vendredi, 26 décembre 2025
La philosophie de l’histoire de Hegel - Sur la dialectique non linéaire de Hegel

La philosophie de l’histoire de Hegel
Sur la dialectique non linéaire de Hegel
Alexandre Douguine
Alexandre Douguine explique, dans ce bref article, que, pour Hegel, la fin de l’histoire correspond à un retour à l’origine.
L’Esprit Absolu n’est pas un début, mais le résultat du cycle complet de l’épanouissement de la subjectivité — c’est pourquoi Hegel n’est pas un idéaliste, mais un phénoménologue. Cependant, il est un phénoménologue du Sujet Radical. Si Hegel déclare que l’Absolu est un résultat, alors une immanence absolument radicale apparaît — semblable à celle de Fichte. Hegel écrit: «Il faut dire de l’Absolu qu’il est essentiellement un résultat, qu’il n’est ce qu’il est vraiment qu’à la fin» (1).
L’Absolu est ce qui doit encore devenir lui-même, non seulement en purgeant son côté sombre, comme chez Böhme (2), mais en passant par l'auto-aliénation de soi — du vide universel au concret catastrophique, puis en revenant du concret catastrophique à l’origine dans une nouvelle qualité. Autrement dit, l’Absolu se trouve devant nous comme un but, comme une fin. Cependant, ce n’est pas un mouvement linéaire, et cela est également crucial à comprendre: c’est un mouvement du centre vers la périphérie, puis, du périphérique, de retour vers le centre. Ce n’est pas le mouvement qui se déroule sur le cercle extérieur de la conscience, c’est-à-dire là où se produit une transformation constante (derrière l’éternité, dans l’élément du temps).
Pour Hegel, l’histoire n’est pas ce qui se déploie dans le temps; plutôt, c’est ce qui unit le départ de l’éternité dans le temps et le retour du temps dans l’éternité. L’histoire de Hegel, le temps de Hegel, est un mouvement du centre vers la périphérie, puis de la périphérie vers le centre. Cette histoire détermine à l’avance les structures et les moments du temps. Le temps lui-même n’a pas d’orientation, de sens ou de contenu; il ne porte aucun événement en lui. Tous les événements et contenus du temps proviennent de l’intérieur de la conscience (le temps en tant que processus linéaire est fondamentalement étranger à la pensée platonicienne, hégélienne et phénoménologique (3)). Tous les événements du temps proviennent de l’intérieur de la conscience. Si nous utilisons ses éléments situés à sa périphérie, ou encore plus à l’extérieur (dans le domaine hypothétique des «choses en soi»), ou si nous considérons l’histoire comme un processus linéaire, nous dévions au maximum de Hegel.

L’histoire selon Hegel est l’histoire de l’épanouissement de l’Esprit subjectif dans le temps et de son retour et de sa transformation en l’Esprit Absolu. L’histoire selon Hegel est transversale au processus temporel en soi. C’est-à-dire que l’histoire n’est pas simplement « non temps » — elle est perpendiculaire au temps. Les événements qui se produisent dans l’histoire ne sont pas ceux qui se produisent dans le temps, mais ceux qui ont lieu dans les structures de la conscience. Et c’est cette conscience qui marque le temps par ses événements. Par conséquent, lorsque nous parlons de «la fin de l’histoire», cela signifie atteindre le point originel dans une nouvelle qualité. Cependant, ce déploiement de la structure de l’Esprit et cette progression de la dialectique de l’actualité (Wirklichkeit) n’ont jamais eu de début dans le temps — elles existaient au point de l’éternité. Ce point est ce que nous identifions comme le Sujet Radical, comme Homo Intimus (4), ou comme νοῦς ποιητικός. À partir de là, comme à partir d’un état vide et non manifesté, la négation se déplace vers la périphérie, puis une retour se produit. Dans ce retour, le centre se révèle comme quelque chose d’absolu. C’est le résultat de l’histoire, mais il n’existe ni dans une dimension linéaire ni dans une dimension cyclique. Dans un cycle, comme le montre Aristote, il n’y a ni début ni fin. Le mouvement d’une planète est éternel; elle n’a jamais commencé à partir d’un seul point — elle a toujours existé. Son début est à la fois le début et la fin, deux relations d’un seul point autour duquel tournent les planètes, non un point situé sur l’orbite elle-même. Cela nécessite une perspective totalement différente sur la dialectique de Hegel, qui ne peut pas être interprétée du point de vue des processus se produisant à la périphérie de notre conscience, mais qui se présentent comme indépendants et autonomes.
Notes:
(1) Hegel. Phénoménologie de l'esprit.
(2) Dans les enseignements de Jakob Böhme, Dieu contient dans son fondement (Grund) un commencement obscur («la nature en Dieu»), dont il se purifie (s'absout) dans le processus de devenir-Esprit. Voir Alexander Douguine, Noomachie : Les guerres de l'esprit. Le Logos germanique. L'homme apophatique.
(3) Voir le cours magistral d'A. Douguine «Doxas et paradoxes du temps» (2021-2022).
(4) Homo intimus — « l'humain le plus intime », situé encore plus profondément que le simple «humain intérieur», homo interior. Une catégorie cruciale dans le système de Dietrich Freiberg et parmi les mystiques rhénans. Voir Douguine. Noomachie : Les guerres de l'esprit. Le Logos germanique. L'homme apophatique.
16:12 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : hegel, philosophie, alexandre douguine |
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