J’ai déjà eu l’occasion d’écrire, d’une part, que l’Administration Obama et l’Union Européenne ne sont pas désireuses de régler la crise syrienne ; et d’autre part, que l’Otan aurait dû mener une négociation secrète avec Poutine sur trois dossiers, et, non pas, sur un seul dossier, à savoir une négociation secrète conjointe sur l’Ukraine, la Syrie et l’Iran. L’Otan ne l’a pas fait - et ne le fera pas - pour deux raisons.
La première raison, c’est qu’Obama fait semblant de combattre l’Etat Islamique (EI) sunnite et qu’il négocie un accord désastreux avec l’Iran chiite, accord qui permettra à ce pays de poursuivre son programme nucléaire clandestin à vocation militaire. Obama favorise les deux branches de l’islam en même temps, la branche sunnite (avec l’Etat Islamique) et la branche chiite (avec l’Iran théocratique), car il veut détruire l’Occident d’ici son départ de la Maison blanche.
La deuxième raison, c’est que l’Union Européenne (UE) a clairement choisi de coopérer avec les musulmans religieux, au détriment des musulmans laïcs. L’UE a signé des accords avec de hauts dignitaires islamiques, accords qui mettent fin à l’islam des dictateurs laïcs au profit des religieux musulmans intégristes. Ainsi, l’UE s’indigne face à Bachar al-Assad et elle s’aligne sur le Qatar.
Cela dit, la crise syrienne me pose un problème. Je l’ai déjà écrit plusieurs fois. Je déteste le clan Assad. Notamment parce que j’ai vu de mes yeux les monstruosités perpétrées par le clan Assad contre les Chrétiens au Liban dans les années 1980. Cela dit, lorsque quelques années plus tard, dans les années 1990, je me suis rendu en Syrie (y compris à Palmyre actuellement menacée par l’Etat Islamique…), j’ai été bien obligé d’admettre que la situation des Chrétiens y était bonne. C’est un paradoxe typiquement levantin. Le clan Assad a voulu chasser les Chrétiens souverainistes du Liban afin de pouvoir annexer ce pays.
Et le même clan Assad, dans son propre pays, la Syrie, a ménagé les minorités, y compris les minorités chrétiennes, du fait que ce clan est lui-même une minorité alaouite dans un pays majoritairement sunnite. Je sais très bien qu’actuellement le clan Assad fait à son propre peuple ce qu’il avait déjà fait pendant plus de quinze ans au peuple libanais. Du reste, à l’époque, j’étais très seul dans ma défense des chrétiens libanais qui semblaient laisser le monde entier indifférent. Et malgré tout, je ne peux pas, aujourd’hui, prendre parti contre le clan Assad que je déteste, car si un Califat islamique lui succède, les Chrétiens de Syrie n’auront plus qu’à faire leurs valises. Et qui les accueillera ? Personne…
Si le clan Assad devait tomber, la Syrie serait peut-être soumise à une partition en plusieurs mini Etats : un Etat sunnite ; un mini-Etat alaouite ; un mini-Etat kurde ; et un mini-Etat chrétien. Ce qui, soit dit en passant, entraînerait, à son tour, sous toute vraisemblance, une partition du Liban en un mini-Etat chiite, un mini-Etat sunnite, un mini-Etat druze et un mini-Etat chrétien (autant de principautés dans le style Andorre, Monaco ou le Lichtenstein…).
Aujourd’hui, en mai 2015, avec les influences de l'Iran, du Qatar, de la Turquie et de l'Arabie saoudite, je n’ai pas la moindre idée de ce qui va se passer en Syrie et au Liban. Cela dit, la chute éventuelle du clan Assad est actuellement considérée, une fois de plus, comme une option possible, parmi d’autres options, elles aussi possibles. Mais je ne verrais pas d’un bon œil -- pour les Chrétiens syriens et libanais, ainsi que pour les Israéliens -- la Syrie demeurer un seul et unique Etat, mais à dominante sunnite et sous la forme d’un Califat islamique…
Michel Garroté, 20 mai 2015