vendredi, 03 janvier 2025
Le retour du droit de la force sur la scène internationale
Le retour du droit de la force sur la scène internationale
Raphael Machado
Source: https://jornalpurosangue.net/2024/12/01/o-retorno-do-dire...
L’un des éléments centraux de l’ordre international établi après la Seconde Guerre mondiale, ayant l’ONU comme noyau institutionnel et la Déclaration universelle des droits de l’homme comme « Bible », est l’interdiction de faire la guerre.
Bien que la guerre accompagne l’humanité depuis les débuts de ses structures sociales, et qu’Héraclite l’ait utilisée comme symbole du principe fondamental de la totalité, les fondateurs de l’ONU, pleins d’orgueil, ont cru pouvoir nier cet aspect de la réalité et bâtir un ordre international où l’usage de la force serait exclu de l’équation.
Depuis, l’intention des élites mondialistes, ainsi que celle de leurs philosophes, théoriciens et influenceurs, a été de considérer la force comme un simple outil policier, à utiliser exceptionnellement et de manière « consensuelle » dans des situations de guerre civile, de défense contre l’agression militaire ou de lutte contre le terrorisme. Une « guerre pour mettre fin à toutes les guerres » devait naturellement conduire à une cosmopole.
Cependant, la seconde moitié du 20ème siècle a été marquée par de nombreuses guerres. Mais il convient d’apporter une nuance ici. La plupart de ces guerres ont été historiquement reconnues comme telles grâce aux récits des historiens réalistes. Les conflits eux-mêmes, toutefois, se sont drapés dans le manteau du droit international. L’intervention occidentale dans la guerre de Corée, par exemple, s’est faite sur la base d’une résolution de l’ONU, tout comme l’intervention en Libye. Même les interventions plus ou moins unilatérales des États-Unis, comme au Vietnam, ont cherché à s’appuyer sur des termes neutres, présentant les militaires américains comme de simples conseillers et les renforts comme une défense des intérêts américains dans le pays.
Outre l’élément purement juridique dans ces tentatives de justification de l’usage de la force, il existait également une dimension relevant davantage de l’éthique et de la psychologie, impliquant un certain respect tant pour la figure de l’État-nation que pour celle de l’ennemi, et plus encore pour l’ONU en tant qu’instance médiatrice.
La majorité des conflits de cette période ont respecté, dans une certaine mesure, des aspects fondamentaux du droit international, même si les images de la guerre du Vietnam sont choquantes (puisque c’était l’ère du photojournalisme de guerre), surtout en comparaison avec celles des guerres mondiales ou des conflits antérieurs au 19ème siècle.
Toute cette situation a pris fin au cours des dernières années, et je vais en expliquer les raisons et en présenter les preuves.
En commençant par les événements en Syrie : l’une des raisons pour lesquelles les Syriens ont été pris de court et n’ont même pas cherché à fortifier Alep est que tant eux que les Russes et les Iraniens pensaient que la simple présence de quelques Russes et de leurs drapeaux hissés à Alep suffirait à « imposer le respect » aux groupes terroristes. Cela rappelle le mépris des Azerbaïdjanais pour le fait que le Haut-Karabakh ait été, jusqu’à un certain point, protégé par de petites garnisons russes.
Le fait d’ignorer la présence symbolique d’une puissance en un lieu donné signifie que la simple représentation de la force ne suffit plus dans le droit international.
La conduite d’Israël a également contribué à enterrer l’ordre international actuel. En plus de violer de nombreux principes du droit international, Israël ignore les résolutions et même les condamnations des tribunaux internationaux. Ses alliés occidentaux encouragent ce comportement et valident son retrait unilatéral de l’ordre international contemporain. Israël a choisi de s’appuyer exclusivement sur la force brute pour atteindre ses objectifs.
L’opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine représente également un moment révolutionnaire dans le système international. Bien que les Russes aient cherché une légitimité, leur discours légaliste a progressivement été abandonné, et le sujet est désormais abordé sous l’angle de l’usage pur et simple de la force pour sauvegarder la sécurité nationale, dans un contexte où le recours aux tribunaux, accords, réunions et conférences serait inutile et contre-productif – d’autant que cela avait déjà été tenté auparavant.
En consolidant ces réflexions, nous en arrivons à un point où nous assistons à l’effondrement total de la crédibilité du système international basé sur des règles. Cet effondrement de la crédibilité rend derechef le droit international absolument inefficace. Il n’existe plus aucune garantie que les traités et accords seront respectés – au contraire, nous avons vu de nombreux traités violés ces dernières années. Il n’y a plus non plus aucune garantie quant à l’exécution des décisions des tribunaux internationaux.
Cela semble logique dans le contexte actuel, marqué par une transition géopolitique mondiale de grande ampleur. Un ordre géopolitique ne peut être maintenu que dans la mesure où il est institutionnalisé et où ses principes, règles et symboles sont respectés.
Aujourd’hui, chaque pays qui souhaite voir ses intérêts et revendications respectés devra les soutenir par la force brute, et non plus par la « suggestion » de la force ou par des « représentations » de la force. Si même la Russie, première puissance nucléaire mondiale, ne se voit pas respectée d’elle-même – devant révéler l’Oreshnik pour cela – aucun autre pays ne peut espérer l’être.
Les missiles (et la volonté de les utiliser) sont devenus le seul fondement de toute prétention sur la scène internationale. C’est la phase hypersonique du « might makes right » (« la force fait le droit »), qui perdurera jusqu’à ce que nous construisions un nouveau système international pour un nouvel ordre avec un nouveau droit.
17:41 Publié dans Actualité, Droit / Constitutions | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : actualité, droit international, théorie politique, politologie, ciences politique, pilosophie politique | | del.icio.us | | Digg | Facebook
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