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jeudi, 19 décembre 2024

Quelle sera donc la religion du futur ?

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Quelle sera donc la religion du futur?

Claude Bourrinet

Le fonctionnement intellectuel et imaginaire humain est tel qu'il lui est nécessaire de s'appuyer sur des comparaisons. Un exercice scolaire itératif consiste à établir des parallèles entre des périodes de l'histoire. Cette paresseuse tentation, malgré parfois les séductions de l'apparence, a le défaut d'oublier un facteur important: la réalité. Si le cycle de la naissance, du développement, et de la mort, loi naturelle, se retrouve en permanence dans la longue marche de l'humanité - encore est-ce là une perception distanciée, car quand on y regarde de près, les limites imparties à chaque phase ne sont pas si tranchées, et, en tenant compte des différents domaines des réalisations humaines, on est contraint de constater qu'il y a, au fil du temps, d'innombrables naissances, et autant de développements et de morts, ce qui rend fort problématique les découpages auxquels les historiens se sont tenus à un certain niveau - pour le reste, c'est-à-dire les hypothétiques similitudes entre certaines époques, il faut bien en rabattre: l'homme, être plastique, modulable, protéique, change à tel point de nature, qu'il n'est plus le même à mesure qu'il évolue. Un Romain du 1er siècle est complètement dissemblable d'un Romain du 4ème, et ne parlons pas des hommes de moyen âge, ou de l'époque contemporaine. L'hétérogénéité n'est pas seulement de degré, mais elle est radicale. Lorsqu'on pense "comprendre" un texte de Cicéron, par exemple, nous l'appréhendons en fonction de ce que nous sommes. Il est impossible de le saisir comme un citoyen romain de la République romaine. On ne peut que s'en approcher, prudemment, à l'aide d'un appareil critique conséquent.

Il en va de même de toutes les productions humaines. L'histoire ne repasse pas les plats, où il s'agit alors de parodie, de singerie. Les Révolutionnaires français ont mimé Sparte, Rome etc., mais la Révolution est la source de la modernité, non de l'Antiquité renaissante. La tranchée est immense entre un Brutus, et un Robespierre. Ce sont deux espèces différentes.

Aussi a-t-on tenté de prévoir la "spiritualité" de l'avenir, et certains se sont essayés à dessiner les contours de la religion qui succédera à un christianisme moribond. Les nationalistes identitaires occidentaux craignent l'islam, sans se demander de quel islam ils parlent, et si celui-ci ne subira pas le sort du christianisme, et pour les mêmes causes (société de consommation, nihilisme techniciste etc.). Il faudrait aussi analyser les causes d'un soi-disant revival musulman, dans une région qui subit de plein fouet l'effet destructeur de l'Occident. L'islam actuel n'est peut-être que la réaction moderne, voire moderniste (l'utilisation pointue de la technique, par exemple) d'une société qui craint de mourir.

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Il est courant de prévoir que l'extinction du christianisme, sous toutes ses formes, amènera l'avènement d'une nouvelle religion, éclectique, inspirée d'un New age, qui est déjà installé dans les pays occidentaux depuis près d'un siècle, mais qui ne touche que les classes moyennes. Ce courant n'est structuré qu'en une multitude de sectes, et il règne comme atmosphère mentale, inspirant par exemple la publicité, la production d'objets, et des pratiques tenant de très près aux finalités hygiénistes ou thérapeutiques de bien-être et d'adaptabilité à une société sous tension. Il est difficile de parler à son sujet de religion, ni même de spiritualité. Mais il est indéniable que des millions d'individus en sont adeptes, même si la profondeur de leur engagement n'est pas très convaincants, malgré les prédictions d'un Jünger, qui pensait qu'une sorte de shintoïsme, de bouddhisme cool, de paganisme éthéré, suivrait l'avènement de l'Etat universel, ou, plus sérieusement, une nouvelle poésie de l'être, comme l'espérait Heidegger, sans trop y croire.

A ce sujet, celui de la palingénésie, c'est-à-dire de la transformation  d'un ensemble religieux en un autre - songeons au remplacement du paganisme du haut-empire néoplatonicien par le christianisme de l'Antiquité tardive - nous avons certes des points apparents de comparaison. Mais la Weltanschauung d'un disciple de Plotin était en gros similaire à celle d'un saint Ambroise, par exemple. Saint Augustin a glissé du néoplatonisme au catholicisme sans véritable heurt. Les racines épistémologiques, philosophiques, théologiques, relativement parentes entre ces traditions, ont été consolidées dans la terre civilisationnelle de la vieille Europe durant plusieurs siècles.

Rien de tel à notre époque, qui est inédite dans l'histoire. Pour la première fois, le passé est renié, considéré comme inutile pour fonder la société du présent et du futur, l'homme est, de même, aboli, perçu comme construit selon un tas de critères, la dimension suprahumaine, qui fondait le politique et les liens sociaux depuis toujours, a disparu, même à l'état de reste, plus aucun repère ne subsiste des temps anciens. On ne peut se fonder sur ce vide absolu pour imaginer une suite qui ressemblerait à ce qui s'était passé il y a des millénaires. Nous sommes dans un temps impensable. On ne peut le penser, car, pour penser, il faut comparer.

Mais que l'on ne tombe pas dans la caricature ! Les phénomènes historiques sont rarement scindés brutalement. Il subsiste toujours des terreaux antiques, même ténus, ou, le plus souvent, contaminés. Il existera encore des chrétiens, et sans doute plus solides que maintenant, mais ils seront ultra-minoritaires. Car il ne faut pas s'imaginer qu'il puisse exister un avenir fiable pour les Eglises. Poutine peut bien se rendre à l'office, il n'en demeure pas moins qu'en la sainte Russie, comme chez nous, il n'y a plus que 2% de pratiquants. Certes, comme dit Emmanuel Todd, il se peut qu'à l'Est, on ait encore des croyants "zombies", mais arrivera le temps du degré 0 de la croyance et de la pratique, les mêmes causes créant les mêmes effets (l'occidentalisation a conquis la planète, avec son nihilisme, latent ou actif).

Aux Etats-Unis, non seulement le nombre de ceux qui ne croient pas dépasse désormais celui des croyants en Dieu, mais, comme le faisait remarquer Rod Dreher, la pratique (ce à quoi il est indispensable de prêter attention, plutôt qu'aux déclarations de principe) le recentrement individuel, le genre de vie hédoniste et individualiste, voire narcissique, contredisent violemment les "valeurs" chrétiennes, certains "fondamentaux" évangéliques, comme la chasteté, le rejet de l'homosexualité, de l'avortement, le mépris de l'argent, de la réussite sociale impérative, l'inculture religieuse rendant parfois ce négationnisme sociétal invisible, ou acceptable. L'évangélisme, du reste, était déjà une accommodation crue et matérialiste aux séductions de l'American way of life, de son système codifié lié au travail, au commerce, au spectacle, au show business. Si de nombreux Africains ou Moyen Orientaux se laissent prendre à ce puritanisme made in USA, c'est parce qu'il permet d'échapper à l'emprise de la société traditionnelle, avec ses contraintes claniques et familiales, et délivre des liens psychologiques afin de permettre des activités plus proches de ce que le monde moderne, individualiste, utilitariste, promeut.

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L'hypothèse d'une nouvelle "religiosité" doit tenir compte de la réalité du monde de la technoscience. L'humanisme, qui était à l'origine solidaire du christianisme, est devenu une religion séculaire à partir du XVIIIe siècle. L'homme est devenu le centre de l'existence, de la civilisation, et le porteur du sens de la vie. Nous assistons maintenant à sa métamorphose. La vraie foi qui semble mouvoir les esprits, les coeurs et les corps, et susciter un véritable enthousiasme, maintenant, c'est la démultiplication des pouvoirs de l'humain, et le rêve d'un homme éternellement jeune, voire immortel. C'est un projet faustien (tout-à-fait compatible avec ce "supplément d'âme" qu'est le New Age, du reste), entreprise méphistophélique que Goethe a dépeinte dans son fameux drame, et qui est l'un des rares mythes à être encore virulent dans notre univers nihiliste. A mon sens, voilà la religion du futur, prévue, somme toute par la Bible : "Et nous serons comme des dieux".

Je prophétise en pleurant.

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lundi, 10 janvier 2022

De la démocratie bidon au techno-féodalisme

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De la démocratie bidon au techno-féodalisme

par Markku Siira

Source: https://markkusiira.com/2022/01/10/lumedemokratiasta-teknofeodalismiin/

"Nous nous plaignons de l'autocratie en Amérique latine, au Moyen-Orient, en Afrique, en Russie et en Chine, mais nous ignorons largement les tendances autoritaires plus subtiles de l'Occident", écrit Joel Kotkin.

Mais il est vain d'espérer une dictature lourdement efficace dans le style du 1984 de George Orwell. Les sociétés occidentales pourront rester nominalement démocratiques, mais les citoyens seront dirigés par une "classe technocratique dotée de pouvoirs de contrôle plus importants que ceux des dictatures les plus inquisitrices", affirme l'universitaire.

La nouvelle autocratie émergera d'une centralisation économique impitoyable. Il y a cinq ans, quelque quatre cents milliardaires possédaient jusqu'à la moitié de la richesse mondiale. Aujourd'hui, seuls une centaine de milliardaires possèdent cette part. Oxfam, une organisation caritative d'aide au développement, réduit la taille de la classe possédante à seulement vingt-six personnes.

Selon un rapport de l'OCDE publié avant la pandémie des taux d'intérêt, la part de la richesse nationale détenue par les non-riches a diminué presque partout. Cette tendance s'observe même dans des sociales-démocraties comme la Suède et l'Allemagne.

Comme l'a dit l'économiste conservateur John Michaelson en 2018, l'héritage économique américain de la dernière décennie est "la surconcentration des entreprises, le transfert massif de richesse vers les 1% les plus riches de la classe moyenne".

Ce processus a évolué tant dans l'économie physique que dans l'économie numérique, souligne Kotkin (photo, ci-dessous). "Au Royaume-Uni, où les prix des terrains ont augmenté de façon spectaculaire au cours de la dernière décennie, moins d'un pour cent de la population possède la moitié des terrains".

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Sur tout le continent européen, la grande majorité des terres agricoles sont tombées entre les mains d'un "cartel de petites entreprises et de propriétaires méga-riches". "En Amérique, Bill Gates possède le plus de terres agricoles, plus de 200.000 hectares, et Ted Turner et John Malone possèdent des domaines de plus de deux millions d'hectares, chacun plus grand que plusieurs États."

Kotkin est bien conscient que l'économie numérique est également dominée par un nombre tout aussi restreint de sociétés géantes. "Ensemble, ces acteurs dominants ont un pouvoir pouvant atteindre 90 % sur des marchés essentiels tels que les systèmes d'exploitation informatiques de base, les médias sociaux, la publicité en ligne et la vente de livres".

La techno-oligarchie ne se contente plus de contrôler le matériel, mais rachète de plus en plus de journaux traditionnels et "sélectionne" les informations en fonction de ses goûts. Elle domine également de plus en plus le divertissement grand public: la vente de MGM à Amazon n'est que le dernier exemple en date de sa conquête et de sa consolidation des médias.

À l'instar des princes barbares du Moyen Âge, les nouveaux oligarques ont pu s'emparer de leurs fiefs sans grande résistance de la part de gouvernements centraux faibles. La "pandémie" a accéléré ce processus ; les fermetures et les restrictions de mouvement qu'elle a entraînées se sont avérées lucratives pour les grandes entreprises technologiques, dont les bénéfices ont doublé pendant cette période.

Les experts préviennent aujourd'hui que la plupart des petites entreprises pourraient être contraintes de fermer complètement ou de faire partie de grandes chaînes de franchisés. C'est le produit de la "réinitialisation" et du "grand redémarrage" du capitalisme ; le plus grand programme de transfert de richesse de l'histoire est en cours, mais peu d'entrepreneurs semblent le comprendre.

Kotkin a noté que la politique en matière de changement climatique alimente également l'autocratie des puissances occidentales en place. Alors que les techno-oligarques et les institutions financières mettent en œuvre la vision du Forum économique mondial de Davos, ils obligent les gens à cesser d'utiliser les combustibles fossiles.

Les entreprises et les spéculateurs super riches pourront réaliser d'énormes investissements dans l'"économie verte", grâce à des avantages fiscaux, des prêts et des ventes garanties à des entités gouvernementales. Cette "arnaque verte" est le dernier projet lucratif de BlackRock et d'autres sociétés de transfert d'actifs, commercialisé sous le nom d'"investissement éthique".

Pour les classes moyennes et populaires, cependant, le "grand redémarrage" pourrait s'avérer moins prometteur, voire désastreux, craint Kotkin. Comme l'a souligné Eric Heymann, économiste principal à la Deutsche Bank Research, pour la plupart des gens, une transition "verte" rapide signifiera "des pertes importantes de bien-être et d'emploi". L'économiste écrit déjà des mises en garde sur la nécessité d'une "écodictature".

Une politique consciente de décroissance visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre exigera de la plupart des gens qu'ils renoncent à leur voiture, qu'ils voyagent beaucoup moins et qu'ils vivent dans des maisons plus petites. La mise en œuvre sera également inévitablement intrusive : on parle déjà de "budgets carbone" familiaux.

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Si l'on ajoute à cette obsession les technologies de surveillance, on aboutit à quelque chose qui ressemble au système chinois de notation au crédit social, où le droit à la libre circulation est soumis à l'approbation du gouvernement. Tous les citoyens ne l'obtiennent que s'ils ont le nombre nécessaire de points d'obéissance.

Alors que le logement et les autres coûts montent en flèche, les barrières sociales se durcissent. Dans le nouvel ordre mondial, l'esclavage permanent de la rente et la dépendance totale de l'État se profilent. La confiance dans les institutions s'étant encore érodée à l'ère des taux d'intérêt, de plus en plus de jeunes pensent que travailler dur ne paie pas.

Kotkin affirme que "dans un monde dominé par quelques institutions, le précariat actuel, composé de travailleurs occasionnels et de ceux qui ont abandonné la vie active, pourrait devenir une version économiquement moins utile du prolétariat de Marx : une sous-classe permanente nécessitant un contrôle agressif, quasi militaire".

La période "pandémique", avec ses restrictions, a accéléré le passage des cols blancs au télétravail et la demande de solutions automatisées a explosé. Un avenir moins dépendant du travail humain élèvera les oligarques de la technologie au plus haut perchoir, ce que Lénine appelait "les sommets de l'économie".

Mais le pouvoir de l'argent ne peut pas régner tout seul. En effet, les puissances financières ont besoin d'une "classe de convertis loyale, capable de donner raison à leurs dirigeants et d'apaiser les âmes inquiètes des classes inférieures". Les politiciens sont les premiers à venir à l'esprit, mais d'autres serviteurs de l'élite sont nécessaires pour faire fonctionner la société.

Au Moyen Âge, l'Église catholique a joué ce rôle en légitimant l'ordre féodal comme l'expression par excellence de la volonté divine. Selon Kotkin, la version actuelle est composée de "représentants de la haute bureaucratie, du monde universitaire et des industries culturelles et médiatiques".

"L'élite numérique s'oint elle-même et est oint par ses collègues élites du monde des affaires et des médias. Les cadres bien formés des grandes entreprises et les membres qualifiés du clergé sont naturellement attirés par l'idée que la société est gouvernée par des professionnels aux valeurs "éclairées" - des personnes qui leur ressemblent beaucoup."

"En réponse à leur propre crise existentielle, une grande partie des médias soutient la création d'une technocratie mondiale", explique Kotkin. Il convient aux agences de presse de promouvoir un "capitalisme éveillé" informé qui se pose en défenseur de l'égalité et des droits de l'homme, mais qui maintient le peuple dans le droit chemin de sa censure et de ses exigences en matière de politiquement correct.

Les médias appartenant aux oligarques, les politiciens rémunérés et les institutions supranationales imposent aux masses des mesures d'austérité et le contrôle de l'empreinte carbone, tandis que les plus riches vivent eux-mêmes comme des aristocrates médiévaux, se mariant somptueusement et construisant des manoirs.

Pourtant, ces élites se préparent également à une éventuelle "révolte paysanne" des classes inférieures. Cela inclut l'utilisation de gardes de sécurité privés, la construction de bunkers et la recherche de cachettes éloignées aux États-Unis ou à l'étranger, notamment en Nouvelle-Zélande, pays éloigné et très surveillé.

Quel est le jeu final pour les oligarques et leurs alliés ? La mobilité des masses vers le haut de la hiérarchie économique est hors de question ; tout le monde ne veut pas devenir riche. Le journaliste spécialisé dans les technologies Gregory Ferenstein a interrogé 147 fondateurs d'entreprises numériques et en a tiré ses conclusions :

"Une part croissante de la richesse économique est générée par une proportion plus faible de personnes très talentueuses ou originales. Tous les autres vivent d'une combinaison de travail entrepreneurial à temps partiel et de subventions gouvernementales".

Selon la Silicon Valley, une grande partie des gens pourraient à l'avenir vivre des vies virtuelles en tant que consommateurs soutenus du métavers de Facebook ou de l'"espace immersif" de Google. Cela ressemble à un désir de voir les gens s'asseoir de plus en plus entre quatre murs, comme dans un coffre de banque ou une prison.

Il est clair que l'ordre émergent suscitera des déceptions, même à un stade précoce, suppose Kotkin. La confiance mondiale dans les institutions, notamment les médias et les grandes entreprises technologiques, est tombée à un niveau très bas. L'incertitude économique et géopolitique est également en hausse. On nous impose une économie verte pour laquelle nous ne disposons pas de la technologie, ni même des moyens.

Alors que l'automatisation détruit les emplois traditionnels, les oligarques et leurs alliés du nouveau clergé veulent imposer un "revenu de base universel pour que les paysans ne se révoltent pas". Cela aussi peut susciter des résistances, car tout le monde ne souhaite pas vivre dans une "dépendance subventionnée, rendue tolérable uniquement par l'équivalent numérique du pain romain et des jeux du cirque".

Tout cela pourrait devenir réalité plus tôt que nous le pensons. Les techno-oligarques sont en train de créer quelque chose qui ressemble à ce que le mondialiste et transhumaniste Aldous Huxley appelait dans Brave New World Revisited un "système de castes scientifiques".

Huxley a écrit en 1958 qu'"il n'y a aucune raison valable" pour qu'"une dictature entièrement scientifique soit jamais renversée". Elle conditionne ses sujets dès le ventre de leur mère afin qu'ils "grandissent en aimant leur esclavage" et "ne rêvent jamais de révolution".

Un tel despotisme maintient "un ordre social strict et fournit suffisamment de divertissement par le biais de la drogue, du sexe et des vidéos" pour que les "esprits artificiellement étroits de ses citoyens soient occupés et satisfaits".

"La fusion du gouvernement et des grandes entreprises oligopolistiques, et la collecte technologiquement améliorée des données privées, permettront aux nouveaux autocrates de contrôler nos vies d'une manière que Mao, Staline ou Hitler auraient enviée", déclare Kotkin à propos de ces perspectives.

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mercredi, 24 mars 2021

L’Europe doit investir dans les technologies du futur

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L’Europe doit investir dans les technologies du futur

Par Jérémy Silvares Jeronimo
 
Ex: https://eurolibertes.com/

Comme des millions de personnes, j’étais vissé sur mon fauteuil devant mon écran de télévision le 18 février afin de voir le robot Persévérance se poser sur la planète Mars. Construit par la NASA (1), le robot Persévérance montre une fois de plus que les Occidentaux des deux côtés de l’Atlantique continuent d’être des explorateurs hors-normes.

En matière de spatial les Américains dominent, suivis des Européens. Les chinois ne sont pas encore à notre niveau mais cela ne saurait tarder. Et si les Américains dominent encore c’est aussi à cause du nombre de scientifiques qui sortent de leurs excellentes universités et qui peuvent, avant d’aller travailler pour la NASA, travailler dans des start-up sur tous types de projets innovateurs dans ce que l’on appelle la vallée du Silicone (Silicon Valley).

Pourtant je lis, ici et là, sur les sites dits de « réinfosphère », de violentes critiques sur ce que la Silicon Valley, les entreprises et les personnes qui y travaillent représentent, c’est-à-dire le camp progressiste, le politiquement correct et le danger pour la démocratie que sont les GAFA. Mais il importe de souligner que les GAFA sont réellement un danger pour la démocratie. Il suffit de se rappeler la manière dont Twitter et compagnie ont expulsé Donald Trump.

Que ces compagnies soient ou non d’accord avec le contenu des tweets on doit se poser la question cruciale : une entreprise privée peut-elle censurer le président des USA ? D’autant que l’importance que ces réseaux sociaux ont eue sur les élections est préoccupante. La pression que les GAFA exercent sur les petits réseaux sociaux libres surtout après que des millions d’utilisateurs ont quitté Facebook et Twitter pour aller vers Parler est scandaleuse (2).

Ceci est vrai, mais, il y a un mais… Car la Silicon Valley c’est bien plus que les GAFA ou le progressisme, c’est une des régions de l’Occident où l’on rêve encore du futur, et ça, ça n’a pas de prix. Et quand je dis rêver du futur, je parle des capacités que certaines personnes ont – Elon Musk n’en n’est qu’un exemple – à penser l’homme de demain, les technologies de demain, les conquêtes de demain.

Après avoir tout inventé ces derniers siècles (3), les nations d’Occident risquent de se faire dépasser par les nations d’Extrême-Orient, Japon, Corée, Taiwan, et surtout la Chine. Nos leaders politiques, à part quelques rares exceptions, ont depuis les années soixante-dix laissé partir nos brevets, nos inventions, notre technologie. En France, jusqu’aux années soixante-dix nous étions dans les premiers de cordées (pour citer un certain président).

Le TGV, le Minitel, le Concorde pour n’en citer que quelques-uns furent des fleurons à leur époque… Et c’était pareil dans tout l’Occident. Et maintenant ? Nous inventons toujours, mais les États donnent de moins en moins d’argent à la recherche scientifique. Et certains scientifiques n’hésitent pas à quitter la France afin de pouvoir poursuivre leurs travaux. Ce qui en dit long sur l’intérêt que ceux qui tiennent les cordons de la bourse leur vouent.

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Or aux USA, que l’on aime ou que l’on n’aime pas ce pays, on continue de rêver et d’inventer, dans les grandes universités, à la NASA, dans la Silicon Valley. Avec de l’argent privé et public. On y travaille sur la Deep Tech, ce qu’en français on nomme les « jeunes pousses disruptives », l’intelligence artificielle, la robotique, les énergies propres, la nanotechnologie, l’aérospatial ou l’informatique quantique…

En Europe aussi on travaille sur ces sujets, mais pas autant que nous devrions car l’argent manque pour ces projets… les gouvernements préfèrent financer des ONG et des associations qui déconstruisent nos Nations.

Et cependant… cependant même aux USA, de plus en plus de chercheurs, d’inventeurs et de scientifiques partent pour la Chine. Le nombre est encore très petit mais… C’est une catastrophe pour l’Europe et pour les USA. Si les nations d’Occident ne se maintiennent pas sur le podium de l’inventivité, nos pays n’auront plus aucune attractivité et deviendront des nations secondaires.

Nous continuons, nous Occidentaux, à avoir de très « grosses têtes ». Ne les laissons pas fuir vers la Chine. Que la prochaine Renaissance soit à nouveau en Occident et non pas en Chine. Comme le disait Philippe Coué sur CNews, lors de l’atterrissage de Persévérance, il n’y a pas de grandes nations sans grands projets. À nos leaders d’investir dans ces grands projets.

Notes

(1) En plus des Américains, principaux concepteurs du projet, il y avait aussi des pièces européennes, comme la camera SuperCam construite par des Français.

(2) Le fait qu’Amazon coupe l’accès à ses serveurs justement au réseau social Parler est tout aussi honteux… lien : 12/0172021, Amazon coupe l’accès du réseau social Parler à ses serveurs, Le Temps, France, lien : https://www.letemps.ch/monde/amazon-coupe-lacces-reseau-s...

(3) Je vous renvoie à mon dernier texte, Ce que le monde doit à l’Occident. Pour ceux qui l’auraient oublié, lien : https://eurolibertes.com/culture/ce-que-le-monde-doit-a-loccident-pour-ceux-qui-lauraient-oublie

00:10 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, futur, technologies, high tech, europe | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

jeudi, 28 mai 2020

Bâtir le futur sans nier le passé

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Bâtir le futur sans nier le passé

par Yohann Sparfell

Ex: http://www.in-limine.eu

Le monde est aujourd’hui secoué par de terribles soubresauts. Ceux-ci, à la première lecture, apparaissent comme issus de rivalités inter-ethniques et inter-confessionnels. Ils se traduisent essentiellement par des conflits armés. Mais ceux-ci ne sont en réalité que les expressions ultimes de rivalités qui s’accroissent du fait de contestations territoriales, de concurrences autours des ressources en matières premières ou en eau, de positions stratégiques, ou de luttes d’influences. Rivalités à partir desquelles se cristallisent la plupart du temps les facteurs d’appartenance ethnique et/ou religieux.

Sans nier que ces rivalités puissent avoir leur source dans une histoire faite de rapports inter-civilisationnels ou inter-ethniques compliqués, il s’agit aujourd’hui de comprendre que celles-ci trouvent à être instrumentalisées essentiellement par, non pas essentiellement une grande puissance que pourrait être les États-Unis ou la Chine, ou encore la Russie, l’Inde ou l’UE, mais par ce que l’on nomme l’ « Empire britannique », désignant par là le pouvoir financier mondialiste actuel qui a imposé sa propre souveraineté sur les émissions monétaires du monde entier. Lui seul a encore aujourd’hui intérêt à générer le chaos où bon lui semble en fonction des intérêts de la dynamique globaliste qu’il porte vers une Gouvernance mondiale totalitaire.

Dans ce jeu de dupes où certaines formes de replis sur des supposés fondamentaux religieux ou ethniques rentrent par le fait dans cette dynamique – bien souvent en ayant la volonté d’y parer – c’est toute possibilité d’établir une entente et des compromis – par la compréhension mutuelle des problématiques des uns et des autres – qui se voient ainsi être mis en péril. Or, le monde actuel n’est plus celui, technologiquement et psychologiquement parlant, du passé, et il est aujourd’hui nécessaire de tenir compte d’un contexte complexe au sein duquel tout débordement pourrait conduire à de sombres et fatals conséquences pour l’humanité toute entière. Les desseins morbides de l’oligarchie actuelle nous font marcher de plus en plus vite et dangereusement sur la corde raide au-dessus du vide : rien de ce qu’ils projettent ne peut être tenu pour acquis au nom d’une quelconque supériorité de quelque ordre que ce soit, les enjeux étant devenus trop importants et risqués. Et ils sont d’autant plus risqués que l’on prend conscience que l’humanité, dans toute sa complexité, ne peut se réduire, au regard du cours de son histoire, à des formules mathématiques, statistiques ou autres. Il ne faut pas oublier que l’ingénierie sociale, employée allègrement par certaines factions du pouvoir mondialiste, pour autant qu’elle soit essentiellement expérimentale, n’en est pas moins, par le fait, une science approximative nécessitant en permanence une remise en cause de certains de ses présupposés étant donné qu’il ne sera jamais possible d’intégrer la globalité des facteurs humains dans un projet de modélisation de ses visées de modifications sociales. Peut intervenir à tout moment un facteur imprévu qui alors aura toute latitude à déboussoler tout l’édifice de remodelage de sociétés entières. Et ceci jusqu’à engendrer de plus ample destruction pouvant aboutir à mettre la vie sur terre en danger, suite, par exemple, à un conflit nucléaire.

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Face à cette tendance fort dangereuse menée par des hommes en proie à une avidité illimitée, il devient plus que temps de mettre en place certaines conditions devant amener à promouvoir un véritable dialogue des cultures et des civilisations. Nous vivons une époque cruciale à cet égard, et il faut bien mesurer l’importance d’une prise de conscience de l’état actuel d’une part, et d’autre part de la nécessité impérieuse d’y apporter des solutions visant à détendre les relations et entreprendre une compréhension mutuelle des intérêts de chacun, ainsi que - sinon surtout - de ses propres craintes vis-à-vis de ceux qui l’entourent. En d’autres termes, il devient plus qu’urgent que s’amorce une dynamique visant à prévenir, ou du moins à ralentir et même affaiblir les tendances actuelles à s’enferrer dans des identités fantasmées conduisant fort souvent à des formes de fondamentalisme. Il faudra par conséquent valoriser les échanges tant culturels que spirituels et bien sûr économiques, mais par dessus tout, il s’avérera indispensable, si nous ne voulons pas sombrer dans une guerre de tous contre tous à l’échelle mondiale, prendre conscience des besoins fondamentaux de l’autre, dont le respect pour la forme par laquelle s’exprime sa personnalité est peut-être l’un des principaux.

Promouvoir les échanges et la compréhension mutuelle, soit, mais chaque nation cherche avant toute chose, parce que la légitimité des États à cet égard est en jeu, de satisfaire aux besoins fondamentaux de sa population et de son économie. Comme nous l’avons indiqué, les conflits sont surtout le fait d’une concurrence effrénée par rapport à des ressources et, tout aussi important, par rapport à un accès à certaines positions stratégiques, comme l’accès aux mers par exemple, ou à des passages terrestres ou maritimes fondamentaux pour les possibilités futures de croissances et d’efficacité de défense. Les conflits s’exacerbent en ce nom, et sont malignement exploités et amplifiés par de plus grandes puissances afin de pouvoir imposer leurs propres agendas aux plus faibles nations. Et en outre, aujourd’hui, comme nous l’avons noté, la dynamique mondialiste portée par la Finance internationale amplifie encore plus ce phénomène de relations internationales dans le sens souhaité d’une imposition globale d’une structure conflictuelle mondiale permanente pour les intérêts d’un capitalisme qui tend à accroître l’exploitation généralisée des ressources, y compris, si ce n’est surtout, humaines. Et l’élément par lequel l’oligarchie espère y parvenir, c’est de saper toute souveraineté des États afin de pouvoir prescrire en toute quiétude les conditions nouvelles, à l’échelle mondiale, d’une société globalisée où la concurrence et la compétition seront élevées en seules vraies valeurs, tout en détruisant parallèlement la notion de Bien commun.

Le Bien commun, justement, doit pouvoir être remis à l’honneur dans un combat pour lequel prime le bien être de tous et la liberté pour chacun – dans le sens des possibilités accordées à chacun à ce qu’il puisse faire grâce de son assentiment à honorer sa singulière participation au Bien commun. À l’anti-thèse de l’exploitation généralisée des survivants et de l’annihilation programmée des autres, soit d’un rapport gagnant-perdant, nous devrons imposer des relations gagnant-gagnant, et ce à l’échelle d’une humanité qui tend inévitablement à s’unifier. Certaines choses qui ont pris de l’ascendant de nos jours sont effectivement irréversibles, et elles le sont d’autant plus que l’homme postmoderne accroît son emprise technologique sur le monde, et sur lui-même. Il faudra bien savoir l’accepter tout en faisant l’effort indispensable aujourd’hui de pouvoir dominer le progrès technologique – dominer étant se placer au-delà afin de pouvoir le mettre à son véritable service - en faveur de valeurs humanistes et au travers d’un attachement primordial accordé à la personne humaine et à la richesse de sa diversité dans son unité. Les intérêts de chacune des nations doit pouvoir s’imbriquer au sein des relations internationales sans qu’elle est à y perdre ni son âme ni ses intérêts particuliers. L’accroissement des flux d’échanges, tant économiques que culturels, doit pouvoir permettre à ce que s’accroisse simultanément une compréhension mutuelle. Donc, il faudra faire en sorte que nous puissions libérer raisonnablement ces échanges et, en amont, les conditions par lesquelles elles pourront s’engager dans un voie prometteuse, des interférences d’une volonté malsaine hégémonique qui ne sait que considérer le monde et sa diversité en faveur d’un durcissement altitudinal de son pouvoir autocratique.

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À cet égard, le projet mené par la Chine des Nouvelles Routes de la Soie – ou Belt and Road Initiative (BRI) – pourrait éventuellement être très prometteur car susceptible de reposer essentiellement sur ces principes de respect des différences et de recherche de codéveloppement. Effectivement, ce codéveloppement ne saurait devenir viable à long terme que s’il respecte chacune des visions du monde par laquelle chaque peuple et communauté pourra librement, et de par son propre entendement, se connecter au maillage mondiale des voie de communication terrestres et maritimes portées par ce projet, étendu à ce que certains appelent un « Pont mondial ». Cette condition est effectivement indispensable à la viabilité de ce projet international, car il se doit de rester justement inter-national, et non globaliste c’est-à-dire intégré dans une dynamique d’effacement progressif des nations et de leur souveraineté ainsi que, simultanément, d’élaboration d’une sorte de « communauté humaine mondialisée », standardisée à l’avantage d’une Gouvernance mondiale du capitalisme financier hégémonique et totalitaire.

Œuvrer pour une coopération au niveau international et mondial dans l’objectif de construire un futur où pourra librement se déployer la création et se développer l’innovation humaines ne signifie donc nullement passer outre les impondérables de la nature humaine. La personne humaine ne peut réellement s’épanouir que dans le cadre de ses communautés, locale, régionale, nationale et au-delà, civilisationnelle. C’est au sein de celles-ci, et ce uniquement en regard de ce qu’elle peut être à même de parcourir concrètement de son entendement et de sa raison en compagnie de ceux avec lesquels elle partage la même vision, qu’elle peut au mieux définir une légitimité à ses propres actes, à l’aune de l’héritage et des intérêts communautaires qui les meuvent. Toute coopération est donc une rencontre entre des intérêts et des héritages toujours à un moment donné divergents mais qu’il faudra bien, pour l’élaboration d’un Bien commun d’ordre supérieur, articuler entre eux de façon à ce que chaque communauté y trouve avantage et enthousiasme au-delà de ses propres limites culturelles et de ses intérêts plus étroits. C’est un enjeu de taille et jamais acquis définitivement. Cela demande un effort perpétuel de maintenir une réciprocité gagnant-gagnant, du point de vue des intérêts, par exemple économiques, mais surtout une réciprocité raison-contre-raison du point de vue cette fois des héritages respectifs. Et cela parce qu’il s’avère indispensable en notre époque cruciale de faire comprendre tout l’enjeu au niveau de l’humanité toute entière de réussir à dépasser nos divergences les plus aiguës et de pouvoir faire participer positivement nos différentes cultures à une vision d’avenir vers de grands projets mobilisateurs et, peut-on espérer, annonciateurs de paix et de progrès dans le respect universel de la personne humaine, comme des êtres non-humains qui l’entourent.

La meilleure façon de ne pas s’opposer à l’autre est de s’affirmer soi-même. Cela est une leçon que devrait apprendre l’humanité au-delà de ses différences culturelles et spirituelles. Et le seul moyen réellement efficace et pérenne d’y parvenir est de ne point nier son héritage, tout ce qu’a pu léguer le passé au travers d’une diversité de cultures et de trésors de spiritualité, mais au contraire de s’y appuyer en les transcendant. Ces cultures et spiritualités, comme autant de possibilités qu’ont imaginés les hommes afin d’exprimer leur rapport à l’être et à la vie, doivent être les socles à partir desquels nous pourrons envisager des échanges qui seront primordialement culturels et spirituels avant que de n’être qu’économiques. Il s’agit de donner une priorité à ce qui, seul, est l’instrument de l’affirmation humaine : sa vision du monde au regard de toute la diversité des « climats » par lesquels elle a su se nuancer. Une forme d’être, liée à un héritage, à un « climat » particulier, et dans la mesure où la culture en est véritablement une parce qu’elle s’inscrit dans la dynamique de l’identité1, est ce à partir de quoi l’homme peut se donner les moyens et le désir sain de tendre vers l’universel. Lorsque l’on a rien à échanger que du matériel et des rêveries par lesquelles l’on tend à confondre la Réalité avec ses propres idéaux, l’on ne tend jamais la main vers l’autre afin d’approcher de l’universel et, un tant soit peu, de la Vérité. On s’enferre dans ses propres croyances et l’on désire par dessus tout les imposer aux autres. L’homme doit apprendre que les nuances forment un seul et même tableau, mais que sans ces nuances, il ne peut y avoir de message universel à transmettre via ce tableau. Il doit apprendre que sa culture, source de sa souveraineté et singulière parmi tant d’autres, est un moyen lui appartenant en propre d’exprimer cet universel à condition qu’au lieu d’exclure les autres, il l’affirme au milieu des autres. À partir de la diversité des communautés humaines, la subsidiarité jusqu’au niveau de la multipolarité civilisationnelle et, au-delà, de la coopération mondiale, peut donc devenir un formidable outils permettant que l’homme puisse progresser vers la conscience spirituelle de l’unique Réalité qui est Universalité.

Yohann Sparfell.

1 Chose que nous avons détaillé dans notre ouvrage Res Publica Europae, éditions Ars Magna, Nantes, décembre 2019 : https://www.editions-ars-magna.com/index.php?route=produc...

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mercredi, 27 novembre 2013

Où va le monde ?

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Où va le monde ? Et pourquoi le pire n’est pas encore sûr !

par Pierre LE VIGAN

 

L’une des responsabilités du politique, sinon la première, c’est de ne pas compromettre l’avenir. Cela implique de prendre en compte les risques de catastrophe sociale, écologique et autre. Quatre auteurs répondent ici à ces questions avec des préoccupations proches mais des sensibilités intellectuelles différentes.

 

Pour Yves Cochet, dont les idées sont parfois très discutables mais ont le mérite d’exister, par ailleurs le seul politique des quatre auteurs, le culte du retour de la croissance va se fracasser contre le mur du réel. La croissance élevée ne reviendra plus : l’énergie abondante et pas chère c’est fini. De là l’idée que les objecteurs de croissance doivent continuer d’autant plus à développer un autre imaginaire que la croissance, cette religion du toujours plus. Quel imaginaire ? Celui d’une société de sobriété, de partage, de nouvelles autonomies collectives.

 

Dès maintenant un grand accident écologique est possible : ce que l’on pourrait nommer un supplément du destin ou une accélération du destin. Loin de tout délectation morbide, il faut penser la catastrophe possible pour pouvoir peut-être l’éviter : c’est le « catastrophisme éclairé » pour lequel plaide Jean-Pierre Dupuy. Se saisir du temps du projet pour agir avant qu’il ne soit trop tard.

 

Mais il faut agir sur plusieurs fronts car l’écologie et l’économie font système. Explications. La folie de la finance a mis en péril l’économie réelle, celle qui, avec les P.M.E., crée la richesse réelle et l’emploi. En d’autres termes, la production est attaquée et souvent liquidée par l’économie casino. Ensuit, c’est la société elle-même, avec les États menacés de faillite, qui souffre de la crise de l’économie réelle. En bout de chaîne, c’est la planète dont les ressources et les équilibres sont  détruits par la logique du turbocapitalisme. Une « sortie » de crise possible se profile. Elle n’est pas rose. C’est le replâtrage autoritaire du système, au profit d’une minorité de très riches. Mais ce n’est pas une fatalité. À l’encontre de ce risque de dérive oligarchique et autoritaire, l’objectif rassembleur pourrait être, selon Susan George, de reconstruire une société humaine à partir de l’idée que la terre n’est pas un bien inépuisable. « On ne peut jamais gagner une guerre contre la nature » note Susan George. Nous sommes dans une planète de plus en plus remplie, et avec des terres cultivables qui ne sont pas multipliables à l’infini. D’où la nécessité de faire de l’usage économe et respectueux de la planète notre loi suprême.

 

Une planète rétrécie, mais quelles conséquences sur les humains ? Serge Latouche émet l’hypothèse d’une double tendance : d’un côté un mouvement vers l’uniformisation mondiale des usages technologiques – une humanité homogène –, de l’autre une tendance à la constitution, sur la base de la séparation politique, voire de l’apartheid, d’entités collectives de plus en plus réduites, de plus en plus identifiées par des références prémodernes (l’ethnie, la religion, etc). Des micro-États ou de grandes « tribus ». Exemples : les petits pays issus de l’éclatement de l’ex-Yougoslavie, l’Ossétie du Sud, le Sud-Soudan, le Somaliland… Homogénéité du monde ou éclatement ? C’est cette dernière tendance qui est dominante selon Serge Latouche. Mais la fragmentation des États-nations n’est-elle pas le moyen pour les grandes puissances de conforter leurs positions ? D’être plus fort face à des petits encore plus petits et plus isolés ? C’est plus que probable, ce qui n’enlève rien à la réalité d’aspirations à des liens plus locaux, par réaction sans doute aux effets de la mondialisation.

 

La deuxième remarque qu fait Serge Latouche concerne l’existence de deux phases dans la crise. Une première phase, de 2007 à 2008, avec la crise des subprimes puis la faillite de Lehman Brothers, a été marquée par l’affichage de velléités de régulation du système financier par les États. « Le marché qui a toujours raison, c’est fini », s’exclamait Sarkozy en septembre 2008. Mais concrètement la seconde phase de la crise n’a pas vu la mise en place d’une régulation nouvelle mais a été marquée par la prise en charge des dettes privées, celles des banques, par les États et donc par les citoyens, avec comme conséquence une transmission des risques de faillite aux États. Premières victimes : les systèmes de protection sociale et les services publics. Et conséquence logique : une politique d’austérité visant à faire payer le coût de la dette aux classes populaires et aux classes moyennes. Le sauvetage des banques a ainsi coûté environ le tiers du P.I.B. mondial, indique Latouche. L’estimation est peut-être surévaluée mais les sommes sont en tout cas de 20 % de la richesse nationale pour le Royaume-Uni, et de 7 % pour la France. Elles sont donc considérables.

 

Surtout, la finance continue de représenter des montants de dix à quinze fois supérieurs à l’économie réelle. La déconnexion entre les deux sphères ne pourra être maintenue longtemps. Seul le crédit en flux continu et le mythe d’une croissance perpétuelle l’a rendu possible pendant un temps, et à quel prix ! Mais le modèle de la guerre de tous contre tous a sapé les fondements mêmes de la société.

 

La mondialisation n‘a pas été autre chose, explique Latouche, que « l’omnimarchandisation du monde ». Quand ce cycle est accompli, il amène les hommes à réinventer les vertus de l’autonomie locale, de la débrouille, des petits marchés locaux. Une alternative au grand marché mondial ? « À moins de remettre en cause la société de croissance, on n’échappera pas au chaos. C’est effectivement : décroissance ou barbarie », conclut Serge Latouche.

 

Pierre Le Vigan

 

• Yves Cochet, Jean-Pierre Dupuy, Susan George, Serge Latouche, Où va le monde ? 2012 – 2022 : une décennie au devant des catastrophes, Mille et une nuits, 78 p., 3,50 €.

 


 

Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com

 

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vendredi, 18 mars 2011

Bref manifeste pour un futur proche

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Bref manifeste pour un futur proche

par Gustave LEFRANÇAIS

« Il ne faut pas agir et parler comme nous l’avons appris par l’héritage de l’obéissance. »

Héraclite

« La vie pure est le mouvement de l’Être. »

Hegel, L’esprit du christianisme et son destin.

« À l’opposé  du mot d’ordre conservateur: “ Un salaire équitable pour une journée de travail équitable ”, les prolétaires doivent inscrire sur leur drapeau le mot d’ordre révolutionnaire: “ Abolition du salariat”. »

Marx, Salaire, prix et profit.

Les positions synthétiques qui suivent conduisent toute action et toute réflexion qui n’entendent  pas améliorer la société du spectacle de l’aliénation mais qui visent – a contrario – à redonner vraie vie à l’existence humaine. Elles témoignent des nécessaires jalons de l’énergie historique pour une véritable pratique révolutionnaire de destruction de la société de l’avoir et en défense intégrale de la communauté de l’être… Elles découlent de la rencontre plurielle et anti-dogmatique d’hommes et de femmes en quête de rencontre humaine à l’amont de tous horizons et à l’aval d’une seule perspective : celle d’une intervention cohérente pour atteindre la possibilité d’une situation où l’être de l’homme trouve effectivement l’homme de l’être.

Par conséquent, elles sont là la simple mais riche expression du mouvement réel de l’aspiration communiste qui – depuis des siècles de luttes déclarées ou obscures -  traverse l’humanité après que celle-ci, en rupture de la tradition communautaire primordiale, eut été séparé  de son rapport générique au devenir cosmique du vivre authentique et qu’elle cherche consciemment ou inconsciemment à retrouver le fil d’un temps non-monnayable où l’humain non-divisé ignorait les profanations de la domestication politique et de la tyrannie économique.

Avant la culture du travail pour la vente existait un monde où l’homme ne produisait que pour ses seuls besoins en des conditions où l’inestimable volupté d’habiter en les plaisirs de la terre sacrale n’avait pas de prix. À la suite du surgissement des productions de l’échange et du profit, a éclos  la société de l’avoir qui a progressivement détruit la vieille et ancestrale communauté de l’être pour faire naître le dressage civilisationnel qui, d’ancien régime à domination mercantile faussement contrôlée à régime nouveau de despotisme marchand véritablement incontrôlable, a façonné progressivement les conditions d’émergence de l’actuelle dictature démocratique du marché totalitaire.

L’actuel énoncé ne dit rien d’autre qui ne soit le produit des expériences passées de l’humanité dés-humanisée en lutte perpétuelle de retour à la vérité d’elle-même, sur la base vivante et millénaire des incessantes jacqueries paysannes puis des insurrections  ouvrières ainsi que des leçons qu’en ont tiré tout au long de l’histoire les organisations révolutionnaires qui ont su jaillir ici ou là pour déclarer que l’émancipation de l’humanité passait d’abord par la liquidation de la société de l’argent et de la mystification politique.

Les présents repères se réclament ainsi des apports subversifs et successifs de la Ligue des communistes de Marx et Engels, de l’Association internationale des travailleurs et de toutes les fractions radicales qui se sont manifestées dans la claire dénonciation du capitalisme d’État bolchévique en toutes ses variations successives de permanente duplicité complice avec les lois de la souveraineté marchande. La conscience historique qui est née de cette inacceptation voulue des obéissances à la seule jacasserie permise a su mettre en avant la nécessité de l’abolition du salariat et de l’État à l’encontre de toutes les impostures de perpétuation et de rénovation de la marchandise qui, de l’extrême droite à l’extrême gauche du Capital, n’aspirent qu’à maintenir ou moderniser le spectacle mondial de la société commerciale de la vie fausse.

Unité totalitaire du mode de production capitaliste en toutes ses variantes

Tous les pays de la planète du spectacle du fétichisme marchand, quelle que soit l’étiquette illusionniste dont ils se parent  sont des territoires de l’oppression capitaliste soumis aux lois du marché mondial. Toutes les catégories essentielles du travail de la dépossession humaine y existent universellement, sous forme moderne ou retardataire, rudimentaire ou épanouie car l’argent en tant qu’équivalent général abstrait de toutes les marchandises produites par la marchandise humaine y triomphe partout en tant que dynamique de l’asservissement continûment et assidûment augmenté.

Dès lors, sous toutes les latitudes et sous toutes les longitudes règne la pure liberté de l’esclavage absolu qui en tant que puissance de la réification ravage tous les terrains de l’humain écrasé par l’abondance de la misère. Du centre de l’empire américain du spectacle de la marchandise à ses périphéries les plus oppositionnelles, le temps des choses enchaîne l’espace des hommes aux seules fins qu’en tout lieu la seule qualité qui leur soit reconnue soit celle que leur offre le mouvement général de la quantité circulante et de la libre comptabilité de l’économie des déchets narcissiques.

La Première Guerre mondiale a irrémédiablement marqué historiquement l’entrée en décadence du mode de production capitaliste qui connaît depuis lors des contradictions de plus en plus insolubles engendrant des conflits inter-impérialistes de plus en plus sanglants pour le re-partage régulier de la finitude des marchés  saturés par l’infinité sans cesse réactivée de la baisse du taux de profit qui impose de toujours vendre en nombre croissant les produits de l’activité humaine capturée par le travail.

Le capitalisme enferme ainsi l’humanité dans un cycle permanent d’horreur  généralisée  – de crise, de guerre, de reconstruction puis à nouveau de crise… – qui en perpétuant l’inversion industrielle de la vie naturelle est la plus parfaite expression de sa décadence advenue. Celle-ci signale que dorénavant l’illimitation organique des exigences de ravage des rythmes du profit bute irrémédiablement sur les limites d’une solvabilité planétaire qui, même dopée de crédit en croissante fictivité pléthorique, ne peut parvenir à digérer la sur-production grandissante de travail cristallisée en matérialité illusoire et inécoulable. La seule alternative à cette situation où la valorisation du capital, malgré la mise en scène toujours de plus en plus féroce de ses machineries terroristes de destruction, ne parvient plus à possibiliser  la falsification de la vie sociale, est la révolution pour la communauté humaine universelle  devenue aujourd’hui visiblement  indispensable pour tous ceux qui n’entendent pas tolérer de demeurer plus longtemps expropriés de leur propre jouissance humaine.

La tâche du prolétariat, c’est-à-dire la classe internationale de tous les hommes  sans réserve, réduits à ne plus avoir aucun pouvoir sur l’usage de leur propre existence, est  en  chaque pays du spectacle de la réification mondialiste, la même : c’est celle de la destruction des rapports de production capitalistes.

Les luttes nationales de libération capitaliste

Ces luttes expriment l’idéologie du développement économique de classes dirigeantes locales qui n’aspirent à desserrer les liens avec le gouvernement du spectacle mondial que pour mieux exploiter elles-mêmes leur indigénat salarié. Elles ne peuvent évidemment se développer que dans le cadre des conflits inter-impérialistes qui aménagent le mensonge fondamental de la domination de classe pour le sauvetage du travail-marchandise.

La participation ou le soutien « critique » ou non du prolétariat à ces luttes, comme le veulent les publicitaires de la farce du soi-disant moindre mal pour permettre aux parents pauvres du capitalisme d’accéder à une meilleure position dans la division mondiale des tâches spectaculaires du vivre mutilé si elle peut intéresser les experts du marché des idées aliénées en quête de notoriété spectaculaire ne peut en revanche abuser les hommes de véridique passion radicale. Car ceux-ci savent pertinemment que tous ceux qui contestent les parents riches de la société moderne de l’exploitation interminable uniquement du point de la défense d’un réagencement plus équilibré des circonstances globales du Diktat du commerce généralisé, ne peuvent aboutir au mieux qu’à faire  vendre la force de travail à un meilleur prix d’oppression.

Chair à transaction, chair à canon au profit d’un des camps en présence, l’humanité prolétarisée doit refuser de choisir entre la peste des grands États macro-impérialistes et le choléra des petits États micro-impériaux qui tous, contradictoirement, complémentairement mais solidairement ont toujours par delà leurs conflits de frères ennemis sur le terrain de la géo-politique du mensonge généralisé, constitué la Sainte-Alliance des fusilleurs du prolétariat.

Face à la réalité de la mondialisation despotique du quantitatif, la lutte de classe ne peut qu’être mondiale comme le proclamait dès 1848 Le Manifeste : « Les prolétaires n’ont pas de patrie ». Ceci au sens où si ces derniers ont bien en tant qu’hommes séparés d’eux-mêmes un reste de patrimoine cosmique d’enracinement non mercantilisable datant d’avant la théologie de la monnaie, la nation étatique née des Lumières de la raison marchande et qui a notamment provoqué les deux Holocaustes mondiaux du XXe siècle, n’est bien qu’une abstraction de marché destinée à satisfaire uniquement les exigences de richesse des calculs de l’échange.

L’appel « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! » n’a jamais été aussi actuel. Après avoir détruit et digéré toutes les anciennes territorialités pré-capitalistes de jadis d’où il était sorti pour les fondre progressivement en l’unité de ses marchés nationaux, le spectacle de la mondialisation capitaliste est maintenant en train de liquider les nations pour les fusionner en une vaste grande surface hors-sol unifiée mondialement par le temps démocratique de la dictature de la valeur désormais totalement réalisée.

L’histoire ne repasse jamais les plats et tout essai de restauration finit inexorablement en comédie caricaturale. Il n’y aura pas de retour en arrière… Les peuples vont immanquablement disparaître et s’y substitueront alors des populations informes de libres consommateurs serviles de la temporalité échangiste du métissage obligatoire en l’adoration des galeries marchandes de la dépense. Ceux qui ne comprennent pas la réalité têtue de ce mouvement historique profond et irrévocable sont condamnés à l’appuyer par le fait même qu’ils le combattent à contre-temps à partir d’une simple dénonciation de ses effets. On ne peut lutter efficacement contre le spectacle mondial de l’économie politique en lui courant derrière pour regretter ce qu’il balaye et en tentant littérairement de faire réapparaître ce qui est justement en train de définitivement s’évanouir. On ne peut contre-dire et s’opposer véritablement au culte de la liberté de l’exploitation infinie qu’en livrant bataille en avant sur le seul terrain du triomphe dorénavant accompli de l’aliénation capitaliste totalement maîtresse de la totalité de la misère humaine.

Nous allons assister maintenant à la victoire réalisée du spectacle capitaliste qui va d’ailleurs se perdre elle-même en un processus d’échec cataclysmique où la dialectique de l’échange s’assimilant à tout usage possible, finira par conduire ainsi la marchandise à se consommer elle-même dans une baisse du taux de profit de plus en plus explosive.

Ainsi, même dans les pays dits « sous-développés » comme dans les « sur-développés », la lutte directe et radicale contre le Capital et tous les gangs politiques est la seule voie possible pour l’émancipation du prolétariat qui pour cela doit se nier en tant que tel en abolissant la marchandisation de la réalité.

Lorsque la réalisation toujours plus réalisée de la domination marchande sur la vie, rend toujours plus délicat et compliqué que les hommes distinguent et désignent leur propre néant en l’indistinction universelle de la marchandise qui a tout inversé, ces derniers se trouvent finalement positionnés en ce seul dilemme de refuser la totalité de la liberté de la tyrannie du marché ou rien. Ainsi, la théorie du vivre l’être est désormais ennemie déclarée de toutes les idéologies révolutionnaires de l’économie politique du mensonge qui en voulant soi-disant plus d’être en l’avoir maintenu, avouent tout bêtement  qu’elles sont à la fois les ultimes secouristes de l’état de la possession et de la possession de l’État.

Les syndicats comme agents courtiers de la marchandise-travail

Simples appendices d’État, les syndicats même démonétisés restent les organes quotidiens de la contre-révolution capitaliste en milieu prolétarien. Leur fonction de vendeurs officiels de la force de travail à prix négociés en fait des régulateurs majeurs du marché du travail par rapport aux besoins du Capital et leur rôle de représentants de commerce du réformisme en même temps que leur fonction d’encadrement  policier de la classe ouvrière les consacrent comme des piliers fondamentaux de la discipline et de la violence de l’ordre capitaliste dans les entreprises et dans la rue.

Destinés à maintenir le prolétariat comme marchandise, simple catégorie servile du Capital, les machineries bureaucratiques syndicales qui ne servent qu’à cadenasser la classe ouvrière et à saboter ses luttes pour les empêcher d’aller vers l’au-delà du reniement des hommes, ont participé à tous les massacres du mouvement révolutionnaire. La lutte du prolétariat pour cesser précisément de demeurer du prolétariat se fera sans eux et contre eux et elle réclame donc leur anéantissement.

La mascarade électorale

Les élections constituent  un terrain de mystification destiné à perpétuer la dictature démocratique de la marchandise totalitaire librement circulante. Avec la séparation de plus en plus généralisée de l’homme et de son vivre, toute activité en s’accomplissant perd toute qualité humaine pour aller se mettre en scène dans l’accumulation de l’in-humain et le fétichisme du prix et de la facture. Chaque marchandise humaine, par la soumission mutilante aux cérémonies de l’ordre démocratique et électoral se fond ainsi dans la liberté du devenir-monde de la marchandise qui en réalisant le devenir-marchandise du monde organise la libre circulation des hommes en tant que disloqués d’eux-mêmes et  coupés des autres mais justement rassemblés ensemble et en tant que tels dans la production pathologique et infini de l’isolement narcissique dans le paraître de l’acquisition.

Le prolétariat n’a rien à faire sur le terrain de la votation qui organise les territoires de la Cité du maintien de l’ordre capitaliste, pas plus à participer qu’à s’abstenir. Il n’a pas non plus à l’utiliser comme une « tribune de propagande » car cela ne fait que renforcer le mythe du despotisme démocratique de la valeur et contribue à dissimuler la réalité de la lutte de classe qui doit viser, elle, à détruire ostensiblement tous les rapports marchands qui soumettent l’homme aux réclames du spectacle des objets.

Tous les partis politiques, grands, moyens ou petits, dans l’opposition comme au pouvoir, au national comme à l’international, de la gauche la plus licencieuse à la droite la plus chaste,  sont – en la synthèse de toutes leurs positions et oppositions – les chiens de garde solidaires du mouvement constant de monopolisation de l’histoire humaine par l’État de la marchandisation absolue et quand ils s’affrontent ce n’est qu’au sujet de la façon dont ils entendent dépouiller l’être humain de son humanitude.

À travers leurs multiples succédanés, les divers leurres réformistes de la politique du Capital n’ont servi qu’à museler le prolétariat en le liant à certaines fractions capitalistes artificiellement qualifiées en l’occurrence de moins nocives.

La lutte de classe radicale de l’être contre l’avoir se déroule en dehors de toute alliance politiste et combat tout ceux qui veulent soutenir, de façon « critique » ou non, la spécieuse idée que pourrait exister une démarche politique qui serait autre chose qu’une simple version du catalogue apologétique de l’humanisme de la marchandise. Le mouvement révolutionnaire vers l’autonomie ouvrière vise à réaliser la dictature anti-étatique du prolétariat, non point pour changer l’aliénation sous des formes aliénées mais pour abolir la condition prolétarienne elle-même et permettre à l’humain de se refonder communautairement sur la seule base de ses besoins génériques déliés de l’autocratie démocratique du solvable omni-présent.

La révolution pour la communauté de l’être

Elle ne vise pas à gérer d’une autre manière les réalités du marché et de l’échange puisqu’elle sait qu’il convient de les annihiler. Elle entend promouvoir le surgissement d’une communauté humaine véritable, affranchie des souffrances du compter, du spéculer et du bénéfice et apte à assumer les joies profondes de la vérité d’un plaisir et d’un besoin cosmiques anti-négociables. Elle est anti-politique car elle n’aspire pas à unifier le déchirement étatique de la vie et elle récuse tous les gouvernementalismes qui ne sont que les solutions de maintenance et de sauvetage du système de l’achat et de la vente de la vie confisquée par le travail du trafic. Elle a pour unique objectif : LA DESTRUCTION DU CAPITAL, DE LA MARCHANDISE ET DU SALARIAT SUR LE PLAN MONDIAL.

Pour cela, le mouvement social de l’humanité se dégageant de la marchandise en s’attaquant à l’ensemble des rapports capitalistes de l’aliénation  et pour passer au mode de production communiste de la communauté de l’être, sera contraint de détruire de fond en comble l’État, expression politique de la domination de la dictature du spectacle marchand et ceci à l’échelle de la planète. En effet pour se nier en tant que dernière classe de l’histoire, le prolétariat ne peut que s’affirmer d’abord en tant que classe-pour-soi de l’éradication définitive de toutes les classes et de toutes les impuissances et tricheries de la division hiérarchiste de la nature humaine dénaturée.

La pratique de l’intervention communiste

Elle est en même temps un produit du mouvement social de la crise historique de l’argent et un facteur actif dans le développement théorique-pratique général de ce mouvement à mesure que la politique de l’économie se montre incapable d’assumer les contradictions de l’économie de la politique et que ceux qui tentent encore de d’administrer le spectacle de la fausse conscience sont rattrapés par la conscience vraie de ceux qui ne veulent plus justement y être dirigés.

Les groupes ou éléments du courant révolutionnaire vers la communauté de l’être  ne sont pas en conséquence séparés de la classe en constitution subversive. Dès lors ils ne peuvent viser à la représenter, la diriger ou à s’y substituer.

Leur intervention en tant que moment du Tout le plus en dynamique de pointe radicale a pour axe principal la participation aux luttes du mouvement prolétarien contre le Capital tout en dénonçant systématiquement les mystifications de  réformation de la marchandise et toutes les idéologies de ses défenseurs au sein de ce mouvement.

Elle ne peut se concevoir évidemment qu’à l’échelle de la planète dans la perspective de la PRATIQUE  MONDIALE DU PROLÉTARIAT S’ABOLISSANT précisément en tant que PROLÉTARIAT, ceci contre tous les États et tous les interlocuteurs du marché de la politique et de l’autisme généralisé de la marchandise.

La communauté de l’être est cette critique charnelle, vivante, érotique et spirituelle qui renvoie à l’homme retrouvant la totalité de l’homme en un refus absolu des géographies de l’humain spolié et éparpillé  par les divisions travaillistes du labeur et du loisir, du manuel et de l’intellectuel,  de la campagne et de la ville telles que nées de l’émiettement et de la pulvérisation de l’existence qui est nécessairement appelée à devenir le territoire de tous les lieux de la centralisation morbide des arts de la marchandise.

La domination de la valeur est aujourd’hui en voie de total achèvement par le despotisme  spectaculaire de la démocratie pure de la marchandise qui est en train de définitivement faire disparaître ou absorber toute son antériorité… La droite n’a plus rien à préserver de l’avant-Capital pendant que la gauche n’a plus rien à en supprimer… Le Capital a ainsi lui-même liquidé la politique en absorbant tout ce qui permettait encore à la gauche et à la droite  de s’opposer complémentairement quant à la façon de gérer la servitude en la vie contrefaite… Il n’y a plus que la politique universelle de l’omnipotence de la marchandise dont droite et gauche ne forment plus que des écuries électorales de vacuité absolue et d’illusion industrielle… Le Capital n’a plus besoin de béquilles pour se mouvoir. Il est en train de se débarrasser de toutes les vieilles médiations idéologiques du passé… Il peut désormais organiser directement la non-vie de l’humanité par la seule action de la tyrannie de la valeur telle que le gauchisme sociétal de l’éternel présent de la marchandise désirante en a été le meilleur laboratoire de recherches infectieuses.

Nous assistons au commencement d’une nouvelle époque. Plus rien ne sera pareil à ces temps jadis où le monde n’était point encore devenu le total spectacle de la marchandise. Désormais, il n’est pas possible de s’attaquer sérieusement à un seul petit recoin de la misère humaine généralisée et des angoisses de l’homme perdu sans signaler du même coup que toute la vie sociale s’annonce comme une immense accumulation de souffles étouffés et coupés unifiés obscènement dans l’isolement concentrationnaire du marché des spectacle de l’image.

Dès lors celui qui ne se déclare pas comme choisissant la difficulté de la guerre au Tout de l’horreur méprisable du monde est condamné au prétexte de faire tout de suite quelque chose d’efficace, à seulement sombrer dans les facilités d’une simple et banale ré-écriture de l’empire de la passivité contemporaine.

La révolution pour la communauté humaine est toute entière contenue dans cette nécessité historique que l’humain ne peut jaillir qu’en tant que vécu des masses cessant pertinemment d’accepter de demeurer masses pour devenir hommes de la qualité brisant l’organisation quantitativiste du spectacle marchand de l’anti-vie humaine.

L’humanité prolétarisée, c’est à dire la classe universelle de tous les hommes exploités par la classe capitaliste du spectacle mondialiste de la marchandise, doit pour se nier en tant que tel, refuser d’admettre toute médiation entre elle et son auto-mouvement historique d’émancipation.

Cette auto-suppression du prolétariat comme émergence ontologique de l’être de l’homme réalisera dans le même mouvement la destruction des derniers épaves du racket politique, lesquels devront  – face au prolétariat se niant – s’unifier objectivement en un seul mouvement: celui de la contre-révolution universelle du Capital…

Avec la mort de la marchandise, ce sera la fin de la dictature de la quantité anti-humaine, la fin de la démocratie et de son ultime contenu : le spectacle totalitaire de l’individu solipsiste qui permettra la résurgence enfin parachevée de la vraie communauté de l’être ; celle de l’espèce en son devenir naturel d’authentique cosmos humain.

Écoutons la vaste colère qui commence à monter et aidons là à aller au bout d’elle-même dans la sensualité du vrai goût de vie contre tous ceux qui entendent l’emprisonner dans la gestion optimisée du commerce enjolivé de l’obscurantisme scientifique des calculs éternels.

NI PARTI, NI SYNDICAT, VIVE LA GUERRE DE CLASSE MONDIALE POUR LA FIN DU SPECTACLE DE  L’ÉCONOMIE POLITIQUE DE LA SERVITUDE EN L’OUBLI DE L’ÊTRE !

Paris, septembre 2010

Pour le collectif L’INTERNATIONALE, Gustave Lefrançais


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