samedi, 10 septembre 2011
Un Quatre Septembre à l'envers
Un Quatre Septembre à l’envers
par Georges FELTIN-TRACOL
De nombreuses villes françaises comportent une rue en l’honneur du 4-Septembre. Or très peu de personnes en connaissent la signification. Par cette appellation, on tient à célébrer la proclamation de la IIIe République en 1870 à Paris. Il est rare en revanche de trouver des rues mentionnant le 22 septembre 1792 (naissance de la Ire République) ou du 25 février 1848 (pour la IIe République). Quant aux IVe et Ve Républiques, elles n’ont jamais été proclamées, même s’il fut prévu de le faire en 1944 depuis le balcon de l’hôtel de ville de la Capitale. De Gaulle rejeta la proposition parce qu’il s’estimait représenter la République depuis le 16 mai 1940
La venue de la IIIe République, le 4 septembre 1870, fut inattendue tant le Second Empire paraissait consolidé pour une décennie au moins. Le 8 mai précédent, un plébiscite organisé par Napoléon III sur les réformes de l’Empire libéral obtenait environ 7 358 000 oui contre 1 572 000 non. Le parti du non, les républicains, sortit de la consultation dépité, las, désespéré même, par l’éclatant succès impérial. Or, quatre mois après, profitant des défaites militaires françaises face aux armées germano-prussiennes et, en particulier, de la chute de Sedan avec Napoléon III fait prisonnier, le camp républicain tenait sa vengeance et, au mépris du récent résultat plébiscitaire, prononçait la déchéance du Second Empire et imposait un nouveau régime.
Certes, entre 1870 et 1879, cette république fut une « république de ducs » dominée par une majorité royaliste et présidée par un maréchal de France au cerveau de cheval. Jusqu’en 1879, le Parlement siégeait à Versailles et le troisième paragraphe – jamais modifié – de l’article Ier de la loi constitutionnelle du 16 juillet 1875 stipulait que « le dimanche qui suivra la rentrée, des prières publiques seront adressées à Dieu dans les églises et dans les temples pour appeler son secours sur les travaux des Assemblées » ! Ce ne fut qu’en 1879 – 1880 que la majorité dorénavant républicaine imposa le 14 juillet et La Marseillaise comme fête nationale et hymne officiel. Au cours de la décennie 1870, profitant des féroces dissensions au sein de la famille royaliste, les républicains donnèrent aux électeurs une image de sérieux et de respectabilité si bien qu’ils engrangèrent les victoires électorales partielles avant de remporter les législatives de 1876 et de 1877.
Il ne faut pas cependant croire, comme l’affirment d’une manière sotte et péremptoire Joseph Beauregard et Nicolas Lebourg, que le « 4 septembre 1870 : c’est la date de naissance de la IIIe République – autoritaire, laïque, patriote et sociale (dans Le Monde Magazine, 30 juillet 2011) ». Autoritaire, la IIIe République ? À part de l’élimination voulue des langues vernaculaires, elle se caractérisa par une instabilité parlementaire chronique compensée par des personnalités de grand caractère. Laïque ? Pas avant la réforme constitutionnelle de 1879 et les lois scolaires de Ferry en 1881 – 1882. Patriote ? Oui, si on confond ce terme avec un revanchisme dément et un antigermanisme primaire. Sociale ? Nullement, si on la compare avec les avancées sociales de l’Allemagne bismarckienne. Souvenons-nous des fusillades de Decazeville en janvier 1887, du 1er mai 1891 à Fourmies, de Villeneuve – Saint-Georges et de Draveil en 1908 ainsi qu’à la belle mais vaine révolte du Midi de 1907. La IIIe République était profondément conservatrice, bourgeoise et bornée.
Dans la perspective de l’élection présidentielle de 2012, politologues et journalistes en mal de sensations fortes (ils n’osent quand même pas s’aventurer en Afghanistan…) évoquent parfois les possibilités d’un nouveau 21 avril ou d’un 21 avril à l’envers. Dans la première hypothèse, le second tour opposerait Nicolas Sarkozy à Marine Le Pen tandis que dans la seconde, Marine Le Pen affronterait le candidat socialiste.
Plutôt que d’entretenir une gesticulation électorale médiocre, le mouvement non-conformiste, identitaire, populiste, radical et solidariste devrait dès à présent penser à l’éventualité d’un 4 septembre à l’envers. C’est-à-dire ? Même sanctionné récemment et régulièrement par le suffrage, un régime politique reste fragile surtout si un aléa majeur vient à le déstabiliser comme la prise de Sedan et l’arrestation de l’Empereur par les Prussiens par exemple. Détestant le Second Empire et récusant toute union nationale sous l’autorité de l’impératrice – régente ou du jeune prince impérial, les républicains firent passer en priorité leur haine du régime sur l’intérêt national. Quelle leçon de réalisme politique !
Au lieu de se perdre dans des campagnes électorales dispendieuses marquées par un gaspillage considérable de temps, d’énergie militante et d’argent, la Rébellion radicale, identitaire et sociale devrait agir dans quelques créneaux métapolitiques fructueux en labourant les champs de l’esprit. À savoir :
— insister sur la formation militante par le biais de radios hertziennes (Radio Courtoisie) ou sur Internet (Radio Bandiera Nera, Europa Radio, l’émission « Méridien Zéro »), de revues (Éléments, Réfléchir & Agir, Flash, Faits et Documents, Krisis, Nouvelle École …), de livres (l’excellent Eurocalypse du collectif Solon), des sites Internet (Vox N.-R., Euro-Synergies, Polémia, blogue de Yann Redekker…), de cercles informels de lecture, d’écoute et de discussion;
— promouvoir l’aide sociale aux plus défavorisées comme le font déjà Solidarité populaire, Action populaire et sociale ou Solidarité des Français;
— faciliter la mise en place de structures réticulaires efficientes en prise dans le quotidien avec la constitution de coopératives d’achats, de ventes, etc., afin de faire travailler et vivre les nôtres (soutien à des A.M.A.P. pas exclusivement agricoles, créer des lieux de convivialité comme le font les Identitaires de Paris avec la Barricade, de Lyon avec La Traboule, le Local 92 de Serge Ayoub à Paris, etc.).
Comme l’exprime fort bien dans un article essentiel de Michel Drac dans Rébellion (n° 49, juillet – août 2011), la priorité revient désormais à la formation, partout où c’est possible, de Bases autonomes durables (B.A.D.). Certaines réalisations sont déjà en cours, qu’elles soient visibles ou plus discrètes.
Toutes ces initiatives visent à reconstituer un tissu social dissident dense à l’échelle locale afin de permettre une meilleure diffusion – réception de nos idées. Ce n’est qu’à et par la base qu’elles seront légitimées et prendront une valeur alternative à la société présente. Le travail peut paraître long, ingrat, fastidieux; il est plus important qu’une participation électorale aléatoire.
N’écartons pas cependant de nos pensées que le Kairos cher aux Grecs qui peut surgir à tout moment. Au XXe siècle en France, cet instant décisif fut à chaque fois parasité par un homme providentiel. N’en déplaise à la Gôche et à l’Université, délaissons immédiatement le 6 février 1934, les 21 – 26 avril 1961 et Mai 1968. Le 6 février 1934 n’a jamais été une tentative de coup d’État fasciste de la part de Ligues désunies, mais l’impitoyable répression policière de manifestants en colère contre les turpitudes politiciennes d’alors. Les plus récentes recherches historiques démontrent l’impréparation, l’amateurisme et la désorganisation, tant matériel que psychologique et politique, du putsch d’Alger des 21 au 26 avril 1961 dont l’objectif n’était pas la conquête du pouvoir, mais une sorte de rappel aux promesses du 13 mai 1958 en faveur de l’Algérie française. Quant à Mai 1968, malgré le passage secret et furtif de De Gaulle à Baden-Baden, jamais le régime ne vacilla : Georges Pompidou agissant pour la circonstance en renard matois. non, les deux seuls occasions de basculement se jouèrent en mai – juin 1940 et au 13 mai 1958. Or, pour ces deux circonstances exceptionnelles, Philippe Pétain et Charles de Gaulle firent don de leur personne à la France et parvinrent à canaliser les mécontentements à leur profit.
De pareils géants historiques n’existent pas aujourd’hui ! Voit-on vraiment V.G.E., Chirac, Rocard, Mauroy en recours suprême en cas de péril majeur ? Quant aux prétendants (le duc d’Anjou Louis-Alphonse de Bourbon, le prince impérial Charles Bonaparte, le duc de Vendôme Jean d’Orléans), les Français dans leur majorité ne les connaissent pas et pourraient même les considérer comme des anachronismes vivants. Non, s’il survenait une nouvelle et terrible « Débâcle » politique, économique, financière, voire militaire, il reviendrait à une élite militante sûre et déterminée de s’affirmer dans le chaos ambiant. Les B.A.D. en constitueront les socles indispensables à notre survie. Une grande école française proclame : « Ils s’instruisent pour vaincre ». Qu’on s’instruise donc chez soi ou dans les B.A.D. afin de vaincre ensuite ! Et scrutons toujours l’horizon qui se couvre lentement d’orages salutaires. Les terribles vents de l’histoire souffleront bien, tôt ou tard, dans notre direction…
Georges Feltin-Tracol
Article printed from Europe Maxima: http://www.europemaxima.com
00:10 Publié dans Histoire, Réflexions personnelles, Théorie politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, réflexions personnelles, troisième république, france, europe, affaires européennes | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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