Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

mardi, 11 septembre 2007

R. Steuckers: Entretien accordé à G. Luyt

8bc9b18ad668be226a5daded4c9e12be.gif

Réponses aux questions de Guillaume Luyt

Entretien avec Robert Steuckers

Robert Steuckers, qu'est-ce que Synergies Européennes ?

«Synergies Européennes» est une amicale paneuropéenne, qui regroupe, de manière somme toute assez infor­mel­le, des non conformistes de toutes nationalités qui travaillent sur un ensemble de thèmes communs: criti­que du mondialisme et des idéologies dominantes, révolution conservatrice et thématiques assimilables à ce complexe politico-idéologique riche de différences, projets alternatifs en économie et en droit, littérature cri­tique des travers de notre monde contemporain, philosophie nietzschéenne et postmoderne, etc. Cette ami­cale "fonctionne" naturellement et spontanément sans structures autres qu'un bureau européen, dont j'assure le secrétariat et qui a pour simple tâche de coordonner des activités communes, comme les séminaires ré­guliers ou ponctuels, les universités d'été ou les rencontres amicales. Comme vous l'aurez sans doute appris par la rumeur, j'avais découvert la ND en 1973 quand j'avais 17 ans et j'y ai travaillé longtemps en gardant toutefois un certain scepticisme au fond du cœur. Toujours, j'ai voulu œuvrer à la charnière de cette ND, que je percevais comme un cercle d'études (j'étais avec Guillaume Faye au “Secrétariat Etudes & Recherches"/ SER), et les diverses expressions du nationalisme révolutionnaire, que je percevais comme des tentatives d'an­crage de nos études dans la réalité sociale; comme des espaces effervescents capables de conquérir une niche et de la consolider sur les échiquiers politiques nationaux dans les Etats européens.

Pour moi, l'aire NR devait être aux forces identitaires ce que le tissu associatif gauchiste était aux forces mar­xistes et surtout à la sociale-démocratie européenne. On mesure pleinement aujourd'hui le succès de ce travail gau­chiste en marge de la sociale-démocratie ou des forces écologistes quand on aperçoit des Fischer ou des Jo­s­pin, des Blair ou des Schröder au pouvoir. Je me suis malheureusement trompé jusqu'ici, mais, en dépit de cet­te erreur d'analyse factuelle, je demeure convaincu qu'une consolidation de cette aire politique, si elle se réa­­lise, sera la base de départ d'un renouveau. Que les extrêmes droites classiques, véhiculant un vétéro-natio­na­lisme anti-social, a-critique à l'égard des structures dominantes, ou des résidus de pensée théologique ou des bricolages complotistes ou des nostalgies des fascismes ou des para-fascismes, sont incapables de mener à bien. La ND, centrée autour d'Alain de Be­noist, avait toujours refusé, avant 1985 et après 1987, de frayer avec des groupes plus militants, portés par des jeunes gens dynamiques (entre 1985 et 1987, les principaux ex­po­sants de la ND accordent toutefois des entretiens aux revues du MNR de J. G. Mal­liarakis, sans que cette coo­pé­ra­tion ponctuelle et passagère ne donne de véritables résultats). Pour nous, qui œuvrions à Bruxelles depuis 1976, ce refus néo-droitiste était une insuffisance. Nous préférions les synthèses allemandes et italiennes, notamment le mélange allemand de nationalisme révolutionnaire et de nouvelle droite, dont les observateurs scientifiques ou critiques ne parviennent pas à séparer les ingrédients (voir les travaux de Bartsch, Pröhuber, etc.). En Italie, Pino Rauti, entre 1978 et 1982, dirigeait le bimensuel Linea, où les options nationales ré­vo­lu­tion­nai­res se mêlaient très habilement à certaines thèses de la ND, rendant particulièrement instructive la lecture de cette publication très vivante, très en prise sur les réalités quotidiennes de la péninsule. La syn­thèse réussie de Linea a toujours été pour moi un modèle.

Dans le cadre de mes activités en marge du GRECE d'abord, du Groupe EROE ("Etudes, Recherches et Orien­ta­tions Européenne") puis de Synergies Européennes ensuite, j'ai toujours tenté de rétablir un contact entre ces deux pôles, l'un théoricien, l'autre activiste. Je n'ai jamais renié mon compatriote Jean Thiriart, avec qui j'ai échangé un courrier aussi abondant que truculent (nous nous échangions des épithètes dignes du Capitaine Haddock), qui fut un maître incontournable sur deux plans: sa volonté de parfaire toujours une analyse géopo­li­ti­que de la scène internationale et, ensuite, sa volonté d'analyser les situations politiques intérieures à l'aune des instruments que nous ont laissés des hommes comme Vilfredo Pareto, Gaetano Mosca, Serge Tchakhotine, Da­vid Riesman, Raymond Aron (surtout "Les grands courants de la sociologie contemporaine"), etc. Thiriart était un analyste lucide des tares des régimes dominants; il méprisait profondément les politiciens à la petite semaine, qui n'agissent que par fringale d'intérêts personnels et par appétit de petits pouvoirs sans impact sur le fonctionnement réel de la politique. J'ai aussi participé régulièrement aux activités du MNR de Jean-Gilles Malliarakis à Paris, dont les interventions publiques étaient si chaleureuses à la mode latine et méditerra­néen­ne. Le MNR de Malliarakis était comme une grande famille et je regrette vivement qu'une structure de ce type n'existe plus aujourd'hui dans la capitale française, permettant des échanges féconds.

J'ai également participé à la revue Nationalisme et République de Michel Schneider, ce qui m'a valu les foudres d'A­lain de Benoist et de Charles Champetier. Heureusement que ces deux personnages ne sont que des Jupiters de petit voltage, juchés sur des taupinières, et que leurs foudres ne m'ont pas terrassé: elles n'ont eu que l'ef­fet d'un micro-postillon crachoté par une musaraigne. L'expérience de Nationalisme et République a été fort in­­téressante dans la mesure où des esprits très différents ont fait confluer leurs réflexions non conformistes dans ce journal, lui conférant une pertinence rarement égalée depuis. Ensuite, dernière remarque sur Natio­na­lisme et République: cette trop courte expérience éditoriale a permis notamment de suggérer les bases d'une recomposition géopolitique de l'Europe.

Incompatibilité entre politique et satano-saturnalisme

En revanche ma collaboration avec Christian Bouchet ("Nouvelle Résistance", le FEL) a tourné court. Bien que j'ai toujours amèrement déploré sa rupture, incompréhensible, avec le mouvement "Troisième Voie" de Jean-Gilles Malliarakis, qui, lui, a trop vite jeté l'éponge, j'ai toujours regardé le mouvement lancé ou repris par Bouchet avec sympathie et nous échangions publications et informations; nous nous sommes retrouvés à Paris dans une salle du 18ième arrondissement à côté d'Alexandre Douguine, nous semblions coopérer sans arrière-pen­sées, jusqu'au jour où Bouchet a eu une idée somme toute assez saugrenue. A la veille des élections euro­péennes de 1994, il a rendu visite au président français de "Synergies Européennes", Gilbert Sincyr, un ancien du GRECE, pour lui demander de placer les membres de SE sur une liste de candidats, dirigée par Bouchet lui-même, qui devait s'opposer à celle du FN de Le Pen. A juste titre, Sincyr a jugé que cette opé­ra­tion n'avait pas raison d'être et que SE, tout comme le FEL, risquait de se couvrir de ridicule, vu les scores for­cé­ment dérisoires que cette liste aurait obtenus. Bouchet a très mal pris ce refus et s'est mis en campagne contre Synergies Européennes, avec, en coulisse, l'appui d'Alain de Benoist et du "Chancelier" (!) du GRECE, Maurice Rollet, qu'il rencontrera à Marseille pour jeter les bases d'un "front commun" contre nous (et contre moi en particulier!).

Ce comportement irrationnel et puéril a fait perdre beaucoup de temps au mouvement. Par ailleurs, bon nom­bre de "synergétistes" voyaient d'un fort mauvais œil les activités non politiques de Bou­chet, où se mê­laient un culte du Britannique Aleister Crowley (sujet/objet de sa thèse universitaire), des pra­ti­ques sa­ta­nistes et sa­turnalistes, des rites sexuels du plus haut comique, où les participants s'affublent d'ori­peaux sacerdotaux d'où dépassent, obscènes, leurs attributs, sacrifices de poulets (pauvres bêtes!) par dé­ca­pitation en psalmodiant des in­cantations hystériques en faux tibétain, etc. Bouchet fait évidemment ce qu'il veut dans ses pénates, s'in­vente les jeux érotiques qui lui plaisent (à chacun selon ses voluptés!), mais un mixte de ces bouffonneries et de la politique —chose sérieuse quand elle refuse d'être purement politicienne— ne peut rien rapporter de bon, si ce n'est les quolibets de nos adversaires, qui peuvent ainsi largement alimenter leurs fantasmes. Le grou­pe “anti-fasciste” Golias étant particulièrement friand de ce genre de mixtum com­po­situm. Tout en gar­dant certaines réserves et en conservant mon esprit critique, je reconnais pleinement par ail­leurs l'excellence des deux derniers ouvrages de Bouchet: le volume collectif intitulé Les nouveaux natio­nalistes et l'ouvrage didactique qu'il vient de publier chez Pardès: Le B.A.BA du néo-paganisme. Bouchet a fait là œuvre utile, mais pour ses dérapages "saturnalistes", je conseille à tous de lire les deux pages bien claires de Victor Vallière, intitulées “De Satan à Loki: l'erreur de parcours de certains néo-païens” (in: Réfléchir & Agir, n°9, été 2001). Vallière nous donne là le vade-mecum de tout responsable local pour faire face à des velléités de saturnalisme ou de satanisme: il faut leur opposer un non possumus catégorique.

Ma collaboration avec Lookmy Shell (PCN) n'a débouché sur rien non plus, mis à part quelques articles dans ses publications. Ultérieurement, la querelle Bouchet/Shell, quels qu'en soient les motifs, a enrayé, à mon avis, la progression du mouvement nationaliste révolutionnaire, y compris des revues de Shell lui-même, qui au­raient pourtant mérité une plus ample diffusion, surtout qu'elles contenaient les articles de Frédéric Kisters, dont le niveau est excellent. Je reconnais notamment le bien fondé des tentatives de Lookmy Shell d'éradiquer tou­­tes les formes de “nazisteries” qui entachent le mouvement national-révolutionnaire et le couvrent de ridi­cule. Mais de là à imiter les insuffisances des mouvements qui s'auto-proclament “anti-fascistes” ou “anti-ra­cis­tes” et de faire du “nazisme” (défunt depuis mai 1945!!!) un concept extensible à l'infini, il y a une marge… Lookmy Shell a malheureusement franchi cette marge et renforcé la confusion qui règne depuis longtemps déjà dans la mouvance NR. J'aurais voulu poursuivre avec lui une quête sur le stalinisme, l'histoire de la diplomatie so­vié­ti­que, la mise en œuvre de la Sibérie dans les premières décennies du pouvoir soviétique, sur l'eurasisme, sur la di­plomatie soviétique pendant la guerre froide, sur la géopolitique des Balkans. A cause de l'attitude incom­pré­hensible de Lookmy Shell, toute cette documentation est restée en jachère mais, soyez-en sûrs, elle ser­vi­ra à d'autres. Par ailleurs, le comportement de Shell à mon égard demeure inexplicable. Il me reproche no­tam­ment d'a­voir dialogué avec le FNB de Marguerite Bastien, dont le journal, Le Bastion, a repris certains de mes pro­pos, sous la forme de deux ou trois interviews, axés principalement sur le problème de la Turquie dans l'OTAN et dans l'an­tichambre de l'UE. Lookmy Shell accusait l'équipe du Bastion d'être inspirée par une idéologie bru­ne-bleue (c'est-à-dire naziste-libérale) et d'être pro-occidentale, alors que dans le conflit du Kosovo, par ex­em­ple, elle a sévèrement critiqué la politique de l'OTAN et ne s'est jamais réclamée du national-socialisme. Je me de­man­de en quoi mes rapports avec les uns ou les autres regardent Lookmy Shell, et pourquoi s'arroge-t-il le droit de se poser en juge (fouquier-tinvillesque) de toute une presse, nationale ou autre? Quelles sont ses com­pé­­ten­ces intellectuelles, quelle élection l'a donc érigé à ce poste qu'il se donne arbitrairement? Shell n'a jamais été mon professeur et je n'ai jamais été membre de son mouvement. Dont acte. Et s'il n'en prend pas acte, je pense que son jugement est vicié et s'assimile aux rodomontades d'un interné qui se prendrait pour l'Empereur Napoléon (ou pour un autre personnage historique). Il y aurait là un vice dans l'appréhension du réel. Que je dé­­plore. Quand je visiterai une nouvelle fois un Asklepion hellénique, je demanderai à ce bon Esculape d'in­ter­céder en sa faveur, de trouver remède à ce mal qui afflige mon bon compatriote Lookmy Shell. Et quand un voi­sin catholique se rendra à Lourdes, je lui demanderai de dire une belle prière pour le Chef suprême du PCN, dont le retour à l'équilibre vaut bien quelques cierges consumés devant cette belle grotte pyrénéenne. Afin que nous puissions tous bénéficier de son rétablissement. Et relancer la machine interrompue à cause de ses co­lères aussi bruyantes qu'inexplicables.

Ces diverses péripéties montrent que l'espace ND/NR pose problème. Qu'il est tiraillé entre un empyrée théo­rique parfaitement éthéré —la planète Sirius disait un jour Pierre Vial en faisant allusion au GRECE— et un dis­cours qui s'englue dans des répétitions stériles, c'est-à-dire dans un piège mortel, où l'on n'appréhende plus le réel correctement. Si, à cet irréalisme et à ses répétitions, s'ajoutent l'arbitraire de personnalités en proie à des défaillances de jugement ou des illusions de grandeur, tout l'édifice, déjà fragile, bascule dans le néant. C'est pourquoi je salue avec joie, aujourd'hui, l'émergence de personnalités nouvelles, qui ont le sens de la camaraderie, de la solidarité, des nuances, de la nécessité de fédérer toutes les forces, de proposer une al­ter­native crédible et acceptable, à condition que ces personnalités adoptent systématiquement des démarches prospectives en direction des besoins réels de nos sociétés, quittent les marécages dangereux du nostalgisme et du sectarisme. Je pense aux efforts d'Eddy Marsan en France, qui juge la situation politique avec le regard acéré du philosophe réaliste, et de l'équipe du journal De­venir en Belgique, qui bénéficie depuis quelques nu­méros de la plume de Frédéric Kisters, qui a quitté, ef­fra­yé, le PCN de Lookmy Shell, à la suite de déboires dont je ne connais pas les détails. La tâche de ces person­na­lités nouvelles et dynamiques sera ardue, mais si elles persévèrent, elles réussiront au moins à établir soli­de­ment un édifice critique (à l'encontre de l'éta­blis­se­ment) et affirmateur (de valeurs et de perspectives poli­ti­ques nouvelles) dans le double champ de la ND et du NR. Et devenir, par conséquent, l'espace de renou­velle­ment des forces identitaires en Europe, que j'avais tou­jours espéré voir advenir. Laissons les personnalités à pro­blèmes se réfugier dans leur tour d'ivoire, prendre une retraite parfois méritée, dans de belles demeures ru­ra­les, en zone verte, pour se calmer les nerfs en siro­tant de réconfortantes tisanes.

Travailler à l'avènement d'une collégialité conviviale

Ce dont nous avons besoin, et que nous appelons de nos vœux depuis l'émergence de "Synergies Européennes", c'est l'avènement d'une col­lé­gialité conviviale et courtoise (ce sont les termes mêmes de notre charte), où cha­cun garde bien sûr qui sa re­vue, qui son cercle, qui son site internet, dans une pluralité féconde qui sera fédé­rée en ultime instance par un état d'esprit non sectaire, où l'intérêt collectif prime les humeurs et les af­fects per­sonnels. Ceux qui souf­frent de tels affects, ou se prennent pour des oracles infaillibles tout en menant des "stra­tégies personnelles" et en semant la zizanie, n'ont pas leur place au sein d'une telle collégialité. Il ne s'agit pas d'oblitérer les élans personnels et les initiatives de qualité; au contraire, il faut les laisser intacts et les fé­dérer ponctuellement, sans faire régner un mauvais esprit de soupçon, ni un caporalisme stérilisant, car de tels es­prits sapent le fonc­tion­nement optimal de tout groupe organisé.

Dans le cadre de la ND, il faut aussi déplorer une ambiguïté importante dans la définition qu'elle donne de la "cul­­ture", en tentant de la dégager et de l'autonomiser par rapport à toute démarche ou réflexion politiques, aus­si modestes soient-elles. Pour moi, une culture politique implique d'aborder les questions

- de la géopolitique (la dynamique croisée de l'histoire et de la géographie, des volontés humaines et de la don­née spatiale),

- du droit (le droit comme expression de l'identité politique d'un peuple, d'un Etat ou d'un Empire),

- de l'économie (les institutions économiques nationales ou locales sont autant l'expression de la culture d'un peu­ple que ses productions artistiques; la revalorisation des institutions économiques spécifiques est un an­­tidote contre les tentatives d'arasement globaliste)

- de l'histoire ancienne et immédiate, car nos méthodes sont généalogiques et archéologiques au contraire de celles des idéologies dominantes, qui plaquent sur le réel des idées toute faites; chaque entité poli­ti­que doit être ramenée à son histoire, à sa trajectoire propre dans le temps, et ramasser son passé pour le pro­jeter vers l'avenir, son avenir, distinct de celui des autres entités.

Cette approche nous différencie de la ND au sens habituel du terme, qui n'a pas abordé ces questions de ma­niè­re systématique, mais a mis davantage l'accent sur la volonté de créer une religion-ersatz (avec des rituels as­­sez parodiques et puérils: incantations biscornues devant une vieille pierre de meule rebaptisée "soleil de pierre", d'où l'expression d'un humoriste, qui avait assisté, à son corps défendant, à ce médiocre spectacle: le "pa­­ganisme du soleil pétrifié"), de forger une nouvelle morale en posant des interrogations sans fin (comme l'at­­­testent, par exemple, les deux numéros de Krisis sur la morale qu'Alain de Benoist a fait paraître naguère). Je ne nie pas l'importance des questions religieuses, morales ou éthiques mais je critique la propension à pren­dre prétexte de ces questions pour générer un questionnement sans fin qui n'aboutit à rien (les philosophes di­ront: le "trilemme de Münchhausen"). Les grandes valeurs religieuses ou éthiques ont déjà été énoncées et vé­cues dans le passé: il suffit de le reconnaître et de s'y soumettre. Le Bushido du shintoïsme japonais ou le Tao Te King chinois, par exemple, tous deux sources d'inspiration d'Evola, sont là, depuis toujours à notre dispo­si­tion. Nous pouvons les méditer, nous forger le caractère à leur lecture comme des millions d'hommes avant nous, intérioriser les admirables leçons de force et de modestie que ces deux textes nous offrent. C'est cela la pé­rennité de la Tradition. Un questionnement inquiet et torturé ne peut rien apporter de bon, si ce n'est l'in­dé­cision et le solipsisme, tares impolitiques par excellence.

Quelle est la dimension de votre combat ?

La dimension de notre combat est tout à la fois culturelle et politique. Elle vise la création d'une école politi­que européenne, puisant ses arguments dans les corpus culturels de notre continent. Géographiquement, ce com­bat est d'emblée européen, car, en notre point de départ, la Belgique, le cadre offert par le territoire na­tional est insuffisant (voire ridicule dans ses limites et indéfendable militairement). Les grands élans politiques ont toujours été impériaux ou européens chez nous, tant dans leurs dimensions laïques (comme chez "Jeune Eu­­rope" de Jean Thiriart), que bien souvent aussi dans leurs dimensions catholiques, où l'iconographe et pé­da­go­gue de l'histoire, le Chanoine Schoonjans des Facultés Saint-Louis, défendait toujours un point de vue im­pé­rial et catholique, même s'il devait parfois faire des concessions au "nationalisme petit-belge". En ultime in­stan­­ce, la patrie est le Saint-Empire, héritier de Rome. Les intellectuels de la fonction souveraine de ce Saint-Em­­pire, à ses débuts, étaient les clercs "lotharingiens", dont la plupart venaient du triangle Liège/Maas­tricht/ Aix-la-Chapelle, patrie originelle des Pippinides. Malgré cet affreux oubli du passé, qui nous pousse au­jourd'hui vers un univers orwellien, vers cette société du spectacle absolu sans profondeur temporelle que nous annon­çait Guy Debord, l'idée de cet aréopage de "lotharingiens" qui travaillent silencieusement au maintien de la struc­ture impériale, est une des idées motrices qui nous animent dans nos cercles de Brabant et de Liège. Cet­te Chancellerie "lotharingienne" trouve un écho dans la volonté de Carl Schmitt de recréer une telle in­stance, ap­pelée à énoncer un droit constitutionnel continental, de facture historiciste, flanquée d'une é­co­no­mie auto-cen­trée d'échelle continentale, reposant tous deux sur un recours à la Tradition, c'est-à-dire aux for­ces spi­ri­tuelles éternelles de l'Europe. Des "Lotharingiens" à Carl Schmitt, nous avons trouvé la conti­nui­té de gran­de pro­fondeur temporelle dans laquelle, humblement, nous nous inscrivons, en tâchant d'être de mo­destes con­ti­nua­teurs ou, du moins, les vestales de feux qui ne doivent pas s'éteindre.

De la guerre préventive des Américains contre l'Europe dans les Balkans, en Méditerranée orientale et en Asie centrale

Quant à la dimension plus pragmatique, que les impératifs de l'heure nous imposent, nous tentons de travailler de concert avec des amis allemands, italiens, espagnols, britanniques, français, helvétiques, russes, croates ou ser­bes sur des thématiques communes à toute l'Europe. Nous tentons de déconstruire à l'avance les antago­nis­mes artificiels que les services de diversion américains cherchent à bétonner en Europe. Par exemple, quand Hun­tington laisse sous-entendre qu'un clivage insurmontable existe de facto entre l'Europe occidentale (catho­lique et protestante) et l'Europe orientale (slavo-orthodoxe et son prolongement sibérien), il avance en fait un ar­gument de propagande pour rendre possible la guerre préventive que mènent les Etats-Unis contre toute con­centration de forces sur la masse territoriale eurasienne. En incluant la Grèce dans la sphère slavo-orthodoxe, les Etats-Unis, héritiers des stratégies de "containment" de l'Empire britannique, veulent à l'avance bloquer toute avancée des puissances danubiennes d'Europe centrale (allemande et serbe) en direction du bassin orien­tal de la Méditerranée, où Chypre déjà, est occupée par les Turcs depuis 1974. En fabriquant un axe musulman et néo-ottoman de la Thrace turque à l'Albanie, les Américains tirent un verrou infranchissable dans la portion sud du territoire balkanique, isolant la Grèce, qui, membre de l'UE et de l'OTAN, et réticente face aux pro­vocations turques, ne peut plus servir de tête de pont dans le bassin oriental. La géopolitique, vous le con­sta­tez, dans cet exemple très actuel, est une discipline faite de méthodologies diverses, qui vise à donner autant d'ouvertures possibles à nos forces continentales et apprend à prévoir l'organisation par nos adversaires de verrous ou le déploiement de stratégies bloquantes, qui visent à nous asphyxier politiquement, économique­ment, culturellement. Les travaux de nos amis croates et serbes (Antun Martinovic et Dragos Kalajic) ont été très éclairants dans cette problématique.

Enfin, il n'y a pas d'impérialité possible en Europe sans une économie propre qui suit ses règles spécifiques et non pas des recettes, néo-libérales et globalistes, énoncées en d'autres lieux, notamment dans les écoles et in­stituts de l'adversaire principal, les Etats-Unis. L'application de ces recettes conduit à notre impuissance. Nous travaillons donc sur les alternatives viables en économie, que des économistes français, tels Perroux, Albertini et Silem, avaient nommé les "hétérodoxies", qu'ils opposaient aux "orthodoxies", c'est-à-dire le libéralisme clas­sique (radicalisée aujourd'hui en "néo-libéralisme"), le communisme soviétique, désormais défunt, et les recet­tes de Keynes telles qu'elles sont appliquées par les sociales démocraties européennes (alors que l'œuvre de Key­­nes, nous le verrons parce que nous la travaillons actuellement, permet d'autres politiques). Pas d'im­pé­ria­lité non plus sans un droit clair et unifié, permettant d'harmoniser l'unité et la diversité. Un disciple de Carl Schmitt, Ernst Rudolf Huber, nous suggère un fédéralisme unificateur, respectueux des forces enracinées, seu­les garantes d'une "Sittlichkeit", c'est-à-dire d'une identité éthique et historique offrant la stabilité évoluante d'une continuité. C'est-à-dire une éthique vivante, politique et historique, qui permet de se projeter dans l'a­venir sans rester engluée dans des formes de gouvernance figées et sans jeter par-dessus bord les acquis du pas­sé. Guillaume Faye parlerait, lui, d'"archéofuturisme". En bref: l'antidote radicale à l'obsession de la "table rase" qui nous conduit tout droit à l'ambiance sinistre du 1984 d'Orwell et à la société moutonnière du spec­tacle, critiquée par Debord.

Vous venez de tenir votre université d'été, quelle place tient ce rendez-vous dans l'action de SE ?

L'Université d'été tient effectivement une place centrale dans nos activités. Elle est simultanément la Diète du mouvement, qui permet à nos sympathisants, venus de toute l'Europe, de se rencontrer et de constater que bon nombre de leurs préoccupations sont les mêmes en dépit des barrières nationales ou linguistiques.

Quelles en ont été les interventions principales ?

Il n'y a pas eu d'interventions principales et d'interventions secondaires, lors de cette 9ième Université d'été (qui est simultanément notre 16ième rencontre internationale). Nous avons toujours voulu présenter un panel d'orateurs chevronnés et d'orateurs néophytes. Cette méthode permet un enrichissement réciproque et évite le piège de la répétition, qui, comme je viens de vous le dire, est mortel à terme. Souvent les orateurs néophytes se défendent d'ailleurs fort bien. Ce fut le cas cette année plus que jamais. Parmi les orateurs chevronnés, nous avons eu Guillaume Faye, Frédéric Valentin, le Général Reinhard Uhle-Wettler et moi-même.

Faye nous a parlé de la "convergence des catastrophes" qui risque fort bien de s'abattre sur l'Europe dans les deux prochaines décennies. C'est un thème qu'il a déjà eu l'occasion d'évoquer dans ces trois derniers ouvrages, mais qu'il va approfondir en étudiant les théories de la physique des catastrophes. Le résultat final de cette quête va paraître dans une dizaine de mois et nous offrir une solide batterie d'argumentaires pour notre "philosophie de l'urgence", que nous avons tous deux héritée de nos lectures de Carl Schmitt (l'Ernstfall sur lequel nous travaillions déjà ensemble au début des années 80, notamment avec le concours de notre ami milanais Stefano Sutti Vaj et de la revue portugaise Futuro Presente), d'Ernst Jünger et de Martin Heidegger. Cette "philosophie de l'urgence" est dénoncée avec rage aujourd'hui par notre ancien "patron", Alain de Benoist, qui renie ainsi une bonne partie de ses propres positions, exprimées dans les colonnes des diverses revues néo-droitistes: on reste pantois à voir ainsi le chef de file de la ND/Canal historique renier purement et simplement les auteurs clefs de la RC et de la ND, qui se veut son héritière. Pire: il s'était posé comme le disciple fidèle d'Armin Mohler, auteur du manuel de référence principal des ND allemandes et italiennes (paru en version fran­çaise chez Pardès). Mohler développait une pensée de l'urgence, tirée des auteurs de la RC dont Jünger, de Carl Schmitt (“die Entscheidung”, “der Ausnahmezustand”), des disciples de celui-ci qui parlaient d'«Ernstfall», de la théorie de Walter Hof sur le “réalisme héroïque” et de la philosophie du Français Clément Rosset, auteur d'un ouvrage capital: La logique du pire. Pour Rosset, il fallait en permanence penser le pire, donc l'urgence, pour pouvoir affronter les dangers de l'existence et ne pas sombrer dans le désespoir devant la moindre contra­rié­té ou face à un échec cuisant mais passager. Mohler et Rosset sont mes professeurs: je n'accepte pas qu'on les trahisse aussi misérablement, que l'on opère une volte-face aussi pitoyable, surtout que rien, mais alors rien, n'est jamais venu infirmer la justesse de leurs démonstrations. La critique d'Alain de Benoist contre la pen­sée de l'urgence, telle que Faye l'articule, est résumée en une seule page de son journal, celle du 1 août 1999 (cf. La dernière année, L'Age d'Homme, 2000). Elle est à mon avis très bête, et toute à la fois suffisante et insuffisante. “Suffisante” par la prétention et la cuistrerie qui se dégagent de cette leçon sans substance, dia­métralement opposée à celles de Mohler et Rosset, et “insuffisante” par sa nullité et sa non pertinence.

Economie régulée et modèles sociaux traditionnels

Frédéric Valentin a abordé deux thèmes importants: la théorie de la régulation, avancée par les gauches au­jourd'hui, mais qui puise dans les corpus "hétérodoxes" (selon la définition de Perroux, Albertini et Silem). Pour les régulationistes français, la bonne marche de l'économie dépend de l'excellence des institutions politiques et économiques de l'entité où elle se déploie. Ces institutions découlent d'une histoire propre, d'un long terme his­torique, d'une continuité, qu'il serait tout à fait déraisonnable d'effacer ou de détruire, sous peine de dis­lo­quer la société et d'appeler une cascade de problèmes insolubles. Par conséquent, une économie qui se vou­drait "mondiale" ou "globale" est une impossibilité pratique et une dangereuse illusion. Dans sa deuxième in­ter­vention, il a montré comment les civilisations indiennes et chinoises avaient mis au point des garde-fous pour em­pêcher les classes sociales s'adonnant au négoce (du latin "neg-otium", fébrilité ou frénésie sans élégance) de contrôler l'ensemble du corps social.

Le Général Uhle-Wettler, ancien commandant des unités parachutistes allemandes et ancien chef de la 1ière Division aéroportée de la Bundeswehr, nous a exhorté à lire attentivement

- les ouvrages de Paul Kennedy sur la dynamique des empires et sur le concept d'hypertension impériale (im­perial overstretch),

- de Zbigniew Brzezinski pour connaître les intentions réelles de Washington en Eurasie et

- de Noam Chomsky pour connaître les effets pervers du globalisme actuel.

Cet exposé a été d'une clarté limpide, tant par la voix d'un homme habitué à haranguer ses troupes que par la concision du chef qui donne des ordres clairs. En tous points, les énoncés et les conclusions du Général cor­res­pondaient aux projets de notre "Ecole des Cadres", dirigée par Philippe Banoy, ce qui a évidemment en­thou­siasmé les stagiaires de cette école, présents à l'Université d'été! Mieux: debout à côté du Général pour tradui­re ses propos en français, j'ai été frappé d'entendre son appel aux jeunes Allemands à rejoindre un cercle com­me le nôtre pour élaborer l'alternative au monde actuel.

Pour ma part, j'ai présenté 54 cartes historiques de l'Europe, montrant le conflit cinq fois millénaire de nos peuples avec les peuples de la steppe eurasiatique. Nos cartographies scolaires sont généralement insuffisantes en France, en Allemagne et en Belgique. Les Britanniques en revanche, avec les atlas scolaires de Colin McEvedy, que je ne cesse de potasser depuis plus de vingt ans, disposent d'une cartographie historique beaucoup plus précise. En gros, quand les peuples européens dominent la steppe eurasienne jusqu'aux confins du Pamir (et peut-être au-delà, vers la Chine, à partir de la Dzoungarie et du désert du Taklamakan), ils sont maîtres de leur destin. Mais dès qu'un peuple non européen (Huns, Turcs) dépasse le Pamir pour s'élancer sur la ligne Lac Balkhach, Mer d'Aral, Mer Caspienne, il peut rapidement débouler en Ukraine puis dans la plaine hongroise et disloquer la cohésion territoriale des peuples européens en Europe. Cette vision, bien mise en exergue par la cartographie de Colin McEvedy, depuis la dispersion des peuples iraniens en Eurasie (vers 1600 av. J. C.), permet de bien mesurer les dangers actuels, où, avec Brzezinski, les Américains considèrent que l'Asie centrale fait partie de la zone d'influence des Etats-Unis, qui s'appuient sur les peuples turcophones.

Pour jeter les bases d'une "révolution conservatrice" civile

Dans une deuxième intervention, plus littéraire celle-là, j'ai montré comment les ferments de la fameuse "ré­volution conservatrice" allemande étaient né dans un cercle lycéen de Vienne en 1867, pour se développer en­suite à l'Université puis dans la sphère politique, tant chez les socialistes que chez les nationalistes. L'objectif de ce cercle, animé par la personnalité d'Engelbert Pernerstorfer, était de raviver les racines, de promouvoir un système d'enseignement populaire, de combattre les effets de la société marchande et de la spéculation boursière, de diffuser des formes d'art nouvelles selon les impulsions lancées par Schopenhauer, Wagner et Nietzsche (la "métaphysique de l'artiste", créateur de formes immortelles par leur beauté). La "révolution con­ser­vatrice" de Pernerstorfer est intéressante dans la mesure où elle se déploie avant la césure gauche/droite, socialistes/nationalistes, dévoilant une synthèse commune qui nous permet aujourd'hui de surmonter le clivage gauche/droite, qui bloque toute évolution idéologique, sociale et politique dans nos sociétés. Ensuite, le cor­pus idéologique qui a germé à Vienne de 1867 à 1914, permet de déployer une "révolution conservatrice" civile, c'est-à-dire une RC qui est en phase avec toutes les problématiques d'une société civile et non pas de la réduire à un "univers soldatique" comme dans la période de guerre civile qui a régné en Allemagne de 1918 à 1923. L'"u­ni­vers soldatique" est certes fascinant mais demeure insuffisant pour une pratique politique en temps normal (ceci dit pour répondre aux critiques insuffisantes et insultantes de de Benoist à l'encontre de toute pensée de l'urgence).

Deux autres orateurs de 40 ans se sont succédé à notre tribune: Andreas Ferch qui nous a brossé une esquisse biographique de Georg Werner Haverbeck, ancien animateur de la jeunesse "bündisch", inféodé par décret aux jeunesses hitlériennes, en rupture de banc avec le parti dès 1936 (parce que Haverbeck voulait une jeunesse fonctionnant selon les principes de la "démocratie de base" et non pas une jeunesse sous la tutelle d'un Etat), pasteur à Marbourg dans les années 40 et 50, animateur de cercles pacifiques au temps de la guerre froide (ce qui lui a valu le reproche d'être un "agent rouge"), fondateur de l'écologie non politicienne dans les années 80, refusant l'inféodation au gauchisme des Grünen (ce qui lui a valu le reproche de "néo-nationaliste" sinon pi­re…). Un destin étonnant qui résume toutes les problématiques de notre siècle. Werner Haverbeck est décédé à la fin de l'année 1999, à l'âge de 90 ans.

Heidegger et les effets pervers de la manie "faisabiliste"

Oliver Ritter, pour sa part, nous a parlé avec une extraordinaire concision et une remarquable clarté de Martin Heidegger. Il a parfaitement démontré que la transposition de critères et de grilles d'analyse de type technique ou de nature purement quantitative/comptable dans l'appréhension du réel conduit à des catastrophes (à cause du "voilement" ou de l'"oubli" de l'Etre). Face à l'option "archéofuturiste" de Faye, qui a des aspects techniciens, voire assurément "technophiles", en dépit de références heideggeriennes, les positions de Ritter sont bien sûr différentes, mais non "technophobes", dans la mesure où Heidegger s'émerveille aussi devant la beauté d'un pont qui enjambe une vallée, d'un barrage qui dompte une rivière ou un fleuve. Heidegger, et Ritter à sa suite, dénonce le désenchantement, y compris celui des productions de la technique, par l'effet pervers de ce culte technicien et quantitativiste de la faisabilité (Machbarkeit, feasability). Cette faisabilité (que critique aussi Ema­nuele Severino en Italie) réduit à rien la force intérieure des choses, qu'elles soient organiques ou produites de la main de l'homme. Cette réduction/éradication conduit à des catastrophes, et assurément à celles, convergentes, qu'annonce Faye. Ce dernier est plus proche du premier Heidegger, qui voit l'homme ar­raisonner le réel, le commettre, le requérir; Ritter, du second, qui contemple, émerveillé, les choses, souvent simples, comme la cruche qui contient le vin, au sein desquelles l'Etre n'a pas encore été voilé ou oublié, de ce second Heidegger qui dialogue avec ses disciples zen japonais dans son chalet de la Forêt Noire.

Sven Henkler, secrétaire de Synergon-Deutschland, vient de sortir un ouvrage sur le rapport homme-animal, totalement vicié aujourd'hui. Henkler nous a présenté son ouvrage le plus récent, Mythos Tier, qui déplore la déperdition définitive du rapport sacré qui existait entre l'homme et l'animal, de l'effroi respectueux que ressentait parfois l'homme face à la force de l'animal (notamment l'ours). L'animal est devenu pure mar­chan­di­se, que l'on détruit sans pitié quand les réquisits de l'économie l'exigent. Thierry de Damprichard a présenté un panorama des auteurs américains de la Beat Generation et explicité quelles influences ils avaient reçues d'Ezra Pound. Cette présentation a suscité un long débat qu'il a magistralement co-animé avec Guillaume Faye, très bon connaisseur de cette littérature, très en vogue dans les années 60. Ce débat a permis de rappeler que no­tre contestation du système (et de l'«américanosphère») est également tributaire de cette littérature protesta­taire. Guillaume Faye a notamment dit qu'elle avait marqué une figure non-conformiste française qui a démar­ré sa carrière dans ces années-là, qui est toujours à nos côtés: Jack Marchal.

Le rôle géopolitique futur de l'Inde et de sa marine

Jorge Roberto Diaz nous a parlé de la géopolitique de l'Inde, dans le cadre de diverses interventions sur les questions stratégiques et géostratégiques. Nous abordons chaque année un ensemble de questions de ce domai­ne, afin de consolider nos positions géopolitiques. L'ouvrage auquel Diaz s'est référé pour prononcer son exposé est celui d'Olivier Guillard, La stratégie de l'Inde pour le 21ième siècle (Economica, Paris, 2000). Jouer la carte in­dienne est un impératif géostratégique pour l'Europe et la Russie d'aujourd'hui, qui permettrait de contourner la masse territoriale turcophone, afghane/talibanique et pakistanaise, mobilisée contre l'UE et la Fédération de Rus­sie par les Etats-Unis. Une alliance entre l'UE, la Russie et l'Inde aurait pour corollaire de contenir l'effer­ves­cence islamiste et surtout, comme l'a très bien exposé Diaz, de contrôler l'Océan Indien et le Golfe Persique, donc les côtes des puissances islamiques alliées des Etats-Unis. Le développement de la marine indienne est donc un espoir pour l'Europe et la Russie qui permettra, à terme, de desserrer l'étau islamique dans le Caucase et les Balkans et de parfaire, le cas échéant, un blocus de l'épicentre du séisme islamiste, c'est-à-dire l'Arabie Saoudite. La menace qui pèse sur l'Inde vient de l'occupation américaine de l'île de Diego Garcia, où sont con­cen­trées des forces impressionnantes, permettant aux Etats-Unis de contrôler les flots et le ciel de l'Océan In­dien ainsi que le transit maritime du pétrole en direction de l'Europe, de l'Afrique du Sud, du Japon et des nou­veaux pays industriels d'Asie orientale.

Max Steens nous a plongés dans la pensée politique chinoise, en évoquant la figure de Han Fei, sage du 3ième siècle avant l'ère chrétienne. Han Fei nous suggère une physique politique limpide, sans jargon, avec, en plus, 47 principes pour prévenir toute pente vers la décadence. Phrase ou aphorismes courts, à méditer en perma­nen­ce! Le renouveau de notre espace politico-idéologique passe à notre sens par une lecture des sagesses po­litiques extrême-orientale, dont

- le Tao-Te-King, traduit en italien par Julius Evola pendant l'entre-deux-guerres et texte cardinal pour com­prendre son idéal de “personnalité différenciée” et son principe de “chevaucher le Tigre” (c'est-à-dire de vivre la décadence, de vivre au sein même de la décadence et de ses manifestations les plus viles, sans perdre sa force intérieure et la maîtrise de soi),

- le traité militaire de Sun Tsu comme le préconise Philippe Banoy, chef de notre école des cadres de Wal­lonie,

- le "Tao du Prince" de Han Fei, comme le préconise Steens de l'école des cadres de Bruxelles et

- le code du Shinto japonais, comme le veut Markus Fernbach, animateur de cercles amis en Rhénanie-West­phalie. Fernbach est venu nous présenter le code du Shinto avec brio, avec une clarté aussi limpide que son homologue français ès-shintoïsme, que je n'ai pas l'honneur de connaître, Bernard Marillier, auteur d'une étude superbe sur ce sujet primordial, parue récemment chez Pardès.

Tremper le caractère, combattre les affects inutiles qui nous distraient de l'essentiel

Ces voies asiatiques conduisent à tremper le caractère, à combattre en nos fors intérieurs tous les affects inu­tiles qui nous distraient de l'essentiel. Un collège de militants bien formés par ces textes, accessibles à tous, per­mettrait justement de sortir des impasses de notre mouvance. Ces textes nous enseignent tout à la fois la du­reté et la sérénité, la force et la tempérance. Après la conférence de Fernbach, le débat s'est prolongé, en abordant notamment les similitudes et les dissemblances entre ce code de chevalerie nippon et ses homologues persans ou européens. On a également évoqué les "duméziliens" japonais, étudiés dans le journal "Etudes indo-européennes" du Prof. Jean-Paul Allard de Lyon III, bassement insulté par la presse du système, qui tombe ainsi le masque et exhibe sa veulerie. Enfin, il y a eu un aspect du débat qui me paraît fort intéressant et promet­teur: notre assemblée comptait des agnostiques, des païens, des catholiques et des luthériens. Ethique non chré­tienne, le Shinto peut être assimilé sans problème par des agnostiques ou des païens, mais aussi par des ca­tho­liques car le Vatican a admis en 1936 la compatibilité du shintoïsme et du catholicisme romain. On peut donc être tout à la fois catholique et shintoïste selon la hiérarchie vaticane elle-même. Dès lors pourquoi ne pas étendre cette tolérance vaticane aux autres codes, ceux de la Perse avestique ou des kshatriyas indiens, le culte romain des Pénates, etc., bref à tout l'héritage indo-européen? Voilà qui apporterait une solution à un problème qui empoisonne depuis longtemps notre mouvance. Mais cette reconnaissance du shintoïsme, qui da­te de 1936, sous le Pontificat de Pie XII, est-elle encore compatible avec les manifestations actuelles du catho­li­cisme: les mièvreries déliquescentes de Vatican II ou l'impraticable rigidité des intégrismes obtus?

Manfred Thieme nous a ramenés à l'actualité en montrant avec précision les effets de la privatisation de l'éco­nomie dans les PECO (pays d'Europe centrale et orientale), en prenant pour exemple l'évolution de la Répu­blique Tchèque.

Les autres conférences, prévues à Bruxelles pendant le week-end précédant l'Université d'été proprement dite, seront prononcées plus tard, majoritairement en langue néerlandaise. Successivement, Jürgen Branckaert, Pré­sident des Jeunes du Vlaams Blok, l'historien brugeois Kurt Ravyts, Philippe Banoy, Guillaume Faye et moi-même y prendront la parole. Branckaert évoquera une figure cardinale de notre histoire: le Prince Eugène de Savoie, vainqueur des Turcs à la fin du 17ième siècle. Un cercle "Prince Eugène" verra le jour à Bruxelles, ras­sem­blant des Flamands et des Wallons fidèles à l'idée impériale, fédérant les cercles épars qui véhiculent la même inébranlable fidélité, tels “Empire et puissance” de Lothaire Demambourg ou la “Sodalité Guinegatte”. Des sections seront créées ensuite en Autriche, en Hongrie et en Croatie, de façon à nous remémorer notre seule légitimité politique possible, détruite par la révolution française, mais dans une perspective plus claire et plus européenne que celle de l'iconographie que nous avait présentée, dans notre enfance, le Chanoine Schoonjans, avec les images de la collection “Historia”. Ravyts analysera les influences de Gabriele d'Annunzio et de Léon Bloy, notamment sur la figure du national-solidariste flamand Joris Van Severen. Il rendra de la sorte cette figure de notre histoire plus compréhensible pour nos amis français et italiens. Cet exposé per­mettra également de raviver le souvenir de Léon Bloy dans notre mouvance, qui l'a trop négligé jusqu'ici. Banoy analysera l'œuvre de Vladimir Volkoff et en tirera tous les enseignements nécessaires: lutte contre la sub­version et la désinformation. Guillaume Faye présentera une nouvelle fois sa théorie de la “convergence des catastrophes".

La diversité de vos intervenants se retrouve dans la liste de diffusion multilingue que vous animez sur le net. Qu'il s'agisse de culture, de politique ou de géostratégie, vous offrez à vos destinataires des contri­butions qui tranchent bien entendu avec la pensée unique mais aussi bien souvent avec la routine intel­lectuelle des milieux nationalistes, français en tous cas. Précisément, quel regard portez-vous sur les na­tionalismes européens en général et français en particulier ?

Le rôle d'un cercle "métapolitique" est aussi de diffuser de l'information en vrac pour aider les jugements à se forger, pour concurrencer, dans la mesure du possible, l'idéologie que véhiculent les médias. Nous diffusons en six langues, le français, l'anglais, l'allemand, le néerlandais, l'espagnol et l'italien. Ce sont les six langues de travail de Synergies Européennes en Europe occidentale. Bon nombre de nos destinataires sont multilingues et la combinaison de langues maîtrisées varie d'individu à individu. Ce service de documentation électronique vise essentiellement, comme vous le devinez, à contredire et à critiquer l'idéologie dominante, celle de la "pensée unique" et de la "political correctness", mais aussi à enrichir le discours de nos lecteurs, quel que soit le secteur où ils sont actifs, politiquement ou professionnellement. En confrontant les idées de leurs milieux national, politique ou professionnel à celles de milieux similaires dans d'autres pays ou espaces linguistiques, ils consolident leurs idées, apprennent à les illustrer avec davantage d'arguments donc à transcender tout ce qui pourrait être répétition stérile. Nous tranchons de la sorte avec les routines du nationalisme français comme avec toutes les autres routines qui sévissent ailleurs. Pour moi, le nationalisme n'a de sens que s'il est une pratique qui consiste à capter les forces agissantes dans la société civile, dans le "pays réel" aurait dit Maurras, mais qui sont contrecarrées dans leur déploiement par l'établissement, ou le "pays légal".

Le "pays réel" des petites et honnêtes gens

Quant au regard que nous portons sur le nationalisme français, vous devinez qu'il est critique, justement parce qu'il vient d'ailleurs, d'un lieu hors Hexagone. En général, les observateurs scientifiques des phénomènes nationalistes dans le monde opèrent une distinction entre les "nationalismes étatiques" et les "nationalismes populaires" ou "ethniques". Les nationalismes étatiques, dans cette optique, seraient ceux qui privilégieraient les appareils d'Etat sans tenir compte des facteurs ethniques ou en s'opposant à ceux-ci. Les nationalismes populaires ou ethniques serait ceux qui instrumentaliseraient les forces populaires contre les appareils, jugés étrangers et coercitifs. Généralement, les nationalismes populaires ou ethniques se réclament du philosophe allemand Johann Gottfried Herder, père spirituel des nationalismes allemand, flamand, scandinaves, finnois, hongrois, russe, serbe, croate, tchèque, grec, slovaque, irlandais, breton, etc. On a opposé ce nationalisme du substrat ethnique aux idées de la révolution française, qui utilisent les forces organiques du peuple pour faire triompher des abstractions qui, une fois établies, travailleront à éradiquer les peuples réels. En dehors de France, le nationalisme français est souvent confondu avec les idées révolutionnaires jacobines, qui sont considérées comme anti-nationales. Ernest Renan a tenté de formuler un "nationalisme d'élection", un nationalisme fait d'adhésion volontaire à une "idée" nationale. Cette formule est également considérée comme un leurre par les nationalismes d'inspiration herdérienne, cette volonté et cette "idée" apparaissant trop éthérées par rapport à la substantialité que représentent l'héritage ancestral, la littérature véhiculée de génération en génération, les lignées de chair et de sang, la langue comme réceptacle de tous les souvenirs ataviques. La formule de Maurras éveille la même suspicion, à l'exception de sa distinction entre "pays réel" et "pays légal". Où le pays réel des "petites et honnêtes gens" (Péguy!) est exploité et écrasé par un pays légal mais foncièrement illégitime. En ce sens, Maurras est ambigu: dans sa jeunesse félibrige, il était un adepte de Herder qui s'ignorait. Il pariait directement sur le charnel local, cherchait à le dégager de l'emprise d'un légalisme abstrait. Cette trajectoire va continuer : la nostalgie d'un populisme organique ne cesse de hanter de grands esprits en France. Les fédéralistes autour d'Alexandre Marc et de Guy Héraud, qui commencent leurs travaux dans les années 30, les éléments critiques à l'égard d'un étatisme trop rigide que l'on repère dans l'œuvre de Bertrand de Jouvenel, le "folcisme" provençal, rural et paysan d'un Giono, les mouvements paysans de l'entre-deux-guerres, le slogan la "Terre ne ment pas" du temps de Vichy, les éléments épars de toute cette quête diffuse qui se retrouve dans le populisme gaulliste pendant la guerre et dans l'après-guerre, etc. La synthèse de toutes ces merveilles de la pensée du 20ième siècle n'a pas encore été faite. Malheureusement ! Cependant, les orientations nouvelles du gaullisme dans les années 60, après les tumultes de la guerre d'Algérie, avec la volonté de créer un Sénat des régions et des professions et de lancer l'idée mobilisatrice de "participation" mériteraient, à notre sens, une attention plus soutenue de la part des cercles néo-nationalistes en France, qu'ils soient inféodés à des partis ou non.

Un programme nouveau pour le nationalisme français

Enfin, il est évidemment qu'en dehors de France, et même dans les régions francophones à la périphérie de l'Hexagone, l'Histoire n'est pas jugée de la même manière. Par rapport au reste de l'Europe, l'Histoire de Fran­ce, depuis Louis XI (que nos instituteurs appelait l'«Universelle aragne», en reprenant l'expression qu'utilisait à son propos Charles le Hardi, Duc de Bourgogne, que l'historiographie française nomme le «Téméraire») et sur­tout depuis François I est regardée avec une évidente animosité. L'alliance que François I noue avec les Ot­tomans est considérée comme une trahison à l'égard du "bloc civilisationnel" européen. Cette animosité est difficilement surmontable, car lorsque nous avons affaire à des amis allemands (surtout du Sud), espagnols, autrichiens, hongrois, croates, lombards ou vénitiens, nous sommes amenés tout naturellement à partager la même vision de l'histoire: celle qui voit l'Europe unie contre les adversaires communs en Afrique du Nord et dans les Balkans. La France, comme du reste l'Angleterre, et dans une moindre mesure le Portugal et la Suède, fait bande à part, est perçue comme étant en marge de notre bloc civilisationnel. Par conséquent, notre souhait est de voir se développer une nouvelle historiographie française qui aurait les caractéristiques suivantes:

◊ Elle se réapproprierait une bonne part de la tradition bourguignonne, dans la mesure où celle-ci est fidèle à l'Empire, forge un "Ordre de la Toison d'Or" visant à reprendre pied dans l'espace pontique (Mer Noire);

◊ Elle revaloriserait des figures comme Catherine Ségurane, héroïque niçoise en lutte contre les Ottomans et François I (cf. «Une jeune Niçoise résiste au Turc Barberousse», in : Historia, n°593, mai 1996);

◊ Elle se réfèrerait davantage à la Sainte-Ligue, au-delà d'un catholicisme trop intransigeant, car la Sainte-Ligue était alliée à une Espagne combattante, notamment en Méditerranée et en Afrique du Nord;

◊ Elle se réfèrerait aux mouvements populaires de résistance, ainsi qu'à la Fronde, contre les tentatives de centralisation, qui n'avait qu'un but, spolier la population pour financer des guerres contre le reste de l'Europe et au profit de l'allié ottoman;

◊ Elle réactualiserait la politique maritime de Louis XVI, qui fut capable de damer le pion à la Royal Navy, et qui aurait, s'il avait réussi, dégagé définitivement l'Europe de l'«anaconda» thalassocratique (Haushofer);

◊ Elle mettrait en exergue la conquête de l'Algérie, imposée par la Restauration européenne à la France, pour expier les fautes de François I, qui avait, par ses manœuvres pro-ottomanes, fait échouer les conquêtes de Charles-Quint, amorcées en Tunisie, et des troupes espagnoles en Oranie;

◊ Elle renouerait avec le gaullisme anti-impérialiste et participationniste, en dépit des clivages catastrophiques de la guerre d'Algérie, ce qui permettrait de retomber à pieds joints dans le concret, en avançant une politique d'indépendance agricole et d'indépendance énergétique, pariant sur la diversité des sources, en proposant un modèle social original, dépassant les insuffisances du libéralisme et du capitalisme de type anglo-saxon, de lancer une politique spatiale (de concert avec le reste de l'Europe), de consolider un armement nucléaire, de relancer une flotte crédible (cf. les thèses de l'Amiral Castex et les travaux de Hervé Coutau-Bégarie) et de maintenir l'atout majeur qu'est une industrie aéronautique autonome, prête à coopérer avec ses consœurs européennes (notamment Saab en Suède).

Vous le constatez: nous ne sommes pas seulement critiques, par rapport aux errements du passé, nous sommes surtout positifs car nous proposons aux Français de mettre leurs atouts au service d'un bloc civilisationnel, capable de résister aujourd'hui aux Etats-Unis et à son appendice, le monde islamique, travaillé par les intégrismes de tous acabits.

 

jeudi, 10 mai 2007

9ième Université d'été de "Synergies Européennes"

9ième UNIVERSITÉ D'ÉTÉ (2001) DE «SYNERGIES EUROPÉENNES»

L'Université d'été tient une place centrale dans les activités de l'association «SYNERGIES EUROPÉEN­NES». Elle est simul­tanément la Diète du mouve­ment, qui permet à ses sympa­thi­sants, venus de tou­te l'Europe, de se rencontrer et de constater que bon nombre de leurs préoccupations sont les mêmes en dépit des barrières nationales ou linguistiques. Cette année, cette réunion annuelle a eu lieu en Basse-Sa­xe, à proximité du site archéologique pré­historique des "Ex­ternsteine", qui fut probablement un observatoire astro­no­mique, comme Stonehenge en Angleterre. Les stagiaires ont visité ce site et sui­vi les explications d'un guide pro­fes­sionnel, qui s'est spécialisé dans la question, et qui maîtrise par­fai­tement l'histoire très controversée  —à l'instar de Glo­zel en France—  des recherches qui ont eu lieu là-bas de­puis la fin du 19ième siècle.

Les interventions principales de la session de 2001

Lors de cette 9ième Université d'été (qui est simulta­nément la 16ième rencontre internationale de ce type patronnée di­rectement par «SYNERGIES EUROPÉEN­NES») a vu se succé­der des orateurs très différents. Les organisateurs ont tou­jours voulu présenter un panel d'orateurs chevronnés et d'o­rateurs néophy­tes. Cette méthode permet un enrichis­se­ment ré­ci­proque et évite le piège de la répétition, qui est mor­tel à terme. Souvent les orateurs néophytes se dé­fen­dent d'ailleurs fort bien. Ce fut le cas cette an­née plus que ja­mais. Parmi les orateurs chevron­nés, nous avons eu Guil­laume Faye, Frédéric Valen­tin, le Général Reinhard Uhle-Wettler et Robert Steuckers.

Guillaume Faye et la «convergence des catastrophes»

Faye nous a parlé de la "convergence des catastro­phes" qui risque fort bien de s'abattre sur l'Europe dans les deux pro­chaines décennies. C'est un thème qu'il a déjà eu l'occasion d'évoquer dans ces trois der­niers ouvrages, mais qu'il va approfondir en étu­diant les théories de la physique des ca­ta­strophes. Le résultat final de cette quête va paraître dans une di­zaine de mois et nous offrir une solide batterie d'ar­gumentaires pour notre "philosophie de l'urgen­ce", héri­tée de sa lecture de Carl Schmitt (l'Ernst­fall sur lequel il a déjà travaillé au début des an­nées 80, notamment avec le con­cours de Robert Steuc­kers, de son ami et traducteur mi­lanais Ste­fa­no Sutti Vaj et de Jaime Nogueira Pinto, éditeur de la revue portugaise Futuro Presente). L'influence d'au­teurs comme Ernst Jünger et Martin Heidegger a également été capitale dans l'élaboration de cette pensée de l'ur­gen­ce. Faye est ainsi le disciple fidèle d'Armin Mohler, auteur du manuel de référence prin­cipal des ND allemandes et italiennes (paru en ver­sion française chez Pardès). Mohler développait, lui aussi, une pensée de l'urgence, tirée des au­teurs de la Révolution Conservatrice dont Jünger, de Carl Schmitt (“die Entscheidung”, “der Ausnahme­zu­stand”), des disciples de celui-ci qui parlaient d'«Ernst­fall», de la théo­rie de Walter Hof sur le “réa­lisme héroïque” et de la philo­so­phie du Français Clé­ment Rosset, auteur d'un ouvrage ca­pi­tal: La lo­gi­que du pire. Pour Rosset, il fallait en perma­nen­ce penser le pire, donc l'urgence, pour pouvoir affron­ter les dangers de l'existence et ne pas sombrer dans le dé­sespoir devant la moindre contrariété ou face à un échec cui­sant mais passager. Mohler et Ros­set sont les véritables professeurs de Faye, tout comme son ami Giorgio Locchi, dis­paru trop tôt en 1992. Guillaume Faye poursuit et ap­profondit ce fi­lon très fécond de la pensée. En cela, il reste iné­branlablement fidèle à l'option la plus essentielle de la "Nou­velle Droite", à laquelle il a voué son exis­ten­ce.

De nous tous, qui avons participé aux initiatives de la ND, incontestablement, Faye est ce­lui qui a le plus don­né, sans autre retours que l'ignoble trahison de ses pre­miers com­man­ditaires, qui ont délibérément tenté de ré­dui­re sa voix à un silence définitif, d'abord en lui coupant les vivres, en­suite, dans une deuxième phase, en montant au printemps 2000 une machination, une cabale, destinée à le faire con­damner à une amende astronomique par la 17ième chambre de Paris. Qu'il accepte ici notre plus sincère gratitude. Et que les comploteurs soient assurés de notre plus parfait mépris.[NDLR/RS : à propos de la critique de toute "pen­sée de l'ur­gence" chez Alain de Benoist: Locchi, Mohler et Rosset sont é­galement mes professeurs, des maîtres que je ne sau­rais re­nier: je n'accepte pas qu'on les trahisse aussi mi­sé­rable­ment, que l'on opère une volte-face aussi pito­ya­ble, surtout que rien, mais alors rien, n'est jamais venu in­fir­mer la jus­tesse de leurs démonstrations. La critique d'A­lain de Be­noist contre la pensée de l'urgence, telle que Fa­ye l'articu­le, est résumée en une seule page de son journal, celle du 1 août 1999 (cf. La dernière année, L'Age d'Hom­me, 2000). Elle est à mon avis très bête, et tout à la fois suf­fisante et insuffisante. “Suffisante” par la prétention et la cuistrerie qui se dégagent de cette leçon sans substance, diamé­tra­le­ment opposée à celles de Mohler et Rosset, et “in­suffisan­te” par sa nullité et sa non pertinence. De Be­noist critique Faye, parce que sa vision "catastrophiste" dé­ri­ve d'une analyse des effets pervers des politiques irréflé­chies d'immigration, pratiquées en France et dans d'autres pays d'Europe occidentale. Faye a prévu également le ter­ro­risme, qui a frappé en 2001, à New York et peut-être aus­si à Toulouse. L'islamisme, en tant qu'extrémisme (qu'on ne con­fondra pas avec l'Islam), est évidemment un danger, pour les peuples de souche européenne comme pour les peu­ples musulmans, mais de Benoist, pour des raisons vé­na­les et alimentaires, ou de vaine gloriole, ne peut dé­velopper une critique de ces dérives: il est un des corres­pon­dants ou des collaborateurs occasionnels à Paris du jour­nal iranien Teheran Times. Cette modeste position, qui pourrait certes être intéressante, autorise-t-elle l'aveugle­ment intellectuel ou le reniement de ses propres positions? Là est toute la question…]. 

Frédéric Valentin: régulationistes et modèles indien et chinois

Frédéric Valentin a abordé deux thèmes importants: la théo­rie de la régulation, avancée par les gauches au­jour­d'hui, mais qui puise dans les corpus "hété­ro­doxes" (selon la définition de Perroux, Albertini et Si­lem). Pour les régula­tionistes français, la bonne mar­che de l'économie dépend de l'excellence des in­stitutions politiques et économiques de l'entité où elle se déploie. Ces institutions découlent d'une his­toire propre, d'un long terme historique, d'une con­­ti­nuité, qu'il serait tout à fait déraisonnable d'ef­fa­cer ou de détruire, sous peine de disloquer la socié­té et d'ap­pe­ler une cascade de problèmes insolu­bles. Par consé­quent, une économie qui se voudrait "mondiale" ou "glo­bale" est une impossibilité prati­que et une dangereuse illu­sion. Dans sa deuxième in­tervention, il a montré comment les civilisations in­diennes et chinoises avaient mis au point des gar­de-fous pour empêcher les classes sociales s'adon­nant au négoce (du latin "neg-otium", fébrilité ou fré­nésie sans élégance) de contrôler l'ensemble du corps social.

Reinhard Uhle-Wettler: Brzezinski, Kennedy, Chomsky

Le Général Uhle-Wettler, ancien commandant des uni­tés pa­ra­chutistes allemandes et ancien chef de la 1ière Division aéroportée de la Bundeswehr, nous a ex­horté à lire atten­ti­ve­ment

- les ouvrages de Paul Kennedy sur la dynamique des em­pires et sur le concept d'hypertension impériale (imperial overstretch),

- de Zbigniew Brzezinski pour connaître les inten­tions réel­les de Washington en Eurasie et

- de Noam Chomsky pour connaître les effets pervers du glo­balisme actuel.

Cet exposé a été d'une clarté limpide, tant par la voix d'un homme habitué à haranguer ses troupes que par la conci­sion du chef qui donne des ordres clairs. En tous points, les énoncés et les conclusions du Général correspondaient aux projets de l'"Ecole des Cadres" de "SYNERGIES EUROPÉEN­NES", dirigée en Wallonie par Philippe Banoy, ce qui a évi­dem­ment enthousiasmé les stagiaires de cette école, pré­sents à l'Université d'été! Mieux: en entendant les paroles du Général, nous avons été frappé d'en­ten­dre son appel aux jeunes Allemands à rejoindre un cercle comme "Synergies Européennes" pour éla­bo­rer l'alternative au monde actuel.

Steuckers: cartographie géopolitique

Pour sa part, Robert Steuckers a présenté 54 cartes histori­ques de l'Europe, montrant le conflit cinq fois mil­lénaire de nos peuples avec les peuples de la step­­pe eurasiatique. Nos cartographies scolaires sont généralement insuffisantes en France, en Al­le­magne et en Belgique. Les Britanniques en re­van­che, avec les atlas scolaires de Colin McEvedy, que Steuckers n'a cessé de potasser depuis plus de vingt ans, dis­posent d'une cartographie historique beau­coup plus pré­ci­se. En gros, quand les peuples euro­péens dominent la step­pe eurasienne jusqu'aux con­fins du Pamir (et peut-être au-delà, vers la Chine, à partir de la Dzoungarie et du dé­sert du Takla­ma­kan), ils sont maîtres de leur destin. Mais dès qu'un peuple non européen (Huns, Turcs) dépasse le Pa­mir pour s'élancer sur la ligne Lac Balkhach, Mer d'Aral, Mer Caspienne, il peut rapidement débouler en U­kraine puis dans la plaine hongroise et disloquer la co­hésion territo­ria­le des peuples européens en Euro­pe. Cette vision, bien mi­se en exergue par la carto­gra­phie de Colin McEvedy, depuis la dispersion des peuples iraniens en Eurasie (vers 1600 av. J. C.), per­met de bien mesurer les dangers actuels, où, a­vec Brzezinski, les Américains considèrent que l'A­sie cen­tra­le fait partie de la zone d'influence des Etats-Unis, qui s'ap­puient sur les peuples turco­pho­nes.

Engelbert Pernerstorfer

Dans une deuxième intervention, plus littéraire cel­le-là, Steuc­kers a montré comment les ferments de la fameuse "ré­volution conservatrice" allemande é­taient né dans un cer­cle lycéen de Vienne en 1867, pour se développer en­suite à l'Université puis dans la sphère politique, tant chez les socialistes que chez les nationalistes. L'objectif de ce cercle, ani­mé par la personnalité d'Engelbert Pernerstorfer, é­tait de raviver les racines, de promouvoir un systè­me d'en­seignement populaire, de combattre les ef­fets de la société marchande et de la spéculation bour­sière, de diffuser des formes d'art nouvelles se­lon les impulsions lancées par Scho­penhauer, Wag­ner et Nietzsche (la "métaphysique de l'artiste", créa­teur de formes immortelles par leur beauté). La "révolution conservatrice" de Pernerstorfer est in­té­res­sante dans la mesure où elle se déploie avant la césure gau­che/droite, socialistes/nationalistes, dé­voi­lant une syn­thèse commune qui nous permet au­jour­d'hui de surmonter le clivage gauche/droite, qui bloque toute évolution idéolo­gique, sociale et poli­ti­que dans nos sociétés. Ensuite, le cor­pus idéolo­gi­que qui a germé à Vienne de 1867 à 1914, per­met de déployer une "révolution conservatrice" civile, c'est-à-dire une Révolution Conservatrice qui est en phase avec toutes les problématiques d'une société civile et non pas de la réduire à un "univers soldatique" com­me dans la pé­riode de guerre civile qui a régné en Allemagne de 1918 à 1923. L'"univers soldatique" est certes fascinant mais de­meu­re insuffisant pour une pratique politique en temps nor­mal (ceci dit pour répondre aux critiques d'Alain de Be­noist à l'en­contre de toute pensée de l'urgence, critiques qu'il adresse surtout à Faye).

L'itinéraire de Georg Werner Haverbeck

Deux autres orateurs de 40 ans se sont succédé à no­tre tri­bune: Andreas Ferch qui nous a brossé une esquisse bio­gra­phique de Georg Werner Haverbeck, ancien animateur de la jeunesse "bündisch", inféodé par décret aux jeunesses hit­lé­riennes, en rupture de banc avec le parti dès 1936 (parce que Haverbeck vou­lait une jeunesse fonctionnant selon les prin­ci­pes de la "démocratie de base" et non pas une jeu­nesse sous la tutelle d'un Etat), pasteur à Marbourg dans les années 40 et 50, animateur de cercles pa­cifiques au temps de la guerre froide (ce qui lui a va­lu le reproche d'être un "a­gent rouge"), fondateur de l'écologie non politicienne dans les années 80, refusant l'inféodation au gauchisme des Grünen (ce qui lui a valu le reproche de "néo-nationaliste" sinon pire…). Un destin étonnant qui résume toutes les pro­blé­matiques de notre siècle. Werner Haverbeck est décédé à la fin de l'année 1999, à l'âge de 90 ans.

Oliver Ritter: Heidegger et la technique

Oliver Ritter, pour sa part, nous a parlé avec une ex­traor­di­naire concision et une remarquable clarté de Martin Hei­deg­ger. Il a parfaitement démontré que la transposition de cri­tères et de grilles d'ana­ly­se de type technique ou de na­tu­re purement quan­ti­tative/comptable dans l'appréhension du réel con­duit à des catastrophes (à cause du "voilement" ou de l'"oubli" de l'Etre). Face à l'option "archéofu­tu­ris­te" de Fa­ye, qui a des aspects techniciens, voire as­su­rément "tech­no­philes", en dépit de références hei­deggeriennes, les positions de Ritter sont bien sûr différentes, mais non "tech­no­phobes", dans la me­sure où Heidegger s'émerveille aussi devant la beauté d'un pont qui enjambe une vallée, d'un bar­rage qui dompte une rivière ou un fleuve. Hei­deg­ger, et Ritter à sa suite, dénonce le désenchante­ment, y compris celui des productions de la te­ch­nique, par l'effet per­vers de ce culte technicien et quantitativiste de la fai­sa­­bilité (Machbarkeit, fea­sa­bility). Cette faisabilité (que cri­tique aussi Ema­nue­le Severino en Italie) réduit à rien la for­ce inté­rieu­re des choses, qu'elles soient organiques ou pro­dui­tes de la main de l'homme. Cette réduction/éra­di­ca­tion conduit à des catastrophes, et assurément à cel­les, con­­vergentes, qu'annonce Faye. Ce dernier est plus proche du premier Heidegger, qui voit l'hom­me arraisonner le réel, le commettre, le re­qué­rir; Ritter, du second, qui con­tem­ple, émer­veillé, les choses, souvent simples, comme la cru­che qui contient le vin, au sein desquelles l'Etre n'a pas en­co­re été voilé ou oublié, de ce second Heidegger qui dia­lo­gue avec ses disciples zen japonais dans son chalet de la Fo­rêt Noire.

Sven Henkler: le rapport homme/animal  

Sven Henkler, secrétaire de Synergon-Deutschland, vient de sortir un ouvrage sur le rapport homme-ani­mal, totalement vicié aujourd'hui. Henkler nous a pré­senté son ouvrage le plus récent, Mythos Tier, qui déplore la déperdition défi­ni­ti­ve du rapport sa­cré qui existait entre l'homme et l'animal, de l'effroi respectueux que ressentait parfois l'homme face à la force de l'animal (notamment l'ours). L'animal est de­ve­nu pure marchandise, que l'on détruit sans pitié quand les réquisits de l'économie l'exigent.

Ezra Pound et la «Beat Generation»

Thierry de Damprichard a présenté un panorama des au­teurs américains de la Beat Generation et expli­ci­té quelles in­fluences ils avaient reçues d'Ezra Pound. Cette présen­ta­tion a suscité un long débat qu'il a magistralement co-ani­mé avec Guillaume Fa­ye, très bon connaisseur de cette lit­térature, très en vogue dans les années 60. Ce débat a per­mis de rap­peler que notre contestation du système (et de l'«a­­méricanosphère») est également tributaire de cette lit­térature protestataire. Guillaume Faye a no­­tamment dit qu'elle avait marqué une figure non-conformiste française qui a démarré sa carrière dans ces années-là, qui est tou­jours à nos côtés: Jack Mar­chal.

J. R. Diaz: l'alliance indienne

Jorge Roberto Diaz nous a parlé de la géopolitique de l'In­de, dans le cadre de diverses interventions sur les questions stratégiques et géostratégiques. Le groupe "SYNERGIES EU­RO­PÉENNES" aborde chaque an­née un ensemble de ques­tions de ce domaine, afin de consolider ses positions géopo­litiques. L'ouvrage auquel Diaz s'est référé pour prononcer son exposé est celui d'Olivier Guillard, La stratégie de l'Inde pour le 21ième siècle (Economica, Paris, 2000). Jouer la car­te indienne est un impératif géostratégique pour l'Europe et la Russie d'aujourd'hui, qui per­met­trait de contourner la masse territoriale turco­pho­ne, afghane/talibanique et paki­sta­naise, mobilisée contre l'UE et la Fédération de Russie par les Etats-Unis. Une alliance entre l'UE, la Russie et l'In­de au­rait pour corollaire de contenir l'effervescence isla­miste et surtout, comme l'a très bien exposé Diaz, de con­trôler l'Océan Indien et le Golfe Persique, donc les côtes des puissances islamiques alliées des Etats-Unis. Le déve­lop­pement de la marine indienne est donc un espoir pour l'Europe et la Russie qui per­mettra, à terme, de desserrer l'é­tau islamique dans le Caucase et les Balkans et de par­faire, le cas échéant, un blocus de l'épicentre du séisme is­la­­miste, c'est-à-dire l'Arabie Saoudite. La menace qui pè­se sur l'Inde vient de l'occupation américaine de l'île de Diego Gar­cia, où sont concentrées des forces impressionnantes, per­mettant aux Etats-Unis de con­trôler les flots et le ciel de l'Océan Indien ainsi que le transit maritime du pétrole en direction de l'Europe, de l'Afrique du Sud, du Japon et des nou­veaux pays industriels d'Asie orientale.

Max Steens: le Tao du Prince de Han Fei

Max Steens nous a plongés dans la pensée politique chinoi­se, en évoquant la figure de Han Fei, sage du 3ième siècle avant l'ère chrétienne. Han Fei nous sug­gère une physique po­litique limpide, sans jargon, avec, en plus, 47 principes pour prévenir toute pen­te vers la décadence. Phrases ou a­phorismes courts, à méditer en permanence! Le renouveau de notre es­pace politico-idéologique passe à notre sens par une lecture des sagesses politiques extrême-orien­tales, dont

◊ le Tao-Te-King, traduit en italien par Julius Evola pendant l'entre-deux-guerres et texte cardinal pour comprendre son idéal de “personnalité différenciée” et son principe de “che­vaucher le Tigre” (c'est-à-di­re de vivre la décadence, de vivre au sein même de la décadence et de ses mani­fes­tations les plus viles, sans perdre sa force intérieure et la maî­trise de soi),

◊ le traité militaire de Sun Tsu comme le préconise Philippe Banoy, chef de l'école des cadres de "SY­NERGIES EURO­PÉEN­NES" en Wallonie,

◊ le "Tao du Prince" de Han Fei, comme le préconise Steens de l'école des cadres de Bruxelles et

◊ le code du Shinto japonais, comme le veut Markus Fern­bach, animateur de cercles amis en Rhénanie-Westphalie. Fernbach est venu nous présenter le co­de du Shinto avec brio, avec une clarté aussi lim­pi­de que son homologue fran­çais ès-shintoïsme, que les lecteurs de la revue "Terre et Peu­ple" con­naissent bien, Bernard Marillier, auteur d'une étu­de superbe sur ce sujet primordial, parue récemment chez Pardès.

Markus Fernbach: les leçons du shintoïsme

Ces voies asiatiques conduisent à tremper le carac­tè­re, à combattre en nos fors intérieurs tous les af­fects inutiles qui nous distraient de l'essentiel. Un collège de militants bien formés par ces textes, ac­cessibles à tous, permettrait jus­te­ment de sortir des impasses de notre mouvance. Ces tex­tes nous en­sei­gnent tout à la fois la dureté et la sérénité, la force et la tempérance. Après la conférence de Fern­bach, le débat s'est prolongé, en abordant notamment les si­militudes et les dissemblances entre ce code de che­va­le­rie nippon et ses homologues persans ou eu­ropéens. On a éga­lement évoqué les "duméziliens" ja­ponais, étudiés dans le journal "Etudes indo-eu­ropéennes" du Prof. Jean-Paul Al­lard de Lyon III, bas­sement insulté par la presse du systè­me, qui tom­be ainsi le masque et exhibe sa veulerie. Enfin, il y a eu un aspect du débat qui nous paraît fort in­té­ressant et prometteur: notre assemblée comptait des agnostiques, des païens, des catholiques et des lu­thériens. Ethique non chré­tienne, le Shinto peut être assimilé sans problème par des agnostiques ou des païens, mais aussi par des catholi­ques car le Va­tican a admis en 1936 la compatibilité du shin­toïsme et du catholicisme romain. On peut donc être tout à la fois catholique et shintoïste selon la hiérarchie va­ti­cane elle-même. Dès lors pourquoi ne pas éten­dre cette to­lérance vaticane aux autres codes, ceux de la Perse aves­ti­que ou des kshatriyas indiens, le cul­te romain des Péna­tes, etc., bref à tout l'hérita­ge indo-européen? Voilà qui ap­porterait une solution à un problème qui empoisonne de­puis longtemps no­tre mouvance. Mais cette reconnaissance du shin­toïs­me, qui date de 1936, sous le Pontificat de Pie XII, est-elle encore compatible avec les manifesta­tions ac­tuelles du catholicisme: les mièvreries déli­quescentes de Va­tican II ou l'impraticable rigidité des intégrismes obtus?

Manfred Thieme nous a ramenés à l'actualité en mon­trant avec précision les effets de la privati­sa­tion de l'économie dans les PECO (pays d'Europe cen­trale et orientale), en pre­nant pour exemple l'é­volution de la République Tchèque.

La suite à Bruxelles…

Les autres conférences, prévues à Bruxelles pendant le week-end précédant l'Université d'été proprement dite, se­ront prononcées plus tard, majoritairement en langue néer­landaise. Successivement, Jürgen Branc­kaert, germaniste et angliciste, l'historien brugeois Kurt Ravyts, Philippe Ban­noy, Guillaume Faye et Robert Steuckers y prendront la pa­role. Branckaert évoquera une figure cardinale de notre his­toire: le Prince Eugène de Savoie, vain­queur des Turcs à la fin du 17ième siècle. Un cercle "Prin­ce Eugène" verra le jour à Bruxelles, rassem­blant des Flamands et des Wallons fidèles à l'idée impériale, fédérant les cercles épars qui véhiculent la même inébranlable fidélité, tels “Empire et puis­sance” de Lothaire Demambourg ou la “Sodalité Gui­ne­gatte”. Des sections seront créées ensuite en Au­triche, en Hongrie et en Croatie, de façon à nous re­mé­morer notre seu­le légitimité politique possible, dé­truite par la révo­lu­tion française, mais dans une perspective plus claire et plus européenne que celle de l'iconographie que nous avait pré­sen­tée, dans no­tre enfance, le Chanoine Schoonjans, avec les ima­ges de la collection “Historia”. Ravyts analysera les influences de Gabriele d'Annunzio et de Léon Bloy, notam­ment sur la figure du national-solidariste fla­mand Joris Van Severen. Il rendra de la sorte cette figure de notre histoire plus compréhensible pour nos amis français et italiens. Cet exposé permettra également de raviver le souvenir de Léon Bloy dans notre mouvance, qui l'a trop négligé jusqu'ici. Ban­­noy analysera l'œuvre de Vladimir Volkoff et en ti­re­ra tous les enseignements nécessaires: lutte contre la subver­sion et la désinformation. Guillaume Faye présentera une nou­velle fois sa théorie de la “con­ver­gence des catastro­phes", cette fois à l'occasion de la parution de son ouvrage Avant-guerre, promis pour février 2002.  

Jérémie CATTEAUX.

06:05 Publié dans Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 01 mai 2007

Contra a democracia nao representativa e a partidocracia

medium_mega_mega_device.jpg

Contra a democracia

(não) representativa

e a partidocracia

(Tradução livre de Rodrigo Nunes de um excerto de uma entrevista a Robert Steuckers, presidente da associação “Synergies Européennes”, conduzida por Pieter Van Damme)

A visão da associação “Synergies Européennes” é democrática mas hostil a todas as formas de partidocracia, porque esta, que se pretende democrática, é na realidade a perfeita negação de democracia. No plano teórico a “Synergies Européenes” referencia um liberal russo do início do século XX, militante do Partido dos Cadetes: Moshe Ostrogorski. A análise que este liberal russo de antes da revolução bolchevique nos deixou assenta numa constatação evidente: Toda a democracia deveria ser um sistema imitando o movimento das coisas na Cidade. Os mecanismos eleitorais procuram logicamente dar representação às efervescências que actuam na sociedade, dia a dia, sem subverter de forma alguma a ordem imutável da política. Como consequência, os instrumentos de representatividade, isto é, os partidos políticos, devem também representar as efervescências que vão acontecendo e nunca procurar a eternização. O mau funcionamento da democracia parlamentar advém do facto dos partidos políticos se tornarem uma presença rigidamente permanente dentro da sociedade, englobando mais e mais gente medíocre nas suas fileiras. De forma a colocar um fim a este inconveniente Ostrogorski sugere que a democracia assente em partidos “ad hoc”, reclamando pontualmente reformas urgentes ou ajustes precisos, proclamando depois a sua própria dissolução para libertar o seu pessoal, que pode posteriormente forjar novos movimentos peticionários, permitindo redistribuir as cartas e repartir os militantes por novas formações que serão também provisórias. Os parlamentos acolheriam assim cidadãos que nunca se ancorariam no profissionalismo político. Os períodos de legislatura seriam também mais curtos ou, como no início da história da Bélgica ou no Reino Unido dos Países Baixos de 1815 a 1830, um terço da assembleia seria mudada a cada terça parte da legislatura, permitindo uma rotatividade acelerada do pessoal político e a eliminação, sancionada pelas urnas, de todos os que se mostrem incompetentes, esta rotatividade não existe hoje, o que, aparte o problema do voto recenseado, nos dá hoje uma democracia menos perfeita que à época. O problema é evitar carreiras políticas de indivíduos que não conhecerão nada da vida civil real.

Max Weber fez também observações pertinentes: ele constata que os partidos socialistas e democrata-cristãos (o centrão) instalam personagens sem competência em lugares chave, que tomam decisões sem qualquer bom-senso, animados pela ética da “convicção” em vez da ética da responsabilidade e exigindo a divisão de postos políticos ou civis em função de simples rácios de votos, sem terem de provar a sua competência no desempenho dos cargos. O ministro liberal italiano do século XIX, Minghetti, percebeu muito rapidamente como este sistema poria um fim à separação dos três poderes, já que os partidos e os seus militantes, armados da sua ética da convicção, fonte de todas as demagogias, quereriam controlar e manipular a justiça e destruir qualquer compartimentação entre o legislativo e o executivo. O equilíbrio democrático entre os três poderes, colocados à partida como estanques de forma a garantir a liberdade dos cidadãos, como definido por Montesquieu, não pode mais nem funcionar nem existir num tal contexto de histeria e demagogia. É aí que estamos.

A “Synergie Européennes” não critica portanto a instituição parlamentar em si, mas mostra claramente a sua aversão a qualquer disfuncionalidade, a toda a intervenção privada (os partidos são na realidade associações privadas, como lembra Ostrogorski) no recrutamento de pessoal político, de funcionários, etc., a qualquer tipo de nepotismo (cooptações de membros da família de um político ou funcionário para um posto político ou administrativo). Apenas a avaliação por um júri totalmente neutro deveria permitir o acesso a um cargo. Qualquer outro método de recrutamento deveria constituir um delito muito grave.

Também pensamos que os parlamentos não deveriam ser simples câmaras representativas onde se sentam membros escolhidos de partidos políticos (logo de associações privadas que exigem disciplina sem autorizar geralmente qualquer direito de tendência ou iniciativa pessoal dos deputados). Nem todos os cidadãos são membros de um partido, de facto a maioria não tem qualquer filiação partidária. Consequentemente os partidos não representam usualmente mais que 8 a 10% da população e 100% do parlamento! O peso excessivo dos partidos deveria ser corrigido por uma representação saída de associações profissionais e sindicatos como defendia De Gaulle e a sua equipa quando falavam de “Senado de profissões e regiões”. Para o professor Bernard Willms (1931-1991) o modelo constitucional mais desejável alicerçar-se-ia numa assembleia de três câmaras (Parlamento, Senado e Câmara económica). Metade do Parlamento seria recrutado entre candidatos propostos pelos partidos e eleitos pessoalmente, a outra metade seria composta por representantes das corporações e associações profissionais. O Senado seria essencialmente um órgão de representação regional (como o Bundesrat alemão ou austríaco). A Câmara económica, igualmente organizada numa base regional, representaria os corpos sociais, entre os quais os sindicatos.

O problema consiste em consolidar uma democracia assente nos “corpos concretos” da sociedade e não unicamente em associações privadas de natureza ideológica e arbitrária, como os partidos. Esta ideia aproxima-se da definição dada por Carl Schmitt dos “corpos concretos”. No entanto, toda a entidade política baseia-se num património cultural, que deve ser tomado em consideração, de acordo com a análise feita por um discípulo de Carl Schmitt, Ernst Rudolf Huber. Para Huber, o Estado coerente é sempre um Kulturstaat (Estado cultural), e o aparelho de Estado tem o dever de preservar esta cultura, expressão de uma Sittlichkeit (etnia), excedendo os simples limites da ética de forma a incluir uma variedade de campos de produção artística, cultural, estrutural, agrícola, industrial, etc., cuja fecundidade deve ser preservada. Uma representação mais diversificada, que vá para lá desses 8 a 10% de filiados partidários, permite justamente melhor garantir essa fecundidade, distribuída por todo o corpo social da nação. A defesa dos “corpos concretos” postula a trilogia “comunidade, solidariedade, subsidiariedade”, a resposta conservadora, no século XVIII, ao projecto de Bodin, visando destruir os corpos intermédios da sociedade, isto é, os “corpos concretos”, deixando o cidadão-indivíduo isolado face ao Leviathan Estatal. As ideias de Bodin foram realizadas pela Revolução francesa e o seu sonho de geometrização da sociedade, que começou precisamente pela erradicação das associações profissionais pela Lei Le Chapelier de 1791. Hoje em dia o recurso actualizado à trilogia “comunidade, solidariedade, subsidiariedade” implica dar o máximo de representatividade às associações profissionais, ao povo real, e reduzir o arbítrio dos partidos e funcionários.

samedi, 28 avril 2007

Sur Jean Eugène van der Taelen

Sur Jean Eugène van der Taelen

Article de "Wikipedia" : http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Eug%C3%A8ne_van_der_Tae...

Article d'ALTERMEDIA-Belgique : http://be.altermedia.info/communiqu/hommage-a-jean-eugene...

06:15 Publié dans Biographie, Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

mardi, 24 avril 2007

Een reactie (zomer 2003)

medium_Entonnoirs.jpg

Hoe met de vijand te handelen....

Vanuit de forumredactie: De heer Steuckers vroeg ons om de onderstaande reactie, als rechtzetting op de topic van thePiano, te plaatsen.

groetjes,

Maarten

Uw bericht en "debat" over de meeting in
Lille/Santes (28 juni 2003)

De meeting kan niet als "fascistisch" beschouwt
worden, daar verschillende sprekers het fascisme als
een speciale vorm van "etatisme" grondig becritiseerd
hebben. Die sprekers waren mensen met een grondig christelijk-katholieke overtuiging. De meeting was dus pluralistisch, misschien niet het zelfde pluralisme als in het Belgisch of het Vlaams of het Waals Parlement, maar toch een pluralisme met onverzoenbare verschillende posities, die tegenover elkaar paal staan.

“De rechtse oppositie tegen Hitler” is de titel van
een boek van de Duitse journalist Claus-M. Wolfschlag
(zijn andere boeken betreffen architectuur, ecologie
en de 68-beweging...). In dat boek beschrijft
Wolfschlag het tragieke lot van verschillende
conservatieve, christelijke of volkslinkse
slachtoffers van Hitlers regime, o. a. de weerstanders
van de “Witte-Roos-Beweging" die onder de guillotine
in München gestorven zijn. Alle mensen over wie
Wolfschalg erover heeft zijn zuivere anti-fascisten.
De gek, die het stuk over de Rijselse meeting
geschreven heeft en de andere zot, die over de
spreekbeurten van Synergon's zomeruniversiteit het
heeft, zijn blijkbaar een soort van mutanten :
anti-fascisten die andere anti-fascisten als fascisten uitschelden. De nedergang in richting "nog meer stomiteit” kent werkelijk geen grenzen meer.

De studie van Wolfschlag is dus niet bepaald
pro-Hitleriaans, of vindt niet dat Hitler te weinig
rechts staat. De begrippen "links" en "rechts" in een
zo onzinnige manier te hanteren leidt tot pure
nonsense.

Evola als een fascistische theoreticus beschrijven is
even gek, nog gekker. Evola was (en blijft) een grote specialist van het boeddisme (“La dottrina del
risveglio") en de eerste Italiaanse vertaler van de
Chinese Tao Te King. Evola verdedigde een multikultuur
van niveau en van kwaliteit. Is de gekke schrijvelaar
van het bovengenoemd stuk wel bekwaam van zo een
gigantisch werk te begrijpen, over hetwelke ik nog
niets durf schrijven na 30 jaar studie (ik kreeg mijn
eerste boek van Evola als Kerstmis-geschenk in
december 1973, toen ik een 17-jaarse scholier was)? En
zijn soortgenoten van het "Centrum voor gelijke kansen
en ander gezever van blablabla boem-boem-boem", sedert
enkele jaren schitterende ambtenaren van de Belgische
Onstaat? Zouden ze niet beter Evola lezen dan flauwe
slogans uit te vinden, bv om een zinnige dialoog te
starten met onze mede-burgers van Chinese of Indiase
afkomst en zelfs met Muslims (op internet vindt u
interessante bemerkingen over de Turkse en
Indonesiaanse uitgaven van Evola)? Trouwens, verstaat bovenvermelde schrijvelaar-klootzak Italiaans, om werkelijk Evola's boeken onder de loepe te nemen? Hij schijnt daarvoor veel te dom te zijn... Ei, garçon, pillekes met fosfoor voor dat jongetje... Conclusie : hij zou dus serieuze literatuur aan serieuze mensen overlaten.

Om ermee te lachen : Evola de theoreticus, Mussolini
of Hitler als mannen van de daad. Evola schrijft over boeddhisme en Mussolini of Hitler zetten zich op de grond of op een kleurrijke tapijt in de Lotus-positie en steken zich een diamant in de navel... Wat een tafereel ! Dat is dus het niveau van zulke beweringen...

Er wordt ook een zekere Meneer De Zutter geciteerd.
Wel, ik zeg dat die Meneer De Zutter stapelgek is. Het
bewijs ervan? Zijn artikel uit De Morgen (26 mei
1999). Waar zou ik die afschuwelijke zin geschreven
hebben? Bewijzen, bronnen, a.u.b. Of morgen een klacht
bij de rechter (hoera, eindelijk wat centen
verdienen...). Dat deze Meneer De Zutter rap bij zijn huisdokter loopt, om een medisch attest te gaan halen, waar duidelijk vermeld wordt, dat hij aan hallucinaties lijdt. Te veel cannabis, misschien...? De Winter heeft toch gelijk, dat is slecht voor de geestelijke gezondheid. Evola lezen is zeker en vast beter.

Robert Steuckers.

13:36 Publié dans Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

lundi, 16 avril 2007

Sobre Steuckers e Sinergias Europeias

medium_Lourmarin8.jpg

O meu bom amigo e camarada belga Robert Steuckers, cuja risonha imagem aqui vos deixo (porque Gilbert Sincyr, que episodicamente apareceu dirigindo o movimento e que elaborou a sua carta, pura e simplesmente se eclipsou...), foi a grande alma, através da sua "Vouloir", do movimento até mais tarde (talvez 2000, sim), embora já sem a pujança inicial, mas os afazeres profissionais do ensino afastaram-no (creio que apenas momentaneamente) do combate mais activo.

Defini-lo, como mo solicitou o Rodrigo, torna-se para mim dificil de tal modo se trata de uma pessoa interessante e verdadeiramente multifacetada. Dissidente permanente de tudo o que ortodoxo lhe parecesse e onde a liberdade de pensamento fosse coartada. Essa é a melhor imagem que dele tenho e penso não se afastar muito de uma qualquer definição que o próprio buscasse para si.

"SINERGIAS EUROPEIAS"

A minha recente passagem no Colóquio da Causa Identitária fez-me vir à memória a minha passagem pelas ideias do movimento das Sinergias Europeias que assim se apresentava no número 0 (Fev. 1994):
SINERGIAS EUROPEIAS é um grupo com vocação ideológica e política.
Implantado na maioria dos países da Europa Ocidental, visa igualmente desenvolver-se na Europa Central e Oriental.
Age para que os Europeus que partilham os valores apresentados na sua Carta possam, para além de outras actividades, fortalecer a sua comunidade de pensamento.
Organiza círculos, seminários e reuniões em cada país, publica trabalhos e textos que considera importantes por intermédio de uma pequena estrutura editorial, a NEPE (Nova Escola Política Europeia).
SINERGIAS EUROPEIAS visa desenvolver na Europa uma verdadeira corrente ideológica, para que a sua visão do mundo se exprima, inflluencie e finalmente participe no futuro do nosso Continente.
No número 1 - "Dossier Ecologia" - este vosso escriba escreveria um texto denominado "A Vingança da História" e no número 2 (o último publicado) - "Dossier Nacional Comunismo" - um sobre "A oposição Nacionalismo/Internacionalismo: problema capital do bolchevismo".
Com o número dois finava-se a revista e naturalmente a minha colaboração...
 
(Photo: Université d'été de "Synergies Européennes", Lourmarin, Provence, août 1993).

11:30 Publié dans Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

samedi, 17 février 2007

Faustische Suchbewegung

Faustische Suchbewegung

Kritik der Globalökonomie: Was uns vor intellektueller Zahnlosigkeit bewahrt
 

Wolfgang Saur

Vor wenigen Tagen konnte man eine kleine Schar beobachten, die angeregt das Weserbergland durchstreifte. Man schlenderte die Höhenzüge entlang, durchmaß mit Blicken die weit sich hinziehende Landschaft und versammelte sich zu Gespräch und Debatte.

Eine alte Dame hält plötzlich inne und spricht nachdenklich über Heidegger, der engagierte Anthroposoph erläutert Steiners Modell vom dreigliedrigen Sozialorganismus, vorneweg strebt der rüstige Greis, er streut ironische Lichter und macht vieldeutige Anmerkungen zur Lage Rußlands; schließlich verblüfft die literarische Lebensreise des Althippies von Charles Bukowski zu Céline. Neben mir geht ein genialischer Junge, dessen sprühender Idealismus exotisch wirkt bei einem Angehörigen der Hip-Hop-Generation. Als sei der sagenhafte "deutsche Jüngling" zurückgekehrt, entrollt er leidenschaftlich das Weltbild von Ludwig Klages. Wir sprechen von Stefan George, vom "geheimen Deutschland" und der "kosmischen Runde".

Die Rede ist von den Teilnehmern der 10. Synergon-Sommerakademie, die fünf Tage lang, vom 23. bis 28. August, auf einem ländlichen Gutshof tagte. Der Studienzirkel, dessen europäisches Zentrum in Brüssel, dessen deutscher Kristallisationspunkt im Kreis um den Dresdener Verlag Zeitenwende und das Esoterikmagazin Hagal liegen, tagt abwechselnd in den verschiedenen europäischen Regionen. Diese platonische Akademie unserer Zeit ist nicht ortsgebunden, sondern ebenso beheimatet unter provenzalischen Bauern wie zwischen den Kunstdenkmälern Umbriens. Sokratischer Kopf des Unternehmens: der Brüsseler Robert Steuckers, der als intellektueller Trapezkünstler moderierend und übersetzend diese mehrsprachigen Tagungen überhaupt erst ermöglicht.

Deren Horizont umfaßte in diesem Sommer 16 Vorträge von 11 Experten aus Deutschland und Frankreich mit einer thematischen Streuung von der aktuellen weltpolitischen Lage bis zur Symbolkunde. Eingebettet waren alle Referate in umfangreiche Diskussionen im Plenum; sie wurden dann in zahlreichen Privatgesprächen fortgeführt bis in die späte Nacht. Angesichts der Funktionalisierung von Wissen in der Informationsgesellschaft kann solch eine gemeinschaftliche Besinnung für die größtmögliche Freiheit gelten, die es heute überhaupt gibt. Völlig zweckfrei konnte sich der Geist hier ungehindert entfalten, weit hinaus über den interdisziplinären Spielraum des akademischen Betriebs. Trotz divergierender Themen besaß man Spannkraft genug, jedes Detail energisch festzuhalten, um ebenso leidenschaftlich zu fahnden nach dem verlorenen Ganzen. Diese faustische Suchbewegung erwies sich als die eigentliche Triebkraft der Tagung.

Nachdem die Linke gleichgeschaltet ist und ihre vormaligen Symbolfiguren zu "Systemstützen" wurden, geht die Ideologiekritik zur Rechten über. Dieser obliegt es nun, den seifigen Politsprech der neototalitären "Metasprache" der Demokratie mit ihren neuen Götzen und Fetischen kritisch zu sondieren und hinter den obszönen "Sakralisierungen" von Globalität, Markt, Moral etc. den tristen Funktionalismus der Macht aufzuweisen.

Dazu gehört die Dekonstruktion von Segensformeln des westlichen Heilswissens, wie sie in der Herrlichkeit individueller Freiheit oder dem gnadenbringenden Universalismus der USA täglich um uns weben und schweben. Deren Schlüsselrolle darf nicht nur als politischer Unilateralismus und kulturökonomischer Imperialismus interpretiert, sondern muß auch philosophisch erfaßt werden. Entgegen der fortgeschrittenen "Depression" Europas (Neujahr) sind nämlich Amerikas Optimismus und säkular-mythische Phantasie ungebrochen. Die "einzige aktuelle primitive Gesellschaft" erkennt hier Jean Baudrillard: "Die idyllische Überzeugung der Amerikaner, der Nabel der Welt, Weltmacht und absolutes Modell zugleich zu sein, ist nicht ganz falsch. Sie gründet sich ... auf die seltsame Behauptung, die reine Utopie zu verkörpern." Mit größter "Naivität hat sich diese Gesellschaft auf die Idee versteift, die Verwirklichung all dessen zu sein, wovon andere immer geträumt haben: von Gerechtigkeit, Überfluß, Recht, Reichtum und Freiheit; sie weiß es, sie glaubt es, und zuletzt glauben es alle anderen auch."

Auch der Individualismus als liberales Dogma ist heute eine Ubiquität. In Frage stellt ihn allerdings die Einsicht, daß sich "Freiheit" qua Autonomisierung modern in Systemen, nicht über die Person vollzieht. Diese wird, gerade umgekehrt, depotenziert zum disponiblen Sozialatom. Als leere Subjektivität mag sie sich aufblähen. Abgelöst von Natur, Geschichte und Transzendenz muß sie die, für den Widerstand in der Gegenwart notwendige Tiefenstruktur entbehren. Damit sind zwei Leitmotive genannt, die den Tagungsverlauf perspektivisch durchstrukturierten.

Nach grundsätzlichen Überlegungen Martin Baluses' ("Das vielfältige Selbst des Menschen") gab Robert Steuckers in Referaten zur kulturellen Münchner Frühmoderne und Berliner Zwischenkriegszeit historische Anwendungen. Als Beispiele von ideologischem Nonkonformismus konnten das Satiremagazin Simplicissimus (1896-1944) und der deutsch-russische Dialog zur Geopolitik gelten. Die rote Bulldogge des Simplicissimus symbolisiert für Steuckers das Modell einer Kunst als Waffe und den "wahren Sinn der Metapolitik".

Anders die Kultur der französischen Moralisten des grand siècle, die den Hintergrund bildeten für zwei Beiträge zur Postmoderne. Der kroatische Politologe Tomislav Sunic zeigte Schopenhauers Epistemologie als Wurzel postmodernen Denkens auf, dessen Pessimismus und Perspektivismus im "normativen Notstand" besonders gut der Wahlpariser Emile Cioran (1911-1995) verkörpert hat.

Einem Hauptthema Mircia Eliades widmete sich Markus Fernbach ("Das Wesen der Mitte - Kaisertum und Königtum in der Tradition"), besonders dem metaphysischen Aspekt nach. Vor dem leuchtenden Hintergrund platonischer Urbilder nehmen sich heutige Monarchisten mit ihrem Konstitutionalismus allerdings naiv aus, im tieferen Sinn unfähig, dem waste land der "schrecklichen, kaiserlosen Zeit" substantiell etwas entgegenzustellen. Wichtig in Fernbachs Erörterung: der anthropologische Hinweis auf das initiatische Projekt einer Selbst-Zentrierung als persönliche Lebensaufgabe. Dies beschäftigt auch Oliver Ritter, der erst kürzlich eine Monographie über Männlichkeit in initiatischer Sicht im Verlag Zeitenwende vorgelegt hat. Auf der Tagung philosophierte er am Leitfaden der Metaphysik-, und Technikkritik Heideggers tiefgründig über "Die Magie des Wortes und der Sprache". Von einer Theorie der Weltgründung durch Sprache aus, arbeitete er gegenüber dem semantischen Aspekt des Wortes dessen Lautgestalt als lebensspendenden Ursprung, als heilige Schwingung heraus, was Leopold Zieglers Grabinschrift treffend ausdrückt: "Ich habe gehorcht."

Sven Henklers Beitrag zur Spiritualität des Kriegers in West und Ost rückte auch die verzerrte Vorstellung vom "Djihad" zurecht. Wörtlich heißt das: "Anstrengung", wobei nur der "kleine Krieg" den militärischen Kampf, der "heilige, große" indes die asketische Anstrengung gegen das niedere Ich meint.

Politkritisch dagegen fiel die Perspektive Hermann Jungs auf den subkontinentalen Islam aus. Sein Vortrag über die indischen Massenmedien kam zu dem verblüffenden Befund einer, gegenüber der hinduistischen Mehrheitsbevölkerung feindlichen Intellektuellenposition.

Daß solche Konstellationen auch von außen induziert sein können, wurde in den scharfsinnigen Beiträgen von Philippe Banoy klar, deren erster sich mit psychologischer Kriegsführung, Manipulation etc. befaßte und einige Mittel der Subversion analysierte, die als komplexe Realitätsfaktoren im Hinblick auf den eigenen Standort diskussionsweise auch Heiterkeit auslösten. Daran schloß sich sein Porträt des klassischen Strategen und Kriegstheoretikers Antoine Jomini (1779-1869) an, des französischen Clausewitz, und dessen Hauptwerks: "Abriß der Kriegskunst" (1838). Historisch weitblickend dabei Jominis Analyse der napoleonischen Ära. Er begreift sie als Abschied von der Vergangenheit, als Paradigmenwechsel, der dem Adel als Kriegerkaste ein Ende setzt und die Kriegsführung professionalisiert, industrialisiert und totalisiert, sich damit als Keim des Ersten Weltkrieges entpuppt.

Den totalitären Charakter der modernen Diktaturen bekamen auch "Hitlers rechte Gegner" zu spüren. So der Titel einer zeitgeschichtlichen Studie von JF-Autor Claus-M. Wolfschlag (1995). Sein Referat nun stellte den im Herbst ebenfalls im Verlag Zeitenwende erscheinenden neuen Interview-Band: "Augenzeugen der Opposition. Gespräche mit Hitlers rechten Gegnern" vor, eine lebendige Dokumentation als Supplement zur systematischen Untersuchung.

Kritik der heutigen Globalökonomie erwies sich als konstitutives Motiv aller Beiträge. Ein Vorläufer, zumal Gegner der klassischen Dogmen war John Maynard Keynes (1883-1946), der von Frédéric Valentin präsentiert wurde, einer guten Synergon-Tradition folgend, die jedes Jahr einen Klassiker der Ökonomie aufarbeitet. Besonders hellsichtig erscheinen seine Kritik an Versailles (1919) und in Bretton Woods (1945), wo die USA seine Beschränkungswünsche ablehnten und sich mit dem Prinzip der totalen Freiheit für Kapitalbewegungen durchsetzten. Valentin gehörte auch das letzte Wort mit einem Vortrag über Entwicklungen der heutigen Weltökonomie (Ausbreitung der informellen Sphäre und mafioser Strukturen, Bedeutungszuwachs der Diaspora).

Robert Steuckers, fern aller Betulichkeiten, ist ein begnadeter Vollblutintellektueller, wuchtig und zupackend im Denken, das bei ihm gleichsam als körperlicher Vorgang von ursprünglicher Vitalität erscheint. Sein kreativer Imperativ, "aggressiv und pfiffig statt muffig", artikuliert den anarchischen Impuls aller Nonkonformisten seit 200 Jahren.

Zeitschrift "Simplicissimus" (1908): "Mag der Wind von rechts blasen oder von links, für meine Mühle weht er immer günstig"

Weitere Informationen im Internet: www.verlag-zeitenwende.de .

05:45 Publié dans Synergies européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook