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jeudi, 24 novembre 2011

Le piège kosovar

 

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Bernhard TOMASCHITZ:

Le piège kosovar

L’Europe des eurocrates soutient la politique pro-kosovar des Etats-Unis et nuit aux intérêts de notre Europe!

Le Kosovo ne parvient pas à se stabiliser. Les Serbes du Nord de ce nouveau pays bloquent les routes pour obliger les douaniers kosovars-albanais à se retirer et à ouvrir ainsi les postes frontières avec la Serbie. Les Serbes du Kosovo veulent que la situation dans la zone frontière redevienne comme avant le 25 juillet, c’est-à-dire sans la présence de douaniers kosovars-albanais. Les Serbes entendent ainsi empêcher toutes les mesures visant à consolider l’indépendance du Kosovo albanais, proclamé unilatéralement en février 2008.

La communauté internationale veut aider à construire un “Etat multi-ethnique” viable dans cette ancienne province du Sud de la Serbie: elle tente de l’imposer par une armée internationale, la KFOR, et par la mission EULEX, mandatée par l’UE pour établir un “Etat de droit”. En agissant de la sorte, la communauté internationale se place résolument du côté des Albanais. Ce ne devrait pas être un motif d’étonnement: les Etats-Unis, qui donnent toujours et partout le ton, ne viennent-ils pas de déclarer sans ambages en juin dernier, qu’une éventuelle partition du Kosovo n’était pas envisageable. “Une partition du Kosovo pourrait entraîner des effets à l’échelle locale qui pourrait s’avérer négatifs pour toute la région”, a déclaré Philip Gordon, vice-ministre des affaires étrangères, responsable pour les affaires européennes. Et il concluait: “Cette position est claire pour les Etats-Unis et elle le restera”. La Russie, on peut s’y attendre, ne comprend guère la position adoptée par les Etats-Unis et l’UE. La Russie est une alliée traditionnelle de la Serbie. Alexandre Lukachevitch, porte-paroles du ministère russe des affaires étrangères, voit là “des conséquences négatives considérables pour tout règlement futur de la question kosovar”, vu “le soutien accordé aux ambitions démesurées des Albanais du Kosovo”.

Malgré l’absence totale de succès de l’Etat kosovar, Américains et eurocrates s’accrochent au statu quo présent et oublient que le Kosovo dépend financièrement de la communauté internationale et est entièrement aux mains de la criminalité organisée. Mais les Etats-Unis tirent profit de cette situation à plus d’un titre: d’abord, les Albanais du Kosovo constituent un gage pour pouvoir, le cas échéant, punir Belgrade si les Serbes adoptent un comportement jugé déviant, comme par exemple un alignement trop prononcé sur Moscou. Washington a depuis longtemps décidé que la Serbie devait être inféodée aux “structures euro-atlantiques”, ce qui ôterait à la Russie son allié le plus sûr en Europe. Ensuite, la question kosovar offre à Washington la possibilité de saboter tout rapprochement entre l’UE et la Russie.

Par ailleurs, il s’agit d’attiser les conflits ethniques et religieux dans les Balkans et de les faire durer car, de cette façon, les Etats-Unis pourront arguer de la nécessité de leur présence dans la région. Manifestement, les Américains poursuivent le plan d’installer au beau milieu du Kosovo le fameux “Camp Bondsteel”, une base militaire capable d’abriter 5000 soldats sur une surface de 386 hectares, et d’en faire un élément permanent de leurs dispositifs en Europe. Pour les Américains, il sera plus facile de parachever leur politique balkanique si cette région comporte des constructions étatiques fragiles et instables comme la Bosnie-Herzégovine et le Kosovo, dont ils pourront faire des vassaux obéissants, qui exécuteront sans trop tergiverser les ordres de Washington. En juin dernier, Gordon, vice-ministre des affaires étrangères aux Etats-Unis, a déclaré, à propos de la Bosnie, qui devrait adhérer à long terme à l’OTAN comme tous les autres Etats des Balkans: “Des Balkans où il y aurait des frontières tracées autour de chaque groupe ethnique nous conduiraient à la catastrophe. En tous les cas de figure, ce n’est pas là un projet que nous soutiendrons”.

Finalement, les Etats-Unis tentent d’établir en Europe des Etats dits “multi-ethniques”, comme la Bosnie ou le Kosovo qui sont majoritairement musulmans, afin que deux corps étrangers soient implantés au sein de la communauté des Etats européens avec la circonstance supplémentaire qu’ils attireront à eux les “sociétés parallèles” (soit les “diasporas mafieuses”) de confession musulmane qui étendent leurs réseaux dans toute l’Europe (avec l’appui d’Erdogan, Gül et Davutoglu, ndt) et disposeront ainsi de deux sanctuaires.

Au vu de tous ces faits, il apparaît incompréhensible que l’eurocratie bruxelloise soutienne sans sourciller la politique kosovar des Etats-Unis. James Bissett, ancien ambassadeur dans l’ex-Yougoslavie, s’est exprimé à ce sujet: “Depuis qu’il prétend s’être libéré de la Serbie, le Kosovo est devenu un Etat failli avec un taux très élevé de chômage, où dominent la corruption et la criminalité, avec des dirigeants qui sont profondément impliqués dans l’importation d’héroïne et d’armes ainsi que dans le trafic de chair humaine”. A cette forte parole de Bissett s’ajoute encore une flopée de reproches à l’adresse de Hashim Thaçi, chef du gouvernement du Kosovo, qui s’est livré au trafic d’organes et à d’autres activités illégales.

Malgré ces accusations graves, Thaçi et d’autres dirigeants kosovars sont carressés dans le sens du poil par les eurocrates et les Américains, car les anciens combattants de l’UÇK, l’armée de l’ombre avant l’indépendance du Kosovo, sont considérés comme des “héros” de la démocratie. Il est intéressant d’observer que l’UÇK est bien vite passé du statut de paria à celui d’allié bénéficiant d’une haute considération. En 1998 encore, un rapport du ministère américain des affaires étrangères considérait que cette armée clandestine kosovar était “terroriste” et constituait un élément-clef dans le commerce illicite de drogues en échange d’armes, trafic qui avait contribué chaque année “à transporter des drogues pour une valeur totale de deux milliards de dollars américains en Europe occidentale”.

Il n’a pourtant pas fallu attendre un an pour que l’UÇK bénéficie de l’aide américaine dans la guerre de l’OTAN contre la Serbie, guerre contraire au droit des gens. D’après le “London Sunday Times”, des agents des services secrets américains ont avoué avoir aidé l’armée de libération du Kosovo, c’est-à-dire l’UÇK, à s’entraîner. A cette époque déjà, on soupçonnait les Etats-Unis de vouloir établir une base militaire fort importante au Kosovo.

Bernhard TOMASCHITZ.

(Article paru dans “zur Zeit”, Vienne, n°45/2011, http://www.zurzeit.at/ ).

 

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