jeudi, 22 mai 2008
Le "Corridor 5", épine dorsale de l'Europe
De Barcelone à Kiev: le Corridor 5, épine dorsale de l'Europe
Depuis la préhistoire, depuis la nuit des temps, les marchandises voyagent par la plaine si c'est possible. L'ambre arrivait de la Baltique à Trieste, non pas en traversant les Alpes mais en les contournant. De même, plus tard, les vaisselles et les étoffes, ainsi que tous les chargements importants, venaient du Moyen Orient par les plaines d'Europe centrale, arrivant par mer ou par terre, en empruntant les trajets les plus aisés. Il ne faut pas croire que la vapeur, l'électricité et les moteurs à explosion y ont changé beaucoup. Les engins mus par ces énergies sont certes plus véloces (mais aussi plus polluants) que les chevaux, mais il n'en demeure pas moins que les trajets en plaine restent plus faciles et que toute ascension d'une montagne coûte de l'énergie, des salaires, du temps et de la fatigue physique.
L'Europe d'aujourd'hui n'est pas une famille unie mais bien plutôt une bande d'hyènes. Chaque hyène cherche à manger le plus de viande morte possible. Cependant, même la bande d'hyènes connaît des règles. L'Europe doit faire en sorte que les règles qu'elle s'est données demeurent certaines, fixes et sûres, autrement l'échafaudage fragile qu'elle constitue croulerait rapidement. Il y a quelques décennies, les choses n'étaient pas ainsi, mais aujourd'hui la jeune construction européenne intégrée est peu sûre et génère des rigidités rédhibitoires. Pourtant, il me semble difficile de changer le tracé du Corridor 5. Je n'ai pas dit que c'était impossible, je dis que c'est difficile. Or, nous, Européens, avons déjà perdu trop de temps. Beaucoup trop.
Pourquoi a-t-on pensé le Corridor 5? Pour unir Barcelone à Kiev (et demain à Moscou) et y faire circuler des marchandises, des personnes, des salaires, des idées, des entreprises, de la technologie de toutes les manières rapides possibles. En d'autres termes, il faudrait que les technologies, les salaires et le savoir-faire des provinces occidentales de l'Europe s'échangent contre des matières premières des provinces orientales (qui en sont riches). L'Europe, sur ce tracé, doit donc construire des chemins de fer, des routes et des aéroports qui fonctionneront dans des conditions optimales.
Ce corridor déplait à beaucoup de monde, c'est l'évidence. Il irrite plus d'une puissance en ce monde. Personnellement, je ne trouve pas scandaleux que la Slovénie, par exemple, en tire des avantages. De même, je ne m'insurge pas de voir le développement industriel dont bénéficie l'Autriche depuis la chute du Rideau de fer (…).
Je pense qu'il serait bon que tous comprennent très bien la situation et apprennent à dire les choses telles qu'elles sont, pour éviter les byzantinismes et, surtout, pour gagner des milliards. L'Europe gagnerait du temps (surtout qu'elle n'en a pas trop devant elle). Nous devrions éviter les défiances mutuelles et imaginer que des tiers profitent toujours de la situation en coulisses: ainsi, par exemple, la Slovénie dit avoir peur de perdre l'atout que constitue le port de Capodistria, si le chemin de fer transeuropéen aboutit à Trieste. A son tour, l'Italie est convaincue que derrière la Slovénie se profilent l'Autriche et l'Allemagne. Malgré ces tiraillements, le Corridor 5 deviendra une réalité, au nez et à la barbe des Américains. Le plus tôt sera le mieux.
Les ports sont les points naturels où arrivent et d'où partent les marchandises qui voyagent par mer (le plus gros pourcentage, voire la quasi totalité, des marchandises stratégiques). Sous-évaluer ou nier la valeur géoéconomique des ports relève de la mauvaise foi ou de la naïveté. A plus forte raison, vouloir décentrer le système portuaire de l'Adriatique septentrionale et l'éloigner du Corridor 5, c'est objectivement ôter à ce Corridor une ressource très importante et, en définitive, faire le jeu de ceux qui s'opposent à sa concrétisation définitive.
Par exemple, personne ne m'ôtera un doute de la tête: les incidents étranges et répétés survenus dans les tunnels sous les Alpes (en premier lieu, celui du Mont Blanc) et les dizaines d'incidents survenus au Val di Susa…
Finalement, le Corridor 5 est vital pour l'Europe en général et pour la Padanie en particulier. Nous devons donc mettre toutes nos forces en œuvre pour que le trafic entre Barcelone et Kiev puisse s'effectuer sans heurt pour le bien de tous les peuples d'Europe. Le Corridor 5 est notre histoire passée. Il est aussi notre avenir. Les polémiques anti-autrichiennes ou anti-serbes doivent être reléguées dans les chroniques annexes, subalternes, superficielles.
Je vous adresse un fraternel salut padanien et européen.
Fabrizio BELLONI, Secrétaire national de la Lega Nord à Trieste.
00:13 Publié dans Affaires européennes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europe, géopolitique, géo-économie, mitteleuropa | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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