Un enseignant vient de saisir sa plume pour dire tout le mal qu’il pense de la politique d’enseignement.
Un brûlot qui s’en prend aux théoriciens de l’école.
«Je suis un gentil. Je n’aime pas m’opposer aux personnes. Mais il y a un moment où il faut sortir du consensus et dire quand quelque chose ne va pas.» Le moins que l’on puisse écrire, c’est que Frank Andriat a tenu parole. Ce professeur de français, auteur d’une trentaine de livres, vient de publier un pamphlet d’une centaine de pages découpé en dix commandements, dans lequel il crie sa «colère» envers la politique d’enseignement menée depuis une vingtaine d’années en Belgique francophone.
Frank Andriat aime l’école. Et, plus que tout, son école, l’athénée Fernand Blum, à Schaerbeek. Un établissement réputé difficile que l’enseignant fréquente depuis 43 ans. Il était alors adolescent. Mais après 33 ans de carrière, l’homme a décidé de sortir du bois. Et, il n’y va pas de main morte : «Il aurait peut-être été bon d’en nuancer certains passages (NDLR : du livre), mais j’ai voulu lui conserver la colère qui l’a fait naître. »
« On va où ? On en a marre »
Cette colère est le fruit d’une accumulation de décisions venues de l’administration, de frustrations face à des décrets toujours plus nombreux que l’homme a vus défiler au cours de sa carrière. Et qui l’ont mené à se poser une question : «On va où? On en a marre.»
«On va de réforme en réforme, ou plutôt devrais-je dire de réformette en réformette. En bon citoyen, j’ai appliqué les décrets, j’ai respecté les lois. J’ai fait avec. Et puis maintenant, je me rends compte que c’est de plus en plus difficile.»
«Ce livre, c’est le coup de gueule. Depuis une vingtaine d’années, l’école est transformée en laboratoire. Les élèves sont les cobayes, les professeurs sont les laborantins.»
Frank Andriat n’est «pas nostalgique» pour autant. L’école de papa avait ses travers. Mais elle avait au moins le mérite d’apprendre l’essentiel aux enfants. Aujourd’hui, dénonce l’auteur, «l’école est devenue le temple de la réussite, un effroyable mensonge qui, de manière hypocrite, a repoussé les situations d’échec vers l’enseignement supérieur et l’université.»
« Arrêter de tout compliquer »
Un constat impitoyable imputé aux «pédagogues intégristes» (sic), «à ces didacticiens qui ont pris l’école en otage avec l’assentiment irresponsable, criminel des politiques.» Des personnes certes «très intelligentes» mais qui ne connaissent rien aux réalités de terrain.
Pour Frank Andriat, «il faut aller plus loin. Et aller plus loin, explique-t-il, c’est arrêter de tout compliquer.» Car, poursuit-il, «pour être un bon prof, il faut être à l’écoute. C’est dans cette dynamique que je voudrais me retrouver sans avoir à appliquer au quotidien des recettes de cuisine. Des bonnes idées de personnes qui n’ont jamais enseigné.»
«Les profs au feu et l’école au milieu», à la Renaissance du livre.
Les commentaires sont fermés.