Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

lundi, 17 décembre 2007

Message révolutionnaire de Nasser

5daab7c84cda5acb4dd91af3daa79727.gif
Viktor STARK:

Le message révolutionnaire de Gamal Abd El Nasser

Le 23 juillet 2002 était le cinquantième anniversaire de la chute de la monarchie morbide et corrompue qui "gouvernait" l'Egypte. Elle fut aussitôt remplacée par un régime de libération nationale, qui a dégager le pays de la tutelle étrangère, qui a œuvré pour que le peuple arabe, partagé entre de nombreux Etats puisse se réunir dans un ensemble grand-arabe, harmonisé par un socialisme de facture nationale.

L'ascension de Nasser

Parmi les révolutionnaires qui débarrassent l'Egypte de sa monarchie corrompue, nous trouvons un officier de 34 ans: Gamal Abd El Nasser. Né dans une famille modeste du Sud de l'Egypte, il adhère aux principes et aux valeurs du nationalisme révolutionnaire dans sa jeunesse. Pendant la seconde guerre mondiale, il sympathise, de même que ses camarades, avec les Allemands. Ces jeunes officiers admirent le "renard du désert", le Feldmarschall Erwin Rommel; ils espèrent que cet Allemand audacieux vaincra l'Empire britannique en Afrique du Nord, car Londres place de facto l'Egypte, pourtant théoriquement indépendante, sous sa tutelle. Pendant la guerre contre Israël en 1948, Nasser se révèle comme l'un des plus courageux officiers de l'armée égyptienne et acquiert le surnom de "Tigre de Falluyah". Il est grièvement blessé.

Après la révolution de 1952, Nasser devient véritablement le chef de son peuple qui lui voue une vénération sans fard. Il représente également le mouvement des peuples non alignés, espoir de tous les peuples colonisés du monde, soumis aux diktats de puissances coloniales étrangères. Nasser meurt en 1970. Bon nombre des principes énoncés à l'époque par Nasser restent parfaitement actuels, surtout aux yeux de ceux qui, à gauche, critiquent à juste titre le "capitalisme sans frein" et la "globalisation néo-libérale".

L'Egypte et l'Allemagne

Les rapports germano-égyptiens reposent en ultime instance sur un événement historique, le même que celui qui a motivé l'action planifiée par les jeunes officiers révolutionnaires autour de Nasser, qui voulaient donner un autre destin à l'Egypte et à tout le monde arabe. Dix ans avant cette révolution, alors que l'armée germano-italienne de Rommel pénétrait en Egypte en 1942, Churchill, conscient du danger et des sympathies pro-allemandes des masses égyptiennes, lance un ultimatum: si l'Egypte ne se range pas immédiatement aux côtés de Londres et ne met pas un terme aux mouvements pro-allemands, l'Angleterre prendra toutes les mesures militaires pour "discipliner" le pays. L'armée égyptienne, mal équipée, ne pouvait absolument pas tenir tête aux Britanniques. Elle dut s'incliner. Pour bien montrer leur puissance militaire, les Anglais font encercler le palais du Roi Farouk par des blindés.

Le chef de l'état-major général égyptien, Aziz Ali al-Misri, qui était germanophile, le Premier Ministre Ali Maher (qui reprit brièvement son poste après la révolution de 1952), de même que bon nombre de leurs amis, ont été immédiatement internés par les Britanniques. Un groupe de jeunes soldats, dont Nasser, ont tenté, sans succès, de libérer Maher par un coup de force. Sadat, qui faisait à l'époque la liaison entre le mouvement arabe de libération et l'Afrika Korps de Rommel, participera également à la révolution nassérienne de 1952. En 1970, il sera son successeur à la tête de l'Etat égyptien. Les Anglais l'internent également en 1942. De la même façon, un an auparavant, Churchill fit décapiter un autre Etat arabe, par des mesures encore plus brutales: l'Irak pro-allemand de Rachid Ali el-Gailani. Dans ses souvenirs, Sadat fustige le comportement brutal des Anglais en Egypte et en Irak pendant la seconde guerre mondiale: il le décrit comme un mépris affiché, scandaleux et inacceptable du droit à l'auto-détermination.

L'Egypte révolutionnaire a toujours fait montre d'un respect profond et d'une admiration pour les soldats de la Wehrmacht; par exemple : le premier président du gouvernement révolutionnaire, Nagib, rédige en allemand un message de salutation en avril 1954 à l'adresse d'une organisation de vétérans de l'arme parachutiste allemande, assorti de sa photo et de sa signature personnelle. Les vétérans ont publié ce document à l'époque. En voici le texte : «Lorsque je salue mes parachutistes égyptiens, je salue en même temps votre commandant en chef, le Colonel-Général Student, ainsi que vous tous, qui avez combattu pour votre patrie au sein des formations parachutistes allemandes, dans l'espoir que les traditions de cette arme demeurent valides pour tous les temps». Le Général Kurt Student, qui est évoqué ici, était celui qui avait conquis la Crète au départ du ciel en 1941; en 1944, il était devenu le Commandant en chef de la Première armée parachutiste de la Wehrmacht; fin avril 1945, il devenait Commandant en chef du Groupe d'Armée "Vistule".

En Egypte, les mausolées et monuments pour les soldats allemands du désert sont nombreux; les dirigeants du pays, surtout Sadat, ont toujours manifesté clairement leur admiration pour les guerriers venus de Germanie. Le monument en l'honneur des soldats, morts en servant dans l'Afrika Korps à El Alamein, ainsi que le monument en l'honneur de Rommel à Tel el Eissa en témoignent. En 1989, on a restauré, non loin d'El Alamein, un monument en forme de pyramide à la gloire du pilote et as allemand que l'on appelait l'"étoile de l'Afrique"; on y lit en langues allemande, arabe et italienne: «C'est ici qu'est mort, invaincu, le Capitaine H. J. Marseille, le 30 septembre 1942».

Les succès intérieurs du nassérisme, l'opposition de l'étranger

Après que Gamal Abd el Nasser ait remplacé le Général Nagib à la tête du gouvernement révolutionnaire, le peuple l'élit Président d'Etat en 1956. Son gouvernement fut autoritaire; il jugula les menées de l'opposition en arguant qu'elle était "dirigée de l'extérieur", ce qui était vrai dans de très nombreux cas. Nasser procéda à des nombreuses réformes importantes en politique intérieure, surtout en ce qui concerne l'enseignement, la formation universitaire et la santé; il procéda également à une réforme agraire au profit des paysans pauvres; il a élargi l'espace habitable du pays en prenant des mesures d'irrigation de grande ampleur. Ces réformes ont fait de lui l'idole des masses. Sur le plan extérieur, Nasser s'est efforcé de parfaire l'unité des Arabes, notamment en forgeant l'Union avec la Syrie et le Yémen, considérée comme la première étape dans le rassemblement de tous les Arabes au sein d'un même état. Le projet a certes connu l'échec, mais suscité beaucoup d'espoirs. Nasser abat également les structures de domination étrangères qui demeuraient présentes dans la vie politique et économique égyptienne, de manière ouverte ou camouflée. Il convient de citer ici la nationalisation du Canal de Suez. Toutes ces mesures ont fait de Nasser un héros populaire dans tous les pays arabes.

Mais très rapidement après la révolution de 1952, des forces étrangères se coalisent contre la nouvelle Egypte. Pendant l'été de 1954, des agents des services secrets israéliens organisent une série d'attentats à la bombe au Caire; en février 1955, un commando israélien attaque Gaza. En 1956, les forces conjuguées d'Israël, de la Grande-Bretagne et de la France attaquent l'Egypte dans la zone du Canal de Suez. En faisant appel à l'ONU, Nasser oblige les agresseurs à se retirer. En 1967, éclate la guerre des Six Jours. Le monde occidental a toujours tenté de faire accroire l'idée qu'Israël lançait ainsi une guerre préventive pour annuler l'effet de surprise d'un plan égyptien et syrien visant à détruire l'Etat hébreu. En 1997, pourtant, le quotidien israélien Yediot Ahronot publie l'aveu de Moshé Dayan, à l'époque Ministre israélien de la défense: 80% des actions militaires syriennes ont été provoquées par Israël.

Face à l'attitude pro-israélienne militante des Etats-Unis, Nasser n'a pas eu d'autre solution que de se rapprocher de l'Union Soviétique. En même temps, il s'efforçait, sur la scène internationale, en tant que chef charismatique des "non alignés", de trouver une alternative viable au système bipolaire, conséquence de la seconde guerre mondiale, où seuls Moscou et Washington menaient le jeu.

Un "Raïs" légendaire

Après la lourde défaite subite par l'Egypte en 1967, Nasser avait décidé de se retirer du pouvoir, mais un vague sans précédent d'enthousiasme populaire, qui voyait en lui "le seul et vrai chef du pays", il accepte de rester en fonction. Ce qu'il fera jusqu'à sa mort en 1970. Arnold Hottinger, journaliste du quotidien helvétique Neue Zürcher Zeitung, écrit: «En dépit de tout, Nasser est resté l'homme auquel les peuples arabes et égyptien ont conservé leur confiance». Ce correspondant au Caire du journal suisse évoque plus en profondeur la personna­lité de Nasser, dans son article célébrant le cinquantième anniversaire de la révolution égyptienne: «Nasser reste toujours, aux yeux de la grande majorité des Egyptiens, et aussi de la plupart des autres Arabes, le plus grand homme d'Etat que le monde arabe a produit depuis la fin de l'époque coloniale». Les jeunes Egyptiens parlent encore et toujours du "Raïs", du "Chef". Et quand on leur demande: «Comment, tu es si jeune, tu n'as pas vécu à son époque!». Ils répondent : «C'est à son époque que j'aurais voulu vivre».

Viktor STARK.

(DNZ/München - n°32, 2 août 2002).

 

 

 

 

00:40 Publié dans Histoire, Hommages, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

Les commentaires sont fermés.