellement l'hégémonie devient complètement vulnérable, perméable à celle-ci, ce qui conduit finalement à son absorption.

L'hégémonie fonctionne de manière sophistiquée. Elle envahit par la force militaire les États qui ne possèdent pas d'armes nucléaires. Elle s'introduit dans les États qui disposent d'une certaine forme d'administration nationale par le biais de la culture. Elle pénètre dans les États dotés d'armes nucléaires par le biais de réseaux et de finances. Elle pénètre la civilisation chinoise par le biais du libéralisme, en commençant par les zones côtières.

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L'hégémonie est un additif moisi qui se répand par le biais des médias, d'Internet, des prêts bancaires, de l'éducation, de l'école, de la famille, de toutes les formes de connexion; par le biais de la restauration, du cinéma, de la participation au processus politique moderne. Tous ces éléments sont des formes d'action hégémonique qui, à proprement parler, ne sont pas intrinsèques à l'homme en principe. L'hégémonie ajuste la structure du comportement humain, l'encourageant à faire ce qui n'est pas logique de son point de vue, mais qui l'est du point de vue de ce moule.

L'hégémonie n'est pas l'arbitraire ; c'est la logique du processus historique de l'ère moderne. Et l'État-nation n'est pas une alternative à l'hégémonie - ce n'est qu'un obstacle temporaire, et cet État-nation déclare la constitution, les droits de l'homme, la forme de production capitaliste, la démocratie libérale, les élections, et envoie culturellement ses représentants à l'Eurovision. Du point de vue de Gramsci, la question de l'élimination de cette formation n'est qu'une question de temps.

 

La concurrence dans les turbulences mondiales

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La concurrence dans les turbulences mondiales

Leonid Savin

https://www.geopolitika.ru/article/konkurenciya-v-globaln...

La rivalité des États-Unis avec la Chine et la Russie implique de nombreux intérêts militaires, économiques et géopolitiques qui se chevauchent et a des implications significatives pour l'ordre international.

Récemment, un certain nombre de groupes de réflexion américains ont régulièrement produit de petites publications et des analyses assez longues sur la concurrence mondiale. Ils ne parlent pas seulement de rivalité sur la scène mondiale, mais plutôt de la concurrence entre les grandes puissances, que les auteurs désignent généralement comme les États-Unis, la Russie et la Chine.

Si nous examinons les recherches de la RAND, nous constatons qu'elle a publié un certain nombre de monographies sur la concurrence entre les grandes puissances au cours de ces dernières années. Et si ces dernières ont été publiées en 2023, les recherches elles-mêmes ont commencé des années plus tôt (1).

L'un de ces ouvrages affirme que la concurrence sur les théâtres secondaires devrait se concentrer sur les centres de pouvoir historiques. L'influence de la Chine et, dans une moindre mesure, de la Russie s'accroît sur les théâtres secondaires, même si les États-Unis restent pour l'instant l'acteur militaire dominant. Cependant, il est souligné que l'implication des grandes puissances dans des conflits sur des théâtres secondaires dans la nouvelle ère de compétition peut être moins motivée par une logique à somme nulle que ce n'était le cas pendant la guerre froide. Il est donc difficile d'évaluer le potentiel de conflit et son escalade.

On dit même que plusieurs scénarios de conflit plausibles pourraient se dérouler en Amérique latine, dans lesquels les États-Unis pourraient être impliqués du côté des opposants à la Russie ou à la Chine. Pourtant aucune force dans cette région n'a jamais déclaré son intention d'affronter Moscou et Pékin. Un document antérieur indique que la rivalité actuelle entre les grandes puissances est fondamentalement liée à la nature du système international. La rivalité des États-Unis avec la Chine et la Russie implique de nombreux intérêts militaires, économiques et géopolitiques qui se chevauchent et a des implications significatives pour l'ordre international. La Chine, en particulier, s'efforce de modifier les règles, normes et institutions internationales dominantes, tout en renforçant ses capacités militaires. Les États-Unis restent toutefois en position de force face à la concurrence. Toutefois, leur succès à long terme dépend du maintien d'une position économique forte et de la volonté de s'engager sur la scène internationale, de la disposition d'alliés et de partenaires clés, de l'influence idéologique sur les règles, les normes et les institutions internationales et d'une position militaire mondiale forte vis-à-vis des puissances concurrentes (2).

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Cet impératif décrit par les auteurs explique peut-être les tentatives des États-Unis à l'égard de leurs alliés, des pays neutres et des partenaires de la Russie. Ce n'est pas une coïncidence si des délégations du département d'État américain se sont rendues récemment dans des pays d'Asie centrale, où le Kazakhstan et le Kirghizstan sont membres de l'EAEU. Cela explique également l'annonce par Washington de nouvelles sanctions à l'encontre de la Russie. Outre les principaux rivaux des États-Unis, leurs planificateurs politiques prescrivent des domaines d'action et marquent les points critiques sur lesquels ils doivent se concentrer. Sous l'étiquette "concurrence stratégique/géopolitique", le site web de la RAND propose généralement un large éventail de publications, allant de la guerre par procuration (3) et du conflit en Ukraine (4) à la fabrication de semi-conducteurs à Taïwan (5), aux changements dans la politique de sécurité japonaise (6) et à l'espace extra-atmosphérique (7).

Il est clair que l'establishment américain est préoccupé par le maintien de sa supériorité mondiale et craint de perdre des positions clés dans l'économie mondiale, la logistique, le secteur financier et bancaire et le complexe industriel de la défense.

Ce dernier est particulièrement important pour Washington, car la vente de systèmes d'armes a plusieurs objectifs : faire pression sur les groupes politiques associés aux fabricants d'armes et d'équipements tels que Lockheed Martin, Boeing, Northrop Grumman et d'autres, y compris le secteur des technologies de l'information (Amazon, Microsoft, Google) ; militariser les États voisins des pays cibles (tels que l'Ukraine, la Pologne et la Finlande) ; et entraîner ses satellites dans la poursuite de ses propres intérêts, y compris dans de nouvelles stratégies militaires et politiques. Les tentatives des États-Unis de renforcer leurs alliances militaires se retrouvent dans des publications telles que le point de vue du Royaume-Uni sur les questions susmentionnées, qui souligne la nécessité de s'engager avec les États-Unis (8).

Le fait que la RAND Corporation travaille pour les besoins de l'armée américaine et reçoit des fonds du Pentagone doit être pris en compte. Mais le point de vue général porte sur les régions du monde et les zones où les intérêts américains (occidentaux) sont en conflit ou potentiellement en conflit avec ceux de la Russie, de la Chine, de l'Iran et de plusieurs autres pays (non occidentaux). Le CSIS de Washington met également l'accent sur ce thème, soit de manière thématique, soit de manière régionale (9).

Ce faisant, il y a une superposition notable d'étiquettes qui ont été développées précédemment, telles que "comment les États-Unis réagissent-ils aux tactiques de pression de la zone grise de Pékin à l'égard de Taïwan et dans l'ensemble de la région indo-pacifique ? Quel est le meilleur moyen de dissuader Pékin d'attaquer Taïwan ? Existe-t-il des outils non militaires crédibles que les États-Unis et d'autres pays partageant les mêmes idées peuvent déployer ? En ce qui concerne les questions mondiales générales, on s'interroge sur la manière dont les États-Unis peuvent améliorer la durabilité et l'efficacité des institutions multilatérales existantes (c'est-à-dire le modèle créé par l'Occident collectif) et sur la meilleure manière d'utiliser leur poids économique pour accroître leur influence dans le Sud (et ainsi limiter Pékin) (10).

Outre le fait que Washington tente de maintenir et d'étendre son influence dans différentes régions, tout cela indique en fait une sorte de consensus au sein de l'establishment américain sur l'avènement d'un monde tripolaire, qui remplacera le monde unipolaire.

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La montée de deux nouveaux pôles, l'un représentant l'ancienne superpuissance et l'autre revendiquant audacieusement une participation active à la gestion des processus mondiaux, ébranle le modèle établi dont les États-Unis étaient les principaux bénéficiaires. Ce modèle est souvent décrit à Washington comme une sorte de système de règles établies par l'Occident collectif, et il est naturel que toute reconfiguration menace de réduire non seulement le flux de bénéfices sur lequel les États-Unis et leurs satellites ont parasité, mais aussi leur importance en tant que telle. C'est pourquoi la concurrence croissante des grandes puissances est évoquée à partir de différentes positions (ici l'Ukraine, Taïwan et d'autres pays, mais pas seulement des pays, mais des régions entières) afin d'essayer de préserver autant que possible leurs monopoles et de maintenir leurs alliés, partenaires et satellites dans l'orbite de leur influence, sans les laisser prendre des décisions souveraines et passer dans l'autre camp, même s'il est officiellement neutre.

Ce qui attire l'attention, c'est le fait qu'ils parlent d'États et non d'alliances. Bien que le bloc des États-Unis et de l'OTAN soit une structure militaro-politique régionale complète, qui assujettit des États entiers, les séparant de leurs voisins et de certains espaces méta-géographiques pour des raisons culturelles et historiques. Ainsi, l'Australie, la Nouvelle-Zélande et même le Japon et la Corée du Sud sont généralement définis comme faisant partie de l'Occident collectif, bien que ces deux derniers pays aient leurs propres identités orientales. Mais les documents doctrinaux de base de la politique étrangère américaine n'ont pas changé. La tendance définie par Barack Obama se poursuit. La Russie, la Chine, l'Iran et la RPDC sont identifiés comme les principales menaces pour les États-Unis.

Dans ce contexte, l'attention est attirée sur le nouveau concept de politique étrangère de la Russie, qui non seulement change de ton, mais utilise également une terminologie différente, non caractéristique des doctrines précédentes.

Les dispositions générales stipulent déjà que "la Russie est un État-civilisation distinctif, une vaste puissance eurasienne et euro-pacifique qui a uni le peuple russe et les autres peuples qui composent la communauté culturelle-civilisationnelle du monde russe". Bien que Nikolai Danilevsky ait écrit sur les types culturels et civilisationnels dès le 19ème siècle, cette notion est présentée ici d'un point de vue stratégique, la Russie étant traitée simultanément comme une puissance européenne et pacifique (un facteur géographique) et comme une puissance eurasienne (un facteur idéologique et culturel). Elle affirme également que la Russie "agit comme l'un des centres souverains du développement mondial et remplit sa mission historiquement unique de maintenir l'équilibre mondial des pouvoirs et de construire un système international multipolaire, afin d'assurer les conditions d'un développement pacifique et progressif de l'humanité sur la base d'un programme unificateur et constructif".

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Il est évident que cette mission historique sera critiquée par nos détracteurs, comme elle l'a été à maintes reprises au cours de l'histoire. Néanmoins, si l'on tient compte d'autres accents, tels que l'espoir que l'Occident comprenne la futilité de sa politique à l'égard de la Russie, ainsi que l'intérêt pour la coopération avec différentes régions et associations, et les pays désignés parmi les partenaires stratégiques, qui sont soutenus par des actions concrètes au niveau international, cela crée de nouvelles conditions pour l'interaction. Et pour l'Occident, en particulier les États-Unis, cela sera perçu comme un défi concurrentiel, y compris des questions idéologiques.

Cela nécessite un examen plus approfondi et plus minutieux des domaines qui sont à la fois mis en évidence dans le concept et déjà en cours d'élaboration. Car tout point faible sera attaqué par nos rivaux géopolitiques. D'une manière générale, il existe une demande supplémentaire d'experts internationaux dans les secteurs concernés et de spécialistes dans les régions et les pays. Outre le transfert du personnel professionnel de l'Ouest collectif vers d'autres régions, comme l'a déclaré précédemment la direction du ministère russe des affaires étrangères, le lancement du deuxième volet du partenariat public-privé et de la diplomatie publique améliorera manifestement la qualité du travail dans ce domaine du point de vue de la stratégie à long terme.

Références :

1 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA969-1.html  

2 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA290-4.html  

3 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA307-2.html  

4 https://www.rand.org/pubs/external_publications/EP70029.h...  

5 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA2354-1.html

6 https://www.rand.org/blog/2023/03/japans-new-security-pol...  

7 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA597-1.html  

8 https://www.rand.org/pubs/research_reports/RRA1959-1.html

9 https://www.csis.org/events/allies-and-geopolitical-compe...  ; https://www.csis.org/programs/emeritus-chair-strategy/reg...

10 https://www.csis.org/analysis/policy-agenda-strategic-com...

 

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