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samedi, 07 avril 2007

Une voix eurosceptique en Turquie

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Une voix eurosceptique en Turquie

 

ANKARA – Le chef de l’opposition turque Deniz Baykal ne croit pas à une adhésion de son pays à l’UE. La politique pro-européenne des milieux politiques turcs, qui sont favorables à l’adhésion, repose, « sur un espoir sans objet, sur une illusion » a déclaré fin mars le chef du parti populaire (CHP), dont les orientations politiques sont nationalistes de gauche. Après avoir examiné la proposition allemande d’un « partenariat privilégié », il a émis l’opinion suivante : « Ils nous disent que nous devons travailler, comme s’ils avaient l’intention de nous accepter quand même un jour ». Les déclarations de la Chancelière Angela Merkel relèvent toutefois d’un autre langage, pense Baykal, qui reproche ensuite vivement à l’UE d’exiger l’instauration de droits pour les minorités en Turquie car cette exigence mettra inévitablement l’unité de la Turquie en danger : « Le nationalisme est le ciment de la société turque. Il est la valeur fondamentale qui fait de nous ce que nous sommes », conclut Baykal.

(source : « Junge Freiheit », Berlin, n°14/2007).

 

Commentaires:

 

-          Prisonniers d’un discours „politiquement correct“ selon lequel personne ne peut émettre de critique à l’encontre d’une nation appartenant à l’aire civilisationnelle musulmane (sauf si les Etats-Unis l’autorisent), les dirigeants de l’UE n’osent pas dire leurs craintes de voir entrer la Turquie dans l’Union. Ce discours crée l’ambiguïté et le quiproquo permanent. Il faut y mettre fin afin de devenir enfin crédible.

 

-          La notion de « partenariat privilégié » est pourtant la notion la plus adéquate pour régler les futurs rapports entre l’UE et la République turque. Il s’inspire des projets allemands d’avant 1914, quand l’Empire ottoman, plus ou moins moribond, avait besoin de l’aide européenne pour se sortir de la profonde ornière où il s’était enlisé. En contrepartie, l’Europe centrale avait besoin du territoire ottoman et mésopotamien pour se porter vers l’Océan Indien et briser, en un point géostratégique important, l’arc territorial qui unissait cet Océan du Milieu sous la férule navale britannique, du Cap à Perth en Australie. Mais cette convergence d’intérêts ne signifiait pas (et ne doit toujours pas signifier) fusion irréfléchie d’éléments hétéroclites et irréconciliables. En ce sens, la notion de « partenariat privilégié », telle que l’utilise la Chancelière Merkel, est plus réfléchie et rationnelle que les rodomontades que l’on a toujours vivement reprochées à l’Empereur Guillaume II (en Palestine, à Constantinople ou au Maroc).

 

-          Le droit des minorités est un principe cardinal, sur lequel nous ne pouvons transiger, surtout dans l’espace couvert par l’actuelle république turque. Les Kurdes sont un peuple locuteur d’une langue indo-européenne, véhiculant des traditions admirables que nos ancêtres, eux aussi, ont partagé. Ils doivent pouvoir les exprimer sans restrictions, sous le regard bienveillant de toutes les puissances européennes (du moins si elles ne sont pas amnésiques…). De même pour les Arméniens et les Grecs d’Ionie, qui doivent, en plus, obtenir réparation pour les sévices que leurs grands-parents ont subis. Les Araméens également véhiculent des traditions proches de la véritable Europe, plus proche, en tout cas, que ne l’est le mixte boiteux et bizarre de musulmanisme sunnite, d’ottomanisme résiduaire, de kémalisme plus ou moins maçonnique et de panturquisme intrinsèquement hostile à l’Europe. C’est sans doute ce mixte-là que Baykal nomme le « nationalisme turc », ciment, dit-il, de l’unité sociale. Ce mixte confus, baptisé « nationalisme », n’a évidemment pas sa place en Europe. Surtout quand il alimente l’idéologie des bouchers d’hier et d’aujourd’hui, qui ont souillé l’honneur de leur drapeau en prétendant le servir. Nous pensons au journaliste arménien assassiné récemment avec une cruelle sauvagerie, comme le furent d’autres, lors des grands massacres perpétrés entre 1890 et 1923. 

 

-          Quant à l’unité de la Turquie, ce ne doit pas être le souci des Européens. L’Europe a intérêt à avoir une Asie Mineure morcelée en autant d’entités possibles, comme avant l’avènement des Osmanlis ou pendant la brève période de ressac au début du 15ième siècle, quand l’Anatolie, après une invasion calamiteuse par les hordes de Tamerlan, était soumise à quantité de séditions et de jacqueries, qui ont donné brièvement du répit à l’Europe, permettant même à nos Ducs d’envisager une reconquista via le Danube et d’encourager des corsaires en Mer Noire. La Turquie s’est ensuite redressée, pour notre malheur, la Grèce et Constantinople sont tombées entre ses mains entre 1435 et 1453. L’unité turque porte malheur à l’Europe. Son morcellement est au contraire un bienfait. C’est une loi inéluctable de l’histoire : il faut être capable de l’écouter.

06:15 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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