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jeudi, 05 avril 2012

Belgique: les sinistres collabos du secteur énergétique

Angélique VANDERSTRAETEN:
Belgique: les sinistres collabos du secteur énergétique

tous_plumes_electrabel_grenpeace-050ec.jpgL’histoire commence par un petit coup de téléphone venu de Paris pour atteindre un poste à Bruxelles: au bout du fil, Constance Giscard d’Estaing, fille de l’ancien président français Valéry Giscard d’Estaing; elle est la directrice d’un bureau de communication réputé et elle demande à un journaliste de “L’Echo”, le quotidien francophone de la bourse de Bruxelles, s’il n’est pas prêt à interviewer Jean-François Cirelli, numéro deux du géant énergétique français GDF/Suez. Cirelli va en outre être nommé administrateur délégué de la filiale Electrabel. La rédaction du quotidien de la bourse de Bruxelles tire immédiatement les conclusions implicites,  qu’il convient de tirer après ce coup de fil: Sophie Dutordoir, la principale responsable flamande auprès d’Electrabel et l’administrateur délégué Dirk Beeuwsaert se voient déjà tous deux flanqués d’un “beau-père” qui ne fera que renforcer la main-mise française sur Electrabel. L’inquiétude est à son maximum en Belgique car Electrabel n’est quasiment plus une entreprise ancrée dans le pays. La main de la France pèse de plus en plus lourd sur notre secteur énergétique.

Aussitôt la guerre des communiqués éclate. Le numéro un de GDF/Suez, le Français Gérard Mestrallet, déclare que Cirelli ne deviendra pas le directeur d’Electrabel. Mestrallet et Cirelli sont à couteaux tirés, ce sont des ennemis irréductibles. Mestrallet ne veut surtout pas donner l’impression que GDF/Suez va s’emparer d’Electrabel. C’est bien sûr une question de “perception”, car Electrabel est depuis longtemps déjà la “vache à lait” de la maison-mère française. Grâce au quasi monopole dont bénéficie Electrabel sur le marché énergétique belge (une part du marché équivalant à 60%), le géant énergétique peut maintenir élevés les prix de l’énergie. Les bénéfices sont immédiatement détournés vers la France pour y combler toutes sortes de déficits ou de tonneaux des Danaïdes. Sur le plan de l’énergie, la Belgique toute entière est depuis longtemps une colonie d’exploitation de la France. Mestrallet essaie par tous les moyens de nuancer cette vision. Donc, pour lui, aucun Français ne peut aller se placer à la tête d’Electrabel. Le directeur de GDF/Suez espère ainsi ne pas trop vicier ses rapports avec le gouvernement belge car celui-ci viserait à créer la concurrence sur le marché de l’énergie afin d’affaiblir la position d’Electrabel et de faire ainsi chuter les prix. En effet, aujourd’hui, la pression se fait forte sur le gouvernement Di Rupo I pour faire effectivement baisser le prix de l’énergie.

Dans son dernier rapport sur la Belgique, le FMI souligne que le manque de concurrence sur le marché de l’électricité constitue un sérieux problème. Le gouvernement veut-il vraiment agir sur ce plan? Officiellement, Di Rupo dit “oui”. En attendant que des mesures importantes soient prises pour libéraliser le marché de l’énergie, les prix sont gelés.

electrabel.jpgMais les milieux politiques belges sont-ils satisfaits de cette timide mesure? Le monde politicien profite bien de la situation. Via GDF/Suez, Electrabel est dans une large mesure une entreprise d’Etat. Pour le PS, ce n’est pas un problème sur le plan idéologique. Pour le MR, qui est un parti libéral francophile, ce n’est pas gênant de voir le marché de l’électricité en des mains françaises. Les partis flamands sont amorphes, se cachent derrière des allumettes, ne réagissent pas. Les liens solides entre Electrabel et le monde politicien saute aux yeux quand on regarde les faits sans lorgnons déformants: la directrice générale Sophie Dutordoir a été la porte-paroles de l’ancien premier ministre Wilfried Martens et la chefesse des communications, Florence Coppenolle, est une féale servante d’Elio Di Rupo.

Deuxième élément important: le gouvernement tire profit de la situation financière qui règne actuellement sur le marché de l’énergie. Un part importante de la facture énergétique des ménages est constituée d’impôts. Seuls 40% de la facture d’électricité constituent le prix réel du courant réellement consommé. Si les prix sont gelés, cela signifie moins de taxes énergétiques pour les pouvoirs publics. Les communes et les intercommunales picorent également quelques graines (ou tout un sac de graines?) dans ce pactole; elles ne sont donc pas heureuses de ce gel des prix. En fait, toutes ces instances préfèreraient que les prix, et les taxes y afférentes, demeurent élevés. C’est ainsi que les intérêts du gros monopole de l’énergie et du monde politicien concordent. Les personnalités qui nous fabriquent notre politique boiteuse et le consortium Electrabel/GDF/Suez sont donc complices. Et vu que le marché monopoliste de l’énergie draine à grande échelle l’argent de nos concitoyens et de nos entreprises vers la France, nous pouvons bel et bien parler de “sinistres collabos du secteur énergétique”.

Ce terme n’est nullement une exagération. Nous ne rappelerons jamais assez que la soi-disant “libéralisation” du marché de l’électricité a échoué à cause de la gestion aberrante des gouvernements belges successifs. Personne ne s’étonnera que ce sont surtout les gouvernements socialistes/libéraux, les majorités violettes, qui ont aggravé la situation. Didier Reynders y a joué un rôle particulièrement perfide en tant “qu’homme de la France à Bruxelles”. Le socialiste flamand Johan vande Lanotte a, lui aussi, joué un bien mauvais rôle dans les accords forgés avec Electrabel. Le monde des politiciens a bel et bien vendu le secteur énergétique belge à la France, sans que cela ne lui ait posé un véritable problème. Nous avons affaires à des “collabos” du secteur énergétique. Des “collabos” qui persistent et signent. Le gouvernement pourrait parfaitement agir pour faire baisser le prix de l’électricité en permettant davantage de concurrence, en diminuant les frais de distribution et en limitant la pression fiscale. Mais rien ne se passe. De concert, Electrabel et les pouvoirs publics continuent à traire la vache à lait qu’est pour eux notre peuple.

Angélique VANDERSTRAETEN.
(article paru dans “’t Pallieterke”, Anvers, 28 mars 2012).

NOTE DE LA REDACTION:
Pour tous ceux qui en ont marre de payer trop cher leurs factures énergétiques: consultez les site flamand: www.dewakkerevlaming.be .

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