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jeudi, 18 mars 2010

L'Egypte, nouvel allié d'Israël

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Matteo BARNABEI :

L’Egypte, nouvel allié d’Israël

 

Le Caire voudrait exclure le Hamas de la conférence de Tripoli – Le leader de la Ligue Arabe se tait

 

Sur l’échiquier du Proche Orient, l’Egypte pourrait bientôt assumer un rôle de plus en plus prépondérant dans un sens pro-américain et pro-israélien. L’Egypte, désormais proche des positions de Washington et de Tel Aviv, prendra-t-elle prochainement la place qu’occupait Ankara dans le dispositif américain, lorsque la Turquie était le principal allié d’Israël dans la région. La donne a changé depuis la nouvelle ligne politique adoptée par la Turquie à la suite de l’opération « Plomb fondu ». Durant l’offensive armée des forces israéliennes contre le Hamas dans la Bande de Gaza, le premier ministre turc Erdogan a exprimé clairement son désaccord face à cette initiative musclée, tandis que le président égyptien Hosni Mubarak donnait son appui inconditionnel à l’Etat hébreu. Cet appui allait jusqu’à tolérer le bombardement d’une petite portion du territoire national égyptien, proche de la Bande de Gaza pour permettre aux Israéliens de frapper et de détruire les tunnels qui reliaient l’enclave palestinienne au monde extérieur.

 

Depuis ce moment-là, les coopérations israélo-égyptiennes de cette nature se sont poursuivies. Il suffit de penser aux opérations conjointes de l’armée égyptienne, de Tsahal et des forces américaines et à la construction d’une barrière très contestée, dite « barrière d’acier », tout au long des limites de la Bande de Gaza. L’aide que fournit l’Egypte à Tel Aviv n’est pas seulement d’ordre logistique et militaire mais aussi d’ordre politique. C’est probablement ce facteur politique qui s’avèrera le plus déterminant, vu le rôle prépondérant que joue l’Egypte au sein de la Ligue Arabe, en tant que puissance fondatrice et grâce au soutien américain ; la Ligue Arabe, rappelons-le, a toujours été présidée par un Egyptien, mis à part de brèves parenthèses, l’une tunisienne, l’autre libanaise. Ces jours-ci, nous assistons à un exemple macroscopique de la bienveillance que Le Caire montre désormais à l’égard de Tel Aviv. L’Egypte, depuis quelque temps, critique sévèrement le rôle du Hamas dans le monde arabe et ne reconnaît pas la légitimité de son gouvernement. On s’en doute, mais sans plus, depuis que les Egyptiens dénoncent les tentatives de rapprochement entre le Hamas et ses rivaux du Fatah. Ainsi, par exemple, lorsqu’une délégation de la Ligue Arabe s’est récemment rendue à Gaza pour exprimer son soutien à la population palestinienne et à l’exécutif local face à la menace israélienne, on a dû constater l’absence du président de l’organisation, l’Egyptien Amr Mussa, alors que l’initiative était importante. Amr Mussa ne s’est pas exprimé sur la question et, malgré les invitations réitérées du Hamas, ne s’est jamais rendu dans la bande de Gaza. Vendredi 19 février, tous les doutes quant à la position réelle de l’Egypte se sont évanouis car les déclarations émises par les instances gouvernementales égyptiennes dans les colonnes du quotidien « Al Misriyoon » font clairement savoir que la présence du mouvement islamiste palestinien au pouvoir à Gaza lors du sommet arabe qui se tiendra le mois prochain à Tripoli n’était pas souhaitée, vu qu’elle « pourrait avoir un impact négatif sur les négociations inter-palestiniennes ».

 

Les dirigeants égyptiens contestent la présence des délégués du Hamas lors de cette rencontre dans la mesure où seuls des représentants gouvernementaux y ont théoriquement accès. Il nous paraît inutile de rappeler que c’est le Hamas qui a gagné les élections en 2006, élections qui se sont tenues sous le regard d’observateurs internationaux, et non pas le mouvement guidé par l’actuel président de l’ANP, Mahmud Abbas. L’Egypte tire quelques bénéfices de son attitude. Contrairement à ce qui se passe en Iran, où le président a été élu par le peuple lors d’élections régulières, et où chaque fois que la police disperse une manifestation non autorisée, on crie au scandale et à la violation des « droits de l’homme », en Egypte, le pouvoir peut garder sa forme purement dictatoriale, sous un masque à peine dissimulant de démocratie. Chaque fois qu’il y a une élection en Egypte, personne ne se présente contre Mubarak et si, par hasard, quelqu’un venait à protester, il serait aussitôt arrêté. Cette situation n’intéresse ni Tel Aviv ni Washington ni aucun de leurs très fidèles alliés. Le gouvernement égyptien interdit toute manifestation en faveur du retour au pays de Muhammad el Baradei qui souhaiterait défier le président égyptien actuel lors de prochaines élections ; c’est anti-démocratique mais personne n’évoque cet interdit dans les milieux politiques conformistes en Europe ou ailleurs. Personne non plus, ni chef de gouvernement ni parti politique ni association humanitaire, n’a protesté contre l’arrestation de trois jeunes femmes coupables d’avoir manifesté en brandissant un portrait de l’ancien président de l’AIEA. Evidemment, puisque l’Egypte rend désormais de bons services à Washington et à Tel Aviv.

 

Il est temps que tombe le masque d’hypocrisie qui recouvre les yeux de tant d’observateurs politiques officiels et que l’on se rende compte que, dans les crises politiques internationales, notamment dans l’actuelle crise iranienne, l’intérêt véritable n’est pas le contenu de la déclaration des droits de l’homme  ou les principes de la liberté civile mais uniquement l’argent. [On apprend par ailleurs qu’un accord  sera signé entre l’Egypte et la Jordanie, d’une part, et Israël, d’autre part, pour la construction de nouvelles centrales énergétiques. Le site de la principale centrale sera situé sur le territoire égyptien, produira de l’électricité pour l’Egypte et pour Israël et vendra le surplus aux pays voisins sauf à la Bande de Gaza, précipitant cette dernière dans une précarité de plus en plus problématique…].

 

Matteo BARNABEI.

(article paru dans le quotidien « Rinascita », Rome, 20/21 février 2010 ; http://www.rinascita.eu/ ).

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