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dimanche, 12 janvier 2025

Damas – Moscou ou l’itinéraire d’un résistant syrien

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Damas – Moscou ou l’itinéraire d’un résistant syrien

par Yannick Sauveur

Mars 2011, la propagande occidentale jamais avare de superlatifs va nommer printemps arabe les manifestations qui ont lieu à Deraa et qui marquent le début de ce qu’on appellera improprement guerre civile et qui est en réalité une guerre de l‘Occident via des milices financées par l’argent de l’Amérique et de ses alliés. Les uns quittent la Syrie. Adnan Azzam, alors en France, rentre au pays. Est-ce par allégeance à Bachar Al-Assad, lui qui a connu, pendant dix-sept jours, les prisons du régime dans les années 70 ? Non, c’est plus simplement par patriotisme, il aime son pays et il ne peut supporter qu’il soit attaqué par les États-Unis, Israël et leurs stipendiés. En France, Laurent Fabius, ministre des Affaires Étrangères à l’époque, dont la servilité est une seconde nature, ose déclarer: « Bachar Al-Assad ne mériterait pas d’être sur terre ».

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Mais sautons quelques années, Adnan Azzam est devenu entre-temps vice-gouverneur d’une région dans le Sud de la Syrie. En 2019, il effectue une expédition de Damas à Moscou qu’il relate dans son dernier livre Qui a murmuré à l’oreille de Poutine ?[i] . Ce livre se dévore d’une traite et se lit comme un roman tant il est passionnant. Il s’agit d’un journal en continu qui s’étend du 19 avril 2019, départ de Damas au 28 janvier 2020, départ de Moscou et retour en Syrie, soit près de 300 jours avec moult aventures, difficultés, imprévus, mais aussi énormément de rencontres, de joies, de fraternité. Cela ne commence pas au mieux, la frontière irako-syrienne est fermée, ce qui contraint Adnan à faire un détour par la Jordanie, pour rejoindre l’Irak. Le livre porte en sous-titre 300 jours à cheval, en effet, Adnan Azzam emmène avec lui deux juments, Nayazik et Amani. Une voiture, ornée du nom « Souria Al Alam » - La Syrie dans le monde fait partie du convoi mais aussi drapeaux syrien et russe car l’objectif est bien de transmettre un message de paix et d’amitié entre les peuples et de montrer la solidarité de l’axe de la résistance contre l’ennemi américano-sioniste.

Après la Jordanie, le convoi entre en Irak. L’hospitalité en Orient est une réalité qui se vérifie chaque jour, et ce sera vrai tout au long du voyage : réception chez l’habitant, accueil (souvent) par le maire du village, discussions et/ou conférences jusque tard dans la nuit. Puis c’est le passage d’Irak en Iran, le même accueil, parfois des escortes de la police pour protéger le convoi. Ainsi, Adnan Azzam est interpellé par un motocycliste qui lui crie : « Espèce de mécréant, nous ne te laisserons pas avec Bachar, gouverner la Syrie ! »

Cette expédition étant tout sauf un long fleuve tranquille, elle est aussi ponctuée d’événements tragiques. On le sait, en Orient, on roule vite, très vite, des tunnels doivent être traversés, ce qui n’est pas une sinécure avec deux juments, il faut se tenir bien à droite de la route en marchant entre les deux juments. Cette fois, le tunnel n’est pas en cause, Adnan marche sur une route dégagée et surgit une voiture « à une vitesse fulgurante, incapable de freiner ». Elle heurte de plein fouet une des deux juments, Amani. « Elle hennit de douleur (…) Puis elle trébuche et s’effondre immobile ».

Autres péripéties, les passages aux frontières: administration tatillonne, paperasse, lourdeur administrative: « Les fonctionnaires enfermés dans une routine déshumanisante, semblent avoir oublié la fierté et la générosité de leur peuple. » Cela se passe à la frontière irako-iranienne. Dans de tels cas, il suffit de s’armer de patience. Il en ira autrement à la frontière irano-azéri ; le refus de l’ambassade d’Azerbaïdjan d’accorder un visa » va se traduire par une attente de quarante-sept jours. Puis le visa est enfin obtenu à la condition expresse de « traverser le pays rapidement, sans interaction avec les médias ou la population. »

Et c’est enfin l’entrée en Russie (15 octobre 2019) et la traversée du Daghestan, de la Tchétchénie et une arrivée à Moscou en janvier 2020.

Au nombre des difficultés de cette expédition, je ne l’ai pas encore mentionné, les conditions climatiques en font partie : la canicule en Irak et en Iran puis le froid, la pluie battante, la neige sur les routes en Russie. Cela n’empêche pas Adnan d’effectuer des trajets d’environ cinquante kilomètres par jour et de repartir souvent à l’aube et parfois en pleine nuit alors que les soirées ont été longues avec réunions, discussions, conférences, visionnage du film réalisé par Adnan. Et partout, c’est un même message qu’Adnan transmet : « Apporter la voix de la Syrie au monde entier », « résister à la mainmise de l’impérialisme américain sur le monde. »

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Adnan Azzam, Robert Steuckers et Chris Roman, lors d'un séminaire sur la géopolitique mondiale dans les Ardennes, 18 mars 2023.

Parmi bien des déboires, Adnan se fait voler tout son argent qu’il récupérera, la police ayant retrouvé le voleur.

Jusqu’ici, j’ai peu évoqué les juments sauf à propos de ce bien triste accident qui a couté la vie à Amani. L’objectif d’Adnan Azzam depuis le début de l’expédition est d’aller avec les juments sur la place Rouge à Moscou et de les offrir au Président de la Fédération de Russie, Vladimir Poutine sauf que ce projet tourne court. Je résume parce que le lecteur trouvera tous les détails dans ce livre qu’il faut lire. Via l’ambassade de Syrie à Moscou, Adnan Azzam apprend qu’il ne peut aller à Moscou avec sa jument et il ne sera pas reçu par Vladimir Poutine. Terrible déconvenue et inexpliquée.

À Moscou, Adnan retrouve des journalistes curieux de le questionner.

Voyage fatigant mais passionnant. À la lecture de ce récit, c’est bien plus qu’une description factuelle. Il se dégage quelque chose des écrits d’Adnan. C’est un combattant qui vit l’amour de son pays avec une forte capacité à communiquer son enthousiasme. Il est bien difficile de douter de la foi qui a animé Adnan tout au long de ces milliers de kilomètres de Damas à Moscou.

Rencontre dédicace avec Adan Azzam:

Dimanche 12 janvier 2025 à 17h

119, bis rue du Faubourg Saint-Martin 75010 Paris

Métro gare de l'est.

Note:

[i] Adnan Azzam, Qui a murmuré à l’oreille de Poutine ?, Relecture et correction : Hervé Dalvy, thebookedition, 2024.

13:45 Publié dans Actualité, Livre, Livre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : adnan azzam, syrie, livre | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook