jeudi, 30 octobre 2025
Moeller van den Bruck, avant-garde de la révolution conservatrice

Moeller van den Bruck, avant-garde de la révolution conservatrice
Par Enrico Colonna
Source: https://www.ilprimatonazionale.it/primo-piano/konservativ...
Souvent, lorsqu’on parle de la Révolution Conservatrice, l’idée qui en ressort est assez floue. Non pas parce qu’on ignore ce dont il s’agit — du moins parmi ceux qui s’intéressent à ces questions — mais parce que ce mouvement était plutôt varié en lui-même et parce qu’à différence d’autres mouvements culturels du 20ème siècle, la Révolution Conservatrice n’a pas eu de véritable manifeste (comme par exemple le Manifeste du Futurisme de 1909). Pour une systématisation bibliographique de ce mouvement, il faut attendre l’essai d’Armin Mohler de 1950, La Révolution Conservatrice, récemment réédité en Italie par "Passaggio al Bosco Edizioni" dans une version enrichie avec la bibliographie de Nicola Cospito et les essais d’Alain De Beniost, Adriano Scianca et Lorenzo Di Chiara.
Les trois étapes de la révolution conservatrice
Cependant, on peut repérer une sorte de « manifeste en trois étapes » dans l’œuvre de l’un de ses principaux initiateurs : Arthur Moeller van den Bruck. Né en 1876, soldat de réserve durant la Première Guerre mondiale, Moeller van den Bruck écrivit dans la dernière décennie de sa vie trois essais qui devinrent en quelque sorte les manifestes de la Révolution Conservatrice : Le Style prussien (1916), Le Droit des jeunes peuples (1919), et Le Troisième Reich (1923).


Une « triade » qui amena un penseur marxiste comme Stefano Azzarà à qualifier Moeller van den Bruck de « Lénine de droite », en raison de ses réflexions sur l’effondrement de l’ordre bourgeois et la nécessité d’une transformation radicale après un tel effondrement.
Moeller van den Bruck a ses racines culturelles dans la lecture passionnée de Nietzsche et dans la critique artistique et littéraire: notons que sa première notoriété en Italie vint avec son essai La beauté italienne, écrit après un séjour en Toscane où il put admirer l’art et l’architecture du Moyen Âge et de la Renaissance. De cette formation culturelle émerge sa conception particulière du « style », qui, selon lui, ne concerne pas seulement l’art ou l’esthétique.

Le style est la forme morale que donne un peuple à sa vie. La louange ici n’est pas pour la Prusse en tant qu’État ou sujet historique-politique, mais comme « manière d’être » : une façon d’être qui privilégie la mesure à l’excès, qui exaltent la primauté du devoir sur le plaisir, qui oppose l’héroïsme quotidien « anonyme » basé sur la constance à l’héroïsme du geste spectaculaire et de la gloire personnelle.
Le style et le droit des peuples jeunes
Moeller van den Bruck, en effet, est très satisfait que l’Allemagne se soit unifiée sous la direction du Royaume de Prusse et non, par exemple, du Royaume de Bavière : en s’unifiant sous la direction et l’impulsion militaire prussienne, l’Allemagne s’est formée sur cette base morale. Il soutient également qu’il existe des « Prussiens d’adoption », comme Georg Wilhelm Friedrich Hegel (originaire de Stuttgart), c’est-à-dire ceux qui ont fait leur la mentalité prussienne. La Prusse n’est donc pas une entité géographique sur la carte, mais — justement — un « style » qui imprègne tous les aspects de la vie.
À la fin de la Grande Guerre, Moeller van den Bruck acheva la rédaction de la deuxième étape de son « manifeste » de la Révolution Conservatrice : Le Droit des jeunes peuples.
A la base de ce texte se trouve une distinction assez « classique » : celle entre vieux et jeunes peuples. Les premiers, qui ont atteint le sommet de leur civilisation et sont désormais en déclin, doivent être balayés par les seconds, qui n’ont pas encore atteint leur plein développement et qui ont le droit historique et moral de se manifester sur la scène de l’histoire.

Est ici évidente l’influence de la pensée de Hegel dans ses Leçons sur la philosophie de l’histoire, où le philosophe de Stuttgart souligne la nécessité du conflit et de la « tempête » pour garder la mer de l’histoire limpide et empêcher qu’elle ne se transforme en un marécage calme et plat.
Le conflit par lequel l’ancien est renversé par le nouveau occupe une place centrale dans la pensée de Moeller van den Bruck. La Première Guerre mondiale a été, dans cette vision de l’histoire, un « chapitre » de cette lutte.
La troisième voie du nationalisme allemand
Mais la notoriété de Moeller van den Bruck repose surtout sur la création d’une expression qui, après sa mort (en 1925, par suicide), a acquis une grande popularité : Le Troisième Reich.
Cette expression devint un mot-clé du mouvement völkisch, bien avant que le national-socialisme en fasse son programme politique.
Il est également intéressant de voir comment, à l’origine, l’auteur envisageait d'intituler « Der Dritte Weg » (la Troisième Voie) cet essai qui constitue la troisième et dernière étape de son « manifeste »: une voie « allemande » vers la révolution, alternative aussi bien au capitalisme qu’au socialisme scientifique.
Comme le note Armin Mohler dans l’essai déjà cité sur la Révolution Conservatrice :
« Face au Saint-Empire romain universel de la nation allemande et au petit ‘Zwischenreich’ (l'Empire intermédiaire) de Bismarck, Moeller van den Bruck, avec le ‘Troisième Reich’, propose l’image d’un Empire final, où les contradictions du socialisme et du nationalisme, de la gauche et de la droite, s’annulent en se réunifiant. Le chiffre trois ne signifie pas seulement la succession des empires au fil de l’histoire ; il exprime l’idée d’une synthèse conciliant une thèse et une antithèse. »
En somme, un Empire de l’âme et un « mythe politique » mobilisateur. Une condition morale avant d’être historique, semblable à celui de l'« Allemagne secrète » évoquée par les intellectuels (comme l’historien Ernst Kantorowicz) réunis dans le cercle du poète nationaliste Stefan George.
20:09 Publié dans Révolution conservatrice  | Lien permanent  | Commentaires (0)  | Tags : arthur moeller van den bruck,  révolution conservatrice |  |
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