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dimanche, 15 août 2010

Contre tous les nationalismes, l'indispensable révisionnisme européen

Contre tous les nationalismes, l’indispensable révisionnisme européen

par Georges FELTIN-TRACOL

Les récents contentieux frontaliers survenus en Europe devraient inquiéter tous les Européens sincères. Diverses crises locales du Vieux Continent témoignent en effet de la persistance du mouvement nationalitaire et de ses manifestations parfois irrédentistes.

On ne traitera pas ici de la question belge. On évoquera plutôt  certains événements survenus en Europe centrale et orientale. Dans cette partie de notre continent, fort méconnue par les Français, on assiste à une résurgence des revendications historiques accumulées aux XIXe et XXe siècles, des funestes traités de paix de 1919 – 1920 aux piteux accords d’Helsinki de 1975 en passant par les traités de Paris de 1947. La disparition, il y a vingt ans, du bloc communiste a réveillé des déchirements nationaux mal soignés et de lourdes querelles mémorielles. En voici quelques exemples.

La C.I.A. estime que la Pologne pourrait retrouver son rang de puissance régionale dans les prochaines années. Pendant cinq ans, entre 2005 et 2010, le président Lech Kaczynski dont le programme politique intérieur était assez sympathique, exprimait sur le plan diplomatique un atlantisme exacerbé, un profond euroscepticisme et une hostilité non dissimulée aussi bien envers l’Allemagne, soupçonnée de guigner les territoires orientaux perdus au-delà de la ligne Oder-Neiss, qu’envers la Russie perçue comme la nouvelle émanation du soviétisme grand-russien. Sa disparition subite près de Katyn en avril dernier paraît avoir contraint son frère jumeau, Jaroslav, à remiser sa phobie russo-germanique. La victoire à la présidentielle du libéral Bronislav Komorowski marquera-t-elle la relance et l’approfondissement du « Triangle de Weimar » (la coopération institutionnelle Paris – Berlin – Varsovie) ? Cependant, malgré quelques éclats, cette querelle de voisinage reste confinée au symbolique, ce qui n’est pas le cas pour les relations entre la Hongrie et la Slovaquie.

Les élections législatives hongroises de mars 2010 ont vu le triomphe du Fidesz (Fédération des jeunes démocrates, la droite conservatrice-libérale) de Viktor Orban. Lassée par huit années de gabegie socialo-libérale, les électeurs ont en outre permis le succès électoral du Jobbik (Mouvement pour une Hongrie meilleure) qui n’hésite pas à dénoncer l’emprise de l’O.T.A.N., de l’Union européenne, du sionisme et des Roms sur le pays.

L’une des premières décisions du nouveau gouvernement Orban a été d’accorder aux membres des minorités magyares hors de Hongrie la citoyenneté hongroise. Par ailleurs, le Jobbik joua sur le traumatisme du traité de Trianon qui disloqua la Grande Hongrie (ou Transleithanie). Le mouvement de Gabor Vona distribua une multitude d’autocollants représentant ce vaste territoire aujourd’hui partagé entre la Roumanie, la Serbie, la Croatie, l’Autriche, la Slovaquie et l’Ukraine. Si la décision gouvernementale ne suscita aucune réaction de la part de Kiev, de Zagreb, de Belgrade, de Vienne et de Bucarest en dépit des rodomontades de Vadim Tudor, le président du Parti de la Grande Roumanie (un condensé de nationalisme rance, de communisme maintenu et de libéralisme abject), elle entraîna au contraire le vif mécontentement de Bratislava.

Indépendante au 1er janvier 1993, la Slovaquie est un jeune État. Sa colère ne s’explique pas si on ignore qu’au XVIe siècle, lors de l’occupation ottomane de la Hongrie, les seules portions magyares non envahies devenaient la « Hongrie royale » (1) réunissant la Croatie, la Hongrie occidentale bordant l’Autriche et la Haute-Hongrie qui allait plus tard correspondre grosso modo à la future Slovaquie. C’est à partir de ce noyau hongrois que les Habsbourg entreprirent une Reconquête. Il résulte de cette histoire mouvementée une présence de minorités hongroises dans la partie méridionale de la Slovaquie (environ 10 % de la population totale), d’où la crainte permanente chez des Slovaques d’un séparatisme hongrois.

Jusqu’aux élections législatives de juin 2010 qui a permis à une coalition de quatre formations de centre-droit d’orientation atlantiste et libérale de constituer un nouveau gouvernement conduit par une femme, Iveta Radicova, Bratislava était gouverné par le socialiste Robert Fico allié pour la circonstance au Parti populaire – Mouvement pour une Slovaquie démocratique du père de l’indépendance Vladimir Meciar, russophile, et au Parti national slovaque, nationaliste, de Jan Slota. À l’annonce de la décision d’Orban, Fico, en pleine campagne électorale, n’hésita pas à convoquer un Conseil national de défense et à envisager un conflit possible avec la Hongrie ! Quelques mois plus tôt, il avait interdit la venue du président hongrois dans une ville frontalière à majorité magyare afin d’inaugurer la statue d’une personnalité hongroise…

On pourrait aussi mentionner le litige frontalier maritime entre la Slovénie et la Croatie finalement résolu après l’approbation référendaire des citoyens slovènes.

Ces quelques cas montrent que les peuples européens ne sont pas tous somnolents et que certains, pas encore confrontés aux délices de l’idéologie multiculturelle et de l’immigration allogène de peuplement, ne rechigneraient pas à reprendre aux voisins – par la force s’il le faut – des terres perdues. Leur vivacité revendicative achoppe néanmoins sur l’intangibilité des frontières. En outre, ces rivalités nationales risquent d’être instrumentalisées par les vrais ennemis de l’Europe, en l’occurrence les États-Unis, l’O.T.A.N., l’O.N.U., la Cour pénale internationale et le mondialisme, et donc d’affaiblir toute renaissance continentale.

Tout Européen conscient de notre destin grand-continental doit comprendre la nécessité de dépasser les enjeux territoriaux inter-européens en acceptant la révision générale des délimitations politiques, non pas par un énième mécano géopolitique, mais en promouvant, d’une part, des regroupements frontaliers locaux avec la multiplication d’euro-régions, et en redécouvrant, d’autre part, les conceptions austro-marxistes du territoire et de la nationalité. Il est évident que, pour nous, les euro-régions à vocation identitaire contribueront à la formation d’un ensemble continental enfin souverain et légitime. Cela implique au préalable la fin des États-nations et la sortie de la Modernité au profit de la redécouverte de l’idée impériale qui se conçoit comme le projet impératif de dépassement de l’ethnique et du civique (sans les nier ou les effacer !) par le géopolitique et le spirituel.

Être révisionniste au XXIe siècle suppose par conséquent d’admettre la disparition des nations étatiques dans leur forme actuelle et leur indispensable métamorphose. Agents corrosifs des traditions, les nationalismes ont toujours été à l’encontre de toutes nos identités charnelles, historiques et spirituelles. Largement responsables de la nouvelle Guerre de Trente Ans (1914 – 1945), ils portent en eux un égoïsme statolâtrique préjudiciable au Bien commun de la civilisation européenne. N’oublions jamais comme nous le rappelle Jacques Marlaud que « le nationalisme est une idée juive (2) ». Que les Européens redécouvrent la substance culturelle des nations tout en valorisant, par le bas, leurs communautés vernaculaires et, par le haut, leur unité géopolitique. De grâce, Kaczynski, Orban et compagnie, cessez vos enfantillages et devenez des patriotes responsables ! Participez à la construction de l’Europe-puissance ! Il y a tant d’ennemis extérieurs à combattre !

Georges Feltin-Tracol

Notes

1 : Sa capitale fut transférée de Bude à Presbourg (Poszony en hongrois), l’actuelle Bratislava.

2 : Jacques Marlaud, « Critique du nationalisme », Interpellations. Questionnements métapolitiques, Dualpha, 2004, pp. 298 – 304. Il faut plus que jamais relire cet article brillant qui explique pourquoi on ne peut adhérer au nationalisme.


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