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lundi, 20 novembre 2017

Ne pas toucher à nos traditions, même tauromachiques!

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Ne pas toucher à nos traditions, même tauromachiques!

Gustave Sintaud

Ex: https://metamag.fr

Certaines de nos plus anciennes traditions, rares encore comme la corrida, la chasse à courre, la chasse en tout genre, ont pu jusqu’à présent, contre vents et marées, se soustraire à la systématique d’un moralisme allogène, imposé aux peuples européens.

Aujourd’hui, ces quelques résidus de traditions ancrées localement se voient fustiger, avec la même hargne totalitaire, qui a fait abattre les arbres sacrés, a éradiqué l’hippophagie, par les effets laïcs d’une morale, venue d’un ailleurs lointain, de ces stériles déserts moyen-orientaux, secrétée par le monothéisme abrahamique et véhiculée, deux millénaires durant, par sa branche chrétienne. Ce vieux courant spirituel cherche à condamner ce qui lui a si longtemps résisté . Il veut enfin extirper ces durables traces de prétendue sauvagerie, inacceptable selon ces germes invasifs.

Alors, la SPA rejoint le concert des moralisateurs impérieux. Fort de son bon droit déclaré de société protectrice des animaux, elle n’hésite point à sortir de ses seuls objectifs statutaires d’action de sauvegarde en refuges, pour élargir son champ d’activité ; et pour le meilleur écho de sa démarche, elle commence par cibler le meurtre rituel du torro bravo dans l’arène. Son action intempestive pour l’interdiction de tout meurtre animal, rituel ou pas, comme de tout ce qu’elle décrète être des mauvais traitements que l’homme, de cette Europe réfractaire, « adore » faire subir aux animaux, veut initier une absolue opposition à la corrida, à la chasse à courre, à la chasse de loisir en général, même à l’abattage, pour bouche, des animaux spécialement élevés pour alimentation humaine, jusqu’au dressage des bêtes de cirque, et à l’incarcération dans jardins Zoologiques, ménageries et animaleries.

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Mais laissons là la pertinence ou la véracité des mobiles de cette association parfois opaque, dans ses nouvelles béances. Pourquoi chercher à lui reprocher une éventuelle nécessité de cacher ainsi de possibles échecs, ou de vouloir gagner médiatiquement en respectabilité …. Quoi de bon à s’échiner à défendre en contre -attaquant par la dénonciation du pourfendeur, quand il n’y a rien à défendre, seulement à montrer pour préserver le sujet outrageusement incriminé ?

Cette fois, comme l’attaque est directe, c’est bien de la corrida à interdire qu’il s‘agit, en priorité, pour son intangible notoriété

Cette course, d’origine espagnole du torro bravo, a gagné une bonne partie de la France méridionale, pour en devenir une tradition multi-séculaire, très enracinée pour s’y perpétuer avec un vivace engouement. Parmi les divers jeux taurins qui sont plébiscités dans ce sud de France, la corrida s’achève, elle, par la mise à mort de la bête indomptable, judicieusement et patiemment élaborée en granaderias, pour rester un fauve.

On peut fort bien comprendre et admettre qu’une sensiblerie exacerbée par un modernité soumise à un moralisme forcené du respect aveugle de toute vie, et du rejet du moindre écoulement de sang, puisse être heurtée par l’épée du toréro s’enfonçant dans le garrot du monstre qui peut saigner abondamment, ou par le coup de descabeillo pour mettre un terme aux spasmes nerveux quand la mort n’est pas immédiate.

Quand on ne veut rien comprendre de ce qui s’exprime dans l’arène, on ne voudra pas accepter la profonde vérité que traduit ce rituel macabre du taureau foncé, soumis et exécuté par l’homme courageux en habit de lumière : l’animal brutal signifie la lourde obscurité du terrible hiver dont délivre l’homme, symbole solaire, pour permettre l’avènement d’un renouveau ensoleillé. La première solennelle corrida se passe toujours à la féria pascale, et ouvre sur une période de clarté vivifiante. A partir de là, toutes les autres corridas poursuivent le même refus des forces primaires et gênantes, et cela jusqu’aux manifestations automnales et la perceptive du sombre retour des temps mornes et froids. Après, il est temps de ranger costumes étincelants, piques, capes et épées, jusqu’au retour de la belle saison !

Ce rite millénaire est attesté dans les tréfonds culturels, tant de l’indo-iranisme, une des expressions indo-européennes les plus excentrées, que de la civilisation vétéro-méditerranéenne : là, le meurtre rituel avestique du taureau noir par Mithra, le Dieu de première fonction, garant de l’ordre cosmique, et conservé bien vivace dans le mithriacisme hellénique et romain, surtout pour contrecarrer les progrès d’un judéo-christianisme très invasif déjà, et ici, depuis la Grèce archaïque, le mythe fondateur du héros Thésée qui châtie, dans son sombre labyrinthe, le monstrueux Minotaure, redonnant plein espoir à son peuple ; il est aidé par Ariane, en très douce aurore.

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Et pourquoi s’interdire un soupçon d’insolence provocatrice pour confirmer cette corrida, il est vrai et regrettable, aujourd’hui un peu trop oublieuse de sa grande implication européenne, avec ce qu’elle produit toujours ce qui marque le plus manifestement l’esprit indo-européen originel. Le roi, rex, rig ou rik était élu par ses pairs guerriers, en besoin communautaire ; était ainsi honoré celui qui était aussi chargé de l’avenir de son peuple ; ses qualités mises en valeur première lui valaient, avec son principat exécutif reconnu, la pleine et entière responsabilité de l’avenir de sa nation. Le roi désigné admettait que sa vie pouvait dépendre des fléaux rencontrés lors de son mandat royal, et qu’il pouvait servir, par le sacrifice de sa vie, à compenser tout malheur ou aléa désagréable subi communautairement.Son holocauste, le cas échéant, était le summum de l’honorabilité ; il s’offrait ainsi, sublimé par le haut rôle qu’il devait tenir. Et, quant la fonction royale vivante s’avéra indispensable, le meurtre expiatoire royal retomba sur un membre de sa royale progéniture, comme Iphigénie dut payer pour le manque de vents porteurs que l’on reprochait à Agamemnon, sur les côtes de l’Aulide, ce prince choisi comme roi des rois, pour l’expédition achéenne contre Troie. Mais la règle originale du sacrifice direct d’un roi peut encore s’entrevoir avec la solennelle reddition du chef arverne, Vercingétorix, élu comme roi des tribus gauloises, pour affronter les légions romaines ; moins bravache que résolu, il s’offrit ainsi, en seul responsable de la défaite, à la vindicte du vainqueur César.

Dans tous les cas, on allait au sacrifice expiatoire avec honneur et bravoure, l’honorabilité de donner sa vie et son sang dans l’intérêt général. De même, le torro bravo roi, pénétrant fougueux dans la place, le regard furibond et les naseaux écumants, va combattre en courant à la mort dans une splendide majesté. Il n’en a point conscience certes, mais peut se mesurer la particulière condescendance qu’on lui accorde pour mourir aussi pompeusement. Combien sa fin, organisée aussi glorieuse, est bien plus honorable que celle, sacrificielle qu’on généralisait par égorgements sur les autels, tout comme celle dans nos abattoirs modernes où défilent les animaux de boucherie. Le torro de la corrida est reconnu pour sa caste et sa bravoure ; on l’applaudit pour les hautes qualités de ses charges, on sait l’honorer, comme il se doit.

En regard de cette survivance d’un rite sacrificiel utile à la juste organisation d’une société installée et vivante, la récente prétention de la SPA se profile dans la droite ligne de ce qu’a voulu imposer la croyance au Dieu unique, confisquant à son profit toute révérence, et monopolisant, à son seul endroit, toute idée de sacrifice ; mais pour forcer la différence avec toute autre croyance, plus naturelle et quotidiennement vécue, le christianisme a rejeté tous les sacrifices sanglants, et transformé la chair animale à consommer, en pain à rompre entre catéchumènes, de préférence sans levain ni levure, et le sang s’écoulant, qui apure, en vin.

Après avoir discrédité l’inimaginable conception du sacrifice royal ou princier, le christianisme rayonnant s’est astreint à prohiber tous les autres sacrifices sanglants, humains et animaux, pour instaurer comme seul toléré, celui de denrées végétales transformées. Il s’acharnait, de la sorte, à transfigurer les communautés de vie résistantes, auxquelles le sacrifice lustral par le sang versé était nécessaire pour leur équilibre, leur quiétude et leur force, en une communauté de foi d’individus isolés, éperdus.

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Même si la SPA parmi tous les comités, les associations, les clubs, et tous les militants vomissant la corrida, pas tous fédérés dans l’historique et très agitatrice Alliance anti-corrida, basée à Nîmes, ni affiliés au Comité radicalement anti-corrida, pouvait créditer le rituel ancestral et très communautaire de ces courses taurines avec leur sanglant sacrifice final, son très nouveau courroux leur reprocherait, d’une part, l’aspect spectaculaire qu’elles offrent à un public bien plus large que leurs seuls aficionados et, d’autre part, la dimension artistique qu’on peut toujours leur accorder, à partir du grand respect d’un code très précis, ciselé, et du perfectionnisme recherché et attendu dans leur déroulement quasi chorégraphique. Toute son ire, pour faire mieux que sa rivale L214, se focalise contre leur potentiel plaisant et attractif, populaire ; voilà pourquoi elle décide à son tour, de porter plainte contre X devant la justice, en espérant une condamnation en droit, et d’agir en préparant une proposition de loi contre ces activités pourtant très réglementées juridiquement, bien que le Conseil Constitutionnel, déjà interpellé, les ait jugées conformes à la constitution française.

Pourquoi donc s’acharner pour tenter de démontrer, avec les torreristas, la beauté des formes dans les passes, les postures, les appels des hommes combattant la bête, et les charges réitérées de l’animal, sublimé par les torristas, sur les chevaux caparaçonnés des picadores armés, et sur l’écarlate muleta virevoltante. La ferveur palpable, l’émotion déclenchée, la liesse des saluts, la grande communion populaire accomplie suffisent largement à accorder à la corrida une profonde sympathie, et à plaindre l’hystérie qu’elle génère chez les soudards de l’anti-plaisir, de l’anti-popularisme, ces coincés, les frileux, les a-culturés.

09:49 Publié dans Sport, Traditions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : taureaux, tauromachie, traditions | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook