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samedi, 13 mai 2023

Quand Emmanuel Kant dénonce la dette et le colonialisme occidental…

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Quand Emmanuel Kant dénonce la dette et le colonialisme occidental…

par Nicolas Bonnal

Projet de paix perpétuelle : un texte célèbre et mal lu. Car le plus grand esprit du siècle tord le cou aux Occidentaux : voyons ce qu’il dit de la dette (qui en Occident signifie la richesse de la nation, plaisante Marx dans le Capital, VI) :

« Chercher des ressources au dedans ou au dehors dans l’intérêt de l’économie du pays (pour l’amélioration des routes, la fondation de nouvelles colonies, l’établissement de magasins pour les années stériles, etc.) ne présente rien de suspect. »

Mais la menace arrive avec l’Angleterre, qui bâtit son empire et ses guerres napoléoniennes avec sa dette immonde ; Kant s’inquiète :

« Mais il n’en est pas de même de ce système de crédit, — invention ingénieuse d’une nation commerçante de ce siècle, — où les dettes croissent indéfiniment, sans qu’on soit jamais embarrassé du remboursement actuel (parce que les créanciers ne l’exigent pas tous à la fois) : comme moyen d’action d’un État sur les autres, c’est une puissance pécuniaire dangereuse ; c’est en effet un trésor tout prêt pour la guerre, qui surpasse les trésors de tous les autres États ensemble et ne peut être épuisé que par la chute des taxes, dont il est menacé dans l’avenir (mais qui peut être retardée longtemps encore par la prospérité du commerce et la réaction qu’elle exerce sur l’industrie et le gain). »

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Qui dit dette dit en effet guerre, et une guerre éternelle comme celle menée par les pays anglo-saxons :

« Cette facilité de faire la guerre, jointe au penchant qui y pousse les souverains et qui semble inhérent à la nature humaine, est donc un grand obstacle à la paix perpétuelle… »

La paix perpétuelle ne peut se faire que sans l’Occident : on le sait maintenant. Un total écroulement financier et économique de ce tordu pourra seul établir la paix dans le monde. Voilà pour la dette.

Et puis Kant pousse plus loin : il se rend compte des mauvaises manières (on ne dit pas encore coloniales) des Occidentaux. Et cela donne :

« Si maintenant on examine la conduite inhospitalière des États de l’Europe, particulièrement des États commerçants, on est épouvanté de l’injustice qu’ils montrent dans leur visite aux pays et aux peuples étrangers (visite qui est pour eux synonyme de conquête). L'Amérique, les pays habités par les nègres, les îles des épiceries, le Cap, etc., furent, pour ceux qui les découvrirent, des pays qui n'appartenaient à personne, car ils comptaient les habitants pour rien. »

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Kant dénonce le désordre et le chaos amené partout par les « civilisateurs occidentaux » :

« Dans les Indes orientales (dans l’Indoustan), sous prétexte de n'établir que des comptoirs de commerce, les Européens introduisirent des troupes étrangères, et par leur moyen opprimèrent les indigènes, allumèrent des guerres entre les différents États de cette vaste contrée, et y répandirent la famine, la rébellion, la perfidie et tout le déluge des maux qui peuvent affliger l’humanité. »

Après des pays plus lointains et plus puissants se méfient – et comme on les comprend :

« La Chine et le Japon, ayant fait l’essai de pareils hôtes, leur refusèrent sagement, sinon l’accès, du moins l'entrée de leur pays ; ils n’accordèrent même cet accès qu’à un seul peuple de l’Europe, aux Hollandais, et encore en leur interdisant, comme à des captifs, toute société avec les indigènes. »

Mais la Chine sera économiquement anéantie au siècle suivant (perdant 90% de sa capacité productive grâce toujours à la civilisatrice Angleterre qui affame l’Inde) et le Japon finira en 1945 comme on sait après avoir mal copié l’Occident et avoir été poussé à faire la guerre à la Russie en 1905.

Et Kant note le caractère dérisoire de ce développement à l’occidentale :

« Le pire (ou, pour juger les choses au point de vue de la morale, le mieux), c'est que l’on ne jouit pas de toutes ces violences, que toutes les sociétés de commerce qui les commettent touchent au moment de leur ruine, que les îles à sucre, ce repaire de l'esclavage le plus cruel et le plus raffiné, ne produisent pas de revenu réel et ne profitent qu’indirectement, ne servant d'ailleurs qu’à des vues peu louables, c’est-à-dire à former des matelots pour les flottes et à entretenir ainsi des guerres en Europe, et cela entre les mains des États qui se piquent le plus de dévotion et qui, en s’abreuvant d’iniquités, veulent passer pour des élus en fait d'orthodoxie. »

On note au passage l’allusion à la tartuferie occidentale. Comme dira Trotski dans un texte célèbre que j’ai recensé :

« L’histoire favorise le capital américain: pour chaque brigandage, elle lui sert un mot d’ordre d’émancipation. »

Eh bien c’est enfin en train de se terminer.

Sources :

https://fr.wikisource.org/wiki/M%C3%A9taphysique_des_m%C5...

https://blogs.mediapart.fr/danyves/blog/220117/comment-tr...

 

11:20 Publié dans Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : immanuel kant, dette, philosophie, colonialisme, occident | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook

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