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lundi, 18 février 2013

Israël: rien de nouveau sous le soleil!

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Bernhard TOMASCHITZ:

Israël: rien de nouveau sous le soleil!

Les élections pour la Knesset ont certes donné une nouvelle composition au parlement israélien mais la politique dure à l’égard des Palestiniens se maintiendra inexorablement

Benjamin Netanyahou est resté premier ministre en Israël après les élections du 22 janvier dernier.Ce n’est pas étonnant car tous prévoyaient, avant le verdict des urnes, la victoire de la coalition regroupant son parti, le Likoud, et les nationalistes de “Israel Beitanu” (Notre Maison Israël), menés par l’ancien ministre des affaires étrangères Avigor Liebermann. Ce qui est plus surprenant toutefois, ce sont les mauvais résultats de cette coalition: elle n’obtient que 31 sièges à la Knesset, soit onze de moins que lors de la législation précédente.

La seconde surprise nous a été fournie par Yair Lapid du parti libéral “Il y a un avenir”. Cet ancien modérateur de débats à la télévision avait lancé un mouvement nouveau et vient de glaner d’un coup 19 mandats, ce qui lui donne la deuxième place, avant le parti travailliste (15 sièges). La quatrième place est désormais occupée par Naftali Bennet, leader d’un mouvement ultra-sioniste, “Foyer Juif”, qui a obtenu douze sièges. Dans la nouvelle assemblée du Knesset, où plus de dix partis sont représentés, les droites, toutes nuances confondues, disposent de 61 mandats, ce qui ne leur donne qu’un très faible avantage: un seul siège en plus de la majorité sur les 120 sièges que compte le parlement israélien.

On ne sait pas encore trop bien à quoi ressemblera le nouveau gouvernement israélien. Mais une chose est sûre: la politique qui sera suivie dans l’avenir ne sera guère différente, surtout face aux Palestiniens. Lors de la campagne électorale, la thématique du “processus de paix” n’a été évoquée que de manière fort marginale, tandis que les problèmes sociaux qui frappent très durement la classe moyenne israélienne (coût de la vie sans cesse croissant, diminution drastique de l’offre en logements bon marché, fossé de plus en plus profond entre riches et pauvres, etc.) ont été à l’avant-plan. Lapid va devoir trouver des solutions, car c’est lui le candidat qui avait, plus que tout autre candidat, soulevé les problèmes sociaux pendant la campagne électorale; il n’exclut pas de former une coalition avec Netanyahou.

L’ancien et nouveau premier ministre poursuivra donc sa politique intransigeante face aux Palestiniens et, au pire, la durcira encore davantage. Pendant la campagne électorale, il avait donné son assentiment à la construction, illégale aux yeux du droit international, de colonies juives sur la rive occidentale du Jourdain, toujours occupée par l’armée israélienne. Dans un entretien accordé au quotidien “Maariv”, un journaliste lui demandait s’il pouvait promettre qu’aucune de ces colonies ne serait dissoute pendant les quatre ans à venir: Netanyahou a répondu sans hésitation et sans circonlocutions inutiles: “oui”. Cette affirmation impavide n’a pas trop rapporté de voix à Netanyahou, comme le montrent les succès de Bennet, jadis l’un de ses plus proches collaborateurs. Bennet a surtout engrangé des voix auprès des colons; pire: dans douze colonies juives de Cisjordanie, le Likoud a obtenu moins de voix qu’il n’a eu de membres jadis. Un membre du Likoud, Barak Herscowitz s’en plaint: “Depuis des années déjà, ce problème existe: les colons adhèrent au Likoud mais ne votent pas pour lui. Ce qu’il font n’est pas illégal mais ils prennent avantage d’une faille du système pour gagner en puissance et en influence en Israël”.

Pour que les électeurs traditionnels du Likoud ne passent pas en masse au “Foyer Juif” de Bennet ou à d’autres formations ultra-sionistes, Netanyahou sera obligé de pratiquer une politique très dure à l’endroit des Palestiniens. Par ricochet, ce durcissement prévisible entraînera de nouvelles tensions dans les relations, déjà fort refroidies, entre les Etats-Unis d’Obama et Israël. Washington, en effet, insiste pour que reprennent les négociations de paix entre Palestiniens et Israéliens et réclame à Tel Aviv qu’il soit mis fin à la construction de colonies en Cisjordanie, afin de créer de bonnes conditions pour un dialogue. L’Américain Robert Serry, coordinateur extraordinaire du processus de paix au Proche-Orient: “Si Israël prend au sérieux la solution dite des deux Etats, il doit reconnaître les effets négatifs d’une poursuite des constructions de colonies. Le sérieux des positions palestiniennes se manifestera si les Palestiniens s’abstiendront de lancer des actions à l’échelle internationale (ndlr: cet automne, la Palestine aura un statut d’observateur à l’ONU) quand commenceront les négociations”.

Mais Netanyahou, un faucon partisan de la ligne dure, ne cédera pas aux désirs de Washington. Finalement, la colonisation du territoire cisjordanien par les colons sionistes est un fait accompli. Les murs et les barrages routiers israéliens ont transformé le territoire palestinien en un tapis mité. Dans plus de 200 colonies vivent plus de 300.000 citoyens israéliens dans un pays qui, finalement, demeure occupé. Une organisation israélienne qui défend les droits de l’homme et qui s’appelle “B’Tselem” (= “Centre israélien d’information sur les droits de l’homme dans les territoires occupés”) ne ménage pas ses critiques à l’encontre de l’”unique démocratie” du Proche Orient: “Le grand nombre de colonies constitue une atteinte aux droits fondamentaux des Palestiniens, y compris au droit à la propriété, à l’égalité, à un niveau de vie convenable et à la liberté de circulation. Les conséquences désastreuses entrainées par la modification de la carte géographique de la Cisjordanie, perpétrée par les autorités israéliennes, empêchent les Palestiniens de jouir de leur droit à l’auto-détermination et de vivre dans un Etat palestinien viable”.

Ensuite, l’association “B’Tselem” reproche aux forces d’occupation israéliennes d’avoir créé en Cisjordanie un “régime de division et de discrimination”, sous lequel existent deux systèmes de droit différents pour un même territoire. Il y a donc un système pour les colons, “ce qui entraîne de facto l’annexion de leurs colonies à Israël et accordent aux colons les droits civiques d’un Etat démocratique”.

L’autre système repose , selon l’association israélienne “B’Tselem”, sur le droit militaire, ce qui fait que les Palestiniens “se voient privés de leurs droits et de toute possibilité d’exercer une quelconque action dans la mise en forme du pays, dans lequel ils vivent”. La critique de “B’Tselem” va même plus loin: “Sous un tel régime, des centaines de milliers de dunam (= 1000 m2) de terrains ont été volés, alors qu’ils étaient habités par des Palestiniens. Ces terrains ont été utilisés pour établir des dizaines de colonies qui ont été peuplées de centaines de milliers de citoyens israéliens”.

Au vu d’une telle politique d’apartheid, qui foule aux pieds le droit des gens, il est évident qu’Israël ne cherche  pas la paix et ne  veut pas d’un Etat palestinien indépendant. Au cours de ces vingt dernières années, le nombre de colons a triplé, ce qui signifie que les bulldozers israéliens sont toujours au travail en Cisjordanie, quelle que soit la situation politique, peu importe donc si le gouvernement de Tel Aviv  a une étiquette de gauche ou une étiquette de droite.

Bernhard TOMASCHITZ.

(article paru  dans “zur Zeit”, Vienne, Nr. 5/2013; http://www.zurzeit.at/ ).