Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

jeudi, 09 décembre 2010

Entretien avec Alexandre Belov: communauté païenne russe et arts martiaux

Archives de SYNERGIES EUROPEENNES - 1996

 

Entretien avec Alexandre Belov:

communauté païenne russe et arts martiaux

 

Q.: Qu'est-ce que le paganisme pour vous?

 

AB: Pour moi, le paganisme est en premier lieu la somme des expériences indépendantes vécues au fil de l'histoire par un peuple particulier, tant dans le contexte des processus vitaux que dans le domaine de la connaissance.

 

Q.: Comment le paganisme slave a-t-il pu survivre sous la férule du communisme?

 

AB: La dictature communiste n'a nullement contrarié les intérêts du paganisme slave. Il faut ajouter que l'athéisme commu­niste a permis de contenir les attaques chrétiennes contre la liberté de la connaissance. L'ère communiste a ainsi rendu un grand service au paganisme slave.

 

Q.: Quelle est selon vous la particularité du paganisme slave en comparaison avec les autres paganismes euro­péens?

 

AB: La particularité essentielle du paganisme slave est d'avoir cultivé radicalement la “grande idée barbare”, c'est-à-dire l'idée d'unir le Nord de glace à l'élément du feu. La variante russe du paganisme slave a joué un plus grand rôle historique dans les traditions d'Europe orientale que le paganisme slave en général, parce qu'il a réussi à conserver et à maintenir durant des siècles au moins trois linéaments païens fondamentaux: l'adoration du Soleil, de trois divinités associées et de Prav (*), c'est-à-dire l'adoration du Dieu du Tonnerre comme divinité principale assurant l'équilibre et l'harmonie de l'univers. Le der­nier avatar de Prav se retrouve dans la désignation en langue russe du christianisme d'Orient, Pravoslaviyé, soit “orthodoxie”. Le nom, au départ païen, a été volé par les chrétiens.

 

Q.: Quels ont été les réunions, rencontres ou événements qui vous ont conduit à créer la “Communauté Païenne Russe”?

 

AB: La création de la communauté païenne russe a été suivie par une deuxième naissance: la fondation d'un centre du culte pour toute la Russie, le sanctuaire de Peroun, Dieu du Tonnerre des Slaves anciens, à Radoucha. Cette fondation a été condi­tionnée, d'une part, par la nécessité de propager la tradition nationale du culte, et, d'autre part, par la nécessité de développer cette tradition en prenant en compte la dynamique du développement dans la société contemporaine.

 

Q.: Pouvez-vous nous parler de la nature particulière de l'Art Martial Slave, que vous pratiquez et enseignez, et la comparer aux arts martiaux orientaux?

 

AB: Goritsa est un art de combat qui récapitule l'expérience historique de la “lutte russe” et la connecte à cette “grande idée barbare” que je viens de vous évoquer. J'ai créé ce système de lutte et je m'en occupe depuis environ quinze ans. Je m'occupe plus généralement d'arts martiaux depuis 24 ans. L'une des particularités principales de Goritsa est d'utiliser les réflexes les plus caractéristiques des lutteurs cherchant à diriger l'attitude de leurs adversaires. Toutes les actions de l'adversaire relèvent de ce complexe que sont toutes les actions bio-mécaniques typiques. Cela permet d'attaquer un adver­saire en connaissant à l'avance ses réactions possibles. La Goritsa est un système unique de combat qui privilégie l'attaque. La Goritsa n'est donc pas un système d'auto-défense. Autre particularité de la Goritsa: ses sources remontent à la chevalerie et sont héritées du symbolisme physique de l'arme du combattant pendant la lutte. C'est là que réside toute entière la diffé­rence entre cet art martial et sa variante chinoise, qui imite plutôt l'attitude de l'animal. J'ai dénombré plus de vingt différences fondamentales entre l'art martial slave, la Goritsa, et les règles des arts martiaux extrême-orientaux.

 

Q.: L'Art Martial Slave est-il pratiqué aujourd'hui dans toute la Russie?

 

AB: Les objectifs et les tâches de la Goritsa sont difficiles à réaliser dans la Russie actuelle, parce que la caste militaire est déconsidérée par la propagande occidentaliste actuelle au profit d'une vision purement économiciste de la société, portée par les financiers qui ne s'intéressent pas aux arts martiaux.

 

Q.: Vous revenez d'un voyage en Italie. Vous y avez organisé des démonstrations et répendu votre enseignement. Que pensez-vous de l'expansion de l'Art Martial Slave en Europe?

 

AB: La campagne de promotion de la Goritsa en Europe est possible, même nécessaire, parce que cette méthode de combat exprime un mode de connaissance fondamentalement païen, partant non-conformiste dans le contexte actuel. C'est le meilleur moyen pour recréer une caste guerrière dans toute l'Europe, qui soit animée par des principes qui soient vraiment les siens.

 

Q.: En dehors de la Russie, quelles sont pour vous les traditions européennes les plus intéressantes?

 

AB: Ce qui m'attire dans la tradition païenne européenne, c'est surtout la beauté et la sagesse que l'on retrouve dans la poésie épique populaire. Nous découvrons là une éthique authentique. Non importée.

(propos recueillis par Jean de BUSSAC et traduit par Anatoli M. IVANOV).

 

(*) NDT: “Prav” est un terme difficile à traduire, emprunté au “Livre de Velès”, un faux devenu à mon grand regret très popu­laire parmi les néo-païens russes. “Prav” est à la racine des mots russes “pravy” (droit), “pravda” (vérité) et “pravoslaviyé” (orthodoxie).